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sur 1170 notes
Les héros des romans de Jim Thompson n'en sont pas. Ils en ont parfois l'ambition mais ils présentent trop de carences en scrupules pour endosser l'armure du chevalier blanc. Ses personnages ont plutôt la cuirasse rouillée, la lance syphilitique et pointent au registre des désaxés irrécupérables. Même recyclés, ils ne vaudraient pas grand-chose en compost. le sheriff Nick Corey fait partie des légendes littéraires de cette corporation peu glorieuse.
Pottsville, est un bled paumé où vivote 1280 habitants. L'ordre est censé être assuré par ce sheriff à la mauvaise étoile, Nick Corey, carpette cocufiée par sa femme sous son toit, mis en boîte par les maquereaux du coin et toujours prompt à détourner ses pas au moindre danger. Comme la meilleure façon de ne pas voir la vérité en face, c'est de garder les yeux fermés, Corey fait des siestes qui ressemblent à des hibernations.
Sa prison prend la poussière, le crime se la coule douce et Corey consacre ses quelques volts à deux activités : dormir et fricoter avec les beautés locales. C'est le lapin de Duracell mais il ne peut pas être partout. Sa devise : ne pas se mêler des affaires des autres pour que leurs affaires ne deviennent pas les siennes. On ne mélange pas son linge sale. Trop fatiguant. Sa formule, plus politique que magique et répétée à l'envie: " Je ne dirais pas que vous avez tort, mais je ne ne suis pas sûr non plus que vous ayez raison." Un vrai centriste.
Méprisé par tout le village, sa réélection à son poste de sheriff n'est pas gagnée, même en accusant son adversaire de vouloir truquer le scrutin, et Nick Corey se met alors à éliminer tous ceux qui l'ont humilié ou qui contrarient ses projets. Cela fait du monde dans le viseur mais la vengeance est un produit dopant qui vaut l'injection d'EPO à l'insu de son plein gré. le lâche devient fourbe et fait en sorte que d'autres soient accusés de ses crimes, pratique facilitée lorsqu'on est le seul représentant du désordre dans un patelin. Immunité diplomatique du trou perdu.
N'étant jamais mieux servi que par soi-même, Nick Corey s'octroie aussi la narration du roman sans états d'âme, heureux de jouer le rôle de Dieu. Ode au narcissisme et dialogues qui ressemblent à des saillies d'Oscar Wilde...en moins poli.
La description du bonhomme n'est pas très sympathique mais je vous assure que ce roman, le chef d'oeuvre de son auteur, par ailleurs scénariste pour Kubrick, groom d'hôtel, employé dans une morgue, foreur de puits de pétrole, caddie dans un club de golf, buveur et tuberculeux à ses heures, mérite un petit détour par Pottsville.
D'ailleurs, Bertrand Tavernier en a tiré le scénario de son « Coup de Torchon », détournant l'action dans l'Afrique coloniale avec Philippe Noiret, Isabelle Huppert et Stéphane Audran.
Dans son indispensable dico des littératures policières, saint Mesplède auréole ce roman aussi amoral que férocement drôle.
Jim Thompson, qui n'avait rien d'un ange, mourut dans l'indifférence des sans grade dégradés et sa reconnaissance fut posthume. Il a trouvé sa place au panthéon des soiffards, broyeurs de romans noirs.
De la mauvaise graine réjouissante en ces temps aseptisés à la morale.
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HI-LA-RANT ! Durant ma lecture, je n'ai pas arrêté de pouffer de rire, de m'esclaffer au risque d'en perdre mon souffle. Pourtant, à l'analyse froide, il n'y a vraiment pas de quoi rire ! On termine quand même la lecture avec 6 morts. Dont 4 tués à bout portant.

Dès le départ, nous faisons connaissance avec Nick Corey, personnage principal du livre et shérif de Pottsville, village de 1 275 ploucs, heu, pardon, de 1275 âmes. Entre nous, le titre original est "Pop. 1280" et je me demande bien où sont passés les 5 âmes disparues. Cinq personnes perdues dans une traduction, ça fait désordre, non ? (Jean-Bernard Pouy répond à la question dans "1280 âmes").

Au premier abord, le shérif Nick Corey m'a fait penser à un mec qui est en attente pour une greffe du cerveau. Oui, une sorte de shérif débile, pas très malin, et je me gaussais de sa stupidité, pensant que cet Averell Dalton était issu du croisement entre Nabilla et François Pignon, bref, un champion du monde en puissance pour un dîner de cons mémorable.

Je ne vous parle même pas du langage de Nick et des autre protagonistes, parce qu'entre les "exaque" , les "p'tet" ou les "j'dis pas que", sans compter les gros mots, Pivot en avalerait son dico.

J'ai vite retourné ma veste et changé mon fusil d'épaule. Nick Corey est en fait le fils caché de Napoléon et Machiavel. le stratège brillant accouplé au machiavélisme puissance 10.

Naaan, sérieux, si l'auteur ne maniait pas la plume de manière si brillante, en la trempant dans l'humour (noir), l'histoire nous ferait frémir et hurler parce qu'elle n'est jamais qu'une vision fort sombre de l'espèce humaine. En principe, j'aurais dû être scandalisée de ce que je lisais.

Tout le roman n'est qu'un long regard horrifié et désabusé sur les Blancs habitant dans les campagnes du sud des états-unis en 1920 et le jugement est sans appel : ils ont l'esprit plus étroits que le cul d'une donzelle vierge qui se ferait prendre par un troll des montagnes. Plus étroits que ça, tu meurs.

Personne n'est à sauver : que ce soit des personnages secondaires qui ont tous un truc à se reprocher à Nick Corey qui un mec plus que paresseux, fourbe, plus malhonnête que les banquiers américains, plus menteur qu'un politicien en campagne électorale, assez violent tout de même, dépourvu de remords, infidèle, manipulateur avec tout le monde, il n'aime que lui et pour ajouter une cerise sur ce portrait peu flatteur, il est cynique. Un brin sadique et lubrique aussi.

On devrait le haïr et on l'apprécie tout de même. Malgré tout ce qu'il commet comme exactions, on ne peut s'empêcher de rire et de battre des mains en criant "encore" ! On ne devrait pas...

Le passage où Nick s'occupe d'Oncle John, un Nègre (pas péjoratif, j'utilise le terme de l'époque qui veut tout dire sur la manière dont ces gens étaient considérés et traités : même pas humain) est terrible. Je n'avais pas moufté pour les trois premiers, mais là... mon coeur s'est serré. Pas longtemps, Nick m'a de nouveau fait rire.

Malgré l'horreur, on continue sa lecture parce que l'on veut connaître la suite des tribulations de Nick Corey, de ce qu'il va pouvoir inventer pour sauver sa réélection, sur comment il va enfin se débarrasser de sa harpie de femme et de son beau-frère Lennie (un débile profond, frère de sa femme, débile comme le Lennie de Steinbeck, la charisme en moins), comment il va arriver à se séparer de sa première maîtresse pour retrouver sa deuxième maîtresse... Ou jongler avec les deux...

On se croirait dans un Vaudeville, les portes qui claquent en moins, tellement la situation devient serrée à un moment donné. le suspense est à son comble parce que aussitôt un problème de résolu qu'un autre arrive ou se crée.

Chaque page est un florilège de scepticisme, de pessimisme, d'érotisme, de cynisme, remplie de vulgarités, de sadisme, enrobée de blasphèmes et de sacrilèges, roulée dans le roublardise et trempée dans l'hypocrisie.

Le pouvoir rend fou, quand le gens ne savent pas, ils inventent et un gentil peur cacher un salaud, entre autre. Voilà ce qu'on peut retirer, entre autre, lorsqu'on trait le roman.

Attention, du livre coule assez bien de sang, la plaisanterie étant noyée dedans.

L'épilogue m'a laissé la bouche ouverte, se fermant et s'ouvrant à la manière d'un poisson rouge échoué sur la table de la cuisine. My god, Napoléon a dû être fier de la stratégie de Nick et Machiavel a dû avoir du plaisir au fond de sa tombe en apprenant comment le Nick manipulait bien. le Nick, il a niqué tout le monde !

Bref, un portrait au vitriol de la société, sans concession, tout le monde est coupable et tout le monde devra payer pour les fautes qu'ils ont commise, même Nick (si ça l'avait moins chatouillé dans le pantalon, il ne se serait pas retrouvé marié à la harpie).

Mais personne n'est assez lucide que pour reconnaître que s'il est dans la merde, c'est qu'il l'a bien voulu.

Décapant ! Hilarant. On devrait voir rouge, mais on rit jaune parce que c'est quand même noir (couleur à l'envers du drapeau de mon pays).

Dorénavant, je tiendrai à l'oeil les gars un peu empotés, qui ont l'air d'avoir été absent lors de la distribution des cerveaux...

Ça me fait penser qu'en Belgique, nous avons un héritier qui a l'air empoté... Il est peut-être comme Nick Corey ? Si oui, ça va swinguer !

Lien : http://the-cannibal-lecteur...
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Tromperies et tracasseries dans un bled bien tranquille
*
Coup de pioche du mois d'août par @taganga2000.
Un livre acquis depuis un assez bon bout de temps. D'ailleurs je le possède également dans sa version antérieure, nommée 1275 âmes.
La nouvelle version (celle-ci) a été retraduite au plus près des mots, de la conjugaison, du style bien particulier de Jim Thompson. J'ai comparé plusieurs chapitres et je préfère de loin celle-ci. Avez-vous remarqué que le chiffre du nombre d'habitants diffère de 5 personnes. Vous allez comprendre cette différence à la fin de mon résumé, hé!hé!
*
Nous avons ici un anti-héros tellement loin de l'image du shérif débonnaire des petites bourgades poussiéreuses des USA.
Nick Corey est tellement futé qu'il pourrait concurrencer Columbo. A l'exception près qu'il est fainéant, retors, et menteur.
*
Focus sur une période troublée dans les années 20, où la ségrégation raciale bat son plein. Dans la bourgade tranquille il passe son temps à monter des machinations, à faire le ménage autour de lui. Egalement à trousser des jeunes dames. Les élections approchent, Nick va tout faire pour les gagner. Quitte à tuer. Mais rira bien qui rira le dernier.
*
"Je dis pas que vous avez tort, mais je dis pas que vous avez raison non plus" , voilà bien ce que Nick clame à qui veut bien l'entendre, ou qui lui cherche des noises.
*
Un très bon roman noir, célébré en son temps. D'un humour corrosif, cynique, car ne l'oublions pas, ce personnage est amoral. L'auteur a réussi - avec brio- à se tenir sur deux narrations : l'une où Nick raconte, commente et juge après-coup et l'autre où il est dans l'action et de ce fait ne réfléchit pas beaucoup. Je dirais que c'est ce qui fait le style, la "patte" de l'auteur.
Cette façon d'utiliser la conjugaison de manière habile est subtile et jouissive. L'auteur s'est bien amusé avec sa galerie de personnages.
C'est mordant, caustique et noir.
*
Alors, vous savez pourquoi il manque 5 âmes à Potts? Ils sont morts, pardi!
Juste la fin qui me paraît trop "ouverte". Est-ce au lecteur d'imaginer le destin de Nick?




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Nick Corey est un brave gars, cocu et Shérif de Pottsville, 1280 âmes. Il ne sait faire que ça depuis toujours et connait sa ville et ses habitants comme sa poche.

Est-ce sa gentillesse ou sa bêtise qui l'ont amené à se faire forcer la main pour un mariage avec sa femme Myra, alors qu'il était à deux doigts d'épouser Amy ?

Est-ce aussi pour cela qu'il se fait insulter publiquement par ces deux macs qui tiennent le bordel de la ville ?
Ou bien encore que le shérif du comté voisin le prend pour un débile profond ?

En tout cas, à l'approche des prochaines élections pour sa réélection, il commence sérieusement à s'interroger sur ce qu'il conviendrait de faire pour que les gens arrêtent de penser qu'il est inutile.

Alors il va agir...

A mon avis :
Jim Thompson joue pendant longtemps dans le récit sur l'ambiguïté du personnage principal, qui semble être un doux imbécile, comme une bonne part des habitants de la ville, mais qui progressivement se révèle être bien plus machiavélique que ce que l'on aurait pu croire. En tout cas, au bal des faux-culs il est au centre de la piste.

Il joue aussi sur l'ambiance qui règne, crasseuse, texane et du début du XXème siècle. On retrouve un peu des romans de Donald Ray Pollock dans la description, même si ça ne va pas aussi loin et si les personnages n'ont pas autant de profondeur ni de noirceur (Il faut dire que ce point de vue, D.R. Pollock y va fort !)

C'est donc d'abord une question d'atmosphère qu'il faut apprécier dans ce livre, qui donne cette impression au lecteur dans un premier temps, d'être soit dans la cinquième dimension, soit dans un monde parallèle où la bêtise régnerait partout en maître.

Et puis on redescend sur terre brutalement au premier meurtre, qui arrive sans crier gare. L'atmosphère glisse alors dans la noirceur, nourrie de l'attitude de ce shérif qui semble être tout à fait préméditée bien que présentée de manière innocente par l'auteur.

J'ai apprécié cet aspect des choses, qui force le lecteur à s'interroger sur la réalité de ce personnage : est-il stupide et chanceux, ou bien tout cela est-il prémédité et réfléchi ? Et ça s'applique finalement à l'ensemble des protagonistes et m'a laissé cette impression de flotter entre ces deux options avant d'en comprendre la finalité.

On s'amuse donc de certaines situations dans la première moitié de ce roman, qui devient plus sombre dans sa deuxième partie.

Et si c'est l'atmosphère qu'il faut apprécier, c'est que le scénario n'est pas d'une très grande originalité et qu'au fil des pages on devine assez facilement la suite des événements, sauf la fin, assez décevante...

A ceux qui s'interrogeraient sur le titre de ce livre que l'on retrouve parfois sous les termes "Pottsville, 1275 âmes" et non pas "Pottsville 1280 habitants", il s'agit bien du même roman. L'explication la plus probable de cette modification c'est que dans sa première traduction le nombre d'habitants a été modifié pour une facilité de liaison dans la prononciation du titre... c'est peu convaincant, mais c'est la raison que l'on retrouve le plus souvent.
Dans sa dernière version, le titre est ainsi redevenu plus conforme à celui d'origine (en anglais : "Pop. 1280").

Enfin, pour être complet, ce livre a été adapté au cinéma par Bertrand Tavernier sous le titre "Coup de torchon", film de 1981, à la différence près que l'action se situe en Afrique et non pas dans le Sud des Etats-Unis.

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https://blogdeslivresalire.blogspot.com/
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La derniere page tournee, je cogite: comment etiquetter ce livre. Pour la premiere partie, comique de situations, tendant vers le burlesque. Pour la deuxieme, country noir. Et la fin? La fin nous assene une glose massoretique sur la situation de l'humain en ce monde. L'evangile selon Nick Corey, le heros de ce livre.


Mais pas peur! N'ayez pas peur, tout le monde dit que c'est un polar alors c'est un polar. Il s'eloigne des pionniers americains du genre, s'eloigne des grandes villes, Los Angeles Chicago ou New York, pour atterrir dans un bled perdu d'un millier d'ames. Il prend ses distances des durs bien sapes a la Sam Spade de Hammett, des preux aux principes inebranlables a la Marlowe de Chandler, ainsi que des maffieux conquerants genre le petit cesar de Burnett. Ici nous sommes chez les bouseux, et le heros, le personnage principal est tout a fait dans son element, c'est un anti-heros notoire.


Non, n'ayez pas peur, parce qu'on se marre bien. Enfin… la plupart du temps. de ce que raconte le narrateur et de la facon dont il le raconte. C'est Nick Corey, le sheriff du patelin. Il nous transmet ce qu'il pense, ce qui lui arrive et ce qui arrive autour de lui, et ce qu'il fait. Il se presente a nous comme un bon vivant, mais paresseux, apathique, un peu simplet, qui, fuyant les problemes au lieu de les affronter, est bafoue et houspille par tous, a commencer par sa femme qui le tyrannise. C'est ce qu'il nous dit et redit, mais il raconte aussi ce qu'il fait, le peu qu'il fait d'apres lui, entre deux siestes, et nous finissons par comprendre que nous sommes devant un manipulateur ingenieux et retors, qui ne recule devant rien pour arriver a ses fins, surement pas devant le meurtre. Ni devant les meurtres en serie. le representant de la loi est son plus grand transgresseur, il est completement amoral, le mal en personne, horripilant.


Et pourtant… Il y a des moments ou on sent une certaine empathie envers ce personnage. Au debut du livre, quand on est berne par ses boniments, son bluff, vu qu'il est le narrateur, mais aussi apres, quand on commence a comprendre, que ses actions, les actions qu'il raconte froidement, revelent sa vraie nature. Je me suis senti un peu destabilise en tant que lecteur. Comme si l'auteur, Jim Thompson, refusait au lecteur le noir et blanc, le noir ou le blanc, l'identification du lecteur avec le protagoniste ainsi que son antipode, sa condamnation totale et sans ambages. Peut-etre parce que les figures qui l'entourent, tous les personnages secondaires, ne sont pas meilleurs que lui. Thompson l'expose comme un pur produit de la societe ou il se demene. Et c'est cette societe, celle des petits patelins americains (de l'Amerique profonde?) au premier quart du 20e siecle, que Thompson entend fustiger. Une societe raciste, classiste, ou les petits blancs valent a peine plus que les noirs, sexiste, mysogine, ou la justice est une chimere.


Dans des pages a l'humour aigre Thompson prononce un requisitoire effarant, une condamnation sans appel. Ecoutons quelques bribes: “Parfois, je me dis que c'est pour cette raison, peut-etre, que nous ne faisons pas de progres aussi rapides que les autres regions de la nation : on perd tellement de temps a lyncher d'autres gens, et on depense de telles sommes pour acheter les cordes, le petrole, les accessoires indispensables, et l'alcool pour nous pinter en prevision de l'evenement, qu'il ne reste plus beaucoup d'argent ni de travailleurs disponibles pour accomplir les taches habituelles”.
Ou encore, quand il s'echauffe: “Il y a les pauvres petites filles sans defense, qui pleurent quand leur propre pere vient se glisser dans leur lit. Il y a les maris qui battent leur femme, et les epouses qui les supplient a grands cris de les epargner. Il y a les gamins que la peur et la nervosite font pisser au lit, et leurs meres qui les forcent a avaler du poivre rouge pour les punir. Il y a les visages hagards des malades, rendus exsangues par l'anemie ou marbres par le scorbut. Il y a la quasi-inanition, la sensation de n'etre jamais rassasie, les dettes qui depassent toujours les credits. Il y a les questions qui tournent dans les tetes : comment va-t-on manger, comment va-t-on dormir, comment va-t-on trouver le moyen de se vetir pour ne pas rester cul nu ? Les pensées de cette espece, quand il n'y a plus qu'elles qui vous occupent l'esprit, ça veut dire qu'il vaudrait mieux etre mort. Parce que c'est le vide qui vous les inspire, et vous etes deja mort à l'interieur de vous-meme, et vous ne faites plus rien d'autre que repandre la puanteur et la terreur, les larmes et les gemissements, la torture, la faim, la honte de votre apathie. Votre vacuite. Je fremis à l'idée qu'il a ete merveilleusement inspire, notre Createur, d'inventer pour notre monde ces abominations pures et simples, afin qu'une chose telle que le meurtre ne paraisse pas si terrible en comparaison. Oui, en verite, cetait vraiment, de Sa part, un geste extraordinaire et empreint de misericorde”.


Alors, c'est un polar? Ben voyons! Pour plagier le narrateur, un polar empreint de miséricorde. Ne le ratez pas.
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Ha, Nick Corey ! Bon sang de bonsoir ! Quelle idée saugrenue t'est donc passée par la cervelle (pour peu que tu en aies une !) pour aller te foutre dans le trou du cul du diable comme tu dis ! Il faut dire qu'entre ton poste de shérif tant mérité (?), tes 12 siestes et tes 14 repas gargantuesques dans la journée, ta femme un brin soûlante et acariâtre, ta première maîtresse te collant aux basques et que tu cherches à éviter, la seconde qui, elle, vaut son pesant d'or et ton débile de beau-frère, ta vie semble des plus exaltantes ! Tu n'as qu'un but dans la vie: te faire réélire à tout prix de Pottsville, petit patelin de 1275 âmes dont les habitants n'attendent presque plus rien de toi. Ne rien faire est déjà beaucoup, te semble-t-il, encore faut-il bien le faire ! Mais, voilà que les élections approchent et Nick semble avoir le feu aux fesses, son rival devient populaire et notre bon shérif semble s'être fourré dans le pétrin. En effet, deux maquereaux lui cherchent des noises et ça, Nick, il aime pas trop ça ! Ni une ni deux, j't'embrouille l'affaire et le tour est joué... Ha, ce bon vieux shérif semble avoir réponse à tout et gare à tous ceux qui voudraient lui mettre des bâtons dans les roues... La bonne ville de Pottsville risque bien d'être chamboulée...

Déjanté, complètement absurde mais terriblement efficace, ce polar ne fait pas la dentelle ! Jim Thompson distille pour notre plus grand plaisir la vie trépidante de ce shérif à la gâchette facile. Personnage malgré tout attachant avec ses penchants et ses bassesses, Nick Corey séduit ou agace, se faisant parfois passer pour l'idiot du village afin de mieux manipuler les gens. Et ça marche ! le lecteur le suit les yeux fermés et l'écoute nous raconter ses péripéties. Avec une écriture enlevée, populaire et accrocheuse, Jim Thompson réussit d'une main de maître à nous plonger dans les bas-fonds des Etats-Unis, où le racisme et le sexisme sont bien présents et nous livre un roman bien noir et cynique, où l'on rit jaune parfois...

1275 âmes... j'suis pas sure que Nick sache compter non plus !
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Désopilant...
Nick Corey est le shérif de Pottsville, « qu'est à peu près aussi proche du trou de balle de la création qu'on peut se le permettre sans se faire mordre un doigt ». Il vit avec Myra son épouse et Lennie, son beau-frère qui « serait incapable de retrouver son cul, même si on y avait attaché une clochette ». Il a pour maitresse Rose, la meilleure amie de sa femme, qu'il aide aux travaux de la ferme entre deux coucheries et pendant que le mari violent et alcoolique de cette dernière est à la chasse. Mais il caresse toujours l'idée d'épouser Amy. A côté de cet imbroglio sentimental, Nick doit gérer les « 1275 âmes » de ce trou à rats et notamment les deux maquereaux du bordel local, son chef Ken qui le prend pour un imbécile et son rival aux prochaines élections...
Le roman de Jim Thompson est une savoureuse satyre tout en second degrés où les âmes n'ont pas d'état d'âme.
Il a inspiré le film réalisé par Bertrand Tavernier en 1981, « Coup de torchon » avec Philippe Noiret, Isabelle Huppert, Jean-Pierre Marielle et Eddy Mitchell.
A découvrir absolument tant c'est drôle, malicieux et fin.
Traduction de Marcel Duhamel.
Editions Gallimard, Folio policier, 248 pages.
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Bienvenue dans le canton de Potts, ses 1275 âmes ou habitants .
Laissez-moi vous présenter Nick Corey , son shérif nullissime et peu scrupuleux qui passe son temps à essayer de ne déplaire à personne , à ne rien dire et rien faire, de peur de ne pas être réélu .
Une feignasse, une couleuvre pour qui , ♫ travailler, c'est trop dur" ♫.
Mal marié , (carrément tombé dans un traquenard même !) , obligé de se coltiner le beau-frère qui vit avec eux (mais est-il bien le frère ?...), affublé d'une maîtresse qui l'épuise et d'une administrée pour laquelle il se pâme, à un moment, la coupe est pleine et le shérif va se rebeller .
♫ He shot , the sheriff ♫
♫Bang bang ♫
De soumis et paresseux, il va s'avérer manipulateur notre shérif.
Pervers, amusant, salop, vieillot, cynique et peu fiable , ce shérif m'a touché en plein coeur . ♫ Bang Bang , I hit the ground ...♫

( Merci à LouisLeroux qui me l'a présenté en l'ajoutant à une de mes listes !)
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Découvert complètement par hasard en compulsant la liste des auteurs pour le challenge solidaire, voilà que je tombe sur un sacré numéro.
Roman noir mais en même temps complètement loufoque et super drôle !
Un héros aux premiers abords nullissime qui s'avère être un drôle de phénomène !
J'ai passé un super moment et je n'ai pas arrêté de rire en me sermonnant par moment "non mais quand même iz c'est abusé là ... et puis il y a des morts tout de même ...)
Mon drôle de loustic est un shérif d'un patelin (Pottsville) de 1275 âmes environ parce que notre feignasse Nick Corey ne s'est pas amusé à vérifier !
Nick a des journées bien chargées : faire un petit déjeuner léger (3 cafés, des saucisses et des crêpes) qu'il fait traîner jusqu'au repas s'il pousse la discussion avec sa femme. Ensuite il lui faut descendre dans son bureau de shérif où il s'accorde généralement une petite sieste bien méritée...
BOn vous voyez le tableau: Nick est un gros balourd qui ne fait rien de ses journées, qui ne contredit personne, qui serre quand même quelques mains en vue de sa réélection ... Qui s'occupe de sa maîtresse et de sa deuxième maîtresse.
Horripilant, machiavélique, paresseux, de mauvaise foi, vulgaire, malhonnête, menteur, infidèle, cynique, plouc ... Nick cache super bien son jeu pour mieux vous retourner le cerveau et vous la faire à l'envers. Un manipulateur né ! Malgré tous ces défauts, je n'ai pas pu m'empêcher de l'apprécier et de me demander comment il allait faire pour se sortir de toutes les situations compliquées où il a le chic pour se fourrer.
C'est très drôle, déconcertant ! Les dialogues sont savoureux ! Complètement inattendu. Bref je me suis bien amusée !

Des situations et des dialogues désopilants.
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Salut les feignasses.
Je m'appelle Nick Corey. Ch'uis le gars né de la plume de Jim Thompson, le gratte-papier mondialement reconnu pour la qualité de ses romans noirs. Rien que ça. Bon, c'est pas volé, y s'débrouille pas mal du stylo le bonhomme. Et drôle avec ça. Là y se fait chatouiller les orteils par les vers depuis quèque zannées déjà, mais paraît qu'avant de tirer sa révérence, l'en aurait écrit d'autres des polars. Mais sont ptèt pas aussi bons que le mien les zaut'. J'dis pas qu'y sont mauvais, mais j'dis pas qu'y sont bons non plus. C'est juste que moi, je pouvais pas être partout, voyez.

Maint'nant que je vous ai présenté le paternel, je vous raconte ma ptite vie. Mais pas trop, pasque d'une, ch'uis vite claqué, pis deux, faudrait surtout pas vous couper l'envie de me rencontrer. Car c'est pas pour me vanter mesdames, mais Dieu sait que j'vaux le détour! Faut voir bibi à la besogne, z'en redemandent toutes. Z'avez qu'à vérifier auprès de Rose et Amy, mes deux poules. Ok c'est mes maitresses et alors? Circonstance atténuante ça vous parle? Z'avez vu le thon que je me paye comme bonne femme? Et une teigne pas dieu possib' la Myra en plus. Nom d'un putois!

Et comme si c'était pas assez, j'dois supporter son frangin sous le toit, une vraie baltringue c'tanimal. Lennie qu'y s'appelle. Ouais je sais, comme le type de Steinbeck, ch'uis pas si con merci. Et un vrai débile not' Lennie, tout pareil. M'est avis que le Thompson l'a fait exprès de m'le coller aux basques çui-là. Genre hommage à l'aut' gugusse. Merci du cadeau Jimmy, mais ch'uis pas George moi. La fermette et tout le tralala j'ui laisse.

Bon, 1275 âmes, c'est le nombre de pèquenots qu'habitent Pottsville, le trou de balle dans lequel je bosse. Ah oui, j'vous ai pas dit la meilleure : ch'uis le shérif du trou de balle. Y m'ont élu shérif ces pèquenots alors que j'en branle pas une. Quand j'vous dis que c'est tous des va-de-la-gueule et des ratés.
Pis racistes avec ça. Peuvent pas blairer les nègres. Je sais bien que c'est crétin. J'y ai dit aux pèquenots qu'y sont faits tout pareil que nous les nègres. Mais ça en démord pas, quand t'es con t'es con. Bon, j'insiste pas trop, j'oublie pas qu'y votent pour ma pomme quand même. Et tant que je peux bouffer et dormir peinard sur le pécule du contribuab', j'vais pas me plaindre.

D'toute façon, j'en fais ce que j'veux de ce bled. Y a pas plus roublard et vicelard que moi à 10 miles à la ronde. Et le plus dingue, c'est qu'y pensent tous que ch'uis un bon à rien et un loser. J'me maaaarre! Qu'y sont cons.
Mais t'inquiète que j'te les mate quand y faut. A coup de plombs dans le bec de ces salopiauds que je règle ça. Ni vu, ni connu. Pasque Dieu lui, y déconne pas et c'est pas un pèquenot Dieu. Y m'a refilé sa mission de faire régner l'ordre dans le trou de balle. Sauf qu'y m'a pas dit comment faire. Alors je fais à ma sauce divine à moi.

Pis y a aussi l'autre trouduc d'à côté qui... Oh et pis j'en ai ma claque d'écrire. Z'avez qu'à l'ouvrir ce bouquin si vous voulez du détail. Ch'uis pas votre cabot, nom d'un putois!
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