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Miyako Slocombe (Traducteur)
EAN : 9782714486455
128 pages
Belfond (01/10/2020)
3.46/5   149 notes
Résumé :
Fête des morts et jeux dangereux dans le Japon des traditions

Alors qu’il venait tout juste de s’habituer à sa nouvelle vie, Ayumu apprend que son père est une fois encore muté. Adieu Tokyo, c’est désormais à Hirakawa, un village perdu dans les montagnes et les rizières, qu’il faudra se reconstruire.
Au collège, l’adolescent découvre une classe de douze élèves. Ces derniers, menés par Akira, se livrent a priori à des jeux innocents. Des moquer... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (78) Voir plus Ajouter une critique
3,46

sur 149 notes
Des petits voyous qui se livrent à des actes de violence, qui éprouvent du plaisir à maltraiter ceux qu'ils trouvent plus faibles qu'eux, sont des types d'élèves qu'on rencontre quelle que soit l'école. Dans une grande classe il n'est pas difficile d'y prendre ses distances , mais dans une classe de six garçons, Ayumu est obligé de fréquenter Akira, qu'il le veuille ou non. le dit voyou se livre à son occupation favorite par le biais d'un jeu de cartes "hanafuda", dont il est le maître. En trichant, il peut choisir sans problème sa victime pour des jeux trés loin d'être innocents, des jeux qui viennent de loin.....
Un auteur japonais que je croise pour la première fois. le sujet en soi n'est pas singulier, mais le contexte japonais et le paysage rural où se passe le récit l'agrémentent de détails subtils et intéressants. le jeune Ayumu arrivé de Tokyo dû à la mutation de son père débarque non seulement dans une nouvelle école où le voyou Akira va le perturber, mais aussi dans un monde rural où des nouvelles sensations vont l'imprégner , "Il était pris d'une étrange sensation, comme si sa peau bruissait, comme si son coeur portait une vague inquiétude, mais tout cela était agréable en même temps. Les montagnes cramoisies, les insectes d'été sur les sentiers longeant les rizières, le coassement des grenouilles, l'odeur de la terre et de la boue faisaient naître cette illusion en lui. Ou peut-être, en tant qu'étranger, était-il sensible à quelque chose que recelait le vent.....un vent couleur moineau ".
La violence au coeur du récit est contrebalancée par la sensation paisible que dégagent la nature, les petits faits quotidiens à l'école, à la maison, les croyances de la région, dont les mots qui errent près des monticules, des carrefours et des ponts, auxquels faut pas y tendre l'oreille car ils influencent les hommes, un festival pour emporter le sommeil, un cheval concombre et une vache aubergine pour le voyage des morts.....

Un roman à double tranchant avec une fin qui confirme la citation gravée dans la tête d'Ayumu "Le silence est fécond ". Lauréat du prix Akutagawa 2018, un livre intéressant qui reflète bien la dichotomie du caractère japonais.


"-Depuis, les barques sur les bateaux, et les lanternes sur les mâts. ...
-On brûle les mots qui portent malheur et on les déverse à l'extérieur du village."
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L'histoire s'ouvre sur un groupe étrange qui progresse dans la forêt, le jour où l'on déverse du feu dans la rivière comme un rituel pour invoquer les morts. Il s'agit d'un ouvrier, suivi par des collégiens, Ayumu fermant la marche, peu rassuré.

Puis retour en arrière, on apprend comment Amuyu est arrivé dans la région : il arrive de Tokyo car son père a été muté à Hirakawa, dans cette région un peu austère, ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il change d'école au gré des mutations paternelles.

Ils sont logés dans une maison, un peu à l'abandon et peu à peu s'y installent et leurs meubles qui paraissaient incongrus au début finissent par se fondre dans le décor. Pour se laver, par contre, il faudra aller aux bains municipaux.

Amuyu est présenté par le professeur principal aux autres élèves de la classe, qui comprend douze élèves, six garçons et six filles et Akira est chargé de lui faire visiter les lieux. Comme à chaque fois qu'il change d'école, Amuyu a du mal à s'adapter au départ car il est réservé voire timide, mais comment pourrait-il en être autrement vu qu'il change régulièrement d'établissement ?

Pourtant, tout commence plutôt bien, Akira désigné comme délégué de classe le désigne pour être vice-délégué, une première dans son existence. le tandem se met en place, mais Amuyu se rend vite compte qu'Akira est étrange : deux ans auparavant, en proie à un accès brutal de violence, il a frappé Minoru, un autre élève avec une plaque d'égout, lui laissant une cicatrice à la tête il avait dû d'ailleurs s'excuser…

Néanmoins, Minoru semble toujours faire partie du groupe qui comprend également Fujima, Chikano et Uchida. Très vite, Amuyu se rend compte, que leurs relations sont bien plus complexes qu'il n'apparaît au prime abord. Akira a besoin de dominer et de créer des jeux étranges, combat de sumo, voler un couteau à cran d'arrêt…

Il se sert d'un jeu de cartes aux figures étranges pour désigner celui qui fera plouf, autrement dit qui perdra et deviendra le souffre-douleur. Étrangement, cela tombe toujours sur Minoru, et comme c'est Akira qui tire lui-même les cartes on comprend vite qu'il triche…

On assiste à une montée en puissance de la maltraitance au collège et cela dérive vers une violence de plus en plus forte qu'elle évolue de manière insidieuse. On passe des mots aux coups, on maltraite au passage une pauvre sauterelle qui n'avait rien demander en lui versant de l'acide sulfurique sur le corps et en faisant croire aussi à Minoru qu'on lui en verse sur la tête…. Pour atteindre l'apogée à la fête des morts, Okuribi, le 15 août, où tout va basculer, d'où le sous-titre du livre « Renvoyer les morts ».

Tout évolue crescendo dans ce roman : le riz qui pousse au fil des saisons : marécage, puis les feuilles qui apparaissent puis les grains… sur fond de végétation qui change, les relations entre les individus avec les disputes entre les parents d'Amuyu, l'atmosphère se tend, et Hiruki Takahashi sait très bien manier les mots pour faire monter la puissance, la violence…

Je me suis laissée happer par ce texte envoûtant, plein de poésie, écoeurée par les actes des collégiens, par l'ignoble Akira et la relative apathie d'Amuyu, mais subjuguée, j'ai continué à lire alors que je déteste la violence, le harcèlement dans les romans…

Le Japon est un pays qui me fascine depuis longtemps, mais jusqu'à présent, mes lectures se limitaient à Haruki Murakami que j'adore, ou Yasunari Kawabata, ou quelques lectures de maîtres Zen ainsi que dans un autre genre, Jiro Taniguchi et ses « quartiers lointains » ou Fuyumi Soryo et sa série « Cesare » sans oublier Ito Ogawa et quelques autres quand même, ne soyons pas trop modeste !

Ce roman de Hiruki Takahashi est le premier à être traduit dans notre langue et il va rester un bon moment dans ma mémoire, il ne va pas être facile à oublier…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Belfond qui m'ont permis de découvrir ce roman intense et hors du commun et son auteur. J'adore la couverture de ce roman, et en général toutes les couvertures des éditions Belfond…

#Okuribi #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Une famille japonaise déménage et quitte la région de Tokyo pour s'installer dans le nord du pays, à la campagne.
Très vite Ayumu, 15 ans , se retrouve intégré à une bande de garçons de sa classe. Ces derniers passent leur temps à se lancer des défis et à punir les vaincus.

Livre très sombre , à l'ambiance pesante dès la première page et cette description du toro nagashi, cérémonie où l'on met à l'eau des lanternes en l'honneur des morts.
On plonge dans l'intimité d'un groupe d'ados qui se mettent en danger à travers des jeux que l'on pourrait qualifier de débiles et dont l'intensité ne fait qu'augmenter au cours du récit jusqu'à la scène finale.
Constrate avec l'image d'un Japon empli de tradition et policé comme on peut se le représenter.
L'histoire nous amène à des faits divers qui font l'actualité macabre de nos journaux sont emplies. Elle est ici bien écrite, glaçante , prouvant encore une fois la fragilité de l'existence et des rapports entre ados. a noter l'omniprésence de 'petites bêtes', sauterelles, cigales qui renforcent encore plus la surprise de lecture.
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Je remercie chaleureusement les Éditions Belfond ainsi que Babelio pour cette lecture et leur confiance !

« Okuribi Renvoyer les morts » est le tout premier roman de l'auteur japonais Hiroki Takahashi à paraître en France aux Éditions Belfond. Au Japon, Takahashi a été récompensé du très prestigieux prix Akutawaga pour ce roman. Je me dois avant toute chose de saluer une nouvelle fois le design de la collection Belfond et le graphisme de l'illustration de la couverture absolument sublime signée Cerise Heurteur. La traduction du japonais est l'oeuvre de Miyako Slocombe. La couverture s'inspire du « Tôrô nagashi », cérémonie au cours de l'Okuribi, la fête des morts au Japon, où l'on met à l'eau des lanternes en papier en l'honneur des morts. L'histoire de « Okuribi Renvoyer les morts » est celle d'Ayumu, un adolescent japonais dont la famille a dû partir à Hirakawa suite à la mutation liée au travail de son père. Ayumu a déjà changé trois fois de collège. C'est un élève qui arrive à se lier aux autres malgré une certaine timidité. Muroya, le professeur principal, présente Ayumu aux douze garçons et filles représentant l'ensemble des élèves de troisième inscrits dans ce collège. Il y rencontre notamment Akira qui lui fait visiter l'établissement. Mais Akira a un passé trouble lui qui en seconde année a frappé avec une plaque grillagée un garçon du nom de Minoru. L'affaire fût classé très vite pour éviter de ternir la réputation du collège. Ayumu se lie à Akira et à sa bande. Ces derniers décidèrent de commettre le vol à l'étalage d'un couteau. le sort joué aux cartes hanafuda désigna Ayumu comme gardien du précieux couteau. Il devînt également vice-délégué de sa classe, et Akira fût délégué. Mais Akira est un adolescent impulsif et cruel, toujours prêt à jouer un mauvais tour à Minoru qui lui, est timide et effacé. Très vite l'ambiance du roman se fait mystérieuse, presque fantastique avec ce climat proche du malaise. Qui est donc cet Akira ? Que recherche t'il ? Les jeux se succèdent au fils des semaines et prennent une tournure de plus en plus malsaine. Akira fait subir des brimades cruelles au pauvre Minoru. Une menace plane. L'atmosphère mystérieuse se confirme au fil des pages comme autant de signes que l'on doit interpréter. Quels sont ces jeux étranges auxquels se livrent ces jeunes ? La violence et les actions humiliantes font partie d'une sorte d'initiation, de rite de passage. Face au déchaînement de violence que subit Minoru, quelle attitude va adopter Ayumu ? On reste sans voix, bouleversé et terrifié par ce roman incantatoire qui nous plonge dans la psyché de ces adolescents, mais également dans les traditions de violence infligées de génération en génération. A l'heure de l'Okuribi, la fête des morts au Japon, tout s'enchaîne et bascule. C'est un subtil mélange de noirceur, de violence, nimbé de fantastique. Les descriptions de la nature environnante, de cette toute petite ville du Japon, sont tout aussi importante et nous plongent dans un roman fort bien écrit à l'atmosphère singulière. Hiroki Takahashi nous délivre un roman saisissant, captivant qui nous hante longtemps après l'avoir refermé.
Lien : https://thedude524.com/2020/..
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Ayumu est un collégien dont le père est régulièrement muté par sa société. La famille venant de Tokyo arrive dans la petite ville d'Hirakawa, préfecture d'Aomori au nord de l'île principale, Honshû. Cela oblige Ayumu à s'intégrer auprès de nouveaux camarades, peut-être pour une seule année, lui qui espère que son père aura une promotion et qu'ils pourront vivre dans une petite maison aux abords de l'agglomération tokyoïte. Il côtoie bientôt une petite bande de six jeunes, dont Akira est le meneur naturel. Mais son passé trouble vis-à-vis de ses camarades ne tarde pas à susciter des interrogations chez Ayumu. Surtout, il a un souffre-douleur dans le groupe, Minoru, le plus faible, qui se laisse toujours embêter. Akira tient sa bande avec son jeu de cartes « Hanafuda », le jeu des fleurs. Chaque carte a une valeur, et en tirant deux cartes il ne faut pas dépasser un total de treize points sous peine de faire « plouf ». Or faire plouf, c'est avoir un gage pas très sympathique mitonné par Akira. Comme par hasard, Minoru perd systématiquement…

Dans ces moments, la tension monte, et l'on craint le pire pour Minoru et ses copains, dont Ayumu qui a quelques sueurs froides, qui remarque vite que les dés sont pipés et que le perdant est toujours le même. L'auteur tient son lecteur en haleine avec ces gages inquiétants, mais il y met une bonne part d'intox, et ce de manière répétée…Il n'en demeure pas moins qu'il nous prépare à ce que ces jeux malsains dégénèrent dramatiquement. Dans les intervalles, nous suivons Ayumu évoluant avec ses parents, désolés d'imposer un énième déménagement à leur fils chéri, avec un père qui espère une promotion et une mère qui n'a jamais su elle-même s'intégrer dans un nouveau cercle social et amical. Ayumu goûte avec curiosité et un certain plaisir la découverte de la campagne, de la nature, des animaux….

Le suspense est présent, la tension va monter, avec cette approche d'Obon, la fête des morts (autour du 15 août, les esprits des morts reviennent visiter leurs proches). Entre festivals de feux et lanternes (matsuri), l'auteur nous fait découvrir un Japon champêtre, avec ses traditions. Il parvient à maintenir le lecteur en alerte, tout en lui offrant ces moments de respiration, loin du tumulte de la métropole tokyoïte. Son approche est dans la nuance, entre le méchant Akira qui sait aussi se faire le protecteur de Minoru, et un Ayumu plus lâche qu'il n'y paraît, pensant avant tout à sauver sa peau.

Okuribi est un roman efficace, qui a été lauréat du prix Akutagawa 2018, le Goncourt japonais. C'était manifestement un bon cru.
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Ayumu était arrivé dans cette région au début du printemps, quand il gelait encore au petit matin. Son père, employé d’une société de commerce, était régulièrement muté et les déménagements se succédaient, la famille se déplaçant toujours plus vers le nord de l’archipel. Alors qu’ils étaient installés depuis environ un an et demi à Tôkyô, le père avait appris, en interne, une nouvelle mutation. Cette fois le poste se trouvait bien plus au nord, à Hirakawa. Lorsqu’il avait entendu ce nom, Ayumu était demeuré perplexe. La géographie était son domaine, pourtant il n’en avait jamais entendu parler. Il s’agissait d’une nouvelle municipalité, issue de la fusion entre plusieurs villes et villages de la région de Tsugaru. Compte tenu du poste qu’occuperait son père, il était très probable qu’à sa prochaine mutation on lui confie une fonction administrative au siège à Tôkyô. L’entreprise avait apparemment pour coutume d’envoyer ses employés dans une région reculée avant de les promouvoir. Il fut d’abord question que le père aille s’installer seul, mais en fin de compte toute la famille déménagea avec lui. En effet, dans l’entourage familial du père, on possédait une maison inoccupée non loin de Hirakawa. Père et mère rêvaient d’habiter une maison individuelle. Ayumu rêvait d’avoir sa propre chambre à l’étage et un jardin avec une pelouse. Au téléphone, la famille avait dit au père :
– Quand une maison est inhabitée elle se délabre vite, alors on serait ravis que tu t’y installes. C’est sûrement ce qu’auraient voulu papa et maman, s’ils étaient encore en vie.
La maison se trouvait encore plus nord que Hirakawa, dans un hameau qui s’étendait entre les montagnes, sur un terrain en hauteur situé à l’est. Lorsqu’on ouvrait la porte coulissante en verre dépoli de l’entrée, une odeur froide de bois s’exhalait. Suivaient trois chambres de six tatamis en enfilade, et à côté de la troisième s’ouvrait la pièce dédiée à l’autel funéraire. On le devinait car l’un des tatamis avait perdu ses couleurs par endroits, révélant la forme d’un autel bouddhique. À l’étage, la surface était presque la même. Cette maison était un peu grande pour une famille de trois personnes. Il fut convenu qu’Ayumu occuperait la pièce de six tatamis à l’étage située côté est. Sa mère en avait décidé ainsi, convaincue qu’elle serait agréable, avec sa belle luminosité. Le lendemain de leur arrivée, les déménageurs y installèrent son bureau, sa bibliothèque munie d’étagères coulissantes ainsi que son lit-mezzanine marron clair. L’un après l’autre, ses meubles familiers furent apportés dans la chambre d’un inconnu. Au bout de quelques semaines, les meubles se fondraient dans la pièce et cet endroit deviendrait sa chambre.
Le père était venu s’installer en éclaireur. Parce qu’il préférait que son fils change d’établissement au début de la nouvelle année scolaire, il avait vécu seul pendant un mois. Il emmena Ayumu aux bains publics situés en bas de la côte, le long de la rivière. Les bains se trouvaient à cinq minutes à pied et l’entrée ne coûtait presque rien. Il n’y avait personne au comptoir, seulement une boîte en bois indiquant : « Tarif pour le bain : 100 yens. » Le père glissa deux pièces de 100 yens dans la boîte, qui tintèrent à l’intérieur. Une serviette à la main, Ayumu fit coulisser la porte en verre dépoli ; deux personnes se trouvaient déjà dans le bassin d’où montait la vapeur. Un adolescent d’à peu près le même âge qu’Ayumu, et un garçonnet qui devait avoir cinq ans. Dès qu’Ayumu et son père se furent plongés dans le bain, l’adolescent en sortit, sans doute par politesse. Tout de suite après, le garçonnet quitta le bassin à son tour comme s’il suivait son aîné.
Sur le chemin du retour, Ayumu, le visage encore rouge de chaleur, contemplait la rivière en sirotant une bouteille de lait caféiné froid et sucré. À ses côtés, son père, le visage rouge lui aussi, buvait un lait à l’arôme de fruits. Une grille métallique les séparait de la berge, et au-delà de cette grille on tombait sur une digue de cinq mètres de haut environ. La rivière s’étendait en contrebas. La berge opposée était reliée au versant d’une montagne escarpée, ce qui donnait l’impression que les eaux coulaient au fond d’une vallée. Les cimes nues des arbres à feuilles caduques se paraient à peine de feuilles vert clair, et leurs interstices étaient encore très visibles. En été, cette montagne se couvrait sûrement d’une verdure foisonnante.
Ici et là au fil de la rivière, de gigantesques rochers montraient leur visage. L’eau les contournait ou stagnait. De là résonnait le murmure de la rivière. Soudain, Ayumu repensa à l’adolescent qu’il avait vu tout à l’heure aux bains. S’il était en troisième année de collège, il le croiserait d’ici quelques jours dans la salle de classe.
– Papa, tu t’es déjà fait de nouveaux amis au bureau ?
À cette question, le père eut un petit rire amusé.
– Tu sais, quand on devient grand, ami ou pas ami, on n’est plus trop dans ce type de relation.
– Tu trouves ça triste ?
Cette fois, le père esquissa un sourire un peu embarrassé et pencha la tête sur le côté. Sa mère avait parfois le même geste. Il vida d’un trait son lait fruité avant de répondre :
– J’espère que toi aussi, tu t’habitueras vite à ta nouvelle école.
C’était la troisième fois qu’Ayumu changeait de collège.
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A la fin des cours, les garçons passaient de nouveau leur temps à jouer aux cartes. Ces cartes hanafuda au dos noir, avec leur boîte en bois de paulownia ornée d’un tengu (créature divine représentée avec un masque rouge au long nez et aux ailes de corbeau) et de chrysanthèmes, étaient apparemment un héritage que leur avaient laissé les anciens élèves.
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Au-delà du parapet, les lanternes étaient suspendues de poteau en poteau le long de la rivière et, se remémorant la coutume dont lui avait parlé Akira, Ayumu s’arrêta. Quand Akira racontait qu’ils déversaient du feu dans la rivière, faisait-il allusion au tôrô nagashi, cette cérémonie où l’on met à l’eau des lanternes de papier en l’honneur des morts ?
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Lorsqu’il parcourait le sentier au crépuscule, il sentait parfois souffler depuis la montagne de la Forêt-Noire un vent tiède, comme coloré. Il avait l’impression que ses joues, sa nuque et ses bras nus se teintaient de la couleur de ce vent du soir. Il était pris d’une étrange sensation, comme si sa peau bruissait, comme si son cœur portait une vague inquiétude, mais tout cela était agréable en même temps. Les montagnes cramoisies, les insectes d’été sur les sentiers longeant les rizières, le coassement des grenouilles, l’odeur de la terre et de la boue faisaient naître cette illusion en lui. Ou peut-être, en tant qu’étranger, était-il sensible à quelque chose que recelait le vent. Pour les habitants de cette région, ce devait être une évidence que le vent portait des couleurs.
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Peut-être à cause du choc sur la tête, il n'entendait aucun son. Seul le bruit du courant résonnait avec une étrange netteté dans ses oreilles. Loin derrière ce ruissellement, par intermittence mais de manière certaine, on jouait un instrument. A force d'écouter la mélodie, il sentit de nouveau son estomac se contracter et il vomit.
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