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sur 135 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
“Dans l'Empire romain, les pérégrins sont des étrangers, hommes libres, habitant les provinces conquises par Rome, mais ne disposant pas de la citoyenneté romaine, ni du statut juridique des Latins.......”, définition de Wiki, et titre du livre d'Olga Tokarczuk, écrivaine polonaise, Prix Nobel de littérature 2018. le même Wiki y est aussi consacré en un chapitre dans le livre 😊. Un roman patchwork, qui nous plonge dans un univers où le voyage est une pérégrination, intérieure et extérieure, à la rencontre de l'autre, l'autre étant d'une diversité infinie, “Le but de mes pérégrinations est toujours la rencontre d'un autre pérégrin.”
Mais, mais....bouger, c'est aussi ne pas avoir le temps pour des méditations stériles, comme la Mort ( “...pour les gens qui voyagent , tout semble neuf, pur et vierge et, en un sens, immortel.”).

Tokarczuk, d'un langage à la fois riche, précis et poétique, attentif aux détails, brouillant les évidences, mettant en doute des arguments donnés comme irréfutables, ne rentrant dans aucune polémique, et remettant en question la logique même des questions posées, mêlant le rationnel à l'irrationnel, nous ballade à travers un monde sans frontières, en mouvement perpétuel, sans point fixe, à la rencontre de personnages, dont les biographies et les caractères s'entremêlent .
Des mythes, des contes, des histoires inventées, son propre vécu.....
Elle nous pousse à réfléchir, à sortir de notre zone de confort, et à aller à l'encontre d'autres points de vue que ceux que nous pensons acquises. Son obsession pour le grotesque et les cabinets de curiosités, qu'elle décrit dans les moindres détails, est au coeur du livre, “le but des pérégrinations est d'aller à la rencontre d'un autre pérégrin. En l'occurrence en pièces détachées “. L'histoire rocambolesque du docteur Blau, expert en spécimens anatomiques, de corps plastinés, ou la collection de pièces anatomiques de Frederik Ruysch, le coeur de Chopin en bocal.....que des pièces détachées dont elle finit même par nous en donner la recette de conservation, ont légèrement fini par me donner la nausée. Faut dire qu'Olga aime ça vu l'enthousiasme avec lequel elle en parle 😊, moi un peu moins.

Que vous soyez voyageur, voyageuse ou non, importe peu. Il vous suffit d'y mettre votre coeur et votre esprit pour savourer ce puzzle géant, constitué des snapshots ( instantanés) de ses pérégrinations. En fin de voyage vous quitterez probablement ( suis pas sûr 😊)à regret ce scrapbook de voyage, le “Wunderkammer” ( Cabinet de Curiosités ) d'une écrivaine spéciale , qui vient d'ailleurs d'en être mondialement reconnue; et probablement lu ou non lu, vous vous procurerez vite le Moby Dick de Melville, le guide de voyage préféré de Tokarczuk. Ce livre n'est pas pour tous les goûts, il risque d'être déroutant. Mais pour qui a des goûts littéraires éclectiques, un défi de lecture très intéressant, voir amusant.

“–Laisse tout cela, et une fois que tu auras fermé les yeux, change ta manière de voir pour une autre et réveille cette vision que tout le monde possède, mais dont peu font usage.”

Deux Snapshots ,

“Instructions de montage

J'ai rêvé que je feuilletais un catalogue américain avec des photos de bassins et de piscines. Je regardais avec intérêt des schémas et des plans, m'attardant sur chaque détail. Les différents éléments y étaient repérés par des lettres a, b, c… et accompagnés d'une description précise. Avec le plus grand intérêt, j'ai commencé à lire un chapitre au titre étincelant : « Construire un océan. Instructions de montage. “

“Même

Sur les bords de la route, je vois défiler d'immenses panneaux publicitaires qui proclament noir sur blanc : « Jesus loves even you. » Un soutien si inattendu me redonne du courage ; la seule chose qui m'inquiète, c'est cet “even”. “
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SEMAPHORE
O vous qui aimez les belles histoires bien ficelees, qui cherchez du suspense, lachez ce livre! Passez outre! Passez votre chemin! Allez ailleurs! Partez! Fuyez!
Mais si vous ne savez pas trop de quoi vous etes en quete, si vous etes prets a vous laisser mener par le bout du nez, sans savoir vers ou, a vous laisser haler par des chemins detournes, ce livre est pour vous. Il vous arrachera a votre home sweet home, vous prendra vers de nombreux ailleurs, que vous ne conceviez pas, que vous ne soupconniez pas, certains charmants et d'autres mines. Partez avec lui! Ne le fuyez pas! Il vous decevra peut-etre. Il faut etre pret a tout.

ENTRER DANS LA MELEE
Mais qu'est-ce que c'est que ce fatras? Tokarczuk nous raconte ses voyages, ses envolees, des rencontres fortuites. Elle y introduit ses elucubrations sur la difference entre l'ici et l'ailleurs, sur la necessite de bouger, sur le desir de partir, de se perdre. Elle y mele des nouvelles plus ou moins longues qui paraissent (du moins au debut) deplacees, hors de tout contexte. Elle parseme des descriptions tres detaillees de ce qu'on appelait des cabinets de curiosites, panopticums, wunderkammers, et de leurs tresors, squelettes, membres plastines, fiasques ou nagent des coeurs, des reins, dans du formol ou autres solutions savantes, " ...dans un bocal allonge, muni d'un couvercle qui ressemblait a une sculpture, flottait un foetus aux yeux fermes, suspendu par deux crins de cheval. Ses petits pieds touchaient ce qui restait du placenta rougeatre, dispose sur le fond." Morbide? Morbide! Vous vous sentez mal? Vous allez vous evanouir? Vous voulez des sels?

SORTIR DE LA MELEE
A des dizaines, des fois des centaines de pages, des nouvelles se completent, des chapitres se repondent, et l'incomprehension s'attenue, on arrive a saisir, sinon un sens, au moins une direction. Tokarczuk peregrine, dans sa vraie vie peut-etre, en litterature surement. Elle part pour l'inconnu et nous prend avec elle. Et elle nous berne. Les trois questions qu'elle dit etre inherentes a tout peregrin, pays d'origine, point de depart, point d'arrivee, ne sont pas valides pour son texte. On subodore le point de depart mais on ne sait jamais quel sera le point d'arrivee. Et le lecteur de se demander: ou suis-je arrive? Suis-je vraiment arrive? Serais-je en transit? Est-ce que Tokarczuk est en transit? Entre des romans differents? Entre des conceptions differentes du roman? C'est peut-etre ca. Elle essaie ici une oeuvre circulaire, qui tourne tourne et tourne autour d'un theme, ou plutot d'une idee, essayant de la tester, de la tamiser, dans differents genres litteraires. "Aujourd'hui je peux me poser la question: que cherchais-je?"

Et ca donne une sorte de roman post-moderne, non denue d'interet. Parseme de tres belles pages, de beaucoup de fragments a mettre en citations. J'ai particulierement aime la derniere grande nouvelle, Kairos, dont le titre (et le contenu bien sur) fait echo a des passages precedents, lointains, qu'on croyait avoir oublies. Des passages qui semblent donc en perpetuel changement, qui se tortillent et se deplacent pour mieux nous maneuvrer. Les textes de Tokarczuk semblent avoir adopte la devise, la publicite, entr'apercue dans un aeroport: "La mobilite est la realite."

Essayez donc ce livre. Ne le fuyez pas. Au contraire, fuyez avec Tokarczuk vers des destinations inexplorees. Prenez le baton du peregrin.

ACKNOWLEDGEMENTS
Ce livre a recu de grands prix. Je lui prefere quand meme Les Livres de Jakob, qui est a mon avis le chef d'oeuvre de l'auteur jusqu'ici (elle est encore jeune...). Je lui avais octroye quatre etoiles, celui-ci n'en recevra donc que trois et demie.
Il y a aussi une deuxieme raison a cette "notation". Par hasard, sans nous concerter, nous avons entrepris la lecture de ce livre a peu pres en meme temps, Bookycooky et moi. J'ai lu son compte-rendu, que j'ai savoure (ah! les emoticones! nouveau?) (appel du pied discret pour qu'elle apprecie le mien). Par une ancienne tradition de generations de babeliotes, contractee en d'autres vies, j'ai pour habitude d'etre plus radin qu'elle, plus pres des etoiles de ma bourse. Abandonner cette tradition serait une trahison, et je n'aurais plus qu'a fuir au loin, a reprendre un peregrinage au destin incertain.
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Olga Tokarczuk est l'écrivaine polonaise la plus primée et sans aucun doute ma préférée, elle ne m'a encore jamais déçue. Voici l'un de ses romans les plus connus qui a reçu le prix Nike (équivalent polonais du Goncourt) et l'un des six traduits en français.

Rien à voir avec Sur les ossements des morts qui a été pour moi un coup de coeur. "Les Pérégrins" est un livre inclassable qui m'a éblouie par son érudition sans parler de l'écriture qui m'a encore une fois épatée. C'est un étonnant mélange de récits, d'anecdotes et de réflexions sur le voyage. Un phénomène qui fascine l'auteure et dont elle nous livre les différentes facettes. On peut se déplacer d'un endroit à un autre, d'un continent à un autre, à pied, en avion, en bateau mais on peut aussi voyager dans le temps ou à l'intérieur du corps humain pour découvrir ses secrets.

Depuis son origine l'homme est en perpétuel mouvement et Olga Tokarczuk nous décrit ses motivations dans un patchwork d'images, d'apparitions et de souvenirs. De courtes histoires tenant sur quelques pages, parfois seulement quelques lignes, des personnages fictifs ou réels forment un ensemble riche et original. J'ai beaucoup aimé ce livre, si différent de mes lectures habituelles. Sans début ni fin, on peut y piocher à volonté pour se régaler de l'imagination de l'auteure, de son intelligence et de son talent à nous livrer un texte à la fois profond et accessible.
Lien : http://edytalectures.blogspo..
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Lire Olga Tokarczuk, c'est se retrouver sur le divan d'une psychotérapeute qui nous parlerait d'elle. On laisse la psy raconter, et nous décrire le symptôme dont elle est atteinte.
« Les symptômes qui se manifestent chez moi se résument en une attirance pour tout ce qui est déglingué, imparfait, estropié, fêlé. Je m'intéresse aux formes qui sont comme des erreurs dans la création, des impasses. À ce qui était censé s'épanouir, mais qui, pour des raisons inconnues, est resté atrophié ou bien, tout au contraire, s'est développé à l'excès, au-delà du projet initial. À tout ce qui s'écarte de la norme, est trop petit ou trop grand, excessif ou incomplet, monstrueux, répugnant […] Ma sensibilité est tératologique, monstrophile. »

On peut, en tant que patient, s'identifier, opérer un transfert, mais on ne peut pas, je le crains, tendre la main à son psy pour l'aider à soulager ses symptômes, car on ne peut que l'écouter, on ne peut que la lire la Tokarczuk, on ne peut pas lui répondre (ça ferait quand même cher la séance. Allez, je t'envoie la facture Olga!) Par moments, on a envie de l'aider. Surtout lorsqu'elle écrit que le monde est sombre, infernal. Elle s'intéresse au Kali Yuga, au monde qui s'assombrit. Par moments, on se demande si elle ne serait pas tentée de rejoindre une secte (celle des Livres de Jakob par exemple) ou celle des Pérégrins (qui serait une secte de l'ancienne Russie). Dans un chapitre, on sent qu'elle est à deux doigts de finir dans un métro emmitouflée dans des couches de vêtements et de lancer des insultes aux passants tout en se balançant sur elle-même. Elle nous dit que si elle bouge, c'est pour ne pas se laisser enfermer (C'est pourquoi elle fuit lorsqu'on l'approche).

Lors d'une autre séance, je la laisse m'expliquer, dans un aéroport, ce qu'est la psychologie du voyage. Alors, j'ai beau avoir suivi les conférences de ce livre, je ne suis pas certaine d'avoir tout saisi au vol de l'avion, mais je me dis que ce n'est pas bien grave et tant mieux, car Olga Tokarczuk l'écrit elle-même que la psychologie est loin d'être une science exacte. D'ailleurs, elle explique dans ce livre pourquoi elle a arrêté de s'adonner à la psychologie. On se demande parfois à la lire dans quelle mesure ses livres peuvent être autobiographiques (d'autant plus qu'on s'y perd avec tous ses personnages). Mais je crois qu'elle nous en dit beaucoup lorsqu'elle écrit qu'elle sait aujourd'hui une chose : « quiconque cherche de l'ordre et de la cohérence doit se tenir à l'écart de la psychologie. » Personnellement, j'aurais soigneusement évité de faire les mêmes études qu'elle, ne serait-ce que pour éviter les dissections. Elle écrit qu'elle soupçonne que tous les étudiants en psychologie ne font pas ces études par hasard et qu'ils ont tous au fond d'eux une faille secrète. Une espèce de tumeur psychologique. (Méfiez-vous des psy, ils sont peut-être plus fous que vous!) Olga Tokarczuk elle-même est un peu toquée. Mais elle a le mérite d'avoir changé de voie, en sentant qu'elle aurait fait une piètre psychologue. D'ailleurs, elle était contre la méthodologie de la discipline, parce qu'elle trouvait les tests mensongers, on enseigne aux étudiants la statistique, on leur apprend à placer l'être humain sur des repères orthonormés. Elle préfère quand l'être humain sort des cases.

Elle les préfère dans des bocaux les humains … (Quand je vous dis qu'elle est bizarre!) N'oublions pas qu'elle est de sensibilité
«  tératologique, monstrophile ». Elle puise dans cette fascination pour l'anormal et nous décrit minutieusement des corps en morceaux, des bocaux fascinants / répugnants (au choix) tels qu'on en trouve au Museum d'Histoire Naturelle. Des bocaux qui ont plus l'air artificiels que naturels et c'est « normal » à mon sens de les trouver artificiels ces morceaux de corps humains « naturels » car il n'est pas « naturel » qu'ils soient conservés aussi longtemps, après la mort, dans des bocaux, par ex. Olga Tokarczuk nous parle des procédés de conservation comme la plastination, ce qui peut aussi bien attirer/ repousser (au choix) ses lecteurs et ses lectrices. Moi j'aime bien la lire, mais, j'insiste, je la trouve vraiment bizarroïde, alors je la lis avec des pincettes (après l'avoir bien disséquée, pour mieux l'analyser).

* « Olga Tokarczuk a étudié la psychologie à l'université de Varsovie. Durant ses études, elle travaille, bénévolement, avec des personnes souffrant de troubles mentaux. Après avoir terminé ses études, elle devient psychothérapeute à Wałbrzych. » Wikipedia
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Et voilà Les Pérégrins c'est fini.

Un livre plus complexe que "Sur les ossements des morts".

Une écriture toujours aussi soignée et intéressante. Bravo à la traductrice.

Un style qui s'appuie sur les images.

Un ensemble de portraits d'individus très différents.

Un entrelacs entre voyageurs et plastinateurs. Étonnant cette fascination pour l'anatomie et sa conservation.

C'est une seconde lecture, 10 ans après la première que j'avais complétement oubliée. Comme les gouts peuvent évoluer, je vous copie la note que j'avais pondue à l'époque (mars 2011)


J'ai enfin fini les Pérégrins de Olga Okarczuk. Quel soulagement, je comptais les pages restantes….

Je vais être de très mauvaise foi mais même sa première phrase est plate : « J'ai cinq ou six ans »

Pour un roman sur le voyage (ou plutôt sur les gens qui voyagent) je ne peux pas dire qu'il m'ait vraiment transporté (dans le sens de ravie)… J'ai failli laisser tomber au bout de 50 pages.

Ce roman est une suite de personnages différents ayant en commun le fait qu'ils voyagent, et l'intérêt, plus ou moins prononcé, pour la plastination (technique d'embaumement du corps humain / animal). Certains de ces personnages apparaissent, disparaissent, on ne sait pas trop pourquoi. Cela peut être des voyages temporels (retour historique) et géographiques.

J'ai aimé cette Polonaise immigrée aux antipodes, par contre les autres m'ont souvent laissé indifférent. C'est poussif. J'y ai retrouvé l'idée de l'Homme qui parle de Llosa dans cette secte russe qui doit voyager pour ne pas se laisser emporter par l'adversité. Mais franchement cela n'a pas l'intérêt d'un Llosa.

Mme Olga Okarczuk, je ne vous relirai pas.

Comme quoi, avec le temps... 10 ans plus tard, j'ai aimé ce livre.



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Ce livre n'est pas un véritable roman mais une sorte de récit de voyage étayé de lettres, de réflexions personnelles, de cartes anciennes.

L'auteur nous propose une succession de textes de différentes longueurs, parfois un paragraphe à peine, ou plusieurs pages, tous en rapport avec le thème du voyage, moderne ou pas, fictif ou pas.
Le titre fait référence à une secte, "les pérégrins", qui sévissait en Russie et qui poussait les hommes à ne pas rester au même endroit sous peine de devenir plus vulnérables aux attaques du Mal.

Le lecteur est invité à suivre l'auteur dans un aéroport, une gare, dans un musée, dans une salle d'attente...là, il va pouvoir observer sans voyeurisme les passagers. Il découvre alors des personnages discrets ou hauts en couleurs, des gens ordinaires ou pas, des mères de famille, des voyageurs qui ont fait le tour du monde ou pas, des conducteurs qui font toujours le même trajet quotidien... Tous ont un jour envie de rompre avec la routine, de retrouver leur liberté, de vivre d'autres situations plus exaltantes.
La narratrice (l'auteur donc) nous emmène à la rencontre de l'autre, car c'est le but du voyage, n'est-ce pas... d'aller à la rencontre d'un autre "voyageur", puis de soi-même. Ce faisant, elle nous présente toute une galerie de personnages fictifs ou ayant réellement existés.
Parmi ceux ayant réellement existés, vous croiserez, Philip Verheyen qui, au XVIIe siècle a étudié l'anatomie sur sa propre jambe amputée et découvert le tendon d'Achille, celle de Ludwika, la soeur de Frederic Chopin qui, après la mort du compositeur, a transporté en cachette son coeur de Paris, à Varsovie...afin de placer l'urne dans la crypte de l'église Sainte-Croix de la ville, et bien d'autres personnages que je ne connaissais pas et que je n'ai pas réussi à identifier.

C'est un livre inclassable car il ne ressemble à aucun autre.
J'ai aimé la poésie qui se dégage de certains des textes et leur philosophie qui nous invite à méditer sur ces tranches de vie.
J'ai aimé l'humour avec lequel l'auteur décrit des situations réelles ou totalement improbables.
J'ai aimé découvrir la personnalité des différents personnages, les détails et l'ambiance qui nous permettent d'éprouver de l'empathie pour eux, dont nous partageons pour un court instant, la vie.
J'ai moins aimé, le fait qu'on ne puisse s'attacher à aucun d'eux en particulier, car le récit est trop bref pour cela.

D'ailleurs à la moitié du livre, j'ai cessé de découvrir ces textes en lecture linéaire, j'ai zappé d'un sujet à l'autre et j'ai préféré cette manière de le découvrir dans le désordre, à celle que j'avais effectuée au début de ma lecture.
J'ai eu envie de sauter certaines histoires qui ne m'ont pas du tout intéressées et donc je l'ai fait.
Je dirai donc que ce livre est un peu déroutant et que chacun des lecteurs doit trouver son propre mode de lecture pour le découvrir.
Il me donne cependant envie de connaître les autres oeuvres de l'auteur traduites en français. A suivre donc...

Olga Tokarczuk est polonaise. Elle est née en 1962 et est aujourd'hui la romancière la plus célèbre de sa génération. Elle a reçu le Prix Niké qui est l'équivalent polonais du Goncourt, pour ce livre.
Elle a obtenu, en 2019, le Prix Nobel de Littérature 2018.
Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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Un ensemble de textes, de quelques lignes à une vingtaine de pages, sur les voyages, ou plutôt les voyageurs, ceux qui ne peuvent rester en place. Caractéristique de notre temps, fait de civilisation, certes mais le voyage, en tant que besoin, existe depuis bien plus longtemps. Rien que le besoin du voyage intérieur, dans les profondeur du corps humain, dans la douloureuse nécessité de le saisir en en comprenant le fonctionnant, et le dysfonctionnement, en le reproduisant. Comme l'écriture saisi d'une autre façon l'âme, une autre façon de figer un fonctionnement, et dont le mouvement tout en étant en apparence l'opposé, est en fait le double réel. Donc voyager, bouger et voir, comprendre et maîtriser ou tout au moins s'abandonner à l'illusion de cette possibilité est en fait la même chose, et répond à l'éternel angoisse qui habite chaque être humain, et qui ne s'apaise qu'avec la mort.

Etrange livre, par moments fulgurant, sombre et lumineux à la fois. Certains textes sont vraiment magnifiques, plein de ces personnages obsédés, habités par une étrange force qui les dépasse. Comme cet homme, dont la femme et le fils disparaissent plusieurs jours sur une minuscule île, qui ne peut s'empêcher, lorsqu'ils sont revenu de vouloir savoir ce qui s'est passé, au point d'occulter tout le reste de sa vie. Olga Tokarczuk a le don de créer des personnages, et nous donner à toucher et à ressentir leurs angoisses et obsessions en quelques pages, d'une façon tellement tangible tout en étant suffisamment subtile pour que l'indicible soit plus fort que l'explicite. Quelques fragments sont tellement intenses qu'il est difficile de passer à l'éclat suivant de suite, il faut laisser passer un petit moment, laisser la lecture de côté.

Mais d'autres morceaux, surtout les plus courts, m'ont un peu moins convaincue, et j'ai eu un peu par moments la sensation d'être dans un exercice de style, brillant d'ailleurs.

J'ai au final la sensation que l'auteur a recherché un peu d'autres pistes, en particulier formelles, que dans ses livres précédents, et même si l'essai est séduisant, il ne mène pas à une nouvelle voie vraiment viable pour la suite de son oeuvre.
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Olga Tokarczuk est quelqu'un de déroutant. Je me suis mis aux pérégrins car j'étais (et suis) en train de lire ses « livres de Jacob » et que ceux-ci m'ont mis en déroute. Je bute  pas désagréablement mais il y a beaucoup de dieu là-dedans et je ne voudrais pas lire une bible bis!!! Donc pour comprendre un livre , un autre livre…
Et là toujours cette impression que pour comprendre et apprécier il fallait se laisser aller et surtout ne pas tempêter laisser Tokarczuk montrer le chemin, guider le pèlerin/lecteur à travers le temps et l'espace . Ce n'est pas un voyage pour voir des choses mais un voyage pour se réaliser.
Le sédentaire accapare un lieu mais le temps lui échappe le voyageur ici, pérégrin, est un être en devenir en parcourant une distance il se ménage le temps et se constitue.
On peut imaginer une toupie qui tourne en avançant : le fait d'être vivant c'est le déplacement et le tournoiement l ‘arrêt la mort
Une fois cela compris Tout va bien .
Cela nous amènerait vite à la relativité d ‘Einstein, au problème des jumeaux de Langevin voir au chat de Schrödinger
Oh la la ...Mais Tokarczuk a un savoir faire indéniable pour nous parler de science et métaphysique le plus simplement du monde

Une initiation à la métaphysique du voyage par des véritables notes déconnectées les unes par rapport aux autres mais étalées dans le temps et l'espace, qui disent toutes : les voyageurs sont les impulsions du vivant et constituent le flux de la vie

Un voyage dans le monde scientifique du vivant médecins-anatomistes /empailleurs naturalistes . Les morts, les empaillés, les musées des curiosités ou horreurs, les planches anatomiques, la vie figée des cadavres plastinés Bref la vie qui stagne avec des effluves de mysticisme.

Un voyage dans le temps avec des nouvelles courtes , très courtes voire anecdotiques très bien instruites et percutantes …. sans suite mais qui accolées les unes aux autres participent au voyage
Un voyage dans l'âme au sens large plutôt que dans la psyché dans laquelle on se perd
Des personnages sans ostensions qui existent parce que Olga Tokarczuk les saisit à la volée entre deux avions, sur une île ,un bateau ou dans le métro
Olga Tokarczuk nous ballade pour notre plus grand plaisir dans un diagramme d'espace-temps en contractant les longueurs et dilatant les durées .
Un livre protéiforme Mine de rien elle passe de la science terrestre la plus banale l'observation de l'humain , de son corps, à la prospection théologique et aux grandes questions qui agitent l'homme.
On passe de l'homme simple mécanisme qui répond à la question comment à l'homme élément d'un tout et dont le pourquoi reste sans réponse.
Une odyssée mystique dans le temps et l'espace

Olga Tokarczuk, à bien y regarder est une rigolote du moins « pince sans rire » à l'humour et humeur noire parfois. Ce serait un grand tort de ne pas la prendre au sérieux !

Une très belle plume !

« Je pense que l'homme a besoin pour vivre d'un environnement climatique à peu près semblable à celui des agrumes »
Pas de pommes pour Eve et Adam mais plutôt des citrons








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Les pérégrinations du roman d'Olga Tokarczuk sont d'une surprenante diversité. Il est d'ailleurs lui-même une pérégrination, en forme de coq-à-l'âne, nous emmenant d'un épisode à l'autre sans que l'on saisisse toujours la logique de leur enchaînement ; mais sans doute n'y a-t-il aucune logique à chercher, le mieux étant de se laisser porter par le voyage, d'en accepter les cahots, de jouir de ses surprises…
Comment, dès lors, résumer "Les pérégrins" ?

Il y a bien un fil, que l'on suit tout du long de la traversée, tiré par une narratrice (l'auteure ?) férue de voyage depuis qu'enfant, elle a effectué sa première pérégrination, à pied, à travers champ jusqu'à l'Oder. Un voyage certes modeste en terme de distance, mais ce n'est pas ce qui importe ici. Non, ce qui compte, c'est qu'elle alors pris conscience que "ce qui est en mouvement sera toujours meilleur que ce qui est immobile, et que le changement sera toujours quelque chose de plus noble que l'invariance ; car ce qui stagne est voué inévitablement à la dégénérescence, à la décomposition et, en fin de compte, au néant (…)". Elle est de ceux qui ont la bougeotte, dont les racines ne s'enfoncent jamais assez profondément pour qu'elle ait envie de rester longtemps quelque part. Aussi, dès qu'elle a reconstitué un petit pécule, elle repart en vadrouille, par ailleurs atteinte d'un syndrome qui se résume en l'attirance pour tout ce qui est imparfait, déglingué. Elle est ainsi entre autres fascinée par les cabinets de curiosités, ou les musées exposant des difformités.

Quoi qu'il en soit, le but de ses pérégrinations est toujours la rencontre d'un autre pérégrin.

Elle évoque donc certaines de ces rencontres, parmi lesquelles une femme obsédée par la souffrance animale et parcourant le monde pour rédiger un Rapport sur l'infamie ; une Islandaise voyageant le long du méridien de Greenwich ; des couples de scientifiques organisant des petites conférences dans les aéroports…. Tout cela entrecoupé de considérations tantôt prosaïques, tantôt sociologiques, voire existentielles, sur ce qui a trait au voyage. L'éloge des aéroports, lieux de vie offrant les mêmes avantages que les villes -jardins et des circuits de promenade, étapes culturelles, centres de conférences…- peut ainsi faire place à un chapitre sur les cosmétiques de voyage, qui sera lui-même suivi d'un passage évoquant la psychologie insulaire, les insomnies qu'occasionnent les escales nocturnes ou les ravages causés par les guides de voyage qui, en nommant les lieux et en les épinglant sur des cartes, ont contribué à les affadir, à en estomper les contours.

Et puis, il y a des passages, tout aussi nombreux, hors du fil, qui s'insèrent dans le récit, en densifient la trame en même temps qu'ils la colorent, tranches de fictions, anecdotes historiques…

Certaines histoires ou thématiques reviennent, à intervalles irréguliers. Ainsi celle de cet homme, Kunicki, dont la femme et le fils disparaissent subitement, lors d'un séjour sur une île croate, alors qu'ils étaient allés assouvir une envie pressante dans les fourrés ; celle de ce conducteur de ferry qui un beau matin décide de dérouter -dans les deux sens du terme- son bateau et ses passagers ; celle de cette femme qui ne parvient pas à rentrer chez elle, où l'attend le dur quotidien qu'impose la maladie de son enfant…

On y décèle une forme d'éloge de la disparition, le voyage ouvrant des moments de latence pendant lesquels nous ne sommes plus localisables, mais aussi celui d'un élan qui nous pousse vers l'inconnu, l'optimiste conviction qu'ailleurs se trouve toujours quelque chose pour nous : la bonne occasion, le grand amour, le bonheur, bref, un moment particulier.

Les pérégrinations y sont aériennes, maritimes, pédestres, urbaines, ou en diligence (aux côtés du coeur de Frédéric Chopin emporté à Varsovie)… elles peuvent aussi être immobiles, comme pour ce prisonnier qui, afin de supporter l'enfermement, voyage dans "Moby Dick" et embarque ses codétenus avec lui.

Quel genre de pérégrination a en revanche souhaité évoquer l'auteure en ponctuant son ouvrage de récits en lien avec la taxinomie ou la plastination ? du spectacle d'une dissection pratiquée au XVIIème siècle aux lettres adressées par une certaine Joséphine Soliman à François Ier pour récupérer la dépouille de son père naturalisée par l'oncle de l'Empereur dont il était le serviteur, en passant par l'évocation des progrès effectués en matière de conservation des corps au fil des siècles, la thématique est récurrente, et surprend.

Mais peu importe, car selon Olga Tokarczuk, ce n'est pas les détails que se cache le Diable, mais dans la stabilité et l'attendu… et j'ai personnellement été complètement charmée par ce récit peut-être foutraque, mais immensément séduisant et, en effet, rempli d'inattendu.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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J aime beaucoup Olga Tokarczuk que je viens de connaitre. Celui ci est mon. 4 volume d elle ,ce n est pas mon préféré, Je l ai trouvé quand meme assez long meme si par bout il peut etre intéressant. Dans certain chapitre je me suis perdue il y avait des longeurs et dans d autre histoire j aurais préféré m y attarder,, Bien evidement avec des nouvelles il faut quelque fois s y attendre. Je comprend aussi que quelque fois la traduction ne leur rend pas tout l hommage mérité. Elle reste quand meme dans mes préférée.
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