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EAN : 9782246165422
270 pages
Grasset (10/03/1993)
3.65/5   110 notes
Résumé :
Agaguk, fils du chef inuit Ramook, veut quitter sa tribu et aller vivre seul sur la toundra avec Iriook qu'il a choisie comme épouse. Le couple réalise son projet mais ne peut pas couper complètement les liens avec le monde extérieur. C'est ainsi qu'Agaguk doit revenir vers son village pour troquer des peaux, trophées de ses chasses, contre des objets de première nécessité en ce pays au climat impitoyable : fusils, balles, kérosène, sel pour conserver la viande. Il ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Classique de la littérature québécoise récente, ce livre demeure pour moi assez énigmatique. Ce qu'en dit Thériault, cité sur la quatrième de couverture, semble la meilleure description que l'on puisse en faire : « Je n'ai pas voulu écrire autre chose qu'un roman du Grand Nord en écrivant Agaguk. Ceux qui ont voulu y voir un réquisitoire ou une apologie de la vie arctique se trompent tous. ».
En effet, quelques jours après avoir lu ce livre, au moment d'écrire cette note de lecture, je ne peux toujours décider quel est le message de l'auteur. L'écriture est en effet relativement objective, elle se contente de dérouler les faits, sans aucune analyse ni prise de position. Si les réactions des protagonistes peuvent sembler étranges considérées depuis notre référentiel occidental, elles ne sont jamais commentées ni jugées, que ce soit pour en faire l'apologie ou les dénigrer. Relativisme culturel avant l'heure ? Surtout lorsqu'il est question de battre sa femme ou de décider si une fille nouveau-née doit vivre ou mourir ? Je ne crois pas non plus. Il me semble plus que ce livre se veut un témoignage, une relation de ce qu'est cette culture aux lisières du cercle polaire arctique, de ce qu'elle a été et qu'elle est en passe de ne plus être.

Ce livre se passe dans les années quarante ou cinquante, alors que déjà les changements se font sentir au contact d'une culture occidentale qui se fait plus présente. Agaguk, le héros éponyme, n'est déjà plus l'esquimau qu'étaient ses aïeux, lui qui veut vivre en solitaire, loin de sa tribu, gagné par cet individualisme qui est la marque des blancs. Pourtant, pour vivre ainsi seul, il faudra qu'il use d'une connaissance de la nature et des animaux élaborée par des générations et des générations avant lui. C'est ce début de mutation qu'Yves Thériault raconte, dans un style sobre et sans parti-pris.
Ce fut une belle lecture, à la fois instructive et plaisante, malgré la violence de certaines scènes. Une écriture au plus près des personnages, dont la seule poésie est celle de la simplicité et des besoins essentiels comblés chaque jour. Agaguk est accompagné d'Iriook, sa compagne, un personnage féminin au fort tempérament, elle aussi premier chaînon de cette mutation en train de se dessiner, et ce couple devient le trait d'union entre le lecteur lisant au chaud sous ses couettes et ce peuple esquimau dont il ne sait probablement pas grand-chose et qui pourtant vit la même vie que lui, une vie où il faut se nourrir et s'abriter, une vie qui transmet la vie, une vie fière, une vie qui fait face à l'adversité. Une vie qui peut à peu s'éveille à ce qui la transcende et lui donne un sens.
C'est peut-être cela qu'Yves Thériault a voulu écrire, un message d'universalité, de fraternité qui fait fi des différences culturelles qui pourraient apparaître comme insurmontables. Mais aussi l'espoir que chacun peut choisir son destin, chacun en tant qu'individu et chacun comme représentant d'une société, d'une culture qui n'est pas figée mais qui doit continuer d'évoluer, de s'adapter.
Au moment où j'écris cette note, je me prends à penser à deux grands hommes que j'ai entendu citer récemment. L'un est Paul-Emile Victor qui s'émerveille de la capacité des esquimaux à avoir su répondre aux exigences de la vie dans un environnement aux ressources si limitées : de l'eau (ou de la glace), parfois un peu de bois, des rênes ou des phoques, des poissons. Et ils peuvent combiner ces éléments de tant de façons différentes qu'ils peuvent se vêtir, s'abriter et se nourrir. C'est exactement cela que décrit Thériault, ces combinaisons sans nombre qui permettent qu'une génération remplace la suivante, toujours. L'autre est Claude Lévi-Strauss qui, dans une conférence sur « Race et Histoire » dans les années cinquante, estime que les cultures ne peuvent rester repliées sur elles-mêmes, elles se doivent d'échanger, mais doivent aussi se montrer réticentes dans cet échange, au risque de perdre leur spécificité et de ne plus rien avoir à échanger. Il me semble que c'est aussi ce qu'illustre Thériault, une culture qui change, mais qui demeure irréductiblement elle-même.
Un livre qui mérite d'être découvert bien au-delà du cercle polaire ou des frontières du Québec. Un livre qui mérite d'être le classique qu'il est, et dont je lirai avec plaisir les deux suites, l'histoire de Tayaout fils d'Agaguk et celle de Agoak fils du fils d'Agaguk, l'homme qui est maintenant chanté dans les veillées, comme il le rêvait, même s'il ne pouvait s'imaginer que ce serait dans les veillées des blancs dans des maisons en pierre et dans les pages d'un livre qu'on le chanterait.
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Lire la littérature québécoise pour un anglophone, c'est un calvaire. Malgré toute sa bonne volonté, un Canadien-anglais n'est pas capable de s'intéresser aux obsessions habituelles des écrivains québécois; c'est-à-dire, la langue et la nation. Comme résultat, on enseigne « Agaguk » qui ne parle pas de ces questions aux universités anglophones du Canada.
La thématique d' « Agaguk » est plutôt canadienne-anglaise. Il parle de la confrontation culturelle entre les peuples autochtones. L'intrigue se déroule pendant les années cinquante dans le grand nord québécois. À cette époque les francophones étaient complètement absents de la région qui étaient peuplée des Inuits (esquimaux) et des blancs anglophones (les membres de la gendarmerie royale).
Publié en 1958 sept ans après le très célèbre « People of the Deer » (1951) de Farley Mowat, « Agaguk » commence sur le même ton. À première vue, Agaguk, le protagoniste est un bon sauvage Rousseauiste qui vit dans la solitude et qui suit le code d'honneur ancestrale de son milieu. En fait, Agaguk vit dans la misère. Son existence nomade et la chasse ne lui permettent pas de subvenir à ses besoins. Nourrir sa famille est carrément hors de sa portée.
Thériault partage les idées de Mowat sur les conditions de vie des Esquimaux mais il voit leur culture autrement. Contrairement à Mowat, Thériault voit leurs valeurs d'un très mauvais oeil.
Agaguk est sauvage dans le sens que Rousseau donne au mot mais loin d'être bon. Il tue volontiers un trafiquant d'alcool qui lui avait volé ses fourrures sans sentir le moindre remords. Au foyer, Agaguk est un vrai monstre. Il bat sa femme régulièrement parce qu'il croit que c'est son devoir. Il ne permet pas à sa femme de s'exprime sur quoi que ça soit et il prend toutes les décisions du ménage tout seul.
Le hic est que la femme d'Agaguk est beaucoup plus intelligent que lui. Surtout, elle comprend mieux comment se compter avec les blancs afin de s'en tirer à bon compte. Grace aux stratèges de sa femme, Agaguk s'échappe à la justice de état Canadien et le couple poursuit leur vie dans la Toundra.
« Agaguk » est un roman très provocateur. Son portrait de la culture inuite est peu flatteur. La thèse de l'auteur que les hommes qui battent leurs femmes sont capables de se racheter ne plaira probablement pas à bien des feministes. Néanmoins, il y a beacoup de vrai dans « Agaguk ». Il mérite toujours d'être lu non seulement par des étudiants anglophones mais par le grand public canadien.
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Il m'a fallu bien des années d'hésitation avant de lire ce classique de la littérature québécoise récente, il m'a fallu aussi l'insistance d'un ami qui ne tarissait pas d'éloges à propos de ce roman même si il l'avait lu il y a plus de cinquante ans. C'est donc d'un pas hésitant que je me suis avancé dans cette aventure mais au bout de quelques pages à peine mon hésitation s'est évanouie et c'est de plein pied que je me suis enfoncé dans la lecture de ce roman.

Alors que la vie des Inuits me semblait monotone et que leur habitat me semblait rébarbatif, l'auteur par sa belle plume m'a fait découvrir un univers insoupçonné plein de vie et ayant sa propre beauté C'est incroyable qu'habitant le même pays je sois si ignorant de la culture et du mode de vie de ces peuples qu'on nomme maintenant premières nations à juste titre. Il m'a fallu lire un livre écrit il y a 65 ans pour mieux connaître les Inuits , du moins ceux de cette époque.

J'ai beaucoup aimé ce roman dont l'auteur dit n'avoir eu d'autre intention ou prétention que d'écrire une histoire sur le grand-nord. Pari réussi l'histoire est captivante, bien écrite dépeignant bien la nature sauvage et grandiose de la toundra canadienne et les moeurs de ses habitants. Il y a des moments poignants, des descriptions de chasse splendides le tout servant de décor à l'histoire d'une communauté où il se passe des événements très humains pas plus ni moins brillants que dans nos sociétés le tout pimenté d'une petite intrigue policière. D'ailleurs je verrais bien Yves Thériault écrire un polar. J'ai donc passé un bon moment de lecture et j'essaierai de mettre la main sur la suite de cette histoire.
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Un livre absolument magnifique, hors du commun, si vous êtes intéressé par la culture inuit et par l'appel du nord ; sinon, passez votre chemin littéraire, il n'aura que peu d'intérêt pour vous. Tout y est, tout ce que j'ai pu ressentir en Terre de Baffin, au Groënland et au Spitzberg. le drame humain originel rapporté à quelques individus au milieu du désert ...
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Agaguk est inuit. Voulant échapper au contrôle de son père, il part dans la toundra avec sa femme Iriook. Ils vivront plusieurs années à l'écart des leurs, dans l'angoisse des Blancs. Pour se défendre, Agaguk tue Brown, un trafiquant d'alcool. Entre peur et quotidien, Agaguk se bat aussi contre lui-même.

Peu de choses à dire. Je n'ai pas été touchée par le personnage. La description des paysages est intéressante mais elle suscite peu d'émotions.
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critiques presse (1)
LaPresse
19 août 2013
Le choc des cultures est bien sûr au coeur d'Agaguk, qui a été analysé depuis sa publication sous tous les angles. Mais quelle que soit la lecture qu'on en fait, Agaguk reste une oeuvre passionnante au récit brillamment ficelé qui se lit d'une traite et qui, dans sa forme peut-être plus que dans son propos, n'a pas pris une ride.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
Or, il n'y avait qu'un seul animal capable de créer ce tableau. Le Grand Loup Blanc? Le seul qui pouvait faire tache pâle sur l'ombre.

Agaguk, rivé au sol, complètement immobile, mais le fusil bien en joue, attendit que l'animal vint encore plus près. Bientôt l'odeur en fut si forte qu'il en ressentit de la nausée. Et ce n'était plus une tache, mais la forme bien identifiée d'un loup rampant sur le ventre. Lui aussi à l'affût de sa proie, cherchant à retrouver la silhouette d'Agaguk maintenant écrasée sur le sol, comme fondue dans la nuit.

L'homme en face de la bête, deux ruses s'affrontant.

Si le loup venait assez proche, Agaguk lâcherait le coup, la balle tuerait l'animal.

Et s'il le manquait?

Une hélée de distance. Puis la distance d'un lancer, et finalement cent pas, cinquante... Le loup était presque à portée de la main. Seulement, il se dirigeait droit sur Agaguk, une cible étroite, difficile à déterminer dans le noir.

Agaguk colla l'œil sur la mire, la bête bien en joue contre le soleil de minuit à l'horizon.

Dix pas. C'était alors le temps ou jamais. Tout dépendait d'un geste, la pression rapide sur la gâchette, le coup, la balle... L'instant d'une seconde, et moins encore. Un destin fixé. La mort du loup? La mort de l'homme?

Agaguk pressa la détente.

La balle fut un ouragan qui jaillit du canon. Mais elle ne tua pas le loup. Elle ne fit que l'égratigner au passage. Il roula par terre et se retrouva dix pas plus loin. Il fut aussitôt sur ses pattes.

Agaguk était debout aussi, son couteau au poing.

Le loup bondit.

Une masse fantomatique, sorte de bolide lancé des airs, s'abattait sur Agaguk. L'homme et la bête basculaient dans le noir. La gueule du loup s'ouvrait, baveuse de rage, et mordait avec un grondement diabolique l'être qui se débattait furieusement entre ses pattes.

C'était entre les deux une lutte horrible, une gymnastique macabre. À chaque gueulée de la bête, le cri de l'homme s'enflait en vrille et crevait la nuit. Le loup en furie l'agrippait, le labourant à grands coups de griffes, puis l'homme saisissant la seconde propice - celle où l'animal s'arc-boutait pour foncer à nouveau - repliait son bras pour plonger le couteau dans le cuir de la bête. Alors celle-ci s'esquivait, mais pour bondir de nouveau sur l'homme qui se raidissait contre la torture.

De grands lambeaux de chair pendaient entre les dents de l'animal.

Un combat terrible, mêlé de cris et de rugissements où, tour à tour, l'homme et la bête, égaux en puissance ou en fureur, dominaient. Soudain la lame du couteau brilla. Le poing partit comme une flèche, s'abattit. Une fois, une autre et une autre fois encore.

Agaguk avait, dans la bouche, un goût sucré de sang qui lui redonnait des nerfs et de la poigne. Maintenant, à cheval sur le loup qui se démenait en hurlant, il frappait à tour de bras, toute vigueur retrouvée, toute douleur assoupie.

Puis il se releva, passa le bras sur sa figure ensanglantée et mesura en lui les forces restantes.

Le loup blanc, éventré, gisait à ses pieds.

Agaguk défit la corde qui lui servait de ceinture, en noua une extrémité autour des pattes d'arrière du loup, s'attela au fardeau et le traîna sur la toundra.
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Courbés comme des portefaix, ils n'avançaient que très lentement, s'arrêtant souvent pour reprendre souffle. Il n'était pas un muscle en eux, pas d'énergie qui ne criât grâce. Même Agaguk, dans sa jeunesse et sa force de mâle, s'épuisait vite. Alors ils s'arrêtaient et, sans se défaire de leur charge, demeuraient plusieurs minutes immobiles, enracinés dans la mousse, face au vent, pour calmer la respiration sifflante, pour ralentir les battements du coeur. Ils suaient, car le soleil était chaud, et ils avaient soif. Mais l'eau dans les outres commençait à se faire rare.

Nous aurions pu aller en ligne droite, dit Iriook au bout de quelques jours. Nous aurions pu passer par le village. La voix d'Agaguk retrouva soudain ses accents brusques.

Non! Nous n'irons pas au village. Il n'en ajouta pas plus et son entêtement farouche agaça Iriook. Mais elle ne dit rien et ils reprirent leur marche.
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Restait Iriook .
Elle aussi était libre , car son père et sa mère étaient maintenant morts. Elle habitait seule dans la hutte autour de laquelle Ayallik et d'autres venaient rôder. Un mois auparavant, Agaguk n'avait eu que le temps de s'élancer vers
la fille qui criait , de l'arracher des bras de Chorok.
----Elle est à moi ! avait déclaré Agaguk. Qu'on la laisse en paix !
Une fois Gorok sorti de la hutte, elle avait levé le regard vers Agaguk. Un regard ému, plus soumis encore qu'il ne l'aurait cru.
-----Je ne savais pas que j'était à toi , avait-elle dit.
------Tu l'es.
Elle sourit mystérieusement .
------Cela me plaît.
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Il eût voulu s’asseoir à ses côtés, savoir faire quelque geste tendre, mais il n’avait jamais appris ces choses, et d’en sentir tout à coup l’impérieuse nécessité le mettait mal à l’aise. Il trouvait des mots, pas ceux qu’il eût voulu dire, mais d’autres, bien simples, ne signifiant rien. Il mettait pour les dire un ton nouveau, presque caressant.
– Tu veux du thé ?
(p. 93, Chapitre 13, “Isuk - La fin”).
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C'est à mi-chemin entre le villages des huttes et le pays nommé Labrador qu'Agaguk trouva l'endroit dont il avait rêvé; le monticule mesuré et marqué, sorte d'îlot plus ferme , à peine un mouvement de terrain dans cette toundra de mousse spongieuse et brunâtre, couche vivante dissimulant le permafrost millénaire .
Et c'est sur ce tertre qu'il amènerait Iriook afin de vivre avec elle son destin.
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