"La première difficulté qu'on a à vraincre avec les Gens de Lettres quand il s'agit de leur santé, c'est de les faire convenir de leurs torts, ils font comme les amants qui s'emportent quand on ose leur dire que l'ojet de leur passion a des défauts; d'ailleurs ils ont presque tous cette espèce de fixité dans leurs idées que donne l'étude (...) et fait qu'il n'est point aisé de leur persuader que leur conduite leur est nuisible. Avertissez, raisonnez, priez, grondez, c'est souvent peine perdue; ils se font illusion à eux-même de mille façons différentes (...). L'un compile les choses les plus communes, l'autre redit ce qu'on a dit cent fois, un troisième s'occupe des recherches les plus inutiles, celui-ci se tue en se livrant aux compositions les plus frivoles, celui-là en composant les ouvrages les plus fastidueux, sans qu'aucun d'eux songe au mal qu'il se fait,& au peu de fruit que le public en retirera; le plus grand nombre ne dévore l'étude que comme le gourmand dévore les viandes pour assouvir sa passion (...). Arracher-les de leur cabinet, forcés-les au repos & aux délassements" (...). Dès qu'un Homme de Lettres est véritablement malade, la première ordonnance qu'on doit lui faire c'est une cessation absolue de toutes ses études; quelque violent qui lui paroisse ce moyen (...). Il faut qu'il oublie qu'il y a des sciences & des livres, la porte de son cabinet doit être fermée pour lui. Quand la foiblesse est excessive; il faut quelquefois les mettre au lait si on peut parvenir à le leur faire digérer (...). On sait que de simples voyages entrepris par des Savants pour aller voir des bibliothèques éloignées, les ont guéris".