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Critique de kuroineko


Qu'on vienne me dire que les classiques sont ennuyeux! Balivernes! le format poche de chez Folio peut certes impressionner. Pourtant, il faut sans la moindre hésitation écarter les tentures qui camouflent l'entrée de la Foire aux Vanités. Qu'est ce que mille pages en compagnie d'un maître ès divertissement, tout prêt à nous découvrir les folies, les hypocrisies et les vaines appétences d'une société qui pourrait être la nôtre. Il suffit de changer les costumes.

Qu'il s'occupe de ses personnages ou s'offre quelques digressions, Thackeray garde toujours un ton où perce l'ironie. Il multiplie les figures de style pour soutenir la cause satirique de son roman. S'il n'échappe pas aux préjugés de son époque - principalement envers les femmes - il faut lui reconnaître une assez juste équité quant au traitement de la gente masculine. Lorsque ces messieurs ne sont pas vains ou dissipés, ils sont corrompus ou grotesques.

Difficile cependant de trouver aventurière plus ambitieuse et dénuée de scrupules que cette chère Rebecca Sharp, il est vrai. Elle annonce la couleur dès les premières pages: quittant le pensionnat en compagnie de la douce et naïve Amelia Sedley, la jeune fille née d'un peintre miséreux et d'une danseuse tôt disparue déclare à son compagne effarée qu'elle n'est pas un ange. le reste du récit viendra à grand renfort de péripéties prouver la justesse de cette affirmation.
Cette blonde Vénus au coeur aussi tendre qu'un bloc de marbre est un personnage des plus fascinant de la littérature à mes yeux. Comme son semblable balzacien Lucien de Rubempré, on est sans cesse à se demander, au cours de la lecture, jusqu'où elle va aller, jusqu'où va-t-elle repousser les limites des principes moraux de cette société des faux-semblants. Certes, elle commet des erreurs de parcours mais on doit lui reconnaître une ténacité et un aplomb à nuls autres pareils.

Thackeray oppose dans sa grande Foire aux Vanités - qui aurait pu s'appeler la Foire aux Illusions aussi bien - des caractères fort divergents, s'amusant à les croiser et les manier dans cette vaste comédie sociale qu'il nomme lui-même son théâtre de marionnettes.

Sa langue a toute la vivacité d'un chroniqueur. Son humour acide fait crisser les masques d'un système et d'un monde d'apparences, d'appétit et de jeu de dupes. Ses portraits sont appelés à rester ancrés dans la mémoire de son lectorat. Il ne tombe néanmoins pas dans le sarcasme cynique ou véritablement méchant, pas plus que dans un manichéisme outrancier. Il démontre avec succès les mécanismes et les tartufferies qui règlent ce grand corps social qu'est l'humanité. Et ses vérités égratignent bien des poses chez bien des personnes.

Les habits ont changé, les technologies évolué... Mais la comédie n'en finit pas de tourner.
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