Je remercie Babelio et les éditions le Pommier pour cet essai reçu dans le cadre de l'opé Masse Critique.
Livre intéressant puisqu'il semble réfléchir, décrire, mettre le focus sur une pléthore d'aspects de ces évolutions révolutions qui sont en cours et qui courent vite. Bien plus vite que les penseurs et que les politiques. Il y a urgence. Et ce livre nous éveille ou réveille.
Le livre est construit comme un abécédaire de Accordage affectif à Transfert. Non pas de Way of life, de Zébulon non plus.
Si j'en ai un peu marre de voir du
Serge Tisseron sans arrêt partout, il faut bien reconnaître que le monsieur sait bien de quoi il parle et qu'en effet cet abécédaire est fort complet.
Il n'y a qu'une chose sur laquelle je ne suis pas en accord, c'est le fait des émotions qu'on peut ressentir quand on casse un objet, la tristesse qu'on peut vivre à ce moment. Pour un objet et donc a fortiori pour un robot, pour son robot et a fortiori pour son robot humanoïde. On est juste triste parce qu'on a perdu quelque chose, soi, on pleure pour soi, pas pour l'autre, qu'il soit un robot ou non et qu'on lui prêtait faussement des sentiments et une ressemblance à nous (même pour les humains qui partent c'est sur nous qu'on pleure...) Bref, je vais pas épiloguer là-dessus ce n'est qu'un petit élément parmi plein d'autres d'intérêt.
L'abécédaire a ses défauts, l'impression de redites, de reformulation presque telles quelles de phrases ou d'idées. Si vous lisez le livre d'une traite vous risquez de ressentir fort cette impression. Si vous le picorez ce ne sera pas le cas et, au contraire, vous aurez plutôt une impression de renforcement de ces idées et de bon rappel.
Tisseron donne son point de vue, il ne s'agit pas d'une simple description passive. Il présente une charte des droits de l'humain par rapport aux robots et IA. Car c'est essentiellement de l'humain dont parle ce livre. Il s'agit de protéger l'homme. Et étrangement, puisque les robots en soi n'ont aucune volonté, si ce n'est de faire ce qu'on leur dit, il faut protéger l'humain des concepteurs, des idées, idéologies des concepteurs, des choix cruciaux de ceux-ci. Pas de la machine robot qui n'est jamais qu'une machine, objet.
Il faudrait nous garder de donner autant d'importance à ces objets, ils sont utiles, très utiles et libèrent l'homme de tâches répétitives, pénibles, où nos émotions ne sont pas propices. Exemple ; répéter mille fois à une personne alzheimer telles ou telles choses, épuisant, non. le robot le fera sans souricller.
Oui, bon,, les programmeurs, les concepteurs, et tous ces dieux qui vont posséder toutes les informations sur les humains, collectées par toutes ces machines, ces dispositifs dotés d'une forme d'intelligence artificielle, etc, il faut absolument nous en méfier, et nous munir de moyens de protection et de respects de limites suffisants ! Et cela n'est encore nulle part, tandis qu'effectivement l'accumulation des données se produit.
L'auteur tente de réfléchir aussi à partir de concepts analytiques basiques, comme le transfert, l'identification projective, l'objet transitionnel... Je trouve ces tentatives assez vaines, pas très intéressantes, je pense que l'analyse ne fonctionne plus bien avec ces concepts et nouvelles formes de réalité. Oui, non, je ne suis pas convaincu.
Tisseron met beaucoup l'accent concernant la liberté des robots, que ceux-ci sont et seront en permanence connecté à Internet et donc... interconnectés, chacun apportant à l'autre des informations, ce qui fait que considérer un robot individuellement aura peu de sens. A peu de sens.De même, imaginer une "révolte" des robots est plutôt ridicule. Ils n'ont aucun désir particulier, si ce n'est celui qu'on leur aura codé.
Tisseron est contre l'humanisation des robots, leur doter d'émotions, danger de l'anthropocentrisme, de l'animisme également...
L'hybridation par contre sera le futur, des hommes augmentés, qui feront de nouvelles différences entre les gens, ceux qui pourront s'augmenter, ceux qui ne le pourront pas...
L'importance d'un bouton off, mettre son robot en stop, s'en passer si l'on veut, et sans croire qu'on l'a tué, sans s'en vouloir. Merci aux concepteurs de ne pas créer cette culpabilité potentielle en procurant au robot des mimiques tellement humaines que l'on va croire qu'on lui fait du tort...
Les robots sont utiles, et indispensables, l'intelligence artificielle est déjà partout et depuis déjà pas mal de temps, il faut vivre avec ces réalités nouvelles, et pour pouvoir au mieux en profiter il faut les réfléchir, mettre certaines limites, essentiellement à l'humain derrière. Car il y aura toujours un humain derrière le réseau, derrière tout cela il reste l'homme.
Mais, clairement, l'homme est capable de tout, souvent du pire, pour le fric, pour le pouvoir, pour la domination... L'humain dans l'être a été, est et restera dangereusement inquiétant, parfois extraordinaire, mais ne nous leurrons pas, comme l'homme est une sale bête, on n'est pas près du bonheur parfait sur terre...
Mais je m'éloigne.
Découvrez ce livre qui fait penser, réfléchir. Qui est très actuel et assez réussi.
(Je me demande dans combien de temps on aura l'impression qu'il est obsolète et ringard... le temps s'accélérant...)