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EAN : 9782360548224
96 pages
Le Mot et le reste (23/08/2018)
3.6/5   5 notes
Résumé :
Fortes de leur travail de longue haleine autour de l'?uvre de Henry D. Thoreau les éditions Le mot et le reste mettent à portée de tous les lecteurs les écrits de cet auteur incontournable en les passant au format de poche. Dans L'Esclavage au Massachusetts, Thoreau fait le constat de l'insuffisance du modèle de retraite pastorale qu'il avait élaboré. La culture de soi ne suffit pas face à des esclavagistes déterminés, il faut résister activement. L'abandon de la po... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
C'est en 1854 que Henry D. Thoreau publie cette protestation contre une loi de l'État du Massachusetts qui impose de rendre à son « propriétaire » les esclaves fugitifs, mettant ainsi l'autorité et la force militaire de l'État du côté de l'injustice et non de la justice.
(...)
L'introduction de Michel Granger éclaire le contexte, l'histoire complexe des États-Unis qui accorde une place centrale à la liberté dans son roman national tout en tolérant la propriété d'êtres humains au nom de compromis politiques et économiques avec le Sud esclavagiste. Il expose également l'évolution de la pensée de Thoreau qui alternait les phases d'engagement avec les périodes de retrait et de silence : appel à la désobéissance civile et refus de payer ses impôts lors de l'annexion du Texas, appel à une opposition active dans le texte présent puis, à la violence collective armée avec la défense de John Brown.

Article complet sur le blog.
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La maison d'édition le mot et le reste peut s'énorgueillir d'avoir réédité pas moins d'une quinzaine d'opuscules de Henry David Thoreau sur la seule période 2017-2019
L'esclavage au Massachussetts reproduit une conférence prononcée par le philosophe américain en 1854.


Si en 1845, une foule abolitionniste avait réussi à libérer, en envahissant le tribunal, un esclave fugitif arrêté à Boston pour l'extrader au Canada, cette tentative échoue en 1854 lorsqu'Anthony Burns est arrêté dans la même ville pour les mêmes raisons.

Protégé par la force armée, le tribunal, par la voix de son juge, décrète alors que cette « propriété » doit être rendue à son « possesseur ». Une loi de 1850 imposait en effet aux États du Nord, ayant aboli l'esclavage, de renvoyer à leurs propriétaires les esclaves capturés sur leurs territoires.

C'est sous escorte d'un détachement fédéral de pas moins de 2 000 hommes qu'Anthony Burns sera renvoyé en Virginie.

La vive émotion produite par cet événement pousse Thoreau à tenir conférence sur le sujet. Par provocation, il lui donnera pour titre « L'esclavage au Massachusetts », signifiant ainsi que ce problème ne se pose désormais plus seulement dans les États du Sud. On sent dans son discours toute la colère du philosophe, se laissant aller à la formule expéditive et à l'insulte.


La force armée d'Etat

Première cible du discours : le Gouverneur du Massachusetts.

Thoreau découvre, ou semble découvrir la force de coercition de l'État. Il dit sa surprise de découvrir l'existence du gouverneur en même temps que celle d'Anthony Burns. A ses yeux, en ayant assuré la sécurité du convoi renvoyant le fugitif en Virginie, le gouverneur s'est rendu complice du jugement qui a dérobé à vie la liberté d'un pauvre noir innocent.
Thoreau raille ce gouverneur dont « le seul exploit est de passer et les troupes en revue le jour du rassemblement ».

Ainsi donc, « toute la force militaire de l'État est au service d'un certain M. Suttle, propriétaire d'esclaves de Virginie, dans le but de l'aider à attraper un homme qu'il considère comme son bien personnel ».
Le philosophe s'insurge : « Est-ce donc dans ce dessein que nous avons des soldats, que nous les entraînons depuis 79 ans ? Cet entraînement ne vise-t-il donc qu'à aller dévaliser le Mexique et à restituer les esclaves fugitifs à leurs maîtres ? »


La justice

Dans cette affaire, bien que ce soit sur la décision d'un juge, l'auteur estime que c'est l'ensemble de la population du Massachusetts qui en porte la responsabilité : « Son grand crime, le plus flagrant et le plus fatal de tous, c'est d'avoir permis que cet individu joue le rôle d'arbitre dans cette affaire. C'était vraiment le procès du Massachusetts. »
Thoreau met en cause le fait qu'un seul homme puisse statuer sur une telle affaire. La décision du juge ne peut qu'être arbitraire ; il est évident qu'il n'est pas une autorité compétente dans une affaire aussi importante. En outre, le philosophe rappelle que le juge, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ne donne pas une sentence éthique, mais simplement technique : « de tels juges ne sont que les inspecteurs des outils d'un cambrioleur ou d'un meurtrier qui s'assurent qu'ils sont en bon état et qui pensent que là s'arrête la responsabilité ».

La loi de 1850 est une hérésie aux yeux de Thoreau. Les juges appliquent une loi injuste puisque autorisant un homme à en posséder un autre.
Thoreau exprime une plus grande confiance dans les sentiments du peuple et pense qu'il serait préférable de soumettre ce genre question au vote populaire.


La presse

Aux yeux du philosophe, tout se passe comme si la presse avait remplacé l'endoctrinement religieux : « le journal est une bible qu'on lit tous les matins et tous les après-midi, debout ou assis, à cheval ou en se promenant. C'est une bible que chacun a dans sa poche… »

Or, la presse semble au bord de la corruption. de fait, elle exerce une influence plus grande et plus pernicieuse que ne l'a jamais fait l'Église dans les pires moments de son histoire.
« Aucun pays n'a sans doute été gouverné par une classe aussi minable de tyrans que celle des directeurs de la Presse périodique de ce pays. Et comme ils vivent et règnent uniquement par leur bassesse, s'adressant à ce qu'il y a de pire et non de meilleur dans la nature humaine, les gens qui les lisent sont dans le même état que le chien qui retourne à son vomi. »

Thoreau conclut sur l'impérieuse nécessité d'attaquer la presse avec autant de sérieux et de vigueur qu'on l'a fait à l'endroit de l'église.


La loi et nous

Il y a dans ce texte une vive critique de notre rapport à la loi.

La loi ne doit pas être une béquille utile à notre indifférence et notre apathie. Thoreau en est conscient : beaucoup de ses contemporains pensent que loi sert uniquement à préserver un confort matériel. Mais, « à quoi bon les valeurs de la loi qui protège votre bien et vous offre tout juste de quoi vivre, si elle n'entretient pas en vous des sentiments humains ? »
La décision du tribunal a une répercussion immense sur le philosophe et impacte jusqu'à sa conception de la désobéissance civile :
« Maintenant que le Massachusetts a délibérément envoyé Anthony Burns, un innocent, à son état d'esclave […] j'ai fini par comprendre que j'avais perdu mon pays. Je n'avais jamais respecté le gouvernement à l'ombre duquel je vivais, mais j'avais eu la sottise de croire que je pourrais arriver à vivre ici en m'occupant de mes affaires privées et en l'oubliant. »

Comment être serein alors qu'une décision si inhumaine a été prise ?
Le philosophe de Walden comprend que son attitude passée n'est plus tenable. Si la probité intellectuelle l'a poussé à se retirer de la Cité, c'est également celle-ci qui le contraindra à revenir. Il s'étonne que les autres citoyens puissent continuer à vaquer à leurs occupations comme si de rien n'était.
Se promener dans les bois n'y suffit plus :
« Je vais me promener près de l'un de nos lacs et je me demande quel est le sens de la beauté de la nature quand les hommes sont vils. Nous allons au bord du lac pour voir s'y refléter notre sérénité ; si nous ne sommes pas sereins, nous n'y allons pas. Qui peut être serein dans un pays où gouvernants et gouvernés sont dénués de principes ? »

On ne peut attendre de la loi qu'elle agisse à notre place. C'est sans doute là ce qu'il entend dire par l'expression : « C'est aux hommes qu'il appartient de libérer la loi ».

« L'humanité va-t-elle un jour apprendre que la politique n'est pas l'éthique, que jamais elle n'assure un seul droit moral, qu'elle ne considère que ce qui est opportun, qu'elle choisit le candidat disponible qui est invariablement le diable ? »

Ici, même si Henry David Thoreau fait explicitement référence à une Loi divine, qui serait supérieure à la Constitution américaine, il reste que ce sentiment religieux ne coïncide pas avec le strict christianisme. Il a pris ses distances avec le transcendantalisme d'Emerson1. Et c'est avant tout des actes humains dont il se soucie :
« le sort de l'humanité ne dépend pas du bulletin de vote que vous déposez dans l'urne une fois par an, mais de la sorte d'homme que vous déposez dans la rue tous les matins en quittant votre logis. »

Article complet sur le Blog Philo-Analysis :
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L'autre jour j'ai fini le très court « L'esclavage au Massachusetts » de Henry D. Thoreau. Je l'ai acheté car c'est de lui que vient le concept de « désobéissance civile » et… ben, parce que je m'intéresse à la question de l'esclavage. le bouquin ne contient en réalité que le texte d'un discours et un article de journal, qui m'ont semblé mortellement ennuyeux. En revanche l'appareil critique les accompagnant est très intéressant, et beaucoup plus clair que Thoreau lui-même sur l'évolution de sa pensée.

Quant à l'esclavage… Il est ici assez théorique. Pour commencer, le Massachusetts n'était pas un état esclavagiste.

Par contre dans les années 1850, c'est là qu'est un point de bascule. Jusqu'alors il existait un compromis consistant à n'accepter un état esclavagiste dans la fédération américaine qu'à condition d'en avoir un autre sous la main qui ne l'était pas. de là à dire que le truc était équilibré… Je ne crois pas, et la suite le prouvera. J'y vois plutôt une tentative désespérée de repousser aussi « légalement » que faire se peut les vilains Sudistes qui, autrement, prendraient beaucoup trop de sièges au Congrès. Autrement dit, c'est moins une question d'équilibre que de garder une majorité parlementaire pour faire keskonveu – le Nord et le Sud des États-Unis ayant des différences culturelles, économiques, sociales extrêmement marquées.

Or après 1850, l'équilibre est rompu quand une loi passe imposant à tous les états fédérés de participer à l'arrestation des esclaves en fuite, qu'ils soient esclavagistes eux-mêmes ou non. le Sud a réussi son coup et désormais il faudra une guerre civile pour venir à bout du système.

Thoreau s'émeut du sort des esclaves en fuite, mais il s'émeut surtout de l'apathie de ses concitoyens. C'est là son idée de l'esclavage au Massachusetts. Il s'élève vigoureusement (mais pas trop physiquement quand même… il n'en peut plus de gloriole d'avoir passé *une* nuit en prison) contre les gens qui se contentent de s'en laver les mains, de fermer les yeux, et blahblahblah.

L'auteur du petit dossier critique fait des parallèles intéressants entre ce que reproche Thoreau aux « moutons » de son époque et notre société actuelle (climat, véganisme par exemple).

Mais au final, c'est un peu ce que j'ai retenu du discours et de l'article de journal : ce « et blahblahblah ». J'ai largement préféré, et ça m'a beaucoup plus interrogé d'ailleurs, toute la mise en contexte historique, sociale, intellectuelle et politique avant et après ces deux textes.

Et puis ce n'est pas parce que le Massachusetts n'était pas esclavagiste qu'il était clean pour autant. Pour un panorama assez édifiant de la condition noire aux États-Unis dans la seconde moitié du XIXème siècle, on peut lire l'excellent roman « Underground Railroad » de Colson Whitehead, prix Pulitzer. A travers la fuite d'état en état de Cora, on découvre que là où ne sévit pas l'esclavage, la ségrégation atteint en contrepartie divers degrés plus ou moins vomitifs. L'abolition ne suffit évidemment pas à acquérir une liberté véritable.
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Un texte et un appareil critiques passionnants pour qui veut saisir les enjeux politiques qui accompagnent la question de l'esclavage aux Etats-Unis, quelques années avant le déclenchement de la guerre civile.
Quand Thoreau tient cette conférence en 1854, une loi fédérale (1850) enjoint les habitants de poursuivre et dénoncer les esclavages fugitifs qui viendraient dans le Nord pour les rendre à leur propriétaire.
La même année, un esclave du nom de Anthony Burns est emprisonné à Boston et reconduit en Virginie malgré l'opposition d'une foule d'abolitionnistes.
La même année, la loi Nebraska-Kansas permet aux colons des nouveaux territoires de l'Ouest de décider ou non s'ils veulent introduire l'esclavagisme dans ces territoires. Cette loi déclenche la naissance du parti républicain et du combat de Lincoln pour l'abolition.
Dans cette conférence, Thoreau fustige la complaisance du gouverneur du Massachusetts, l'absence de conscience moral du juge qui a renvoyé à Burns et appelle ses concitoyens à une réflexion sur le sens de la liberté dans un comté où l'on commémore la résistance des Américains face aux Anglais lors de la bataille de Lexington (1775).

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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Qui peut-être serein dans un pays où gouvernants et gouvernés sont dénués de principes ?
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Je tiens à rappeler à mes compatriotes qu’ils doivent d’abord être des hommes et, plus tard, à l’heure qu’il convient, ils peuvent être des Américains. À quoi bon la valeur de la loi qui protège votre bien et vous offre tout juste de quoi vivre, si elle n’entretient pas en vous des sentiments humains ?
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