Quatrième tome du cycle rédigé par
James Swallow, connu pour ses écrits sur les
Blood Angel, La Fuite de l'Eisenstein a la particularité de continuer d'où on s'était arrêté à la fin du troisième volet, c'est à dire vers l'escapade du dit vaisseau pour porter la nouvelle à l'Empereur de la trahison d'Horus. Bien que la première trilogie conclut la chute d'Horus, elle n'avait pas cependant laissé incertain le sort des commémorateurs survivants, Mersadie Oliton, Kyril Sindermann et Euphrati Keeler et des quelques Astarté les accompagnant dans leur fuite, dont Nathaniel Garro. Eh bien
James Swallow va enfin nous répondre à ce mystère en nous offrant une pleine vue sur la galaxie et surtout pour la première fois sur les dangers que le Warp peut exercer sur un navire spatial en vadrouille. Cependant, la première partie qui fait une centaine de pages nous ramène un peu arrière pour se concentrer sur la lugubre Death Guard introduite précédemment et nous faire entre dans leur intimité.
Nathaniel Garro mène son devoir dans la garde, obéissant fidèlement à ses confrères et son primarque le sombre Mortarion encapuchonné et respirant constamment les poisons en provenance de sa planète natale Barbarus... d'ailleurs ce dernier décide de nommer notre Garro écuyer, un poste d'honneur qui suscite bien des jalousies surtout avec le mesquin Ignatius Grulgor qui l'a toujours méprisé. Garro participe alors à la bataille d'Isstvaan III ou il assiste au massacre et à la sédition de ses frères. Il s'empare du vaisseau l'Eisenstein nommé d'après d'illustres scientifiques de l'ancienne Terra et avec les commémorateurs rescapés de la fusillade prend la tangente et se lance dans l'océan intersidérale de la galaxie afin d'atteindre Terra et d'y apporter le message crucial de la révolte. S'ils y parviennent bien sûr car de nombreux dangers guettent les passagers, entre la plupart de ses collègues d'antan s'étant incrusté en douce dans l'Eisenstein résolu à les occire et l'attention d'un dieu du Chaos sur la frêle coque, rien n'est assuré qu'ils y parviennent sain et sauf...
Une chose est sûre, on quitte bel et bien les intrigues épiques des Son of Horus et du Mournival pour se rendre chez les sinistres membres de la Death Guard dont on est confronté dés le départ. Nous découvrons leur légion, leur organisation, leurs soldats, leurs préceptes et leurs traditions qui sont quelque peu macabres à l'image de leur primarque Mortarion qui suscite l'angoisse, avec ses gardes du corps muets comme une tombe, sa faux tranchante qu'il arbore constamment, son teint pâle et surtout son habitude à humer des toxines nocives pour un être humain qui le rendent bien flippant : en témoigne une scène bien stressante d'une absorption rituelle de poison. Un groupe morose et inflexible, dont l'attitude au combat est d'avancer tout en encaissant les dégats sans jamais reculer.
Heureusement nous les quittons très vite pour opter sur le bombardement de la flotte d'Horus et la fugue du capitaine dans l'Eisenstein. Ce qui ne veut pas dire que l'atmosphère lourd disparaît, loin de là ! Car avec les passagers du vaisseau nous sommes transporté dans l'immensité de l'espace, dans la solitude complète et la crainte asphyxiante de dériver dans la galaxie mais cela va vite devenir secondaire quand le pire frappe l'Eisenstein : le Chaos. Et enfin un dieu se manifeste clairement, sans toutefois y apparaître de sa personne.
James Swallow nous gratifie enfin des noires magies d'une des divinité et du plus répugnant des quatre, Nurgle, le Dieu de la Déchéance, de la Pourriture et Seigneur des Mouches, dieu de l'entropie et de toutes les maladies existant dans l'univers (et du coronavirus je présume au vu de notre situation...).
Si vous avez l'estomac sensible, je vous déconseille rapidement la lecture car avec l'apparition des phénomènes liés à Nurgle, vous aurez droit à des images peu ragoutantes, des cadavres pourrissants, des vers infestant les corps, des mouches dévorant des têtes, et des abominations difformes incarnant la moisissure et la charogne. L'horreur de la décomposition dans toute sa "splendeur" , une facette du Chaos qui nous est déployé avec largesse.
En face, les hommes cependant se battent pour leur survie et vivent avec les révélations qu'ils ont appris d'Isstvaan III. Nathaniel Garro vit une véritable épreuve de la foi, sentant ses convictions trahies par les déloyautés de ce qu'il considérait comme ses frères et surtout de son père, Mortarion. Comment se reconstruire face à ces duplicités et assumer la vie de plusieurs passagers quand tout menace ? La foi qui refait surface quand tout est perdu et qui noue les liens. le courage qui anime aussi les coeurs et qui donne à ses occupants une détermination à survivre quoi qu'il en soit.
Comme toujours Warhammer 40k oblige, l'action est omniprésent dans le récit, à ceci prés qu'une bonne partie des combats ont lieu dans l'éther, donnant un coté huit clos aux luttes, et nous aurons un grisant duel entre un avatar de Nurgle et un Space Marine sur notre bonne vieille lune. Car on verra même un peu, mais de très loin, notre Terre et rencontrerons même quelques terriens dont le mystique Sigilite conseiller de l'Empereur.
Le roman n'est pas parfait bien entendu : il y a beaucoup de zone d'ombres jamais expliqué comme la véritable raison de la trahison de Mortarion, des personnages aux réactions trop peu crédibles (que je dirais pas pour pas spoiler) et peu de suspense garanti pour le sort de quelques-uns qui est très prévisible, sans compter que l'écriture de
James Swallow n'est certes pas aussi rustre et peu hargneux que celle de
Dan Abnett mais est loin d'être aussi fluide et passionnante que
Graham McNeil.
Qu'importe, ce quatrième volet est toujours très bon à suivre, nous explorant un peu plus dans le macrocosme du cycle, avec une plongée terrifiante vers le Warp et le coté repoussant et pourri du Warp. Un voyage dans l'espace effrayant mais très excitant, qui nous montre des hommes en épreuves de leur foi et de leur certitude face à un surnaturel dangereux et qui lance vers une nouvelle voie, celle d'une guerre qui va non seulement se livrer l'humanité entre elles mais surtout l'humanité contre le Chaos.