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EAN : 9782253084617
349 pages
Le Livre de Poche (25/11/2009)
3.64/5   25 notes
Résumé :
Dans une réflexion qui nous fait traverser des siècles d'histoire européenne, Tzvetan Todorov éclaire les notions de barbarie et de civilisation, de culture et d'identité collective, pour interpréter les conflits qui opposent aujourd'hui les pays occidentaux et le reste du monde. Une magistrale leçon d'histoire et de politique, et une véritable " boîte à outils " pour décrypter les enjeux de notre temps.

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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Le sous-titre de la peur des barbares de Tzvetan Todorov montre que ce livre est en partie écrit en réaction aux thèses défendues par Samuel P. Huntington dans son célèbre essai : le Choc des civilisations. Pour l'auteur français d'origine bulgare, les civilisations n'existent pas en tant que blocs homogènes, elles sont plutôt le fruit d'emprunts, d'échanges, de rejets concernant les idées, les cultures, les individus et leurs contenus varient dans la durée.
Todorov, descendant des philosophes des Lumières insiste sur une vision universaliste des valeurs de la Révolution Française (droits de l'homme, liberté, égalité, laïcité,...) parfois tempéré par le relativisme des situations. Il se révèle ainsi un humaniste européen contemporain pour lequel civilisation et barbarie constituent deux pôles extrêmes de la mentalité humaine, les oeuvres vraiment littéraires nous rapprochant davantage d'un état civilisé. Cependant, personne ne saurait être qualifié que de barbare ou que de civilisé.Muni de cette grille d'analyse, il décortique par exemple l'aspect inédit de la guerre contre le terrorisme: multiforme, sans fin prévisible et pouvant justifier tous les abus. Il met en lumière les risques d'islamophobie des sociétés occidentales qui renferme les musulmans dans leur seule identité de croyant potentiellement terroriste en oubliant cultures, solidarités et autres valeurs. Il prône un dialogue avec l'autre, l'étranger, le différent ou celui que l'on considère comme tel, un vrai dialogue où chacun ne doit pas craindre de mettre à distance ses convictions et si besoin à changer d'opinions.
Que de belles et bonnes pensées! que de généreuses idées! Malheureusement, on sent très vite qu'on se situe dans le monde politiquement et culturellement correct de la "bien-pensance", on se sent confortable dans ses opinions où tout est lisse, le papier n'offre pas de résistance et l'angélisme n'est jamais très loin. Ce qui nous manque dns ce genre d'ouvrage, ce n'est pas le pronostic, c'est l'étape suivante: comment fait-on fonctionner le plus harmonieusement possible des sociétés nationales ou européennes forcément et de plus en plus multiculturelles? Où met-on concrètement le curseur entre identité et pluralité?
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La théorie huntingtonienne du choc des civilisations est encore très répandue, car elle est facile. Très répandue aussi la réduction stigmatisante de l'identité des Musulmans à leur seule culture religieuse, de celle-ci à l'islamisme, de celui-ci au terrorisme, réductions successives qui constituent déjà à elles seules une forme d'islamophobie. le terme de barbarie opposé à civilisation appartient à ce langage, pour dénoter l'altérité entre "eux" et "nous".
Or, en refusant tout débat idéologique, c'est justement par l'analyse des termes que Todorov démolit ce discours, en véritable sémiologue (et philosophe spécialiste des Lumières). Qu'est-ce que la barbarie ? qu'est-ce que la civilisation (au singulier) à ne pas confondre avec les cultures (au pluriel) ? Quels sont les contenus des identités collectives ? Comment sortir du dilemme entre ethnocentrisme naïf et relativisme absolu (p. 30) ? Comment la culture (dans son sens national) évolue-t-elle entre pluralité et variabilité (p. 89) ? Comment les identités collectives multiples des migrants furent prises en compte depuis le Des lois de Cicéron (p. 102) et les actes de violence des banlieues françaises relèvent non d'un conflit entre cultures prétendument incompatibles mais de la "déculturation" (p. 144)...
Sans solution de continuité au fil des pages, la démonstration sémiologique et philosophique (anthropologique, sociologique) s'ancre de plus en plus dans les "affaires internationales", c'est-à-dire dans le politique, notamment dans le ch. 3 "La guerre des mondes" et le ch. 4 "Naviguer entre les écueils". Sont traités: les campagnes militaires américano-otaniennes, l'islamisme, la torture, mais aussi le meurtre de Theo van Gogh à Amsterdam, les caricatures danoises du Prophète, le discours de Benoît XVI à Ratisbonne...
Le dernier ch., "L'identité européenne", marque à mon sens une perte de pertinence, d'intérêt et, pire, de subtilité de pensée. Je n'en retiendrai(s) que la critique d'un certain discours sur l'identité européenne, fondée fort justement sur son incohérence:
"L'idée d'égalité entre tous les êtres humains nous vient de l'histoire européenne, pourtant celle d'esclavage est loin de lui être étrangère. le prosélytisme religieux et la laïcité lui appartiennent au même titre, tout comme l'esprit révolutionnaire et le conservatisme. La tolérance est européenne, mais le fanatisme et les guerres de religion ne le sont pas moins. [...] la soumission des peuples étrangers à la volonté du plus fort, l'impérialisme même appartiennent également à l'héritage européen." (pp. 250-251).
Il s'agit donc dans l'ensemble d'un ouvrage d'une rigueur et d'une clarté mémorables, dont le style est beaucoup moins académique et ardu que celui de certaines oeuvres de Todorov (surtout celles de sa jeunesse) sans perdre de précision historique et philosophique : une véritable leçon de citoyenneté à recommander à toute personne éveillée et minimalement intéressée par ces aspects de notre politique.
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Tzvetan Todorov est un critique littéraire, sémiologue, historien et essayiste français d'origine bulgare.

Il publie en 2009 un essai engagé revenant sur les notions de barbare, de civilisation et de culture : La peur des barbares, au delà du choc des civilisations. Publié une seconde fois en février 2016 aux éditions le livre de Poche, cet essai aide à comprendre la situation de « tension culturelle » actuelle. Dénonçant tantôt un occident protecteur de valeurs passés et peu enclin à l'évolution, tantôt un extrémisme virulent de la part de certains groupes se réclamant de la religion musulmane, Todorov dépeint une réalité effrayante qui est en fait la nôtre. Il dessine ainsi une nouvelle silhouette au terme de « barbare » : le barbare est celui qui a une attitude de déshumanisation et d'humiliation envers son semblable. La barbare et la barbarie se trouvent ainsi en tous lieux et ne sont pas propres à une culture en particulier.

Pourquoi « au-delà du choc des civilisations » ? T. Todorov fait référence à cet essai indigeste de Samuel Huntington, The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order. Il s'agit d'une pseudo analyse politique parue en 1996 et pour la version française en 1997, et dont la carte de division du monde en civilisations du monde est devenue tellement populaire qu'elle est étudiée dans les manuels de géographie du lycée, et ce évidemment dans un but de critique négative. Si les fondements de cet ouvrage s'effritent comme du calcaire, il faut bien lui reconnaître une chose : jamais Etats-Unis et Europe n'ont jamais été aussi liées idéologiquement que par cette haine commune de l'Autre, et plus particulièrement de l'Autre musulman. Car le choc des civilisations c'est bien cela : l'affrontement d'un bloc occidental blanc et catholique et d'un bloc musulman. Et c'est ce que Todorov dénonce sans concession.

Mais de la même manière que le choc des civilisations délaisse tout un pan de l'humanité, Todorov ne se concentre que sur ce conflit binaire alors qu'il avait lui-même énoncé en introduction une division tripartite du monde en pleine guerre froide !Mais aussi vite que les fleurs ont fané, Todorov a délaissé le « tiers monde » et ne s'est focalisé que sur le conflit occident/Islam.

D'autre incohérences sont relevées : pointer du doigt les Etats-Unis en les désignant « Américains », la partie devient le tout et tous les autres pays du continent disparaissent…

Mais simple à lire et riche en enseignement toutefois, il fait office d'une introduction convenable au sujet du « choc des civilisations ».
Lien : http://chrisylitterature.jou..
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Belle réflexion sur les notions de barbarie, de civilisation, de culture. Todorov plaide pour un humanisme des Lumières et prône tout particulièrement une grande tolérance face au radicalisme religieux contemporain, et l'islamisme tout d'abord, bien évidemment. S'il développe son propos en philosophe et sémiologue plus qu'en historien, il fait preuve, à mes yeux, d'un angélisme inquiétant. Certes le dialogue et la compréhension de l'autre sont les seules solutions de progrès, certes les attitudes de rejet populistes et l' hégémonie américaine agissent à l'envers d'une solution, mais sa bien-pensance me paraît irréaliste d'autant plus qu'elle ne s'accompagne que d'un optimiste béat. Son rôle n'est pas de donner des solutions - et c'est bien plaisant de ne pas entendre de leçons péremptoires comme tant savent les donner, son voeu est d'indiquer la bonne direction à l'aune de son immense savoir sur les civilisations ; mais j'avoue que l'exercice me paraît cours et pas assez engagé ni assez pédagogique.
Voici un livre au style ardu, à la lecture exigeante, que l'on clôt avec plein de points d'interrogation mais qui a l'incontestable mérite de faire réfléchir sans péroraisons stupides.
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Pourtant fervent lecteur de Tzvetan Todorov (confer la liste ci-dessous), car grand spécialiste, et à juste titre dénonciateur des régimes Totalitaires : Communiste et Nazi ; je suis extrêmement surpris de constater, ici, l'indulgence, voire l'angélisme dont l'auteur fait preuve vis-à-vis de l'Islam.

En effet, Tzvetan Todorov analyse, comme dans ses autres ouvrages, de manière très érudite, les notions de : Culture, Civilisation, Barbarie, etc..

En revanche, en ce qui concerne l'Islam : malgré, d'une part, la foultitude d'attentats terroristes Islamistes dans le monde ; et d'autre part, l'accroissement exponentiel ces dernières décennies, du prosélytisme Islamique : communautarisme, signes et revendications religieux en tous genres de la part de nombreux musulmans dans notre sphère Républicaine laïque Française et Européenne ; Tzvetan Todorov, lui, ne semble pas s'en inquiéter outre mesure.

Alors : ultra-tolérance naïve (ce que je ne peux imaginer de la part d'un si grand Penseur) ? Espoir vain, de la notion de Totalitarisme qui serait née avec le Communisme, et morte avec le Nazisme ? « Bien-Pensance » inutile, mais dans l'air du temps ? Déconnexion entre la théorie et la Réalité ? Ou bien, finalement, peut-être un peu de tout cela à la fois !

En tout état de cause, j'espère que, pour le bien de l'Humanité, son immense connaissance des Cultures et de la Nature Humaine, lui donnera raison. Et que, ce que NOUS ferons de ce 21ème siècle, nous conduira plutôt : vers l'évolution des Civilisations, que vers…, la Barbarie !

Confer également, d'autres ouvrages tous aussi passionnants de Tzvetan Todorov :

Face à l'extrême ;

Mémoire du mal, Tentation du bien : enquête sur le siècle ;

Les Abus de la mémoire ;

L'Esprit des Lumières ;

le Nouveau Désordre mondial : Réflexions d'un Européen.
Lien : https://totalitarismes.wordp..
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
C'est à la population musulmane elle-même qu'il incombe de sortir de la confusion entre modernité et Occident, d'accueillir sereinement les valeurs démocratiques en cessant de les interpréter comme le signe d'allégeance aux pays occidentaux sous prétexte que ces valeurs y sont nées: l'origine d'une pratique ne se confond pas avec son sens. (p.240).
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Comment se réjouir de la victoire sur un ennemi hideux si pour le vaincre il a fallu devenir comme lui? (p.20).
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Une culture qui incite ses ressortissants à prendre conscience de leurs propres traditions mais aussi à savoir s'en distancier est supérieure (car plus "civilisée", donc) à celle qui se contente de flatter l'orgueil de ses membres, en les assurant qu'ils sont les meilleurs du monde, et que les autres groupes humains ne sont pas dignes d'intérêt. (p.56-57).
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Il y a quatre types de groupes. (...) Leur population a souvent le sentiment que, pour des raisons diverses, elle a été tenue à l'écart de la répartition des richesses; aujourd'hui son tour est venu. Les habitants veulent profiter de la mondialisation, de la consommation, des loisirs, et pour atteindre ce but ils ne lésinent pas sur les moyens. C'est le Japon qui, il y a déjà plusieurs décennies, a ouvert cette voie, dans laquelle il a été suivi par plusieurs pays du Sud - Est asiatique et, depuis peu, par la Chine et l'Inde. (...)
Le deuxième groupe de pays est celui où le ressentiment joue un rôle essentiel. Cette attitude résulte d'une humiliation, réelle ou imaginaire, qui leur serait infligée par les pays les plus riches et les plus puissants. Elle est répandue, à des degrés divers, dans une bonne partie des pays dont la population est majoritairement musulmane, du Maroc au Pakistan. Depuis un certain temps, elle est présente aussi dans d'autres pays asiatiques ou dans quelques pays d'amérique latine
La cible du ressentiment sont les anciens pays colonisateurs d'Europe et, de façon croissante, les Etats unis, tenus pour responsables de la misère privée et de l'impuissance publique. (...)

Le troisième groupe de pays se distingue par la place qu'y occupe le sentiment de peur. Ce sont les pays qui constituent l'Occident et qui ont dominé le monde depuis plusieurs siècles. Leur peur concerne les deux groupes précédents, mais elle n'est pas de même nature.
Ils redoutent la force économique , la capacité de produire à moindre coût et donc de rafler tous les marchés, bref, ils ont peur d'être dominés économiquement. (...)
Enfin, un quatrième groupe de pays , dispersés sur plusieurs continents, pourrait être désigné comme celui de l'indécision : groupe résiduel dont les membres risquent de passer un jour sous l'emprise de l'appétit comme du ressentiment, mais qui pour l'instant restent extérieurs à ces passions. En attendant, les ressources naturelles de ces terres sont pillées par des ressortissants des autres groupes de pays, avec la complicité active de leurs propres dirigeants corrompus; des conflits ethniques y apportent la désolation.
P. 16-18.
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Le barbare n'est pas celui du tout celui qui croit que la barbarie existe, c'est celui qui croit qu'une population ou un être n'appartiennent pas pleinement à l'humanité et qu'ils méritent des traitements qu'il refuserait résolument de s'appliquer à lui-même. (p.79).
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Vidéo de Tzvetan Todorov
Avec Stoyan Atanassov & André Comte-Sponville Rencontre animée par Catherine Portevin
Tzvetan Todorov, né en 1939 à Sofia, arrivé à Paris au début des années 1960, a vécu la plus grande partie de sa vie en France et écrit son oeuvre en français. Mais il se voyait toujours comme un « homme dépaysé ». Cette expérience a nourri son intérêt pour le dialogue entre les cultures et sa vigilance à l'encontre de toutes les tentations totalitaires. Quelle part bulgare avait-il gardé en lui, quelles relations entretenait-il avec son pays natal ? Comment aujourd'hui ses livres sont-ils lus et perçus en Bulgarie ? Pour évoquer les passages de Todorov entre Sofia et Paris, sont réunis pour la première fois ses amis et spécialistes de son oeuvre, des deux côtés de la frontière qui fut naguère rideau de fer : Stoyan Atanassov, Professeur de littérature romane à l'Université de Sofia et traducteur en bulgare de l'oeuvre de Todorov et André Comte-Sponville, philosophe, grand lecteur et ami de Todorov, préfacier de son livre posthume Lire et Vivre (Robert Laffont/Versillio, 2018). Une édition augmentée de son fameux Dictionnaire philosophique est paru en 2021 aux PUF.

À lire – Tzvetan Todorov, Lire et Vivre, Robert Laffont / Versilio, 2018 – Tzvetan Todorov, Devoirs et délices. Une vie de passeur, Entretiens avec Catherine Portevin, le Seuil, 2002, rééd. Points 2006.
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