— Si ça tourne mal, tu te la mords, Santa. Étoilés ou pas, ça reste des chefs. Les mêmes que tu as pu côtoyer depuis que tu es dans le milieu.
— Je me mords quoi, au juste ?
— La langue.
Oui, chef. Mais, ouch , ça fait mal ! J’avais presque oublié à quel point.
Les bulles remontent à la surface et enfin, nous trinquons, les yeux dans les yeux.
— À tes étoiles, Santa Di Livio.
— À ta victoire, Rafael Ortiz.
Ma victoire… Je ne veux pas y penser, à ma victoire. Ce sera celle que je lui aurai volée, avec son cœur que je finirai par briser quand elle va oser en vouloir plus. Parce qu’elle me veut, avec mes secrets, mes blessures, mes provocations. Elle me veut, moi. Et je la veux aussi parce qu’elle aurait été parfaite — dans une autre galaxie.
Défense de la blesser.
Défense de lui dire la vérité.
J’arrive au Jéricho, avec si peu d’heures de sommeil et tant de courbatures que je devrais être théoriquement sur les genoux. Ce n’est pas le cas, je suis même parfaitement réveillée. Mon corps doit puiser de l’énergie dans mon cœur… Je n’imagine aucune autre explication.
Je ne parviens plus à parler, alors Rafael continue de me perfuser en mousse au chocolat à la fleur de sel, mais son regard est sombre et ses doigts blanchissent autour de la cuillère.
Rafael me fixe, l’air grave.
— Est-ce que l’amour répare tout, Santa ?
Je ne suis pas aussi bavarde que lui, j’ai la gorge et les lèvres sèches. S’il pouvait lire dans mon cœur…
— Non.
Il est déçu.
Je continue, la voix tremblante :
— L’amour fait mieux que ça : il nous donne la force de pardonner, la patience de comprendre. Il nous réconforte quand on est abîmé au point de se sentir perdu.
- Parce que tu n’aimes pas le chocolat. Parce que tu n’aimes pas l’esbroufe. Parce que tu es belle comme un cœur, que tu rougis tout le temps et que tu es la fille la plus douce, la plus fière et la plus honnête que je connaisse. Parce que tu m’as eu sur un « j’en ai vu d’autres », et que mon monde n’a plus tourné correctement après ça.
— Choisir les matières premières, les marier en fonction de leur saveur, leur couleur, leur fraîcheur pour créer un tableau de maître… La cuisine, c’est de l’art ! Le moins abstrait de tous, et le plus délicieux, surtout !
Je suis entièrement nue, offerte au regard de braise d’un Rafael sous tension. Sa poitrine se soulève vite et fort, sa jugulaire palpite. Je déboutonne son jean, il le descend sur ses hanches en même temps que… que rien du tout.
Rafael ne porte pas de sous-vêtement. C’est… c’est… foutrement décadent !
— J’ai été un peu pressé après le service… grogne-t-il.