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Critique de michfred


Le premier Tabucchi que j'ai lu m'a enchantée: c'était "Nocturne indien". le second m'a emballée: c'est "Péreira prétend", tellement différent, et pourtant lui aussi un petit miracle d'écriture, plein de finesse, d'humour et de pénétration!

Le premier personnage, c'est Lisbonne! Lisbonne l'atlantique avec ses vents violents , ses brumes marines, son soleil éclatant et ses couleurs décapantes, Lisbonne avec ses rues en pente, son tramway acrobatique, son port plein d'odeurs salines et ses marchés colorés, sa vie pétulante et pourtant sous étroite surveillance policière ..Lisbonne, une belle frégate arrimée, une cavale bridée, une ville arraisonnée...On est sous le régime de Salazar...

Lisbonne, Pereira y vit, chroniquant, dans le journal Lisboa, la page littéraire, avec une scrupuleuse minutie, et une cécité tout aussi scrupuleuse au contexte politique...Sa grande spécialité, ce sont les chroniques funèbres, les hommages aux écrivains défunts, ou menacés de l'être....

Car le monde de Péreira est mort: sa femme, au portrait de laquelle il se confie à voix haute, dans l'appartement bien rangé et solitaire, ses écrivains -pas tous morts, mais déjà prêts à l'être, empaquetés dans leur élégie funèbre de circonstance..Et surtout lui, Pereira, qui économise ses plaisirs et ses émotions, avec la prudence d'un grand vieillard.

Il est un de ces petits fonctionnaires ternes et obéissants qui sont les rouages bien huilés de toute dictature.

Et un jour, un grain de sable vient enrayer toute cette belle mécanique: Pereira contacte, sans bien savoir pourquoi - une sorte de brusque surgissement de son moi profond - un jeune thésard , Monteiro Rossi, aux idées contestataires...et avec cette rencontre, peu à peu, va se fendiller la carapace d'indifférence, de fausses certitudes et de craintes pusillanimes que Péreira prétend dresser entre lui et le monde, mais qu'il a surtout érigée entre lui et sa conscience..

Ponctué par le leit-motiv "Péreira prétend" le désordre nouveau -j'aime bien...- va miner , saper, corrompre, détruire la petite vie sans histoire, la petite histoire sans vie de notre héros..

J'ai adoré ce récit, drôle, tendre, réaliste et critique, servi par un style parfait- un vrai conte philosophique!

J'aurais aimé le lire en italien...je le ferai peut-être un jour: sostiene Pereira...

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