Une rue, Radnoti, pas très loin de la grande ville, probablement Debrecen en Hongrie. Figée dans le temps, quelques années après l'instauration du communisme au pays. Pour ses habitants, c'est tout simplement «
Notre rue ». Pour le lecteur, c'est un voyage dans le temps intéressant, parfois comique, parfois touchant. En effet, l'auteur hongrois
Sandor Tar pige dans ses souvenirs d'enfance pour la reconstituer, pour en dresser le portrait, un peu comme certains regarderaient une photographie. Il ne s'agit pas d'une de ces artères importantes pour le monde, où il se passe des événements cruciaux, même pas une de ces rues commerçantes ou passantes, non. C'est un bout de nulle part, presque anodin, mais qui vaut tout aux yeux de ses habitants.
« [Cette rue], elle est pauvre, aride, les cours sont vides, sales, négligées, des mouches partout, des tas de fumier nauséabonds, des toilettes sans porte, même les nouvelles maisons se pavanent sur un ramassis d'immondices, la plupart n'ont pas de crépi, les fenêtres sont bouchées avec des briques, et personne ne va au temple. » (p. 85) Certes, ce n'est pas une description des plus objectives, elle est faite par le pasteur qui ne l'aime pas. Mais ses habitants, eux, ils l'aiment. Ils y sont nés, y ont grandi. C'est tout ce qu'ils connaissent. Ils s'en foutent que la rue ne soit pas pavée où qu'il n'y ait pas l'eau courante. Tout ce qui compte, c'est « chez Michi, où les habitués se retrouvent par temps de pluie, et également quand il ne pleut pas. » (p. 91) le débit de boisson a un vrai nom nom mais tout le monde dit chez Michi, à cause du patron.
«
Notre rue » est un recueil de nouvelles mais chaque courte hsitoire complète la précédente et annonce la suivante. C'est que les personnages de cette même rue – on ne se fait pas d'idée, c'est eux qui sont important et moins cette artère qui les réunit – reviennent d'une nouvelle à l'autre.
Sandor Tar jette sur « sa » rue un regard nostalgique mais surtout lucide. Il n'enjolive pas. Il montre, c'est tout. C'est qu'il ne se passe pas grand chose sur cette rue. Ses habitants mènent leur petite existence qui n'a d'importance que pour eux. Ils ne sont pas parfaits, oh non, mais ils sont humains. Et attachants malgré leurs faiblesses. Par exemple, ces ivrognes invétérés, ces pauvres diables, ces proftiteurs de toutes sortes, mais aussi ces amoureux et ces travailleurs. Il y a le vieux Vida, sage, qui a construit une des premières maisons de la rue. Jancsi Hesz qui gagne toujours aux cartes. Mme Piroska, Jozsef Sudak, Attila le plus beau garçon de la rue, Dorogi et son épouse Mancika, le pasteur Marton Vegso, c'est un passionné d'histoire mais il est peu compréhensif et conduit mal. Et tous ces autres. Des portraits colorés mais, en même temps, ordinaires et criant de vérité. On pourrait presque y reconnaitre nos voisins et amis d'enfance...
Tous ces familliers sont une partie intégrante de «
Notre rue ». À vous de découvrir ce monde qui n'existe plus que dans la mémoire de quelques aînés, puis chez les lecteur de ce petit ouvrage.