Le train roulait depuis une dizaine de minutes et la petite fille regardait autour d'elle comme si elle cherchait quelque chose. Puis elle se blottit sur les genoux de sa mère et murmura :"Maman je veux voir." [...]
L'enfant contempla la campagne fuir sous ses yeux et demeura silencieuse pendant quelques minutes. Elle plaqua ensuite tout son visage contre la vitre et M. Aghios sourit parce qu'il crut qu'elle faisait cela pour mieux voir. Puis elle se retourna vers son père en pleurnichant :" Je voudrais voir, moi.
- Tu ne vois donc pas ? lui répondit le père étonné.
- ben non je ne vois pas ! s'exclama l'enfant [...]"
Sa mère lui demanda :"Mais qu'est-ce que tu veux voir ? Tu ne vois pas tout ?"
L'enfant fondit en larmes : "Je ne vois pas le train."
Borlini éclata de rire et les parents se mirent à rire aussi, un peu embarassés par la bêtise de leur fille. Seul Aghios fut ému. Lui seul ressentait et comprenait la peine que l'on éprouve de ne pouvoir se voir soi-même voyager. Le plaisir du voyage aurait été tout autre si l'on avait pu voir le grand train et sa locomotive traverser la campagne comme un serpent rapide et silencieux. Voir à la fois le train, la campagne et soi-même : voilà quel aurait été le vrai voyage.
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