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EAN : 9782372580922
256 pages
Taurnada Éditions (07/10/2021)
4.27/5   174 notes
Résumé :
Lorsque les eaux noires recrachent le corps de la fille de Joséfa, personne ne peut imaginer la descente aux enfers qui attend les habitants de la Baie des Naufragés.
L'assassin restant introuvable, à l'abri des petits secrets et des grands vices, une mécanique de malheur va alors tout balayer sur son passage…
Les révélations d'un corbeau, la détresse d'une mère et le cynisme d'un flic alimenteront l'engrenage de la rumeur, de la suspicion et de la hai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (105) Voir plus Ajouter une critique
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Je découvre cette auteure avec son sixième roman et très bonne pioche ! Dans le genre thriller psychologique, c'est vraiment excellent !

Le casting est impeccable : une jeune fille de 17 ans assassinée, portant sur elle de la lingerie fine ; une mère inconsolable et déterminée malgré la douleur qui la ravage à trouver le coupable ; un tueur introuvable ; un flic cynique pour mener l'enquête. Et toute une ribambelle de suspects, essentiellement des voisins ( un autre flic, un quinquagénaire célibataire, une famille avec un adolescent, des promeneurs ). Tous sont finement campés. On y croit totalement.

Là où Estelle Tharreau fait très fort, c'est dans sa capacité à immerger le lecteur dans une atmosphère ultra poisseuse, quasi en mode huis-clos dans ce quartier de la Baie des Naufragés d'une petite ville banale de province. Dès les premières lignes, j'ai été frappée par la singularité de l'univers de l'autrice. Elle aurait pu imaginer une énième mère courage admirable dans sa ténacité à démasquer l'assassin de sa fille. Au lieu de cela, elle choisit un personnage peu aimable dans sa douleur, très hermétique, presque repoussant dans son laisser-aller, ce qui provoque un malaise très pertinent, qui interroge sur la définition de la « bonne » victime.

En fait, ce thriller est l'occasion de décortiquer les mécaniques nauséabondes qui peuvent être à l'oeuvre lorsqu'un drame éclate. On se doute que le coupable est parmi le voisinage. Progressivement, le doute s'instille subtilement, se pose sur chacun et on comprend que tous détiennent une part de vérité qu'ils se refusent à révéler plutôt que de mettre à jour leur erreurs, leurs hontes, leurs regrets, leurs failles. D'où l'excellente idée de faire intervenir un Corbeau pour secouer les lâchetés de tous, sur fond de rumeurs, soupçons et délations.

Les parts d'ombre de chacun, de notre société, les nôtres donc, sont ainsi mises à nu et c'est difficile de ne pas se sentir concerné lorsqu'on voit la mère être rejetée de la communauté parce que ça va bien maintenant, hein, il faut passer à autre chose et pas faire culpabiliser la terre entière. Lorsqu'éclatent les suspicions furieusement déplacés sur la jeune fille assassinée parce que, quand même, elle avait des moeurs légères, peut-être même qu'elle se prostituait, peut-être bien qu'elle l'aurait cherché. Ces réactions malsaines oppressent et font réfléchir sur le sens des pensées qui parfois nous échappent. Malgré nous.

Un thriller très efficace, impossible à lâcher avant d'avant découvert le coupable dans un dénouement aussi cruel sombre que les eaux noires de la Baie des Naufragés.
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Lorsque le corps de sa fille est rejeté par les eaux noires de la Baie des Naufragés, Joséfa n'a plus qu'une obsession du fond de sa détresse : que l'on identifie l'assassin. Mais l'enquête piétine, tandis que ragots et suspicions font rage, aiguillonnés par les insinuations venimeuses d'un mystérieux corbeau…


Ce modeste et minuscule quartier, situé à l'écart d'une petite station balnéaire du nord de la France, ne respirait déjà pas vraiment la joie de vivre en temps ordinaire. L'atmosphère y devient carrément poisseuse, lorsque ses quelques habitants se retrouvent l'objet de tous les soupçons. Si la plupart n'ont rien à se reprocher dans cette affaire de meurtre, aucun n'a très envie d'attirer l'attention sur ses petites habitudes et ses travers cachés sous les apparences de la respectabilité. Alors, tout ce petit monde s'observe avec méfiance, dans un climat propice aux pires rumeurs et calomnies. Celles-ci n'exacerbent que davantage une nervosité qu'un rien peut incendier, sans même parler des insidieux messages anonymes agissant comme de l'huile sur le feu.


Dans ce huis clos méphitique, évoluent des personnages aux multiples failles et zones d'ombre. Tous agissent, avec plutôt moins que plus de bonheur, en fonction d'intérêts et de sentiments mal contrôlés et mal assumés, dans un quotidien étriqué où les frustrations et les rancoeurs, mêlées de honte et de culpabilité, fermentent mesquinement dans la peur du qu'en dira-t-on et le souci de l'acceptation sociale.
Comble de l'hypocrisie quand son mutisme revient à couvrir un grand crime, cette petite société finit par se donner bonne conscience en se vengeant de ses propres lâchetés et compromissions par le lynchage de ceux qu'elle croit, sans preuve, coupables de petits vices. de même, elle en arrive à se dédouaner de ses responsabilités, en se prenant à douter des bonnes moeurs de la victime et de sa mère, dont le malheur porté avec colère et agressivité dérange. L'on n'aime guère se voir tendre un miroir de ses propres faiblesses, alors, faute d'un vrai coupable, l'on accuse les victimes de l'avoir finalement bien cherché, et l'on prend sa revanche avec d'autant plus de virulence, que l'on s'attaque, à bon compte et sans preuve, à quelque fautif commodément trouvé pour servir de dérivatif.


Bien plus que l'intrigue elle-même et son suspense somme toute modéré, c'est la manière dont l'auteur réussit à épaissir son ambiance fétide, à décortiquer le processus ravageur de la rumeur, et à faire fermenter les rancoeurs au sein d'un échantillon ordinaire et représentatif de notre société, qui impressionne le lecteur. Car, et c'est bien le plus terrible, tout y est d'une parfaite justesse psychologique et d'une totale crédibilité.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Yprat , Baie des naufragés . Quatre mots . Quatre mots qui sonnent comme autant de menaces , un lieu où ne subsistent que quelques maisons , un lieu qui n'en comptera bientôt plus qu'une ...La jeune Suzy est retrouvée morte , son corps rejeté par les eaux noires . Terrible deuil , terrible besoin de savoir pour une mère dont la détresse va muer peu à peu au point de détourner la vindicte populaire contre elle . Allez donc laver votre linge en famille lorsque les eaux mortelles sont noires ....
Ce roman c'est une incroyable descente au plus profond des àmes ,.Le lire , c'est accepter de se laisser immerger dans un cloaque nauséabond , de se trouver là, penaud , devant un tsunami de boue ...Ils y sont tous , les personnages , et on les croit , on les comprend , on les suit , on les épie , on les observe...Mais où va - t - on ?, ça , mystère. Et pourtant , l'addiction est bel et bien là ...L'autrice maîtrise son sujet , agite devant nos yeux , sorte de muletas rouges , des personnages qui ne laissent voir d'eux- mêmes, que ce qu'il faut en savoir , juste ce qu'il faut pour nous engluer , nous faire absorber des eaux noires jusqu'à plus soif , jusqu'à la lie . C'est un roman psychologique fort bien écrit, avec des dialogues de très bonne tenue , au rythme assez rapide pour ne jamais lasser , et assez lent pour mieux nous " alpaguer " et nous faire macérer dans la mélasse d'une société en lambeaux .
Je partage tout à fait les excellentes critiques et les très belles notes attribuées par les amis et amies babeliotes et je ne peux que joindre mon avis conquis aux leurs . Un très bon roman noir qui ne pourra que vous séduire.
J'aurais voulu être rapide , ne vous en dire que deux mots , mais j'ai été une fois de plus bien bavard , il est vrai que la qualité de ce roman mérite qu'on s'y attarde ...Allez , quatre mots , considérons que je vous en ai dit quatre mots ...Il paraît qu'en quatre mots , on peut changer le cours d'une vie ... Si , si , je l'ai lu quelque part, il y a ....Tiens " Yprat . Baie des naufrages ." Ça fait bien quatre mots , ça ? Et bien voilà, vous n'avez qu'à y aller et vous me direz ...ou pas . Allez , bon courage , ça va décoiffer....C'est gluant , ça oui , mais pas glauque , non pourtant , " ça pique " . Bon vent .
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Elle court, elle court la rumeur…

Quand les eaux noires de la Baie des Naufragés recrachent sa fille, c'est la vie entière de Josefa qui bascule. Plus rien ne sera jamais comme avant.

Désespérée, elle semble prête à tout pour découvrir la vérité, quitte à s'en prendre à la population locale et aux rares voisins ne lui ayant pas déjà tourné le dos. Elle se mue en une personne vindicative qu'il va être plus facile de détester que de plaindre.

À la faveur d'un terrible corbeau qui vient encore envenimer les choses, la haine et les rancoeurs remontent à la surface faisant fi des dommages collatéraux. Secrets honteux et vieilles histoires au remugle poisseux se font jour.

L'engrenage mortel ne fait que commencer. Tic-tac, tic-tac…



Quel bonheur années après années de découvrir les romans d'Estelle Tharreau !

Une écriture qui se densifie, un style toujours plus maitrisé, un indéniable sens de la noirceur et du suspens qui rendent son univers aussi particulier. Pas besoin d'effets grandiloquents ou d'une débauche de gore, l'intérêt est ailleurs. Dans un soin particulier à raconter des histoires, à installer des atmosphères troubles, tout en se renouvelant à chaque fois.

Laissez-vous emporter par le tourbillon des Eaux Noires, vous n'allez pas le regretter !

Lien : https://bouquins-de-poches-e..
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Je remercie Joël ainsi que la maison d'éditions Taurnada pour cette nouvelle lecture.

Je rattrape tout mon retard et vous allez encore avoir quelques chroniques pour cette maison d'éditions que j'adore, avec de très bons livres et d'autres un peu moins. Pour "Les eaux noires" c'est une sacrée claque que j'ai pris avec l'impossibilité de lâcher cette histoire qui fait plus vraie que nature. Ayant découvert cet auteur avec un autre titre de la même ME (la peine du bourreau) c'est avec une joie non dissimulée que j'ai continué et le pari est plus que réussi. Comment un si petit livre peu faire autant de dégâts ? Je parle du fait de toutes ces remises en questions que nous faisons et une fois la dernière page lue, on relativise énormément, mais surtout on se demande jusqu'où nous aurions pu aller si cela avait été notre enfant ? Dans ce thriller psychologique, l'auteur décrypte un écosystème qui peut-être n'importe où : peu de voisins, un sens unique, peu d'échanges, un semblant de huit-clos pour cette baie des naufragés qui porte que trop bien son nom. Yprat est devenu l'endroit à abattre, le lieu qu'il ne faut pas prononcer, celui-là même qui dérange. Dérangeant, c'est tout à fait le mot, la mère de Suzy, Susu pour les intimes dérange par le fait que sa fille est morte. Dérange parce qu'elle ne partage pas sa peine avec les autres, dérange parce qu'elle va tous les jours depuis des mois à la police pour connaître le moindre détail de cette enquête qui n'avance pas. Dérange par son aspect négligé alors qu'elle a autre chose à faire que se pouponner. C'est dérangeant d'avoir une personne proche de chez soi, un voisin, un ami qui est toujours triste, agressif, donne des claques à des journalistes peu scrupuleux qui veulent le beurre, l'argent du beurre, le pot et la crémière au passage. C'est dérangeant de travailler avec quelqu'un qui a vécu un drame et qui fait la tête h24...

C'est le récit d'une femme qui a déjà perdu son mari, veuve, elle se voit contraint de changer ses horaires de travail pour subvenir aux besoins de sa fille, de payer la maison, d'avoir quelque chose à soi de correct. On ne demande pas la lune, juste un toit sur la tête. Alors Jo prend les horaires de nuit pour gagner plus et laisse une clé de chez elle à un voisin, pour se rassurer elle et sa fille pour le cas où. le choix est vite fait, Jo ne peut pas rester de jour dans la station service, les moyens diminuent, la peur de perdre le peu qu'elles ont est bien présente. Ce choix qui lui fait mal, parce qu'elle n'est pas présente la nuit, aux cotés de sa fille qui devrait dormir. Une jeune fille de 17 ans qui part chez une amie pour le weekend, une jeune Susu qui ne reviendra pas le dimanche matin comme elle l'avait promis. Son corps est retrouvé plus tard... Un corps meurtri par les eaux noires de cette baie sauvage, insouciante, asociale aussi. le microcosme dans lequel les deux femmes vivent est malsain sans vraiment qu'il le soit. Les secrets des voisins ? Tout le monde en a, à plus ou moins grandes échelles, mais la vie privée des gens ne regardent qu'eux, pas vrai ? Sauf si cela pourrait mettre derrière les barreaux celui ou celle qui a tué cette pauvre fille. Quelques maisons, quelques hommes et femmes qui n'ont rien vu ce soir-là. Soit ils n'étaient pas présents, retour de vacances, rentrés chez eux, soit ils dormaient, à moins que... L'enquête n'est pas bâclée, mais pas de témoins, pas d'indices, pas de meurtrier ! Alors il faut chercher autrement, les rumeurs, les on-dits, les m'as-tu-vu pour se faire mousser et pourquoi la mère ne parle pas ? Pourquoi elle a viré tout le monde de l'enterrement de sa fille ? Pourquoi autant de secrets autour de sa vie ? Et un coupable idéal apparait, avec une liste longue comme le bras de cadavres, c'est lui ou pas ?

Les gens parlent à tort et à travers, menant les enquêteurs dans une impasse, celle de la baie des naufragés. Jo ne cesse de vouloir trouver qui a fait cela, quitte à tout perdre, qui à se perdre elle-même et faire de mauvais choix. Les jours, les mois, deux ans ont passé. Deux années que l'auteur nous décortique avec tout ce qui se passe dans la tête de chacun. Les aigris, les malmenés, les pervers, les curieux, 5 parties composent le récit avec sa vision des choses et c'est si proche de la vérité que cela fait mal. Entre celui qui a vu quelque chose, mais qui se tait, par peur ou tout simplement parce qu'il n'en a rien à faire, de toute façon elle est morte hein, à quoi bon remuer le sable ? Jo est DÉRANGEANTE (ça vous l'avez compris, pas vrai ?) avec son air maussade et sa façon de poser des questions à tout va, sans oublier les petits mots disséminés ça et là. Il suffit d'un rien pour mettre le feu aux poudres et les autres personnages vont bien s'en rendre compte. Qu'importe si Jo est malheureuse, elle est celle qui est montrée du doigt, celle par qui tous les maux de leur petite ville arrivent, celles qui a osé se taire en silence après la mort de sa fille, qui n'avait peut-être pas une vie si parfaite. C'est si facile d'écouter les ragots, de faire sa propre opinion, mais il faut comprendre qu'une histoire à deux côtés et s'il n'y en a qu'un seul qui est entendu, cela ne servira à rien, si ce n'est faire encore plus de mal. Et ce MAL est puissant. Les mots sont affreux, les gestes comptent, le désespoir est bien plus imposant, pouvant amener à faire des choix catégoriques. Celui qui se tait est forcément le coupable idéal, il doit cacher des choses malsaines, des événements qui sont liés. Et si tout était faux ?

Et si la morale de cette histoire était tout simplement que chacun s'occupe de ses fesses, parle quand il le faut sans pour autant dénigrer quelqu'un, comme cette pauvre Suzy qui est morte et cela serait bien fait ? Et si cela allait bien plus loin encore ? La peur fait paniquer les gens et ce récit démontre bien que les esprits restreints ont peur de ce qui n'est pas comme eux. La victime c'est Suzy, une jeune fille de 17 ans qui a cru au bonheur le temps d'un moment fugace. Un jardin secret que sa mère ne connaissait pas (d'où le terme de secret), des voisins qui ne sont pas si sereins et cette mère qui a tout perdu. Les habitants ne sont pas bienveillants, ils veulent de la joie, du rire et ne pas penser qu'une presque femme a perdu la vie dans ce recoin de leur ville qui n'a pas bonne fréquentation. L'oubli est facile lorsque cela ne nous touche pas personnellement, rayer de la carte un lieu, un visage, afin de continuer à vivre sournoisement dans nos propres réflexions. C'est une véritable descente aux enfers pour Jo qui fait le vide autour d'elle, qui n'avait déjà pas beaucoup d'amis véritable. Ces derniers s'accrochent, enfin surtout Cédric s'accroche, mais au bout du compte, comment faire pour tenir le coup ? Jo est un personnage qui n'est ni fort, ni faible, il est vrai, avec ses faiblesses, son envie de savoir, cette vérité qui ne ressort pas et ce meurtrier qui vit depuis deux ans tranquillement. Les mois l'ont affaiblis, mais elle reste toujours la même. Lorsqu'un nouveau "chef de la police" débarque un semblant d'espoir renait. Si ce n'est que ce Thomas Casano est froid, impersonnel et s'en fou de ce que les autres pensent. C'est un point de départ intéressant, un homme qui ne va pas hésiter à fouiner, à poser des questions, à surveiller, faire semblant. Acteur ? Il aurait pu et sa façon de travailler est une sacré épine dans le pied de ses sous-fifres. Pour autant cela ne se fera pas en un claquement de doigts.

Pus de deux ans pour avoir le fin mot de l'histoire, plus de 24 mois pour cette femme qui a vécu l'enfer sur terre sans avoir le droit de pleurer autant de temps qu'elle le voulait la perte de sa fille. Et vous savez quoi ? L'auteur m'a tellement embrouillé l'esprit avec tous les petits secrets de ses voisins, les flics qui n'en ont plus grand chose à faire, les habitants de la ville qui la montre du doigt que je n'avais pas le bon en tête. (En réalité, j'hésitais lourdement entre l'assassin de Suzy et un autre personnage) Et ce corbeau qui n'a pas le plumage désiré qui lance des mots par email je vous prie ! Des mots, des maux, les pages en regorgent et ne cessent de nous enfoncer un peu plus dans la vase. C'est une enquête qui ne laisse pas indemne, des mois d'incertitudes, de doutes, de matraquage sur la vie supposée de sa fille. Un combat qui ne sera pas à la loyale, une population locale qui ne veut pas de malheur à ses côtés. Jo est devenue la femme à abattre et non la mère de la victime.

En conclusion, un thriller psychologique où les secrets les plus honteux seront dévoilés. La mort d'une jeune fille n'émeut plus personne, les vieilles histoires remontent à la surface tels des corps échoués après un naufrage. Nul n'est à l'abri et les dommages collatéraux vont élaguer le terrain. Un récit où celle qui aurait dû être soutenue par ce drame se retrouve lapidée devant des hommes et des femmes qui ne comprennent pas pourquoi la perte d'un enfant est si douloureux. Ce qui est malsain ce n'est pas la façon dont réagit Jo, c'est la manière dont elle est traitée et les propos tenues par des gens qui ne savent pas ce qui se passe derrière une porte fermée. L'auteur a su m'emmener dans cette enquête intense et diabolique montrant un aspect de la société qui fait froid dans le dos !

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– Bien, alors tu demandes aux collègues de renforcer les patrouilles dans la Baie et d’ouvrir l’œil cette nuit. Tu m’avertis immédiatement si vous constatez un truc. N’importe quoi, tu m’appelles ! O.K. ?
– Ça marche.
– Toi, Jo, tu appelles ton boulot pour leur dire que tu risques d’être un peu à la bourre. On passe au poste de police avant que tu partes. Je les connais bien, les

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Le lotissement dans lequel vivait Alexandre Céroque et son épouse Natasha se réduisait à un alignement de maisons identiques, mitoyennes par le garage avec un carré de jardin côté cour. Un vrai labyrinthe de ruelles et d’impasses dans lequel tout le monde se perdait la première fois. Un conglomérat uniforme et ennuyeux qui prenait les allures d’un rêve inaccessible pour Jo.

Elle ne salivait pas devant les demeures de maître d’Yprat, mais elle s’autorisait à rêver à ces habitations proprettes et sans grâce tout en sachant qu’elle ne pouvait pas s’offrir le loyer et encore moins l’acquisition.

Ils se garèrent et à peine eurent-ils ouvert leur portière qu’Alex se précipita vers eux, sous les nuages d’acier. La pluie recommença à tomber.

« Entrez vite ! Le café est prêt. »

Natasha les observait sur le seuil. Elle jeta un regard noir à Cédric, ne salua personne et s’éclipsa. Alex leva les yeux au ciel et tenta d’excuser son attitude en de telles circonstances.

« C’est toujours à cause de…

– Te fatigue pas, mon grand ! lança Cédric en lui tapant sur l’épaule. On ne la refera pas.

– Allez, entrez. Alors, c’est quoi cette histoire ? Suzy s’est barrée ?

– Pas exactement. Elle a menti à Jo. Elle ne répond pas au téléphone et elle n’est pas encore rentrée. Alors, sa mère la cherche partout. Comme t’étais de service vendredi et samedi, je voulais savoir si tu avais vu Suzy ou un truc bizarre. Enfin, tu vois.

– Ben, écoute, pas grand-chose. Même rien du tout, pour tout te dire. C’était le calme plat. D’ailleurs, on s’est bien fait chier ce week-end ! Le seul truc que j’ai consigné dans le registre, c’est le passage chez toi. Désolé, Jo. »

La mère de Suzy n’avait pas ouvert la bouche depuis que Cédric avait pris les choses en main. Elle adressa un piteux signe de remerciement à Alex, « le beau gosse » comme l’appelaient les vieux et les jeunes, les hommes et les femmes.

Embarrassé par ce surnom à ses débuts, il en plaisantait volontiers désormais. Cependant, il avait conscience et abusait de l’attrait qu’occasionnaient son mètre quatre-vingt-huit, sa carrure de handballeur et ses boucles auburn qui faisaient ressortir ses yeux vert clair. Natasha, sa femme, le savait également, ce qui avait entraîné son exil temporaire chez Cédric quelques années auparavant, le jour où elle avait surpris des mots que son mari n’aurait dû prononcer qu’à elle seule, et non au téléphone, planqué à l’arrière du garage.

« O.K., fit Cédric après un instant de réflexion que Jo et Alex avaient respecté dans une attente silencieuse. Alex, tu prends ton poste dans combien de temps ?

– J’allais y aller.

– Bien, alors tu demandes aux collègues de renforcer les patrouilles dans la Baie et d’ouvrir l’œil cette nuit. Tu m’avertis immédiatement si vous constatez un truc. N’importe quoi, tu m’appelles ! O.K. ?
– Ça marche.
– Toi, Jo, tu appelles ton boulot pour leur dire que tu risques d’être un peu à la bourre. On passe au poste de police avant que tu partes. Je les connais bien, les collègues du commissariat. Je vais leur glisser un mot, comme ça eux aussi, ils vont ouvrir l’œil. S’il y a du nouveau, je vous appelle tous les deux. C’est bon pour tout le monde ? »
Jo et Alex acquiescèrent.
Tant d’efforts et de sollicitude pour maintenir Jo dans l’illusion que tout cela n’était pas grave. Tant de minutes passées à croire que la vie reprendrait sa routine rassurante.
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Jo en tira deux enseignements douloureux : lorsque les gens ne connaissent pas la vérité, ils préfèrent en inventer une en parfait accord avec leurs pulsions malsaines, et que ses congénères ont besoin de prendre part et parti.
Ainsi, tout le monde se lamentait sur le meurtre de la pauvre Coline, tandis que celui de son propre enfant devenait insidieusement la juste conséquence de la vie scabreuse menée par une mère et un fille répugnantes et infréquentables.
Cette conclusion, Jo l'entendait quotidiennement à la station-sortie 8 que les touristes prenaient d'assaut avec les beaux jours. Il suffisait que les photos de Coline et Suzy apparaissent pour que fusent les commentaires.
"Trois cafés et un chocolat ! Pauvre gamine quand tu penses qu'elle s'est peut-être fait tuer comme l'autre alors qu'elle, elle n'avait rien demandé..."
Et Jo devait leur servir trois cafés et un chocolat.
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La précarité, c’était cela aussi : ne pas avoir les moyens financiers de s’enfuir et de recommencer une nouvelle vie, ailleurs, loin de ses démons et de ses bourreaux.
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Elle alluma. Comme elle, tout était propre, inerte et usé. La propreté était la pierre angulaire de sa dignité. Ce qu’elle devait préserver pour faire oublier le reste. Joséfa ne vivait pas dans la pauvreté. Elle se tenait juste au bord de ce précipice, dans cet équilibre incertain qu’on appelle pudiquement la précarité. Tout comme elle, sa maison en était remplie : une femme et des objets vieux jamais renouvelés, jamais ménagés, toujours sous pression, utilisés jusqu’à la corde, rafistolés avec les moyens du bord sans avoir l’assurance de tenir jusqu’au bout. Un être et des choses du passé, incrustés dans le présent et au futur impossible.
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Jo en tira deux enseignements douloureux : lorsque les gens ne connaissent pas la vérité, ils préfèrent en inventer une en parfait accord avec leurs pulsions malsaines, et que ses congénères ont besoin de prendre part et parti.
Ainsi tout le monde se lamentait sur le meurtre de la pauvre Coline, tandis que celui de son propre enfant devenait insidieusement la juste conséquence de la vie scabreuse menée par une mère et une fille répugnantes et infréquentables.
Cette conclusion, Jo l'entendait quotidiennement à la station-service 8 que les touristes prenaient d'assaut avec les beaux jours. Il suffisait que les photos de Coline et Suzy apparaissent pour que fusent les commentaires.
— trois cafés et un chocolat ! Pauvre gamine quand tu penses qu'elle s'est peut-être fait tuer comme l'autre alors qu'elle avait rien demandé...
Et Jo devait leur demander douze euros quarante.
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« Au Canada, une autochtone a dix fois plus de risque de se faire assassiner qu'une autre femme. »
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