Le vrai secret de Singapour est d'avoir placé la recherche au cœur de l'enseignement, depuis le début des années 1980.
Avant d'apprendre, désapprendre, p 173
La Terre est une toute petite scène dans une vaste arène cosmique. Songez aux fleuves de sang déversés par tous ces généraux et ces empereurs afin que nimbés de triomphe et de gloire, ils puissent devenir les maitres temporaires d'une fraction d'un point.
Or, nous sommes nombreux à croire que si l'apprentissage ne se déroule pas dans un contexte ennuyeux, voire s'il n'occasionne pas un minimum de souffrance , c'est qu'il y a un loup. Cette opinion est aussi répandue que fausse. La recherche scientifique montre qu'on apprend jamais mieux que lorsque motivation et plaisir se nourrissent mutuellement.
Depuis la fin du XIXe siècle, la durée de scolarité moyenne des Français augmente à peu près de une année tous les 10 ans. Quand mon grand père passe le bac il y a un siècle, 1% des Français ont le bac. Aujourd'hui, on atteint 80% et environ 1% d'une génération passe un doctorat. Le niveau de formation moyen a donc augmenté de manière substantielle. Mais dans l'intervalle, le nombre de places dans les grandes écoles les plus prestigieuses-polytechnique ou l'école normale supérieure en particulier- n'a pas changé dans les mêmes proportion. Si bien que la probabilité pour un bachelier d'intégrer ces écoles à l'époque de mon grand père était nettement plus élevée qu'aujourd'hui. Ce malthusianisme, qui constitue une exception française, engendre une tension terrifiante sur le système éducatif, plus anxieux de trier que de s'assurer de l'efficience des apprentissages et de leur égale distribution dans toutes les catégories sociales et toutes les zones géographiques.
Il ne viendrait à aucun médecin l'idée de proposer de traiter un patient sans tenir compte des apports les plus récents de la recherche - et à aucun patient de l'accepter, a fortiori depuis qu'Internet à démocratisé l'accès aux informations sur la santé !
C'est pourtant ce que l'on fait en matière d'éducation.
Kant disait, lui, qu' "on mesure l'intelligence d'un individu à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter". Il ne faut pas fuir l'incertitude, moins encore la nier, mais oser le questionnement et oser dire "je ne sais pas "quand on ne sais pas.
Dans un monde en mouvement, l'immobilisme est une régression.
Nous l'avons vu précédemment, une étape essentielle pour ne pas s'abuser soi même en succombant à tous les pièges cognitifs que nous tend notre cerveau consiste à essayer de "se connaitre soi-même". Ce chemin, qui peut prendre une vie (si tant est qu'il est une fin) ne fait l'objet d'aucune préconisation des programmes scolaires. Il est entièrement renvoyé à la sphère privée ou à l'initiative individuelle.
Pour Confucius, il existait trois manières d'atteindre la sagesse. La première consiste à apprendre de ses erreurs. Elle est exigeante, voire quelque peu douloureuse : il faut accepter de les regarder, ces erreurs ! La deuxième est de réfléchir suffisamment au contexte pour éviter de commettre des erreurs. C'est moins douloureux mais encore plus exigeant : il faut dépasser les barrières mentales et s'investir fortement. La troisième, qui est selon lui la plus simple, consiste à imiter les gens les plus sages autour de soi.