J'ai voulu découvrir ce roman qui se trouvait dans mes suggestions, après avoir lu la BD de Korrig'Anne L'Or du Soir Qui Tombe.
Dans la même lignée, ce roman autobiographique traite du deuil périnatal, sous une autre forme.
Ici, il ne s'agit pas de la mort in utero d'un bébé, ni même à la naissance, mais d'une petite fille, Emma, née trop tôt. Beaucoup trop tôt.
Lorsque j'ai tourné les premières pages, je m'étais préparée à ce que ma lecture soit difficile. Même si l'on n'est pas touché(e) personnellement par le sujet, les mots d'
Alain Thiesse font écho au creux de l'être humain que nous sommes. Et quels mots !
Le deuil périnatal est un thème ô combien douloureux et il est rare que des pères viennent s'exprimer sur la perte de leur enfant. Avec émotion et dignité, l'auteur passe en revue les années de vie de son enfant, de sa naissance à son décès, à l'âge de six ans.
Ce roman pose de nombreuses questions. Finalement, ce n'est pas tant la mort d'Emma sur laquelle s'attarde son père, mais bien ce qu'il s'est passé avant. Pourquoi un jeune pédiatre, qui était pourtant au courant que les parents ne souhaitaient pas qu'on réanime leur enfant, est-il passé outre ? Pourquoi s'acharner à ramener à la vie une petite fille condamnée à une existence de handicap lourd ?
Il ne s'agit pas ici, de traiter du droit à la vie, mais de s'asseoir et de lire, avec toute l'empathie dont nous sommes capables, le ressenti de cet homme, de ce père endeuillé. Ce père dont le souhait n'a pas été entendu, qui a dû voir sa fille être réanimée, encore et encore. À quel moment peut-on parler d'acharnement thérapeutique, à quel moment peut-on déterminer qu'il y a eu maltraitance envers un nourrisson de quelques semaines seulement ?
Qu'on soit parent ou non, qu'on projette d'avoir des enfants ou pas, la réponse reste la même. Dans des situations comme celle-ci, nous voudrions être écoutés. Et c'est pour cela que ce roman d'
Alain Thiesse est si essentiel, afin que sa parole résonne au-delà de cet hôpital sourd et aveugle. Une lecture à broyer le coeur.