Merci à Babelio « Masse Critique » et à l'éditeur Karthala pour l'envoi de ce beau volume de près de 350 pages, denses et de grand format.
Sous la direction de M.A de Suremain et E.Mesnard, une vingtaine d'universitaires-spécialistes éclairent chacun, de manière détaillée, une facette de l'enseignement des traites, des esclavages, des abolitions et de leurs héritages.
L'objectif du livre est de « croiser des perspectives sur l'enseignement de ces questions en Afrique, Europe ou Amérique » et d'enrichir la réflexion des enseignants et des publics intéressés par le sujet.
L'enjeu est de participer à la reconnaissance de cette part de l'histoire, alors qu'elle commence, depuis une vingtaine d'année, et depuis la loi Taubira de 2001, à tenir une place croissante en réponse à une demande sociale importante.
L'ouvrage se divise en trois parties.
La première expose des expériences pédagogiques menées en écoles élémentaires, collèges et lycées, en France et Belgique (6), au Niger (1), au Sénégal (1). La fresque qui orne la couverture du livre résulte d'ailleurs d'un de ces projets.
Les études de cas sont détaillées : dispositifs de classe, problématiques, synoptiques, bilans, représentations initiales et productions finales des élèves...
Certains auteurs fournissent la base documentaire de leurs séquences. Ainsi, celle utilisée en classe de seconde par le professeur Donnadieu présente des documents particulièrements originaux et pertinents (exemple de document original (1777) : « les remords tardifs d'un esclavagiste »...).
La seconde partie traite des prescriptions et outils pour enseigner. Elle fait une analyse-critique des programmes scolaires dans différents pays -Sénégal, Portugal, Haïti, France, six pays d'Amérique centrale-, fournissant les programmes classe par classe, ou des comparaisons entre les différents manuels (France).
Le chapitre sur le Sénégal est l'occasion de citer le mémorial de Gorée en soulignant que c'est avant tout un rôle symbolique qu'il nous faut attribuer à ce lieu, beaucoup d'autres ayant vu transiter des flux d'esclaves.
La dernière partie expose des recherches didactiques passionnantes sur l'usage de représentations picturales : les timbres-postes (commémoratifs souvent), la peinture (sur l'affranchissement des esclaves de 1848) ou des sculptures comme «Cap 110 Mémoires et fraternité» du martiniquais L.Valère (1998).
Le chapitre « Choix du passé et poids du présent » en France tend ensuite à montrer qu'il peut parfois exister un «angle mort dans l'histoire de la traite atlantique : la participation d'Africains à celle-ci, ainsi que des processus de résistance à la capture et à la traite négrière ». D'après les auteurs, cette faible occurence des négriers africains correspond aux programmes d'avant 2002, rectifiée depuis dans les textes (mais pas encore toujours dans les discours).
Cette partie se clôt sur des considérations sur le racisme et la reconnaissance de l'afro-descendance au Mexique.
Le nombre, la diversité et la spécialisation des auteurs font partie des forces de ce recueil.
Petit revers de la médaille ressenti : ces caractéristiques l'ont rendu parfois, pour la lectrice que je suis, un peu hétéroclite, appelant, en complément de l'analyse, un processus de synthèse.
Les introductions des auteurs à chaque nouvelle partie contribuent à une vision synthétique. Elles auraient peut-être gagné, à mon sens, à être complétées par une étape de bilan et conclusion plus développée qu'elle ne l'est.
A titre personnel, les lectures de Mémoires d'esclaves comme celles d'Equiano, d'H. Jacobs, de F.Douglass, ou encore, les Confessions d'un négrier, m'ont paru apporter un complément intéressant à la découverte de la présente publication.
Le lien avec nombre d'oeuvres romanesques s'avère également captivant.
Cet ouvrage s'impose, en tout état de cause, comme une somme extrêmement précieuse pour qui veut s'intéresser de près à ces sujets.
Commenter  J’apprécie         170
Tout d'abord merci à la masse critique pour l'envoie de ce livre. Je dois dire qu'il m'intéressait tout particulièrement par mon objectif d'être professeur d'histoire et je n'ai pas été déçu. En plus de nous apporté un apport de connaissance considérable et spécifique sur l'esclavage et la traite, le livre nous livre toute la complexité de traité ce sujet en classe. Ce qui est très intéressant c'est que le livre traverse tout les continents et tout les milieux sociaux et culturaux, on peut ainsi voir la différence dans un pays comme la France entre deux régions ou deux âges. Les démarches entreprises pour traités le sujet sont très intéressantes et innovente parfois, on peut aussi voir ce qui marche ou pas.
Je pense que ce livre est très intéressant pour les futurs professeurs bien entendu mais aussi par tout ce qui sont intéressé par les systèmes éducatifs.
Commenter  J’apprécie         00