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EAN : 9791090724426
832 pages
Monsieur Toussaint Louverture (18/01/2018)
4.27/5   263 notes
Résumé :
"Un Jardin de sable" est le cri de rage des laissés-pour-compte et des âmes médiocres à qui on ne tend jamais la main, mais qu'Earl Thompson [1931-1978] embrasse dans la brume du sordide et de l'impur.

Jacky, né au Kansas à l'aube de la grande dépression, porte le désespoir et la misère comme une seconde peau. Témoin malgré lui de toutes les turpitudes, il se nourrit d'un monde où prévalent la brutalité, le sexe et le mépris. Sa jeunesse est un comba... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (57) Voir plus Ajouter une critique
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Un jardin de sable est un livre épisodique, et certains épisodes sont plus désopilants ou atterrants que d'autres.
Mais dans chaque épisode, un fil rouge, Jack.

Né au Kansas, plat pays où les océans de blés s'étendent à l'infini, le petit Jack est élevé par ses grands-parents, les MacDeramid, Wilma, sa maman, étant partie voir si l'herbe était plus verte ailleurs après le décès de son mari, un Suédois, Odd Andersen.

Un an après la venue au monde du bébé, le 29 octobre 1929, c'est le début de la Grande Dépression et tous ceux qui frôlaient le seuil de pauvreté se retrouvent dans le caniveau.

Le grand-père, John, qui tentait de faire vivre sa famille bon an, mal an, d'investissements en placements foireux et de ferme abandonnée en ferme abandonnée, tient Roosevelt pour responsable de sa déchéance, et il ne perd pas une occasion de le faire savoir à qui veut bien l'entendre.
Il est d'ailleurs persuadé que Roosevelt lui en veut personnellement.

La grand-mère travaille où elle le peut, durement, sans se plaindre, au fil de leurs déménagements.
Autour de la famille, de nombreux personnages bien croqués, mais le plus souvent uniquement de passage. Ça tombait bien, je ne m'y serais jamais retrouvée.

Le gamin grandit, très proche de son grand-père, et de nombreux chapitres sont désopilants.

J'ai reproché à la première partie d'être assez froide, bien que le livre soit une biographie, mais ceci explique peut-être cela.
Les baffes et les coups volent bas et très fréquemment sur Jack, le pauvre gosse n'ayant qu'un semblant d'extérieur pour jouer, et encore pas toujours... sans jouets, sans copains.

Pour la nourriture, la grand-mère s'en charge, et on pourrait dire qu'à l'époque il mangeait son pain blanc, le livre étant constitué de deux parties.
Mais je n'en dirai pas plus.

Un livre poignant que je voulais lire depuis longtemps, et je remercie donc mes amis Yaya, Sandrinette, Patounet, Berni-Chou, Anne-so et Catherine de s'être joints à moi pour cette LC.

On plonge dans la fange, la pauvreté, la misère, le désespoir.
Et bien entendu, dans ce genre de "milieu", on baigne dans l'alcool, le sexe et la violence.
L'auteur ne s'encombre pas de circonvolutions et les mots sont très souvent crus.

Néanmoins, le style est impeccable et aide à tourner les pages au cours des passages les plus difficiles. Son sens du détail est appréciable pour qui aime les longues descriptions.
De ce fait, on visualise très bien chaque environnement et élément du décor.

Je ne sais pas si je lirai la suite, Tatoo, mais je n'ai pas regretté d'avoir lu celui-ci.
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Une seconde, je reprends mon souffle… Voilà. J'en avais besoin après 830 pages prises en pleine face, sans un seul temps mort, sans un seul moment de lassitude, sans un seul début de commencement de volonté de sauter une simple ligne. Car Un jardin de sable est un monument de littérature, de ceux qui vous marquent un lecteur et qui honorent à jamais sa bibliothèque.

Un préalable : âmes prudes, s'abstenir. Earl Thompson nous entraîne dans un monde de misère, de violence, de sexe, de stupre, de transgressions en tout genre. Et d'amour aussi…

On suit ainsi Jacky, gamin du Kansas dont la mère Wilma n'a rien trouvé de mieux pour père qu'un suédois rapidement décédé, la laissant seule alors que la crise de 29 puis la grande dépression frappe sans pitié les américains les plus pauvres. Des pauvres gens frôlant peu à peu la frontière qui les sépare des paumés, exaspérés par les discours de Roosevelt les appelant au sursaut. Tu sursautes sur quoi toi, quand tu n'as plus rien ?

Période 1 : la jeunesse de Jacky démarre dans une cellule familiale où les grands-parents Mac Deramid tentent de tenir le cap, la tête et l'honneur hors de l'eau. Tant mieux, car Wilma est loin d'être une mère parfaite, suivant le premier fêtard disposant de quelques dollars pour oublier l'espace de quelques temps sa vie misérable. Jusqu'à partir pour suivre Bill, alcoolo méprisable, laissant Jacky seul avec ses grands-parents. C'est le temps de l'apprentissage de la débrouille, ponctué d'incessants déménagements sonnant comme autant de dégringolades sociales vers les frontières de la misère. Et pourtant, malgré une certaine forme d'indifférence de la grand mère Mac Deramid, malgré la rudesse du langage du grand-père Mac Deramid, ces grands-parents seront salvateurs pour Jacky !

Période 2 : Wilma refait surface et entraîne Jacky dans un nouveau semblant de cocon familial avec Bill. Mais du Kansas au Mississippi puis au Texas, difficile d'échapper à l'inévitable descente aux enfers. Bill boit toujours plus, ne travaille toujours pas, est de plus en plus violent, de moins en moins lucide. Alors, de piaule en piaule, de bouge en bouge, vient l'heure de la débrouille : entre deux baffes, le corps de Wilma vaut bien quelques dollars ; le repas du soir vaut bien quelques larcins ; la rue, les voisins, les bars, les rencontres improbables servent d'éducation à Jacky, chantier naturel abandonné par sa mère immature.

Et puis il y a l'amour, le beau, le sublime ! Celui incroyablement généreux des grands-parents pour Jacky ; celui de Jacky pour sa mère ; celui de Wilma pour ce fils qu'elle voudrait aimer. Mais quand on ne sait pas…

Et puis il y a l'amour, le charnel ! Celui que découvre Jacky quand sa sexualité s'éveille, seul, dans la rue, dans un bar, auprès d'une voisine, d'une vision, d'un fantasme.

Et puis il y a l'amour, le sordide. Celui de la violence, du viol, de l'inceste. Celui des repères qui disparaissent quand seul l'instinct de survie commande. Celui qui seul, une fois assouvi, peut conduire au sursaut voire à la rédemption.

Earl Thompson fait le pari d'aller au bout de l'infâme, au plus profond du côté sombre de l'âme humaine, pour mieux démontrer que, même à ce niveau, on peut encore lutter, survivre, rester debout, conserver ce minimum de dignité pour rebondir et se construire un avenir.

Son écriture est simple, belle et fluide, se permettant de faire 5 pleines pages sur un simple détail qui aurait fait deux lignes chez tant d'autres. Sans jamais en faire trop. Même si chez Thompson, une bite est une bite, une chatte est une chatte et le reste est à l'avenant. C'est aussi ce qui fait la force du livre. C'est aussi ce qui choqua tant de lecteurs aux États-Unis au siècle dernier et qui en choquera d'autres en France ces prochains mois.

Mais je le répète, Un jardin de sable est une grande oeuvre, qui plus est magnifiquement éditée par Monsieur Toussaint Louverture. Bravo et merci !
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Une lecture que j'étais contente d'avoir terminée, non parce que le livre est mauvais, non parce qu'il ne m'intéressait pas, mais parce qu'il m'a mis profondément mal à l'aise, par la violence et le sexe qui y tiennent une place majeure et répétitive. Violence insoutenable quand elle s'exerce à l'égard d'un enfant, surtout, sexe qui devient très glauque dans la deuxième partie et c'est à ce moment que le livre m'a rendue un peu nauséeuse par l'accumulation des scènes qui se répètent encore et encore.

Ne vous fiez pas à ma note, j'ai opté pour la neutralité, la plupart sont bien meilleures et la qualité de l'écriture le justifie, mais j'ai retiré très peu de plaisir de cette lecture et mes notations reflètent la plupart du temps ce plaisir de lecture. Dans ce cas, l'écriture très maitrisée et descriptive n'aura pas suffi.

Jack est né dans l'Amérique de la dépression des années 30, d'une mère immature (et le mot est faible en ce qui la concerne) et d'un père qui partira très vite avant de décéder. Il est élevé dans un premier temps par ses grands-parents, et puis rejoindra sa mère et le petit ami de celle-ci pour une vie qui rendra la première partie du livre quasiment l'équivalent du bonheur.

L'Amérique qui nous est décrite est celle de la misère, de la pauvreté, des expédients pour essayer de survivre et garder un toit, avoir de quoi assurer le prochain repas. La vie de ces pauvres gens n'est qu'une suite de boulots hasardeux, dépend de l'assistance qui leur procure juste de quoi ne pas crever de faim, et s'habiller. Jack n'aura que peu l'occasion d'être un enfant, et l'on a tendance à oublier qu'il est aussi jeune, tellement la vie est dure avec lui, tellement les adultes qui l'entourent surtout quand il vit avec sa mère semble plus immatures que lui, l'enfant.

Je retiendrai de ce livre l'image du grand-père, qui m'aura fait rire et qui saura exprimer maladroitement son amour pour son petit-fils, même si dans son cas la maxime « Qui aime bien châtie bien » est amplement mise en pratique. Il reste mon personnage préféré de ceux qui entourent Jack, même s'il est certain que la grand-mère aime aussi son petit-fils et tente de le protéger. Cette période où il vit avec eux, celle de sa petite enfance, parsemée de violence, restera quand même la moins difficile de la vie de Jack. Il aura même pendant quelques mois l'occasion d'aller à l'école. Ses conditions de vie vont largement empirer à partir du moment où il rejoint sa mère, je n'en dirai pas plus.

Un livre dur, dérangeant. Et en plus c'est une autobiographie. J'ai eu le coeur serré en lisant tout ce que ce gamin avait vécu, même si l'émotion a mis du temps à se manifester. Et je ne lirai sans doute pas la suite de son histoire.
Je remercie mes compagnons de cette lecture commune, sans qui j'aurais sans doute abandonné ce livre, Yaena, HundredDreams, Patlancien, gromit33, berni_29 et surtout Nicolak notre éclaireuse, en avance dans la lecture et qui m'a motivée pour continuer.
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Il est toujours plus difficile de donner un avis pour une lecture à qui l'on a décerné seulement trois Etoiles et c'est le cas pour « un jardin de sable » d'Earl Thompson.

Ce livre est un vrai coup de poing qui vous met KO debout dès ses premières pages.

Il ne peut vous laisser indiffèrent par son humour noir et son ton souvent ordurier.

Il choquera les âmes sensibles et fera fuir les moralistes de tous poils.

Ici on parle de violence, de sexe, de misère humaine. L'auteur qui ne veut pas s'embarrasser de fioriture, nous pousse hors des limites de notre humanité. Avec des mots crus, il nous raconte l'enfance chaotique du petit Jack dans l'Amérique des années 1930, celle de la Grande Dépression. Avec un érotisme souvent dévoyé et quelquefois pervers, Earl Thompson nous décrit les premiers émois sexuels d'un gamin orphelin de père et qui sera confié par sa mère à des grand parents ruinés après la vente de leur ferme. Ce roman transpire la sueur du désespoir à chaque page, il pue l'alcool et on n'y rencontre que des prostituées et des camés. Dans cette Amérique de Roosevelt, on vit au jour le jour avec aucun avenir se profilant à l'horizon et où l'on cherche le moindre moyen de se faire de l'argent quels qu'en soient les moyens utilisés.

Heureusement que le style d'Earl Thompson est là pour nous aider à avaler les 800 pages de ce pavé littéraire. La plume de l'auteur américain nous permet de supporter les vicissitudes du jeune Jack et d'accepter le langage fleuri des personnages qui l'entourent. C'est la qualité de l'écriture qui nous retient de jeter ce roman aux ordures même si le scandale qu'y est présent à chaque page, nous inviterait à le faire. La description précise des personnages et le détail méticuleux des scènes et des lieux affichés donnent une réalité à cette histoire brutale et morbide. Cette marque de fabrique de l'auteur tend à devenir fortement addictive au fur et à mesure que progresse la lecture…

Entre pornographie et érotisme, le fil est tenu. Ce que la pornographie montre de manière très crue, l'érotisme va plutôt le suggérer ou le sous-entendre. Dans un jardin de sable, ce doute n'est jamais permis car il laisse peu de place à l'interprétation. C'est cette réalité malsaine qui nous gêne tout au long du récit même si sa place reste utile pour accentuer la dramaturgie de l'oeuvre. Pourtant les Dickens, Zola et autre Steinbeck ont réussi leur roman social et réaliste sans tomber dans cet excès brutal et dérangeant. Autre temps, autres moeurs, Charles Bukowski n'aurait pas renié cet auteur.

Je tiens à remercier Yaena, HundredDreams, AnneSo, Berni_29, Gromit33 et principalement notre Nicolak, cette devancière hors pair qui a su nous motiver jusqu'au dernier mot, celui de Fin.

« On ne devrait lire que des livres qui nous piquent et nous mordent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d'un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire? L'esprit n'est pas libre tant qu'il n'a pas lâché prise. le regard ne s'empare pas des images, ce sont elles qui s'emparent du regard. »
Franz Kafka (1833 – 1924)
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Rencontrer un nouvel auteur avec les camarades de Babelio ? Bien sûr, avec plaisir, c'est agréable de ne pas lire seul dans son coin, de pouvoir partager ses impressions, ses émotions, ses interrogations.
Pourtant, en parcourant la page du livre sur le site, deux choses m'ont chiffonnée : le nombre considérable de pages et le résumé qui annonçait un texte puissant mais sombre, dur, parcouru de violences et de transgressions.
J'hésite peu devant l'enthousiasme de mes ami.es.
De plus, le titre est beau, la couverture magnifique, il est très bien noté et les éditions Monsieur Toussaint Louverture ne m'ont jamais déçue.

Après treize jours de traversée chaotique loin de ma zone de confort, je ressors indécise et embarrassée. Ai-je aimé ? détesté ? A vrai dire, dans ce flux continu entre beauté et laideur, attirance et répulsion, empathie et aversion, humour et malséance, beauté et tragédie, mon ressenti est plutôt un mélange immiscible entre plusieurs sentiments contradictoires auquel s'est ajouté de l'agacement devant tant d'insistance autour du sexe.

*
L'auteur nous transporte dans l'Amérique de la grande Dépression. Portrait d'une enfance, celle de l'auteur lui-même, « Un jardin de sable » est un livre étonnant, très bien écrit, mais terriblement glauque, malsain.
Dans ce premier tome d'une trilogie, l'auteur nous entraîne dans l'enfance de Jacky. Abandonné par sa mère, il est élevé dans ses premières années par des grands-parents. Puis sa mère, remariée à un mari violent et alcoolique, le reprend et l'entraîne dans des années de galère, où il est négligé, méprisé, maltraité.

*
Les personnages de Earl Thompson sont abîmés, écorchés ou brisés, tendres ou ignobles, beaux ou laids, sympathiques ou exécrables, mais profondément humains. le lecteur côtoie des escrocs et des salauds, des maquereaux et des marginaux ; des malchanceux, des vicieux et des malheureux ; des travailleurs, des arnaqueurs, des magouilleurs, des voleurs et des violeurs ; des brutes et des putes.
Dans cette atmosphère crasseuse et insalubre, les personnages aiment, rêvent, souffrent, luttent, se rebellent, picolent, frappent.

Les seuls personnages sympathiques sont sans aucun doute les grands-parents. Ils font ce qu'ils peuvent, comme ils peuvent pour garder la tête hors de l'eau. Ce sont des gens bien, honnêtes, travailleurs, à qui on prend tout, les laissant dans la misère et la dépendance. Je les ai trouvés touchants.

Jacky, le héros de ce récit, est un petit garçon non scolarisé, sans éducation et sans camarade de jeux, qui se construit seul. Intelligent, courageux, optimiste, déterminé et fier, il est à l'image de ce rêve américain, refusant de dépendre de l'assistance publique, ne ménageant pas ses efforts pour avancer, s'élever au-dessus de sa condition et partir à la recherche du bonheur.
Peut-être est-il un maverick, ce « petit cheval sauvage qui court tout seul sur les plaines, vit dans les canyons, et est très heureux ainsi. Mais peut-être que non, en réalité. Parce qu'il n'apprend jamais rien, à part à courir et à ruer. Il n'a jamais de nom, ni jamais d'endroit pour dormir au chaud en hiver. »
Mais c'est aussi un enfant perturbé, instable, fragile, marqué par l'abandon de sa mère, la pauvreté et souffrant de profondes carences affectives.

Sa mère veut prendre soin de lui, elle tente de réparer ses erreurs, de l'aimer comme une mère, mais son incapacité à l'élever, le protéger, lui assurer une vie décente est criante. C'est une mère défaillante et toxique mais c'est aussi une mère en souffrance, complètement démunie, seule, usée, immature, battue par un mari possessif, alcoolique et beau parleur, obligée à des choix extrêmes pour survivre.

*
Si l'humour est présent dans la première moitié du récit, il s'efface complètement dans la deuxième partie, laissant une place importante à la violence et au sexe .

« … la nuit allait toujours prendre pour lui la forme d'une femme, parfois allongée paresseusement, lascivement sur le paysage, parfois tordant les arbres ou lacérant les océans obscurs dans sa fureur. »

Par contre, j'ai aimé découvrir l'histoire américaine pendant la dépression, saisir le quotidien des américains à cette époque, une vie de misère où le rêve américain apparaît davantage comme un mythe, voire un cauchemar éveillé qu'une réalité.
Le contexte historique aurait peut-être mérité d'être davantage mis en valeur.

*
L'écriture de l'auteur est intense, très visuelle et ne laisse pas indifférent : tour à tour âpre, dure, immorale, poétique, violente, poignante, douloureuse, gênante, c'est un carrousel d'émotions qui m'a emportée, un manège de passion, de douleur, de crasse et d'horreur qui m'a emportée et malmenée.

« le lit du petit était une paillasse juchée sur le dessus de la commode et de la glacière, telle la couchette du haut dans un navire. C'était douillet et créatif. Il aimait cet endroit. C'était son coin à lui. C'était un coin super quand il y avait de l'orage la nuit. Là, jamais la foudre ne pourrait le trouver. C'était un navire, un chariot couvert, un train, une cabane dans les arbres, une source inépuisable d'imagination. »

J'ai appris que le récit était en partie autobiographique. Cela se ressent dans le style de l'auteur. On perçoit une sincérité, une mise à nu, une authenticité dans ces instants de vie d'une noirceur indéfinissable que restitue Jacky, dans tous ces personnages aux traits marqués par le malheur, la misère sociale, la colère, l'agressivité, l'abjection.
J'ai trouvé le texte inconfortable, malaisant par la répétition de scènes érotiques, par la persistance de l'enfant à avoir des rapports intimes avec sa mère.

*
Si je suis allée au bout de ce récit marqué par la violence, le désespoir, les déceptions, les désillusions et le sexe, je le dois à mes compagnons de lecture, Nicola (@NicolaK), Doriane (@Yaena), Anne-Sophie (@dannso), Catherine (@gromit33), Bernard (@berni_29) et Patrick (@Patlancien) : le contexte social et économique était très intéressant, le style de l'auteur m'a beaucoup plu pour son côté rugueux, brutal, tourmenté, douloureux. C'est aussi un texte tourmenté que j'ai aimé pour son courage, sa franchise.

« Je n'avais jamais rien lu de tel. D'accord, c'était rempli de sexe, de salauds, de crasse, d'alcool et d'une profonde pauvreté, mais, à sa façon triste et sordide, c'était également beau.:»
Donald Ray Pollock

Cette enfance glauque et malheureuse m'a déstabilisée, je me suis sentie oppressée par sa violence, gênée par son obsession pour le sexe. Je n'ai également jamais rien lu de tel et en ce sens c'est un texte remarquable. Malgré cela, je reste partagée entre la beauté, l'honnêteté de l'écriture et la rudesse, la redondance du récit.
Si je suis sur la réserve, de nombreux billets sont particulièrement élogieux, alors faites-vous votre propre opinion si le coeur vous en dit.
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critiques presse (1)
LeMonde
15 février 2018
« Un jardin de sable », roman autobiographique, raconte une enfance chaotique dans le Midwest des années 1930, entre misère, érotisme et grâce. Son auteur, mort en 1978, était ignoré en France jusqu’à aujourd’hui. Une découverte.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (73) Voir plus Ajouter une citation
Où s'en vont-ils mourir, les êtres comme ça ? Dans des chambres sordides, aussi inélégamment et misérablement qu'ils ont vécu. Un fils dans les Marines. Une fille qui ne parle pas, c'est comme ça. Où et comment les inhume-t-on ? Aucun plaisir plus grand dans leur existence que de mordre dans un chocolat au cœur de caramel, et aucun rêve plus noble que d'aller s'installer à Miami un jour ; il semblerait plus approprié de les dessécher sur pied que de les enterrer. Ils veulent jouer dans la cour des grands mais, trop idiots ou trop peureux pour y faire autre chose que des pâtés de sable,
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"Moi, j'ai trimé toute ma vie, d'un bout à l'autre de ce pays, et jamais j'ai rencontré quelqu'un qui resterait assis sur son cul à mourir de faim ou qui laisserait sa famille mourir de faim si y voit qu'y a quelque chose qu'y peut faire. Un homme, ça veut travailler. Qu'est-ce qui peut faire d'autre de son temps ? Oh, évidemment, il aura pas envie de s'crever la paillasse pour recevoir moins que c'qui faut pour survivre. Personne a envie de patouiller dans un égout, de ramasser les ordures, des trucs comme ça. Hé, attends, tu vas sûrement me dire : "Ben, y faut bien que quelqu'un l'fasse, non ?" Pourquoi qu'y faudrait bien ? Qui c'est qui a dit qu'il fallait les ramasser, les ordures ? Donne aux gens assez pour vivre, et tu pourrais être surpris, y aura bien quelqu'un pour avoir l'idée d'inventer une espèce de chèvre mécanique à garder dans sa cuisine. Ça aussi, c'est du travail. Le problème, ça a toujours été que les gens sont pieds et poings liés par le désir d'autres gens qui veulent gagner plus qu'eux, au lieu que tout le monde s'entende pour résoudre un problème bien précis qu'il faut résoudre pour le bien de tous. Les choses devraient pas être comme elles sont, là. En fait, c'est ceux à qui on a fait croire qu'ils risquent de perdre le peu qu'ils ont s'ils ouvrent leur clapet, et les religieux qui sont tout contents d'attendre leur récompense "là-haut", c'est tous ceux-là qui disent et qui répètent qu'y faut surtout pas que les choses changent ; ceux qui pensent que le Seigneur ressemble au président des Caisse d’Épargne Fédérales. Oublie les clodos et les pochards qui traînent sur Main ou Market Street. Ce qui nous tue, c'est que les riches se payent de l'alcool et des vacances à l'étranger sur not' dos à nous. Moi, j'ai travaillé avec trop de gens différents dans toute ma vie pour ne pas avoir foi en mon prochain."
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Bon, je crois que vous feriez mieux d’aller dire à monsieur
Roosevelt que son histoire de soja, pour John MacDeramid, ça va pas être possible tout de suite. Vous pouvez lui dire que, rien que d’y penser, à arracher, brûler, couper et tuer, comme y veut me faire faire, ça me rend tellement malade que j’préférerais encore me laisser décaniller moi-même.
Vous voyez, ça m’a pris quand même quelques années pour arriver à faire de ce petit coin c’que vous voyez aujourd’hui. Oh, je sais bien qu’c’est pas grand-chose pour certains. Mais c’est tout ce qu’on a, nous autres.
Tout ce qu’on a après avoir travaillé dur. Je pense pas qu’vous pourrez comprendre ça. Vous venez de l’Est, pas vrai? J’ai pas l’impression que vous avez beaucoup travaillé la terre.
— Non, interrompit le type, impatient. Mais nous, à la Farm Security Administration, nous avons conduit des études, et je peux vous dire que…
— Tu vas fermer ta gueule! Bordel de Dieu, ces enculés de la fsa seraient même pas foutus de planter un clou tout seuls. Écoute-moi bien ! Je suis paysan depuis la guerre de Sécession. J’ai labouré des pentes tellement raides qu’y fallait bander les yeux des mules pour qu’elles y aillent. J’ai arraché des souches qu’auraient pété les vertèbres à quatre percherons pour nettoyerun champ à planter. Si on mettait bout à bout toutes les mottes que j’ai r’tournées, ça couvrirait les États du Kansas, de l’Oklahoma, du Nebraska, et y’en aurait encore assez pour recouvrir un versant de Pike’s Peak. Et jamais, nulle part, mon petit monsieur, j’ai vu des gens si peu dans l’besoin qu’y z’enterrent leurs récoltes et appellent ça progresser. Bon Dieu d’bordel de Dieu,c’est l’idée la plus contradictoire que j’aie jamais entendue.
Y’a jamais eu qui qu’cesoit qu’a jamais fait pousser trop d’choses. Si ce putain de système peut pas absorber c’que les fermiers font pousser quand y’a tant de gens qui crèvent la dalle sous les yeux des politicards, alors c’est le système qu’y faut enterrer. Et queq’chose d’intelligent qu’y fautessayer à la place. À t’entendre, on dirait que c’est de ma faute à moi, cette Dépression !
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Le visage de Madame Miller n'était pas tant une caricature de la féminité qu'une insulte à son essence même. Une toute petite bouche écarlate peinte sur une surface qui n'était pas sans évoquer la pâte à pain, et qui semblait, vision obscène, s'ouvrir vers l'intérieur quand elle parlait, comme si la femme allait se dévorer elle-même.
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Tout le monde est tellement dans la mouise qu'y z'ont même plus envie, tellement qu'y z'ont peur de perdre le peu qu'il leur reste. Z'ont plus de couilles. Plus personne qui lève le petit doigt pour empêcher ces cinglés de donner le pays aux banquiers. Y faudrait qu'on prenne des fusils, des fourches, des haches, tout ce qu'on peut attraper, nom de Dieu, et qu'on marche sur Washington et Wall Street. Virer tous ces enfoirés. [...] On rend le pays aux petites gens. Ici, ça a jamais été prévu pour être le pré carré d'une minorité. Mais non, tout le monde a la trouille, ils font la queue pour pouvoir lécher le cul du gouvernement et dire "merci patron" pour ce qu'ils récupèrent.
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Vidéo de Earl Thompson
Dans les années 70, Earl Thompson a vécu en France.
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