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Critique de motspourmots


Le lecteur a ses contradictions, ses ambivalences. Après tout, il est humain. Tenez, moi par exemple. J'ouvre un livre de Graham Swift parce que je veux lire du Graham Swift, j'y ai déjà goûté, ça me plaît, j'en veux encore. Et puis lorsque je l'ai terminé, je ronchonne un peu parce que c'est du Graham Swift. du grand art, de la belle ouvrage, plaisant à lire. Mais concocté avec un procédé déjà remarqué dans le (fantastique !) dimanche des mères et qui me laisse comme un arrière-goût de déception. Je fais peut-être la fine bouche, parce que le menu est impeccablement exécuté et que je ne peux être que satisfaite en sortant de table. Mais si j'étais inspectrice pour un célèbre guide culinaire, j'aurais envie de dire au chef que sa troisième étoile ne tient qu'à un fil, que j'aimerais être surprise, sentir la prise de risque, un souffle de renouvellement. Je m'explique.

Le grand jeu nous transporte à Brighton en 1959, station balnéaire en vogue dans ces années d'après-guerre où le divertissement y prenait ses quartiers d'été. Dans l'un des théâtres se produisent Jack Robinson (maître de cérémonie) et le duo formé par Ronnie Deane le magicien et Evie White son assistante, l'une des attractions maîtresses de la saison. La relation entre Evie et Ronnie évolue, ils se fiancent avant qu'un beau jour, Ronnie ne disparaisse sans plus donner de nouvelles. Evaporé, le magicien. Cinquante ans plus tard, alors qu'elle entame le deuil de celui qui fut son époux pendant toutes ces années, Evie se souvient encore de Ronnie et de ces quelques mois pivots dans le destin du trio. Et le lecteur est invité à remonter le temps, aux côtés de Ronnie, enfant évacué pendant la guerre et logé à Evergreen chez un couple où il découvrira la magie et en même temps une vocation, aux côtés d'Evie, jeune femme ambitieuse et plus opportuniste qu'il n'y paraît, et de Jack qui mènera une incroyable carrière d'acteur sans plus faire référence à ses débuts.

Tout comme dans le dimanche des mères, il est question de revenir sans cesse à l'instant inaugural, de toucher du doigt le moment clé qui influe sur les destins, avec cette construction en cercles concentriques qui me fait penser à ce tour de main indispensable pour bien mélanger des ingrédients en revenant toujours au milieu de la casserole. Mais cette fois, ce procédé a ses limites, peut-être parce que les ingrédients ne possèdent pas la force ni l'intensité dramatique du précédent roman. Ou parce que l'éparpillement entre les niveaux - la saison à Brighton, l'enfance de Ronnie, les souvenirs d'Evie - empêche de capter la colonne vertébrale de l'ensemble. C'est difficile à caractériser mais il me semble que quelque chose ne prend pas dans la construction. Reste une ambiance faite de sensations, de petites touches. de jolies pages empreintes de mélancolie sur l'art du spectacle, l'atmosphère des années 50, l'importance du rêve et des paillettes, la réalité derrière les costumes étincelants. Agréable donc, mais loin de la virtuosité et de l'intelligence du Dimanche des mères.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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