Ce choix lors de la dernière Masse Critique non-fiction parce que j'aime beaucoup les
contes traditionnels. J'ai dû commencer par
le Petit Chaperon rouge, lu à haute voix par mes parents et mes soeurs. Vers 8 ans, je me suis régalée avec un recueil pour enfants des
contes de Perrault. Et en sixième, la prof de français a eu l'idée géniale de nous faire découvrir les
contes de Grimm (en Folio, traduits de l'allemand et préfacés par
Marthe Robert). Enchantement à chaque fois, mélange de fascination et de répulsion/crainte, tandis que les
contes d'Andersen m'ont toujours semblé glauques, et rien d'autre.
.
Les versions de ces auteurs sont des transcriptions de
contes transmis oralement. On retrouve d'ailleurs ces légendes populaires dans différentes cultures, avec des variantes et des similitudes. Ce qui nous mène tout droit à la psychanalyse puisque ces histoires cruelles s'adressent à l'inconscient collectif, avec des angoisses et difficultés universelles - prédation, viol, inceste, dévoration, mort, relations familiales et rivalités dans la fratrie, etc.
Je zappe Disney : leurs adaptations dénaturent complètement les pépites originales, les enrobant de sauce niaise, colorée et sautillante, occultant parfois des éléments clefs du récit. Aucun intérêt.
.
Pour une approche psy des
contes populaires occidentaux, on peut lire le brillant ouvrage de
Bruno Bettelheim, paru en 1976 (
Psychanalyse des Contes de fées).
J'ai adoré également la thèse d'
Anne-Marie Garat consacrée au Petit Chaperon Rouge. Description de l'éditeur : "Sollicitant tour à tour, sans jamais sombrer dans le jargon des spécialistes [vrai !], la psychanalyse, les outils d'analyse stylistique, l'étymologie, l'histoire littéraire et l'histoire tout court, elle propose une interprétation inédite dans une langue lyrique et éclairante." Oui. Un tour complet, un régal !
.
J'attendais donc beaucoup de cet essai de
Pierre Sultan.
Déception, pour diverses raisons. Impression de remplissage, longueurs, lorsque l'auteur établit des parallèles avec des personnages historiques :
La Belle au Bois Dormant serait une référence à Catherine de Médicis. La démonstration est lourde...
La comparaison entre
Barbe-Bleue et
Gilles de Rais m'a un peu plus intéressée. J'avais déjà lu des articles/ouvrages sur le sujet, et le personnage fait partie du folklore régional (dans l'ancien pays de Retz, au XVe siècle - visiter le château de Tiffauges).
.
Je n'ai pas aimé le ton de l'auteur, prétentieux, qui pointe les erreurs de Bettelheim (touche pas à mon Bruno ! 😒).
Il énonce des évidences comme des trouvailles : "Chez
Charles Perrault, les mères sont très souvent défaillantes. Certaines meurent trop tôt comme celles de
Cendrillon et de
Peau d'Ane, sont inexistantes comme celle du Chat Botté ou s'effacent derrière leur époux, comme dans '
La Belle au bois dormant'." On lui dit que c'était une réalité il y a moins de 100 ans - décès fréquents en couches donc enfants sans mère ; et société patriarcale, donc domination masculine/paternelle... ?
Et ces félicitations de Nothomb, en postface, soi-disant spontanées, alors que l'auteur lui a envoyé son livre ! Un peu pathétique, ce besoin d'être reconnu par une marchande de best-sellers et de le montrer, aussi intelligente et cultivée soit cette écrivaine. Ça pourrait n'être qu'un détail, mais ce fut la confirmation du manque d'humilité du monsieur, dont les analyses laissent à désirer, comparées à d'autres.
.
Merci à Babelio et aux éditions Riveneuve.