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Critique de Orazy


Tarkovski a adapté Solaris de Stanislas Lem, mon livre de SF préféré. Il a aussi adapté Stalker. J'ai vu Stalker il y a plusieurs années, bien avant de lire le livre. Il est instantanément devenu l'un de mes films favoris (bien plus d'ailleurs que Solaris, à mon sens un peu raté).

L'adaptation de Tarkovski est tout à fait différente du roman, comme souvent le maître a pris ses aises et donné une interprétation personnelle, très mystique, trop diront certains. Ayant lu le roman, je ne suis plus sûr d'aimer autant le film. Car Stalker (NB : le titre original Pique-nique au bord du chemin, est bien meilleur, mais encore une fois les traducteurs français y sont allés de leur grain de sel) réussit un équilibre rare entre les dimensions mystique/ métaphysique, émotionnelle et idéologique/ politique, que n'atteint pas son adaptation.

De plus, le roman se permet de posséder à la fois un concept très fort (des extraterrestres sont arrivés sur Terre et repartis sans interagir avec les hommes, laissant derrière eux des Zones dangereuses peuplées d'objets mystérieux) et des personnages et une histoire profondes, qui tiennent debout d'eux-mêmes.

Stalker est un roman anti-bourgeois et anti-totalitaire à la fois, d'un anarchisme individualiste très russe (les académiques, les dirigeants, les capitalistes et autres profiteurs sont tous renvoyés dos à dos). C'est aussi l'histoire d'un mari et d'un père qui, au contraire de ses semblables, n'a pas l'intention de tout sacrifier à la Zone pour d'utopiques connaissances ou de folles richesses, mais plutôt d'y prendre assez pour vivre et de repartir aussitôt.

Les frères Strougaski reprennent la lubie et le thème majeur de Lem : si d'autres intelligences existent dans l'univers, soit nous ne les comprendrons pas soit elles ne s'intéresseront pas à nous (comme nous ne comprenons ni nous intéressons guère aux autres êtres vivants qui peuplent cette Terre alors même qu'ils sont si proches). C'est donc un roman anti-humaniste dans le bon sens du terme, qui déchoit l'Homme de la place centrale qu'il s'est lui-même accordée dans l'univers.

Les Strougaski l'avaient compris : si nous en sommes "arrivés là", ce n'est pas par un manque mais par un trop-plein d'humanisme, par une croyance trop grande en nous-mêmes. Il ne s'agit pas de tout arrêter et de retourner dans nos grottes, juste de faire descendre de quelques degrés notre ego. Et cela, un Stalker le fait très bien.
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