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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce court roman de jeunesse du grand Tanizaki publié en 1918 est délectable.
L'histoire est perverse à souhait et pleine de rebondissements. Elle parodie Conan Doyle et propose une variation très japonaise sur le fameux thème du démon de la perversité cher à Edgar Allan Poe. On y suit, voyeurs que nous sommes, les investigations d'un couple d'amis assez décadents. le narrateur est un écrivain surmené apparemment raisonnable. Son ami Sonomura est un riche oisif passionné de romans policiers et de cinématographe en proie soi-disant à des troubles mentaux. Ce dernier prétend au téléphone qu'un crime sera commis le soir même. Il s'en est convaincu en décryptant au théâtre un message chiffré avec le code exposé par Edgar Poe dans le Scarabée d'or. Nous voilà entraînés dans les bas-fonds de Tokyo où nous assisterons par le judas d'une porte à une scène incroyable mais vraie, dont la principale protagoniste est une beauté glaciale et vénéneuse, à la longue chevelure noire serpentant sur sa peau laiteuse…
Si vous voulez en savoir plus sur cette histoire grotesque et extraordinaire, je vous engage à lire la critique magistrale de Sachka, la Ténébreuse.
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Après avoir publié un premier inédit de Tanizaki en 2018, Noir sur blanc, les éditions Philippe Picquier ont proposé en 2019 un deuxième roman jusqu'alors inédit en français, Dans l'oeil du démon. le narrateur est invité par son ami Sonomura à assister le soir même de leur conversation, un peu après minuit dans un lieu précis du grand Tokyo à un assassinat. Il sait même que cela se fera avec une corde ou des lacets. Comment est-ce possible ? Sonomura a surpris dans une salle de cinéma le jeu d'un homme et d'une femme échangeant des messages codés dans le dos d'un troisième homme placé entre eux. Avec son goût pour les mystères ésotériques et leur décryptage, il a déchiffré le papier ramassé derrière eux, qui emploierait le procédé de la nouvelle d'Edgar Poe, le scarabée d'or. le narrateur est assez incrédule, et nous dit régulièrement que son Sonomura est en train de virer barjot. Il va néanmoins l'accompagner…Et à travers les fines ouvertures extérieures de la maison, leur oeil va être témoin d'une scène étrange, et bel et bien de crime : les deux comploteurs sont là. L'homme photographie la femme…l'oeil collé à la fenêtre est aussi quasi collé sur sa peau de lait…nous pouvons presque sentir son parfum…Telle une geisha, elle s'avère d'une beauté remarquable...mais il y a aussi ce léger geste de tension, comme si elle tirait sur quelque chose…couché sur ses genoux ? On ne voit pas tout…mais là-bas, dans l'angle de la pièce, que fait cette petite baignoire ?! On entend bientôt les conversations, nos amis voyeurs sont si près ! C'est notre homme du cinéma, il a été liquidé ! Et la belle dame s'apprête à dissoudre le corps vite fait bien fait…C'est qu'il est lourd le bonhomme, plus que la dernière fois dit-elle !!! Nos deux amis se carapatent pour ne pas se faire surprendre et fuir cette scène de crime. Notre narrateur a comme l'intuition que quelque chose cloche, cette scène parfaitement ordonnancée a-t-elle bien eu lieu ?! Mais Sonomura est excité. Il ne compte pas en rester là…C'est qu'il est tombé amoureux de la Belle ! Il lui faut absolument l'approcher, gagner sa confiance. C'est risquer sa vie, tant cette femme semble redoutable ! Il va y parvenir…Un temps sans nouvelles de Sonomura, le narrateur reçoit une lettre inquiétante…l'invitant à récupérer à un lieu indiqué un leg de Sonomura…Mais il n'est pas au bout de ses surprises…

Dans un format qui ressemble davantage à une longue nouvelle qu'à un roman, on retrouve le goût de Tanizaki pour la perversion et le jeu, son regard malin et humoristique sur la psychologie et les stratégies de ses personnages, faisant ainsi travailler du même coup les méninges de son lecteur. Pourtant, dès le départ, il fait planer le doute sur la santé mentale de Sonomura, et instille un doute tout aussi fort au fil des pages sur la matérialité de ce que nous allons lire, et voir à travers les yeux du narrateur. de sorte que finalement, et avec l'aide malvenue de la quatrième de couverture, on devine assez rapidement les tenants et aboutissants de l'intrigue. Les traducteurs ont privilégié semble-t-il la fluidité, la simplicité, en modernisant l'expression de ce roman qui a désormais quasi un siècle. Bien ou mal, je ne me prononcerai pas catégoriquement, chacun jugera.

Pour ma part, j'ai le sentiment que Tanizaki a produit dans cette oeuvre de jeunesse une sorte de divertissement qui n'a pas des prétentions démesurées. Ma note qui aurait pu être plus moyenne est cependant relevée par la scène centrale de l'observation du crime, un véritable morceau d'anthologie en termes de finesse de description des détails, comme un scénariste de cinéma qui prend soin de fournir toutes les indications de jeu, d'attitude et posture des acteurs, des décors. C'est très réussi, on sent naître ce qui deviendra un des points forts de l'écriture de Tanizaki. Au final, Dans l'oeil du démon est un livre honnête, qui n'entre cependant pas dans les essentiels du maître japonais.
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Takahashi est écrivain. Il vient de passer une nuit blanche à travailler sur un manuscrit lorsque son ami Sonomura l'appelle pour le convier à un rendez-vous aussi incroyable que sordide. Un assassinat va être commis dans la nuit, il en a découvert l'heure et le lieu grâce à son esprit de déduction, et il lui est impensable de ne pas y assister en secret. Alors autant ne pas y aller seul. Takahashi connaît la mesure de folie qui sommeille en son ami, riche et décadent héritier noyant son oisiveté et ses appétits coupables dans le cinéma et les romans policiers. Il ne peut se résoudre à laisser son ami dériver dans la pure démence et se décide donc à le retrouver pour le raisonner, quitte à le suivre jusqu'au lieu du supposé crime dans les bas-fonds de Tokyo… La scène morbide à laquelle ils assisteront clandestinement les plongera dans une fascination tout aussi maladive que sensuelle, le début pour eux d'un jeu de piste ou de dupes tout entier axé sur le mystère d'une femme à la beauté aussi redoutable que fatale…

Tout comme Oscar Wilde dans « le Portrait de Dorian Gray », Tanizaki explore dans ce roman les liens entretenus par la beauté, la décadence et la duplicité. On retrouve aussi dans cet ouvrage l'idée de fancy chère à Edgar Allan Poe, cette fantaisie irrationnelle et délirante engendrant erreur et illusion. En tirant les ficelles de l'étrange et de l'incongru, Tanizaki se joue du voyeurisme sordide de ses personnages comme de ses lecteurs, tout en réussissant à insuffler une part de sensualité trouble dans son récit. Takahashi et Sonomura sauront-ils démêler les fils de cette intrigue sans se laisser capturer par l'oeil du démon ?

L'ambiance sombre et envoûtante rappelle les nouvelles de Poe ou de Bradbury. le style d'écriture m'a surpris par sa simplicité. de la part de Tanizaki, je m'attendais à quelque chose de plus travaillé stylistiquement, même si le passage clef de ce roman nous décrit de manière fascinante une femme aussi sublime que dangereuse.
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Remerciements

Je remercie Babélio pour la masse critique.
Je remercie les Éditions Philippe Picquier une de mes maisons d'édition préférée.
Pourquoi préférée ?
J'aime la littérature japonaise et cette maison d'édition m'apporte des auteurs certes moins connus ceux des “grandes” maisons, mais souvent bien plus intéressants (un exemple parmi tant d'autres : Ryû Murakami )
Je lis sur liseuse la plupart du temps. Il suffit d'aller voir sur 7Switch pour constater l'absence de DRM de leurs ebooks.
Je HAIS les DRM et vous devriez aussi.
Je remercie l'excellent travail des traducteurs : Ryoko Sekiguchi et Patrick Honnoré.
Traduire du japonais est déjà peu facile.
Alors traduire du japonais du tout début du XXe siècle et lui donner cette tournure quelque part entre Edgar Allan Poe, Oscar Wilde et Fiodor Dostoïevski (pour les tourments) relève du tour de force.

Mais de quoi parle le roman ?

Résumé (court)

C'est l'histoire de deux jeunes hommes qui par un sacré concours de circonstances assistent à un meurtre.
La meurtrière est une femme qui immédiatement le fascine au plus haut point.
Pour leur propre perte ?
Je n'en dirais pas plus.

Avis

Attention ce n'est pas un polar moderne. le centre du récit n'est pas la résolution d'un meurtre.
Le vrai centre du récit est la fascination pour la mort et surtout pour la femme qui la donne. Si résolution il y a c'est celle de la nature de cette femme. Qui est-elle ? Une geisha ? Une opportuniste ? Un membre d'une bande de criminels ? Les deux hommes ne cherchent pas à éviter un prochain prévisible meurtre. Au contraire.
Ils cherchent à percer le mystère de cette femme fascinante.
Ils cherchent à s'en approcher jusqu'à se bruler les ailes ?

Les personnages ? Deux jeunes hommes aisés tentés par la recherche de sensation forte.

La réussite du roman ?

Nous faire partager les scènes du meurtre comme nous y étions.
On pourrait mépriser ces deux hommes, mais au travers du récit nous sommes aussi fascinés.
Nous recherchons à la lecture du roman peut-être une partie de leur propre transgression.
Serait-ce nous l'oeil du démon ? Regardant caché ces meurtres ?

Le décor ?

Un Tokyo aujourd'hui disparu fait de maisons dans d'étroites allées sombres, un peu de théâtres, de cinéma, de temples.
Le tout absolument dominé par la nuit. Fascinant.
Mon conseil : il reste des petites ruelles à Tokyo aujourd'hui. Promenez-vous-y ! Vous ne saurez pas déçus.

Un bémol ?

La fin : sans divulgâcher, j'ai été incrédule. La toute fin ne me semble pas correspondre avec ce que j'attendais et la tournure générale de l'intrigue.
Lien : https://post-tenebras-lire.n..
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Très belle découverte que cet ouvrage de Junichirô Tanizaki.

L'histoire monte progressivement en intensité au fil des pages.
Tout commence avec un appel étrange de Sonomura à son ami écrivain Takahashi l'enjoignant à le rejoindre sans attendre pour une affaire de la plus haute importance.
Il souhaite lui proposer une expérience unique, assister en direct à un meurtre.
Takahashi en plein travail et pensant son ami sur le chemin de la folie lui dit qu'il ne peut pas le rejoindre immédiatement mais qu'il doit l'attendre. Il pense ainsi pouvoir le ramener à la raison et lui faire oublier cette histoire bien étrange.

Ces premières pages passées, l'intrigue se met en place et le long dialogue entre les deux hommes s'installe. Iront-ils assister à ce meurtre, toute cette histoire est-elle bien réelle ou uniquement sortie du cerveau malade de Sonomura…
De nombreuses questions vont être soulevées, parfois dérangeantes, avant que la dernière page ne soit tournée. L'auteur créé ainsi une atmosphère particulière qui nous tient en haleine au fil des pages et nous pousse à nous questionner sur les révélations de ses personnages jusqu'au bout.

J'ai beaucoup aimé cette lecture. Elle m'a paru commencer assez légèrement puis l'atmosphère s'assombrissait et s'alourdissait au fil des pages pour arriver à la fin de l'intrigue à une chute possiblement attendue mais assez efficace et bien amenée.

Encore un beau livre des éditions Picquier trouvé à la librairie L'invit' à lire dans le 10è arrondissement de Paris.

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Pour ma dernière chronique de l'année 2023, je mets à l'honneur Tanizaki lu pour le bookclub "Ce mois-ci on lit Tanizaki" proposé sur Instagram ! J'avais été époustouflée par l'"Éloge de l'ombre" il y a quelques années et j'étais ravie d'avoir l'occasion de lire "Dans l'oeil du démon". le narrateur de ce roman est appelé de manière pressante par son ami Sonomura qui lui demande de l'accompagner pour assister à un meurtre. Il en a eu connaissance par un étrange concours de circonstances qui culmine lors de l'échange de messages codés inspirés par "Le Scarabée d'or" d'Edgar Allan Poe entre un homme et une femme dans une salle de cinéma.

A aucun moment l'auteur ne fait mystère de la santé mentale fragile de Sonomura qui sert d'ailleurs de prétexte au narrateur pour l'accompagner dans cette aventure puisqu'il déclare : « je voulais surveiller mon ami à loisir afin de juger à quel point il était déjà dérangé » (p. 24). Il confirme par là sa propre instabilité à laquelle Tanizaki avait glissé une allusion dès les premières pages. Avec la même efficacité que le film "The Game" (1997) de David Fincher, nous sommes embarqués dans l'observation d'un meurtre qui illustre l'art de l'illusion tout autant que celui de la manipulation ; le tout magnifiquement écrit !

Le plus fort, à mon avis, est que l'auteur fait du lecteur un complice, un voyeur au même titre que Sonomura et le narrateur. La connaissance même d'un meurtre sur le point d'être commis devrait nous révolter mais nous suivons docilement les personnages et acceptons que crime ne doive pas être stoppé. Est-ce par curiosité morbide ? Ou parce que nous sommes persuadés que le crime n'aura pas lieu et qu'il ne s'agit que du délire d'un homme à l'esprit instable ?
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Dans l'oeil du démon est un court roman écrit en 1918, hommage aux detective stories, et plus particulièrement au Scarabée d'or d'Edgar Poe. Un novelliste, le narrateur, reçoit l'appel urgent d'un ami riche et dandy : il lui demande de venir assister avec lui à un meurtre qui aura lieu la nuit même.
Après avoir expliqué comment il en était venu à penser qu'une telle chose allait se produire, avec force analyse et déductions, les deux compères partent à la recherche du lieu présumé de l'assassinat...
Ainsi, on retrouve, en plus de l'allusion au message codé du Scarabée d'or, la trame même de la nouvelle (voire d'autres de Poe, comme La Chute de la Maison Usher ou la trilogie de Dupin), où le narrateur accompagne son singulier ami et relate ses prouesses intellectuelles aussi bien que ses bizarreries.
On se croirait aussi d'ailleurs un peu dans un film d'Hitchcock (pour vous donner un peu l'atmosphère de cette intrigue) quand le narrateur est le témoin caché de scènes assez terribles !
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J'aime cet auteur.

J'avais déjà lu "Éloge de l'ombre" que j'ai beaucoup apprécié.

A travers ce récit de l'attirance pour une femme que l'on sait perfide mais jolie ne peut-on voir une simple description du narcissisme perverti...

Je me pose la question

Belle oeuvre, tout en finesse et beauté...
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Je découvre Tanizaki avec ce court roman, hommage au Scarabée d'Or d'Edgar Allan Poe.

Votre ami, passionné d'énigmes policières, vous entraîne dans une affaire de préméditation de meurtre, qu'il aurait surpris lors d'un échange de message codé dans un cinéma. Vous ne le croyez qu'à moitié, mais découvrez, à ses côtés, l'oeil collé à un trou, la scène macabre impliquant une femme à l'étrange beauté...

Entre onirisme et fascination, Tanizaki joue avec nos nerfs comme l'ami joue avec ceux du narrateur. le mystérieux d'Edgar Allan Poe se mêle aux codes de la sexualité japonaise pour produire un Kamishibai complètement dépaysant. A lire pour goûter à cet auteur, avant de s'embarquer pour des voyages plus sombres...
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Un roman tout particulier que « Dans l'oeil du démon » de Jun'ichirô Tanizaki. Ecrit au début du vingtième siècle, ce roman semble ne pas prendre une ride. Une histoire étonnante, entre manipulations, obscurs secrets et meurtre en catimini. Un roman court qui nous conte l'histoire d'un écrivain appelé par son ami, afin d'assister à un meurtre. Entre folie, beauté meurtrière et mensonge, le lecteur ne sait sur quel pied danser. Un labyrinthe d'énigmes nous propulse vers ce fameux meurtre où l'on se sent pris au piège par un jeu d'apparence. Un roman qui se joue de nous mais pour lequel on ne peut se détacher jusqu'à en découvrir toutes les révélations.

Une histoire insolite qui colore ce thriller d'une atmosphère typiquement japonaise.

A découvrir !
Lien : https://avoslivreschroniques..
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