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Critique de Nastie92


J'aime Sylvain Tesson.
J'aime l'écrivain cultivé, intelligent et poète.
J'aime l'homme, original en diable, extravagant et excessif.
Et par-dessus tout, j'aime son non-conformisme assumé.
J'aime ses prises de positions franches, sa façon de ne pas avoir peur d'être à contre-courant.
J'aime sa droiture tranquille.
Sylvain Tesson est droit dans ses bottes et ne craint pas d'exprimer ses convictions.
J'aime sa façon de refuser la pensée unique que l'on veut nous imposer.
Sylvain Tesson est un esprit libre. Libre de ne pas suivre le courant bienpensant. Libre de ne pas hurler avec les loups.
À l'époque actuelle, il faut du cran pour revendiquer le droit de penser par soi-même. De l'intelligence et du talent pour transformer sa pensée en mots percutants.
De tout cela, Sylvain Tesson ne manque pas. Le panache en plus.
Voilà pourquoi j'aime Sylvain Tesson.
Ce livre est un journal intime, couvrant la période de janvier 2014 au printemps 2017.
Dans la préface, l'auteur explique que pour lui, "un journal intime est une entreprise de lutte contre le désordre." Il y consigne ses pensées au fil du temps et de ses multiples voyages. L'homme a la bougeotte ; éternel baroudeur, il saute d'un point à l'autre du globe avec naturel et facilité.
Tout au long de la lecture, on le suit dans ses pensées, ses découvertes, ses réflexions, ses indignations, ses amusements ; on passe du plus futile au plus important.
J'aime ce mélange rafraichissant de la part de quelqu'un qui ne se prend pas au sérieux et pratique beaucoup l'autodérision.
J'aime sa passion folle de la culture, qui transparaît à chaque page et j'apprécie les coups de griffes qu'il n'hésite pas à donner à ceux qui la piétinent, comme une certaine ministre de la culture : "Étrange sensation d'entendre les élites politiques se vanter de ne plus jamais lire (la cybergirl Fleur Pellerin, par exemple)".
J'aime sa façon de parler sans détour et très lucidement de sujets graves, tel le massacre des chrétiens d'Orient : "À la souffrance de ces hommes s'ajoute l'étourdissante indifférence de nos édiles, de nos évêques, lesquels, à force de crier à la discrimination pour tous, ne parviennent même plus à discerner ceux de leurs frères qui la subissent le plus cruellement."
Au cours de ma lecture, je me suis souvent réjouie de trouver sous la plume de Sylvain Tesson les mêmes pensées que les miennes, et je le remercie de savoir bien mieux les exprimer que je ne le ferais.
Par exemple : les églises en France, indépendamment de toute considération religieuse, appartiennent à notre histoire, à notre culture. Le nier est faux et stupide. Ce n'est pas parce que la France est aujourd'hui un pays laïc qu'il faudrait effacer toute trace du passé : "On peut tenir à ces églises, aimer l'apparition du clocher au creux d'une vallée de France, même lorsque l'on ne croit pas au Ciel. Il faut distinguer la foi et la culture. Le dogme et la civilisation."
Sylvain Tesson a parsemé son livre d'aphorismes réjouissants. J'adore ces petites formules qui nous montrent que quelques mots bien choisis ont parfois plus de poids qu'un grand discours. Tout y passe et l'ensemble forme un mélange jubilatoire.
L'auteur y excelle car il possède l'oeil averti du photographe qui sait voir ce que la plupart ne voient pas. Par exemple, en Chine : "Ce panonceau : Cité interdite : horaires d'ouverture". Il a le sens de la formule lapidaire : "Le voile est le linceul du féminisme", et son ironie désabusée y fait merveille : "Apparition de l'homme sur la Terre : l'Évolution déterre la hache de guerre." ou "Le seul inconvénient de la disparition de l'humanité est qu'il n'y aura personne pour se réjouir de l'événement."
Une très légère oscillation est une lecture beaucoup plus riche que la forme choisie du journal intime ne le laisserait penser.
Entrez dans ce texte, entrez dans une pensée consistante et hors des sentiers battus, dans laquelle liberté de ton et intelligence sont étroitement mêlées.
Beaucoup de fantaisie et de poésie, une bonne dose de philosophie et d'humanité, un brin d'ironie et un zeste de cynisme.
Ai-je déjà dit que j'aimais Sylvain Tesson ?
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