Résolument ethnographique, l'ouvrage se fonde sur les constatations et les recherches entreprises par l'auteur durant sin séjour de plusieurs années en Guyane. L'approche est profondément humaine, l'écrivain s'attachant à dépeindre historiquement et culturellement les agissements des orpailleurs de la fin du XXè siècle sur le territoire avant l'arrivée de la violence, des bordels, du mercure et des garimpeiros. Très intéressant, ce livre aurait peut-être gagné à être un poil moins long.
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Philomène (...)exprime un réel mépris à l'égard de ceux qu'elle nomme les indigènes Boni par opposition aux Nègres, soit les Créoles, pour lesquels le mot nèg' signifie homme et n'a pas la connotation péjorative qu'on lui connaît ailleurs.
A la période post-esclavagiste qui concerne l'histoire de l'or, dans la deuxième moitié du XIXè siècle, des sociétés marrones sont donc établies en Guyane depuis près d'un siècle. Les rencontres entre ces Marrons de l'intérieur et les Créoles de la côte et des Antilles auront lieu sur les fleuves, lors des remontées vers les placers, et traceront bien les différences entre ces migrants individualistes, sans organisation ni qualification et les premiers, maîtres du fleuve et de la navigation, Nègres eux aussi, mais vivant de leur côté en sociétés autonomes et fortement structurées.
Il est une question mystérieuse qui m'a toujours semblé délicate à aborder, c'est celle de la place des enfants dans cette société. En effet, dans le discours de ces gens diserts, qui aiment raconter leurs souvenirs, leurs aventures, et leurs vies, l'enfant est singulièrement absent. Trop absent pour que cela n'intrigue pas. En général, les femmes ont quitté très jeunes leur île natale et leur mère, et de manière douloureuse. Ces départs ont été motivés par des contraintes économiques d'abord, mais qui peut dire le rôle joué par les tensions familiales, les blessures narcissiques ou psychologiques auxquelles elles ont peut-être tenté d'échapper?
La majorité des 4000 Amérindiens du département sont aujourd'hui citoyens français. En revanche, peu de ceux qui résident sur le Maroni - à savoir les Wayana et les Emerillon vivant en amont de Maripasoula- jouissaient en 1985 de ce statut. La plupart étaient donc apatrides dans leur propre pays, en situation de non-droit et dépourvus d'état civil. Quelques-uns sont de nationalité surinamienne ou brésilienne, car, bien entendu, ces groupes répartis en clans, à cheval sur trois pays, ignorent les frontières politiques qui n'ont guère de signification pour eux.
Très rapidement, lorsque les individus deviendront compères, c'est-à-dire amis ou partenaires pour l'or, ils s'attribueront des surnoms.