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Critique de Luniver


Planète Terre, XXVe siècle. Notre monde s'est progressivement robotisé : les androïdes règlent désormais la plupart des tâches industrielles, nous servent dans les restaurants, nous surveillent, et nous éduquent. Les robots sont de plusieurs classes, en fonction de l'intelligence que leur mission requiert. le plus haut degré, le neuvième, consiste à implanter une copie de l'esprit d'un ingénieur humain dans l'androïde. Ce cocktail d'humanité et de haute intelligence a conduit tous les robots de classe neuf à se suicider, ce qui n'est pas particulièrement rassurant (et en dit long sur l'estime que porte l'auteur à ses semblables). le seul à survivre à cette hécatombe est l'androïde Robert Spofforth, à qui on a retiré la faculté de se supprimer, et condamné à servir les humains jusqu'à ce qu'ils n'aient plus besoin de lui.

Malheureusement, il y a peu d'espoir de ce côté-là : les humains sont éduqués depuis des siècles à éviter tout effort intellectuel (« Pas de questions, relax », « Dans le doute, n'y pense plus »), à vivre dans l'isolement le plus complet, et à se contenter du plaisir sexuel ou chimique comme seuls buts dans la vie. Plus personne n'est capable de réparer quoi que ce soit, et quand un robot tombe en panne, on apprend seulement à se priver de ce qu'il fournissait.

Un homme, cependant, va faire une découverte susceptible de changer sa vie. Paul Bentley, professeur d'université spécialisé dans les films, tombe par hasard sur une bobine qui n'est pas un film porno comme attendu, mais qui représente une maîtresse apprenant à lire à des enfants. Avec de l'obstination, il parvient lui aussi à maîtriser la lecture. Ce qu'il découvre dans les livres et les vieux films muets le stupéfie : des gens vivants en groupe, en « famille », sans se soucier des Fautes de Promiscuité et d'Intrusion dans la Vie Privée qu'ils commettent. D'autres qui se disputent, se battent, pleurent, tombent amoureux, sans songer aux sopors qui leur permettraient d'oublier tout ça. Avec l'aide de Mary-Lou, une autre marginale, il va redécouvrir tout le passé de l'humanité et apprendre à se défaire de son éducation.

Walter Tevis nous fait le portrait d'un monde où l'individualisme a été poussé à son maximum, où la société s'est totalement coupée de son passé. La thématique est évidemment intéressante, et on peut facilement comprendre les mises que l'auteur nous adresse, mais j'ai trouvé l'écriture très sèche. J'ai eu peu d'empathie pour les personnages, et à aucun moment je n'ai ressenti en quoi ce système était mauvais, et ce qui manquait aux gens qui en étaient prisonniers, à la différence d'autres dystopies, comme 1984, la Servante écarlate, … dans lesquelles on ressent presque physiquement le poids écrasant de leur vie au quotidien. Ici, on sait juste que des gens s'immolent, sans savoir vraiment pourquoi, et ces gens invoquent le nom du Christ, alors que la religion est totalement absente de la vie de Paul, ce qui laisse à penser qu'ils ne font pas vraiment partie du même système. Paul regrette de temps en temps la compagnie de ses amis, mais on ne s'attarde pas non plus beaucoup sur ce sentiment. On peut alors se poser la question : cette vie nous semble bien fade, mais est-ce qu'elle rend les gens vraiment malheureux ? Et quand on trouve que la vie dans une dystopie n'est pas aussi mauvaise qu'elle en a l'air, on ne peut s'empêcher de penser que l'auteur a un petit peu manqué sa cible...
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