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Critique de mosaique92


Epopée humaine et spirituelle sur fond historique (le Moyen-Age), ce roman d'apprentissage mêle lumière et ombres ; le destin de Nivard (orfèvre puis apprenti-verrier et, enfin, maître-verrier) est tissé de bonheurs et de malheurs ou, plutôt, d'immenses joies et de drames profonds. Car ce taiseux ne fait pas les choses à moitié, ce qui lui permet de devenir un maître reconnu et recherché.
On suit avec intérêt son parcours entre occident et orient, entre amour et insondable désespoir, entre catholicisme et islam et on partage les préparatifs puis les aléas d'un voyage vers l'orient en compagnie d'anciens croisés, à la rencontre de templiers et à la recherche du secret de la lumière et des couleurs. On s'initie à l'art du vitrail qui va être porté à son apogée à cette époque et aux difficultés de ces artisans. Une vie de labeur, de recherches, de déceptions, mais aussi de joies ; de dévouement désintéressé également car certains mouraient avant de voir la fin de leurs projets tant ceux-ci prenaient des années pour se concrétiser (les techniques et les moyens de notre époque industrielle ont considérablement raccourci ces délais). C'est d'ailleurs un aspect du roman qui m'a frappée : on ne mesure pas en jours, semaines ou mois, mais en années, voire en décades.

Cependant, plusieurs particularités de ce roman en ont un peu gâché la lecture.
L'auteur, maître-verrier par ailleurs, s'appesantit un peu trop sur le vocabulaire et les techniques de l'époque de cet artisanat et de métiers annexes tels que forge et orfèvrerie ; un luxe de détails qui m'ont semblé répétitifs. J'aime beaucoup les vitraux et ai fait des voyages pour en admirer certains, mais le ‘'côté cuisine'' poussé à l'extrême ne me passionne pas. Cela alourdit et déséquilibre le roman, à mes yeux.
J'ai eu l'impression d'une histoire utilisant des stéréotypes sur le Moyen-Age : violence (il pleut des morts comme à Gravelotte), obscurantisme voire orgueil poussé jusqu'à l'extrême de beaucoup de religieux, errements de l'Eglise, personnages secondaires caricaturaux : croisés ayant perpétré des massacres abominables et devenus des mercenaires, moines n'ayant de religieux que le nom, hobereaux s'en prenant à tout ce qui passe à leur portée, etc… Seuls quelques rares personnages échappent à ces stéréotypes (les rarissimes amis de Nivard, essentiellement). L'auteur est sûrement un expert dans son art de verrier, mais il aurait dû effectuer davantage de recherches sur l'époque et aurait ainsi pu nuancer le fond historique du roman.


J'ai aimé le personnage de Nivard, taiseux perfectionniste et entraîneur d'hommes, sa soif d'absolu, son souci de se tenir à l'écart d'une Eglise sûre d'elle et de sa vérité et profondément et irrémédiablement amoureux d'une belle orientale dont la mort le laissera amputé physiquement et psychologiquement. J'ai également aimé Soma, le nubien, son dévouement sans limite et sa faculté d'adaptation permanente ; l'amitié entre ces deux hommes est d'une force inouïe (‘'Nivard n'a jamais éprouvé le besoin de questionner Soma sur son passé, et son compagnon de même, comme s'ils redoutaient tous deux d'endommager par les mots la perception qu'ils ont l'un de l'autre ou d'ébrécher par excès de bavardage leur fraternité profonde'').

Le jeune Nivard au soir de la mort de sa mère enterrée à la sauvette par une Eglise engluée dans des codes ineptes avait adopté pour devise : «Quaere Dei lumem post materiam, non gentes (Cherche la lumière de Dieu à travers la matière au mépris des humains)». Il y consacrera sa vie entre ciel et ténèbres ; cette dualité est probablement la source profonde de son art…
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