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3,6

sur 43 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Fabuleuses, touchantes et émouvantes retrouvailles avec Sara Stridsberg.
Une balade intimiste encore une fois entre lumière et ténèbres.
Papillon, phalène, nous glissons avec eux dans une zone éthérée à la rencontre d'êtres égarés, libres et prisonniers, anges dévorés par leurs démons.

Beckomberga Ode à ma famille
Beckomberga: « L'accord conclu en 1925 entre l'Etat et la ville de Stockholm entérinait que celle-ci assumerait désormais la charge des soins apportés à ses malades mentaux. Dans ce but, les conseillers municipaux ont décidé en 1929 la construction de l'hôpital de Beckomberga, lequel a ouvert ses services dans les années 1932-1933 ».

Bekomberga, un refuge pour des hommes et des femmes, brisés, fragiles et si seuls.

Sara Stridsberg par le biais de sa narratrice, Jackie, nous fait pénétrer dans ce monde clos grâce à une odyssée familiale.
Une vraie prouesse: l'auteure nous fait découvrir ce lieu empli de souffrance, de détresse, de folie, de cris, de pleurs mais aussi de tendresse, de rires, et d'amour.
Des mots sublimes pour éclairer la différence, l'incompréhension, la dérive des sentiments, la peur  de l'hérédité et des addictions.

Une écriture toujours juste sans voyeurisme, une écriture en état de grâce.

A travers le regard de son héroîne, Jackie, petite princesse en adoration devant son père, Jim, le roi des « toqués » , puis jeune femme, Sara Stridsberg survole la folie d'êtres humains et chéris et présente l'histoire d'un établissement de santé, projet d'une société moderne, Beckomberga, le plus grand hôpital psychiatrique suédois, qui ferma ses portes en 1995.

Sara Striedsberg encore une fois fait jaillir des ténèbres la lumière, et surtout nous offre le fascinant et émouvant spectacle de la transformation de l'héroïne en chrysalide :
Aimer pour guérir
Et toucher la lumière
Fuir le soleil noir
Et donner la vie
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Beckomberga : un nom qui résonne comme une oscillation, comme un ressac. Un va-et-vient permanent, inéluctable, entre la vie et la mort.

Beckomberga, institution ouverte au début des années 1930, à proximité de Stockholm, pour accueillir "la folie". "Folie", un mot et une définition qui auront bien le temps de changer et d'évoluer jusqu'à sa fermeture en 1995.


La vie c'est Jackie, enfant puis adolescente, qui vient voir son père aussi souvent qu'elle le peut, parce qu'elle est persuadée d'être son lien à la vie, si elle vient, si elle le voit seulement, davantage si elle lui parle et peut se promener avec lui, il restera du côté du souffle ténu de l'existence.

La mort, c'est la tentation qui fascine Jim, le père de Jackie, il l'espère, la provoque, la talonne, la désire comme une délivrance d'une vie dans laquelle il n'est plus rien, ne possède que très peu et estime n'avoir personne, pour quitter ce vide qui s'est insinué en lui.
Ceux qui souffrent sont toujours seuls, indifférents à l'amour qu'on leur porte, indifférents à la souffrance qu'ils provoquent en rejetant toute aide, enfermés dans une cage dont ils ont perdu la clef depuis bien longtemps.

Entre les deux extrémités, il existe des palliatifs à la souffrance : au milieu des vapeurs des alcools, au creux des bras des substances médicamenteuses, des moments de vie "encotonnée", assourdie qui font pour un temps tolérer la douleur, le manque d'amour, la solitude, l'impossibilité de résoudre une quête de tous les instants, de répondre aux questions qui taraudent.
Il y a aussi la fuite, toujours parce qu'ailleurs est autre, ailleurs est peut-être délivrance, absolu...

Les internés ont mille visages, milles tourments, mille quêtes inabouties, mais Beckomberga devient leur maison, la tranquillité qui les apaise un instant, la protection contre le monde extérieur si hostile...

"Comment c'est, dehors, de nos jours ?" demande Olof le dernier patient à quitter Berckomberga et aussi celui qui y est resté durant les soixante-trois ans pendant lesquels l'établissement a été un lieu d'accueil.


Dans ce récit, tous les sentiments, toutes les luttes, toutes les sensations se reflètent dans la végétation qui entoure les bâtiments, dans l'aspect des arbres surtout, tantôt refuges et protecteurs, kaléidoscopes de la lumière qu'ils diffractent pour adoucir l'écoulement du temps, tantôt complices pour quitter cette vie sans issue, tantôt feuillus et chatoyants comme des sourires distribués de façon désintéressée, tantôt squelettes de bois noirs à l'automne ou blanchis par la neige comme autant de cris fossilisés sortant de la bouche des pensionnaires.


La construction du récit est captivante, qui nous emmène, au gré des souvenirs, dans les recoins de la pensée sans écouter la chronologie. Découvrir ce lieu, ce qu'il a représenté d'espoirs pour ceux qu'auparavant on cachait, enfermait dans des cages loin des regards avant qu'ils ne soient pris en charge, juste considérés, est passionnant au rythme d'une narration originale et qui bouscule. le regard sur ceux-là, niés ou laissés en marge parce que trop inaccessibles pour les esprits rationnels. Percevoir, au fil des phrases, ce cri de tendresse d'une fille pour son père…Et l'aboutissement, qui s'avère être dans le regard de l'enfant qui emmène toujours plus loin et ne considère pas la différence…

Et surtout, l'écriture, le style de l'écrivaine, son regard poétique, imagé, qui se pose sur ces êtres et sur toutes ces années, une façon de dire et de faire ressentir, une émotion tissée avec les mots. Des mots qui créent une atmosphère entre rêve, imaginaire et hallucination, baignée de mélancolie.


Une fabuleuse découverte que je dois à une amie babéliote – qui se reconnaîtra ! - qui m'a proposé la découverte de Sara Stridsberg, persuadée que la plume me séduirait : elle avait grandement raison et je la remercie infiniment de cette lecture qui a su allumer dans mes pensées un brasier d'émotions !
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Une plongée dans un hôpital psychiatrique, Beckomberga à Stockholm, sensé apporté sécurité et confort aux "toqués" de Suède ... de 1932 à 1995, cet hôpital reçut de nombreux patients, anonymes ou célèbres et l'autrice nous fait découvrir ce lieu si étrange à travers les souvenirs (parfois confus) de Jackie qui y est souvent allée pour rendre visite à son père, Jim/Jimmy Darling, alcoolique dépressif.
C'est là où elle a grandi, séchant souvent l'école pour y passer plus de temps, là où elle a rencontré son premier amour ...
Un roman touchant, plein d'amour de cette enfant puis femme pour son père absent, lointain, puis pour son fils Marion qui réussit à la sauver de cette spirale de solitude et d'isolement.
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Remarquablement écrit ce récit est d'une mélancolie claire-obscure qui sature le ciel et l'espace entre les lignes.
Jackie, la fille de Jim et Lone, se trouve irradiée par ce père alcoolique qui séjourne à Beckomberga , un hopital psychiatrique de Suède construit en 1935.
Cet amour que Jackie porte à son père est instinctif comme l'enfant qu'elle est puis, plus confus comme l'adolescente qu'elle devient et qui continue à lui rendre visite tous les jours. Cet amour, qui, elle l' espère, le sauvera de sa folie, de son envie de mourir, de son fatalisme.
de meme , elle attend une protection qui ne vient pas , dont on ignore d'ailleurs d'où elle viendrait. Cette protection qu'elle trouvera ,une fois adulte, en Richard, le père de son fils - et qu'elle finira par refuser. Son fils qui sera une source jaillissante faisant taire ,en elle, la trop grande peur et les angoisses de ses souvenirs.
Marion, puisque c'est un prénom masculin en Suède, emportera Jackie dans la spontaneité enfantine. de son coté, elle lui transmettra la vérité comme son père la lui a transmise : Elle savait malgré, son espoir, qu'elle ne pourrait pas sauver son père ni le protéger. Cependant, tout au fond d'elle , elle souhaitait etre, pour lui, une raison valable de vivre, de s'accrocher à la vie.
Dans les yeux de son père, mélange de ténèbres et de folie amère, Jackie avec ses reves , ses espoirs aura incarné la lucidité et à la fois la deception de l'amour.
Ce livre est comme le dit le titre une Ode, un long poème d'amour, sur l'amour , sur la folie de l'amour et sa solitude. l'amour ne sauve de rien , il peut etre un pretexte à la vie mais il en est aussi sa folie et sa mélancolie douce-amère. C'est ce dont temoignent ces pages sublimement ecrites.

L'hopital de Beckomberga a fermé ses portes en 1995.
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Stockholm, ou plutôt Beckomberga, une ville dans la ville, avec cet hôpital psychiatrique qui a accueilli ses premiers patients en 1932 et fermé ses portes en 1995, l'un des plus grands établissements de ce type avec ses 2000 lits. Et pourtant, au-delà de ce chiffre impressionnant, l'idée était de développer à l'époque une nouvelle vision de l'hôpital psychiatrique, la plus adaptée possible aux malades, où ils ne manqueraient, idéalement, de rien.

Nous y rencontrons Jim Darling, qui vit dans cet hôpital, et sa fille Jackie qui lui rend très régulièrement visite. On entre ainsi dans la vie de cette famille, de ce duo père fille notamment, qui tient de façon assez bancale et pourtant toujours hyper soudée. Jim fait tourner les têtes, c'est un homme charismatique tout en étant profondément instable et auto-destructeur. Lone a préféré prendre ses distances, tout en respectant le choix de sa fille de sillonner plus souvent qu'à son tour les allées du « château des toqués ». On les sent tous suspendus au-dessus du vide, dans l'indécision totale, à composer entre l'urgence quasi permanente et la nécessité d'un certain flottement.

J'ai une tendance à aller plonger mon regard où l'on parle de psychiatrie ou d'univers carcéral, le thème de l'enfermement en somme, dans tous les sens du terme, et de son dépassement. Je n'attendais pas grand-chose de ce roman, ouvert un peu hasard par l'attirance de son sujet. Et quelle bonne surprise. La « folie » est très finement décrite, sans pathos, avec beaucoup d'humanité et de tendresse. On se familiarise assez curieusement avec cet hôpital, on reconnaît progressivement les lieux, le parc et ses grands arbres qui bordent le pavillon Grands Mentaux Hommes, les résidents, on prend ses marques. Une écriture très fine, des chapitres courts, comme autant d'allers retours entre passé et présent, qui nous plongent dans l'histoire à la fois difficile, douloureuse et bourrée d'amour et de respect de cette famille hors-norme. Un tour de force pas si évident et très bien rendu par Sara Stridberg.

En regard, une partie de l'histoire de la psychiatrie, les asiles et leurs fermetures progressives, leurs mutations, avec l'évolution des traitements, notamment l'émergence des neuroleptiques et de nouvelles alternatives intégrant davantage les personnes malades dans la société.

Une belle surprise et un gros coup de coeur qui donne envie d'aller découvrir un peu plus les textes de Sara Stridsberg.
Lien : http://casentlebook.fr/becko..
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J ai adoré ce livre qui rend leur dignité aux existences les plus fragiles et les plus maltraitées.
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