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EAN : 9782843046599
380 pages
Zulma (03/10/2013)
4/5   22 notes
Résumé :
Kumudini a dix-neuf ans, la grâce d’être bien née, de goûter les arts et de prier les dieux. Elle vit dans la compagnie tendre de son frère aîné, Vipradas, humaniste fort accablé par le souci des dettes insurmontables de la famille. Jusqu’au jour où un mystérieux entremetteur vient demander pour son maître, un riche négociant adoubé par le pouvoir colonial, la main de Kumudini.
Tout enivrée des légendes sacrées de Krishna, le dieu à la peau de nuit, et de sa ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
[octobre 2013 -L'Arbre à Lettres- Faubourg Saint -Antoine- Paris /Texte offert par une amie- -Lecture 5 juin 2019]

Complètement émerveillée et époustouflée par cet inédit de R. Tagore, dont la réputation (dans mon souvenir) était plutôt assez traditionnaliste...dans sa vie Dans cette fiction, ses propos transgressifs , pour le Bengale de l'époque : 19e et début 20e... sont toujours d'actualité . Qu'ils réussissent à nous parvenir me laisse dans une magnifique surprise..;les idées et convictions "pro- féministes" de Tagore sont des plus inhabituelles et subversives pour son temps, et encore, partiellement, dans notre société présente !!...

J'ai eu la sensation que l'écrivain bengali mettait beaucoup de ses convictions, et révoltes dans la bouche de Vipradas, frère de "notre" héroïne, Kumudini: Son indignation envers les maltraitances insupportables faites aux femmes dans son pays, ainsi que ses réticences vis à vis des religions omniprésentes, augmentant l'asservissement des femmes au lieu de les libérer et de les respecter !

Véritable pépite que j'ai dévorée en 48 heures, avec des personnages attachants, horripilants..., captivants; un style étonnant souvent désuet, lyrisme, mysticisme, poésie mêlés...une forme difficilement définissable;
les multiples dieux, déesses hindous sont abondamment évoqués, tout en exprimant simultanément doutes et interrogations !!

Le qualificatif "désuet" n'est d'ailleurs pas exactement approprié; c'est plutôt une sorte d'emphase de Tagore, soulevant et rallongeant en abondance les phrases !!!On peut être surpris par la forme... baroque, toutefois, les idées développées en elles-mêmes restent d'une actualité et d'une modernité confondantes...

Un livre sur les mariages arrangés en Inde... par le prix Nobel de littérature 1913, R. Tagore qui s'insurge contre les règles de sa propre communauté, accumulant maltraitances et irrespect total aux femmes !!!---

- Portrait d'une jeune épousée bafouée... qui, avec la force de son mental, son intelligence, sa beauté non ostentatoire, et l'amour indéfectible de son frère va résister au-delà des règles et des convenances ! Un livre tragique et magnifique ...


Un roman inédit en France et tardivement traduit en anglais, en 2003...et en français, en 2013. Texte écrit par un Tagore vieillissant, (68 ans) qui s'attaquait à travers cette fiction, de façon virulente, aux "mariages forcés"...

"Kumu n'avait jamais pensé une seconde que le mariage fût une affaire de goût personnel. Depuis son enfance, elle avait vu ses quatre soeurs se marier l'une après l'autre. (...) Elles ne se révoltaient pas quand elles avaient du chagrin. Elles ne pouvaient pas imaginer qu'il pût en être autrement." (p. 48-49)

Deux familles de grande lignée se haïssent et se détruisent depuis des générations... Kumudini, 19 ans, vit paisiblement avec son frère aîné, Vipradas, auquel elle est infiniment attachée !!...Malheureusement, Vipradas... se retrouve endetté jusqu'au cou et ne sais comment faire pour se sortir de cette impasse. Un entremetteur , un jour, se présente et demande Kumu, sa soeur, en mariage pour un homme très fortuné mais plus âgé. Vipradas fait tout pour dissuader sa jeune soeur, alors qu'elle s'est décidée, sûrement, pour aider son frère adoré, et convaincue qu'avec sa foi, elle va être assez forte pour faire face à ce bouleversement à l'aube de ses 19 ans !

Et le futur époux n'est autre que le descendant de la famille ennemie, depuis des générations ! ... On pressent la vengeance de cet homme qui a réussi dans les affaires, est devenu très riche, aussi puissant que son arrogance sans limites.. !

Un mariage catastrophique qui met en lumière tous les dysfonctionnements de la société hindoue, société de castes et de "machistes" hors-pair !!!

Je vais m'autoriser à vous transcrire un extrait très"éclairant" de l'excellente postface de France Bhattacharya :
"Sa passion mystique s'est exprimée dans des chants qui touchent Kumu au plus profond d'elle-même. Toutefois, Tagore ne fait pas de cet idéal une panacée qui permettrait à la jeune épousée de dominer son aversion pour son mari humain, rustre jaloux et méchant, qui est aussi vieux et laid.Le poète montre que tous les efforts de Kumu dans ce sens sont un échec. Son frère aîné, sage athée, qui lui a tout appris: la musique, le sanskrit, la littérature, les échecs, la photographie, est le seul qui puisse lui apporter un moment de paix. La fin du roman est poignante, et je la laisse découvrir au lecteur.
Tagore commença cette fiction en 1927 à la demande du rédacteur d'une nouvelle revue littéraire. Il la publia en livraison mensuelle jusqu'à sa parution sous forme de livre deux ans plus tard." (p. 358)

En fin de volume, une postface passionnante qui nous relate l'histoire de ce manuscrit, nous parvenant plus de 80 années, après sa première publication,...Edition complétée d' un glossaire, et d'une note
explicative sur le déroulement d'un mariage hindou traditionnel au Bengale...

Une joie incroyable que cette lecture qui restera un souvenir exceptionnel... Une vive gratitude aux éditions Zulma, qui nous permettent, à nous, lecteurs de langue francophones de lire et découvrir cet époustouflant inédit de Tagore, poignant, tragique, mais aussi d'une rare luminosité... grâce , entre autres, à la description merveilleuse de sensibilité de la relation unique, fusionnelle, complice entre un frère et une soeur, transcendant toutes les misères du monde, et les codes rigides de cette société hindoue !!
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Inde, fin 19ème. Un mariage arrangé : ça tourne mal...!
Pourtant elle était d'accord, Kumudini Chatterji, la fiancée de 19 ans abreuvée depuis l'enfance de croyances sur le couple parfait. C'est même au sens religieux qu'elle se dit que, quel que soit le fiancé (en l'état : vieux et laid), l'amour va naître afin de respecter l'harmonie universelle.
Elle, elle appartient à une famille aristocratique, raffinée et artiste... mais fauchée comme les blés. Pire : endettée jusqu'aux yeux. Après la mort du père, dépensier et généreux, le chef de famille est le frère aîné - un piètre homme d'affaires. Il lui a fallu doter les quatre autres soeurs, et envoyer le cadet étudier à Londres. Resté seul avec Kumudini, les deux tissent un lien fraternel très fort, prétexte ici à de longues conversations exposant les idées de chacun.
Et le vieux fiancé laid ? Vous l'aurez deviné : c'est le créancier.
Lui veut "une fille Chatterji" : pour le prestige, certes, mais surtout pour venger une très ancienne humiliation infligée à sa famille - une histoire de statue de la Déesse plus haute que celle du voisin, version indienne de la querelle de clochers. "Un lignage qui a reçu des coups est aussi dangereux qu'un tigre blessé."
Nouveau riche, très très riche, ce gros businessman est un véritable tyran domestique, faisant régner la terreur parmi sa famille et ses serviteurs. Personne n'ose même toucher à quoi que ce soit sans son autorisation...!
Autant dire que, lorsque la digne Kumudini éprise d'absolu mais pas de son mari, se rebelle, lui ne sait absolument pas comment s'y prendre. "Madhusudan n'arrivait pas à mettre le doigt sur l'obstacle insensé qui empêchait le coeur de cette femme de se donner à lui. Il avait pourtant pleine et entière autorité sur cette épouse."
Insensé, n'est-ce pas ?
Et c'est le grand frère, probable double de Tagore, qui tire la philosophie de ce mariage désastreux, dans une longue tirade curieusement progressiste (c'est écrit dans les années 20) : "Les femmes ne peuvent que supporter, elles n'ont pas d'autre voie. C'est pourquoi on ne cesse de faire pleuvoir des coups sur leur tête. le jour est venu pour elles de dire qu'elles ne le supporteront plus."
À bas le patriarcat !
Traduction parfaite de France Bhattacharya.
Challenge Nobel
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Kumudini, c'est l'histoire d'un naufrage amoureux, d'une catastrophe conjugale, d'un désastre matrimonial, du ratage magistral d'un couple où chacune des parties s'est décidée pour le mariage pour de mauvaises raisons, tout en étant persuadée, bien évidemment, que les motifs en étaient excellent.

Dans le Bengale de la fin du XIXè siècle ou du tout début du XXè siècle - Rabindranath Tagore ne donne pas d'éléments historiques permettant de situer son roman dans le temps, mais celui-ci a été publié en 1929 - les Chatterji et les Ghoshal, deux puissantes familles locales, se sont toujours opposées, depuis des décennies, pour la possession des mêmes terres. Les Chatterji sont des aristocrates de haute caste, propriétaires terriens depuis au moins un siècle; les Ghoshal sont des négociants enrichis qui cherchent à s'implanter plus encore sur le territoire. Au fil du temps, dans cette lutte, la Fortune a donné la victoire tantôt à l'une des familles, tantôt à l'autre.

Au moment où le récit s'ouvre, les Chatterji sont sortis vainqueurs de la dernière manche, et les Ghoshal ont dû s'exiler à Calcutta. Le temps passant, cependant, le dernier et unique rejeton Ghoshal, Madhusudan, qui possède, poussés à l'extrême, le génie du commerce et le don de la finance, devient immensément riche, tandis que les Chatterji, couverts de dettes, survivent tant bien que mal sur leurs terres.

Les trois filles aînées des Chatterji sont déjà mariées, les parents sont morts, le plus jeune des frères est parti faire de coûteuses études d'avocat en Angleterre, études qui mettent encore plus en péril, si besoin était, le fragile équilibre financier de la famille. Ne restent plus sur les terres que le frère aîné, Vipradas - qui se bat bec et ongles pour garder intacte la dignité de la famille et maintenir la situation économiquement à flot - et la plus jeune des filles, Kumudini, très pieuse - sans pour cela être confite en dévotion - qui, ses dix-neuf ans approchant, se considère déjà comme une vieille fille, tant dans l'Inde d'alors les filles étaient mariées à peine sorties de l'enfance.

A Calcutta, Madhusudan, qui a consacré toute sa jeunesse et une grande partie de sa vie d'adulte à bâtir son immense fortune, pense désormais, l'âge mûr étant déjà là, que la seule chose qui manque à sa réussite économique et sociale c'est une épouse. Il est donc décidé à se marier.

Mais - les vielles haines étant tenaces et le souvenir des indignités passées toujours présent - il veut épouser une femme Chatterji. S'étant renseigné, il apprend ainsi à la fois que les Chatterji sont au bord de la faillite - et que lui seul peut les sauver de celle-ci en épousant une des leurs - et qu'ils ont une fille à marier, très belle de surcroît.

Madhusudan envoie donc un émissaire faire sa demande auprès de la famille Chatterji, qui - les vieilles haines étant tenaces et le souvenir des indignités passées toujours présent - commence par refuser : Vipradas ne veut pas pour sa soeur de cet homme vieux, sinon laid, en tout cas à la mine très sévère, et qui plus, est, arrogant et particulièrement méchant.

Mais Kumudini, souffrant de voir son frère adoré se débattre dans les ennuis financiers et sachant que ce mariage est la seule façon de sortir sa famille de la situation délicate où elle se trouve, persuade Vipradas d'accepter l'offre de Madhusudan. Elle est d'ailleurs convaincue que c'est son Dieu qui a mis ce dernier sur sa route et que Madhusudan est la représentation terrestre de son époux mystique.

Dès la préparation des noces, Madhusudan cherche à écraser les Chatterji sous les manifestations de son opulence et de sa richesse alors que ces derniers, de leur côté, font tout pour ne pas perdre la face et démontrer qu'ils sont une famille de propriétaires terriens qui compte encore dans la région.

Madhusudan ramène à Calcutta une Kumudini toute prête à aimer son mari au nom de l'amour qu'elle éprouve pour son Dieu, mais Madhusudan, ulcéré que les Chatterji aient répondu à son comportement offensant par ce qu'il considère être des offenses plus grandes encore, se méprend sur la timidité de Kumudini à son égard, qu'il prend pour une attitude arrogante et dédaigneuse, et, dès le premier jour de leur union, cherche à briser la jeune femme.

Quand il comprend enfin son erreur et tombe réellement amoureux de sa femme, il est trop tard. Celle-ci ayant vu échouer toutes ses tentatives - souvent imides, parfois maladroites, mais toujours incomprises - de faire de Madhusudan son époux mystique, à défaut de pouvoir en être sincèrement amoureuse, et lassée des rebuffades incessantes de son mari, ne peut plus l'aimer.

Avec ce portrait de la société bengalie, Rabindranath Tagore, cherche avant tout à montrer au grand jour les travers des mariages arrangés et les désastres qu'ils causent.
C'est l'occasion pour lui de faire un constat sans concession de la place de la femme dans la société indienne, à travers des réflexions d'un modernisme étonnant pour son époque. Et son analyse, si pertinente, vaut toujours cent ans plus tard, aussi bien pour la société indienne d'aujourd'hui que pour la place de la femme dans les sociétés humaines de manière générale. Tant il est vrai que les avancées de la condition féminine sont encore fragiles, peu nombreuses, et limitées seulement à quelques catégories de femmes, principalement dans les sociétés occidentales qui plus est.

Ce très beau roman, traduit en anglais en 2003 seulement, et en français plus tard encore (2013), est une nouvelle fois la preuve de l'immense talent du poète bengali, et celle - si elle était encore à faire - de la justesse de vue et de la sûreté de goût de la célèbre institution suédoise qui, en 1913, a décerné à Rabindranath Tagore le prix Nobel de Littérature.
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Les étapes indiennes proposaient une lecture commune d'un roman de Tagore « Kabuliwallah » que je n'ai pas pu trouver en médiathèque. Aussi, me suis-je tournée vers un roman du Maître que propose ma médiathèque « Kumudini », ouvrage disponible depuis peu en traduction française.

« Kumudini a dix-neuf ans, la grâce d'être bien née, de goûter les arts et de prier les dieux. Elle vit dans la compagnie tendre de son frère aîné, Vipradas, humaniste fort accablé par le souci des dettes insurmontables de la famille. Jusqu'au jour où un mystérieux entremetteur vient demander pour son maître, un riche négociant adoubé par le pouvoir colonial, la main de Kumudini. Tout enivrée des légendes sacrées de Krishna, le dieu à la peau de nuit, et de sa bien-aimée Radha, elle y voit un signe du destin et presse son frère dubitatif d'accepter le marché. Mais en unissant sa destinée à celle de Madhusudan, vieil époux aux désirs d'ogre qui règne en despote jusque dans les moindres recoins de sa vaste maisonnée, Kumudini devient l'instrument inespéré et malheureux d'une épouvantable vengeance… »

Je n'avais jamais lu Tagore, j'avais entendu parler de ses romans, de sa poésie et de son côté traditionnaliste. Aussi, ai-je été surprise en lisant « Kumudini » des prises de position de l'écrivain envers la condition des femmes indiennes, soumises à une inféodation, souvent cruelle, à leur belle-famille.

Kumudini Chatterji est une jeune fille cultivée, aimée et bien entourée par son frère aîné et les gens de leur maisonnée. Nous sommes à la fin du XIXè siècle, dans une Inde, plus exactement au Bengale, exigeant de s'affranchir de l'occupation anglaise. Elle ne croit pas au mariage d'amour, ne connaissant que le système des mariages arrangés : elle a vu ses soeurs quitter le foyer paternel pour rejoindre celui de leur époux, soeurs qui se sont épanouies dans leur union. C'est sans révolte qu'elle accepte de bon coeur et dans une attente joyeuse le mariage arrangé proposé par son frère Vipradas. Ce dernier a du accepter l'union en raison de dettes trop lourdes. L'acceptation est vécue comme une immense défaite par cet homme cultivé, progressiste (dans le sens noble du terme), ouvert à la modernité et ses progrès dans de multiples domaines. le futur époux, Madhusudan est issu d'une famille avec laquelle celle de Kumudini est en conflit depuis plusieurs générations. Les deux familles ont suivi des chemins différents, celle de Kumu dans l'opulence, la richesse de propriétaire terrien à la campagne, celle de Madhusudan Ghoshal dans les difficultés financières jusqu'à ce que l'inverse se produise sous les efforts de Madhusudan qui a su faire fructifier les rares avoirs familiaux au point de pouvoir, enfin !, être en capacité d'assouvir sa vengeance. Car il s'agit d'une histoire de vengeance et le mariage arrangé en est le moyen le plus cruel qui soit.

Le lecteur suit la descente aux enfers de Kumu et de Vipradas, chacun à sa manière. La première, hiératique face à la rusticité de son époux, subit l'inféodation en s'attelant à des tâches de subalterne, ce qui empire la maladresse de Madhusudan alors qu'il tente de l'apprivoiser. le second sombrant dans la maladie et la mélancolie.

Kumu tiendra tête, avec constance et élégance, à son « ogre » d'époux aux appétits insatiables et au despotisme insupportable. Les projets de Madhusudan, devenu Maradjah par la volonté du pouvoir colonial, se heurtent à la résistance, extraordinaire, de Kumu face aux humiliations qu'il lui fait subir, et au mépris qu'elle lui adresse en retour. Une attitude absolument inédite, impensable dans une Inde où la femme est traditionnellement assujettie aux volontés de son époux, asservie par lui et soumise à ses ordres ou à ceux de la belle-famille. Kumu, éduquée par son frère qui a fait d'elle une femme qui possède la liberté de penser, est l'image même d'une résistance qui forcera le respect d'une belle-soeur et d'un beau-frère, est la figure par laquelle se lézardera le bel édifice du Maradjah. Je l'ai souligné plus haut, c'est l'époux qui, malgré les vexations, se sent rabaissé par celle qu'il veut asservir, et, comble de l'insupportable, qui apparaît comme en position de faiblesse aux yeux de sa maisonnée. le conflit larvé entre les deux époux, deux visions de l'Inde, monte crescendo et apporte une tension extrême au roman. le renversement de statut des époux, l'esprit d'indépendance de Kamu vis à vis du poids des us et coutumes, font du roman une anticipation des mouvements d'émancipation de la femme indienne et une virulente dénonciation des mariages arrangés. Ainsi, Tagore, à la fin de sa vie, devient un révolutionnaire visionnaire même s'il ne permet pas à son héroïne, qui a l'audace de quitter son époux, de remporter l'entière victoire ce qui aurait été une gageure impossible dans le contexte historique de la publication du roman.

J'ai vraiment aimé l'histoire de Kamu car malgré les passages très sombres de sa vie, il y a de la lumière et de la beauté. La force d'évocation du texte est telle que j'étais au Bengale, avec ses senteurs, ses couleurs, sa musique, ses maisons de maître délabrées mais tellement belles, sa nature luxuriante et prolixe ainsi que tout un art de vivre. J'étais également aux côtés de Kumu, kidnappée à son frère, pour être assujettie à sa nouvelle famille, dans la douleur, l'incompréhension, le chagrin et les graines de la révolte.

Traduit du bengali par France Bhattacharya
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J'ai eu du mal à comprendre ce livre, pourtant très bien écrit. Il est plein de références à la religion hindoue et à un certain type de personnalité feminine, façonnée justement par toutes les lectures et histoires traditionnelles, bien qu'il y ait une note explicative à la fin. J'ai eu du mal à accrocher aux personnages, surtout à Kumudini, qui m'a paru un peu artificielle. La fin est assez décevante, mais je crois, plus proche de la realité qu'une fin plus heureuse... C'est un livre qui rend le lecteur (surtout la lectrice) angoissée par la vie de tant de jeunes femmes mariées à quelqu'un qu'elles ne connaissaient pas vraiment, et surtout, qui étaient bercées dès l'enfance par un idéal d'amour complet et total qui se révèle absolument faux.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Postface

(...) La véritable raison (publication très tardive de cet inédit) , me semble-t-il, est que ce roman est transgressif. Il choquait jusque très récemment la mentalité de la bourgeoisie bengalie conservatrice. Il s'attaque en effet à bien des tabous et des conventions. Il montre le mariage arrangé, dans toute sa crudité. (...)
Par ailleurs, la dénonciation de la condition que la société indienne faisait autrefois à la femme y est sans concession. Tagore refuse de vanter le caractère sacro-saint de la femme parfaite, la -sati- **, victime autant d'elle-même que de la société qui lui dénie toute existence individuelle. (p. 357)

France Shattacharya

[**épouse de Shiva...épouse parfaite, entièrement dévouée à son mari, jusqu'à se jeter dans le bûcher funéraire de celui-ci.]
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Vipradas comprit que c'étaient les femmes qui manquaient le plus d'estime pour leur sexe. Elles ne savaient même pas que c'était pour cette raison précise qu'il était si facile de leur manquer de respect dans leur foyer. Elles éteignent elles-mêmes les lumières qu'elles portent en elles, se disait-il. Ensuite, elles ne font que mourir de peur et de soucis, sans cesse battues par ceux qui sont indignes d'elles. (...) Non, un être humain ne doit pas accepter tant de disgrâce. Celles que la société dégrade à ce point dégradent, chaque jour, cette même société. (p. 307-308)
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Mais on apprit que Madhusudan avait brusquement décidé qu'il emmènerait sa nouvelle épousée le lendemain même du mariage. Ce n'était ni par fidélité supposée à une coutume, ni par nécessité, ni par amour. Ce n'était rien d'autre qu'une manifestation d'autorité. (p. 77)
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Il pensait alors que kumu se soumettrait facilement à son autorité, comme les filles ordinaires qui vont jusqu'à aimer leur dépendance. (...)
Il réfléchissait au moyen de vaincre la force d'une faible femme. (p. 129)
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Postface

Sa passion mystique s'est exprimée dans des chants qui touchent Kumu au plus profond d'elle-même. Toutefois, Tagore ne fait pas de cet idéal une panacée qui permettrait à la jeune épousée de dominer son aversion pour son mari humain, rustre jaloux et méchant, qui est aussi vieux et laid.Le poète montre que tous les efforts de Kumu dans ce sens sont un échec. Son frère aîné, sage athée, qui lui a tout appris: la musique, le sanskrit, la littérature, les échecs, la photographie, est le seul qui puisse lui apporter un moment de paix. La fin du roman est poignante, et je la laisse découvrir au lecteur.
Tagore commença cette fiction en 1927 à la demande du rédacteur d'une nouvelle revue littéraire. Il la publia en livraison mensuelle jusqu'à sa parution sous forme de livre deux ans plus tard. (p. 358)
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Videos de Rabindranath Tagore (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Rabindranath Tagore
Lecture de Notre besoin de consolation est impossible à rassasier de Stig Dagerman et concert autour des oeuvres de Théodore de Banville, Gérard de Nerval, Paul Eluard et Rabindranath Tagore.
« C'est l'angoisse de la séparation qui s'épand par tout le monde et donne naissance à des formes sans nombre dans le ciel infini. C'est ce chagrin de la séparation qui contemple en silence toute la nuit d'étoile en étoile et qui éveille une lyre parmi les chuchotantes feuilles dans la pluvieuse obscurité de juillet. C'est cette envahissante peine qui s'épaissit en amours et désirs, en souffrances et en joies dans les demeures humaines, et c'est toujours elle qui fond et ruisselle en chansons. »
L'Offrande lyrique, Rabindranath Tagore, traduit par André Gide.
Ces émotions douces et amères qui nous secouent ne sont-elles pas universelles ? Ne sont-elles pas l'essence même de notre existence ? Deleyaman, groupe franco-américain dans la veine céleste de Dead Can Dance, aborde ces questions vibrantes, parle d'art, d'amour, de beauté et de contemplation comme des réponses à nos contraintes existentielles.C'est une amicale collaboration artistique entre le groupe et Fanny Ardant qui a donné naissance à cette création. Au travers d'un texte lu, elle dialogue avec le groupe sur une musique créée par Deleyaman. Avec le son du doudouk, le groupe d'Aret Madilian interprétera les titres français de sa discographie
Fanny Ardant : voix Béatrice Valantin : voix, clavier Aret Madilian : piano, clavier, guitare, percussion Guillaume Leprevost : basse, guitare Artyom Minasyan : doudouk, plul, pku Madalina Obreja : violon Gérard Madilian : doudouk
Création en partenariat avec le Trianon Transatlantique de Sotteville lès Rouen – Scène conventionnée d'intérêt national art et création chanson francophone.
À écouter – Deleyaman, « Sentinel », 2020. Plus d'informations sur www.deleyaman.com À écouter : https://deleyaman.bandcamp.com/album/sentinel
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