La grande arnaque : Sexualité des femmes et échange économico-sexuel

Le "continuum" apparaît dans toute son ampleur : dans l'éventail des variations de relations économico-sexuelles se trouvent incluses certaines relations matrimoniales et différentes sortes de relations sexuelles non matrimoniales, y compris les relations "prostitutionnelles" ; mais parmi ces dernières, certaines seulement, les plus connues - celles dont on parle le plus et dont on pense immédiatement quand il est question de la prostitution - se situent à l'un des extrêmes, avec le tarif calculé sur la base du temps et du service spécifié [...]. Dans beaucoup d'autres sociétés, il est tout à fait évident (et mis en évidence par les travaux ethnologiques) que TOUTES LES RELATIONS SEXUELLES tendent à se caractériser par des transactions économiques.

Et pourtant, pour le sens commun (dans les pays occidentaux du moins) non seulement il y a toujours eu et il y aura toujours des putains, mais "toutes les femmes sont des putains", cela fait presque partie de la "nature" ou de la "biologie" des femmes - toute femme pouvant le devenir ou, plus exactement, pouvant être définie telle à un moment ou à un autre de son existence. C'est là encore la manière simple et habituelle de faire passer pour un fait de nature ce qui est le produit d'un rapport social. La menace du "whore stigma", du marquage comme putain, pèse sur toutes les femmes.

[...] Carla Corso et Pia Covre (dirigeantes du Comité italien pour les droits des prostituées) affirment [...] que le client, en payant la prostituée, a droit à un service sexuel, mais pas à sa sexualité à elle ; "ma sexualité, il ne peut pas la payer", dit Pia. L'enjeu - qu'affirment clairement Pia Covre et d'autres collectifs de prostituées et de militants travaillant à la défense des droits des prostituées (cf. Pheterson 1989, 2001) - est d'être un sujet à part entière, y compris un sujet sexuel.

La séparation ne va pas de soi entre le travail sexuel et les autres éléments du rapport économico-sexuel : travail domestique, travail reproductif, soutien psychique - en somme les éléments qui forment l'amalgame matrimoniale.

La sexualité des femmes leur est aliénée, elle entre dans le système d'échange, où son affectation peut être contrôlée par d'autres qu'elle-même. La sexualité masculine n'a subi aucune évolution parallèle [Nash 1981 : 120]