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EAN : 9782752905932
170 pages
Phébus (15/09/2011)
4.09/5   103 notes
Résumé :

Un jeune homme emménage dans un appartement dont l'ancienne locataire vient de se suicider. Il est calme, timide, poli. Pourtant ses étranges voisins déclenchent aussitôt contre lui une guerre sournoise. Dans quel but ? Les effrayants mystères auxquels il peut assister de sa fenêtre existent-ils ailleurs que dans son imagination morbide ? Le propriétaire est-il sincère lorsqu'il affirme : " C'est un immeuble calme, ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Un conte noir à la tessiture délicieusement kafkaïenne !

Si ce livre était un film, ce serait assurément un film de David Lynch, vous savez ce genre de film, à l'image de Mulloland Drive, que vous devez regarder plusieurs fois pour commencer à avoir un début d'explication, explication toute personnelle qui diffèrera sans aucun doute de celle de votre voisin. Mais dès le premier visionnage, vous êtes admiratif, stupéfait et hagard…Vous ne comprenez pas tout, voire même rien, mais le film vous a happé, vous a fait sombré dans des abimes d'interrogations, est venu contrecarrer sans cesse vos débuts de compréhension, vous a parfois mis mal à l'aise surtout à la fin, lorsque les lumières se sont rallumées dans la salle et que vous vous êtes sentis démunis pour donner une cohérence à ce que vous avez vu. Surtout vous avez perçu confusément l'esthétisme du film dans les cadrages, les plans, la photographie. Ainsi fonctionne « le locataire chimérique ». Je ne m'attendais pas du tout à lire un roman d'une telle étrangeté dont le sens m'a échappée par moment tout en me fascinant et en venant me hanter une fois le livre fermé.

J'imaginais ce roman basé sur un scénario plus classique et comme c'est Grégoire Bouiller qui m'a donné envie de le lire, le citant à de multiples reprises dans son dernier livre « le coeur ne cède pas » pour lequel j'ai eu un énorme coup de coeur, je pensais qu'il s'agissait simplement de l'histoire d'un homme, nouveau locataire, qui s'installe dans un appartement dans lequel la précédente locataire s'est suicidée. Un homme est vraiment venu s'installer dans l'appartement de Marcelle Pichon après son suicide par inanition, c'est pour cette raison que Grégoire Bouiller évoque ce livre que je ne connaissais que via les critiques dithyrambiques de certains amis babeliotes. Certes, il s'agit bien du point de départ de ce curieux roman, mais au lieu de développer par exemple ce que ressent le nouveau locataire dans cet appartement où certainement l'âme de la défunte rode, Roland Topor brode en réalité une histoire absurde, sombre, à la fois douloureuse et drôle. Une sorte de conte noir, gothique, fantastique, burlesque. J'ai envie de retourner voir les passages du livre « le coeur ne cède pas » car je suis certaine que j'aurais une compréhension différente de cette référence dans le cadre de l'enquête menée par Bouillier.

Trelkovsky, un homme poli, simple, banal, sans histoire, petit employé transparent, a repris en toute légalité l'appartement d'une certaine Simone Choule qui, après s'être défenestrée, git mourante dans un hôpital. Gênée d'être déjà dans cet appartement meublé alors que cette femme est mourante, il va la voir à l'hôpital et découvre une femme à l'article de la mort, enrubannée, d'où émerge seul un oeil, hagard…Elle ne semble pas percevoir la présence de Trelkovsky qui lui a apporté des oranges ni celle de sa meilleure amie Stella avec laquelle le jeune homme va sympathiser puis avoir une relation amoureuse éphémère. le soir même Simone Choule décède. Commence pour Trelkovsky la vie dans cet appartement, sans cuisine ni toilettes, à qui le propriétaire, Monsieur Zy, qui vit juste à l'étage en-dessous, a donné moult recommandations à suivre impérativement : pas de bruit, pas d'animaux de compagnie, pas de femmes, pas de fête, pas d'enfant.

« Lorsqu'il soulevait le couvercle ‘une poubelle pour y déverser le contenu de son sceau, il était toujours étonné par la propreté qui y régnait. Ses ordures à lui étaient les plus sales de l'immeuble. Répugnantes et abjectes. Aucune ressemblance avec les honnêtes ordures ménagères des autres locataires. Elles ne possédaient pas leur aspect respectable. Trelkovsky était persuadé que le lendemain matin, en inventoriant le contenu des poubelles, la concierge saurait sans hésitation possible quelle était la part qui lui revenait. Elle ferait sans doute une moue de dégoût en songeant à lui. Elle l'imaginerait dans une attitude dégradante et elle froncerait le nez comme si c'était sa propre odeur qu'exhalaient les ordures. Il allait même, quelque fois, pour rendre l'identification plus difficile, jusqu'à remuer et mélanger ses ordures aux autres. Mais ce stratagème était voué à l'échec car lui seul pouvait avoir intérêt à cette manoeuvre saugrenue ».

Très rapidement, la vie dans cet immeuble devient pour lui un enfer, une véritable plongée dans les ténèbres les plus noires, les voisins frappant à la porte ou au plafond au moindre petit bruit. Ne voulant pas se faire remarquer et se fondre avec les murs, le pauvre homme tombe dans un délire, un véritable cauchemar… Je ne veux rien dévoiler de plus pour que vous ayez le même étonnement que j'ai pu avoir en le lisant. C'est cet effet surprise qui fait tout le sel de cette lecture. Sachez juste que les thématiques abordées sont celles de la destinée, celle de la paranoïa, de la folie, du piège, de la machination, de la gêne d'être au monde et de trouver sa place. Et alors que vous commencez à vous faire une idée de ce qui arrive à ce pauvre homme, la toute fin vous coupe l'herbe sous les pieds pour vous retourner comme une crêpe. Qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui ne l'est pas ? Quelle est la réalité et l'envers de la réalité ? Qui est Simone Choule ? Une femme venue hanter ses pensées ? Sa propre névrose ? L'élément déclencheur qui lui permet de voir vraiment l'absurdité de la vie, ordure parmi les ordures ? L'absurdité et le non-sens de sa propre vie seulement ?

J'ai refermé le livre, hébétée et songeuse, en me disant que décidément Roland Topor m'avait bien eu et que, par sa faute, j'allais encore me poser mille et une questions…
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L’écriture impertinente, absurde, fantasque, drôle et douloureuse de Roland Topor pose les fondations d’une histoire délicieusement aberrante et noire. Un conte fantastique et cruel. Trelkovsky gravit les marches de l’immeuble qui le conduit à son appartement. Il bâtit son délire mental. Chaque marche le rapproche un peu plus de ses angoisses, de son désarroi. Possédant et possédé, il n’arrive pas à se défaire de cet immeuble où tous le persécutent. Car ils veulent son expulsion, sa mort ; il finit par s’en persuader. Ils complotent contre lui, ils le harcèlent. Et pourtant ils sont quasiment invisibles. Ayant repris l’appartement de Simone Choule, locataire précédente, suicidée et mourante dans un hôpital parisien, il affronte peu à peu son espace mental. Simone Choule l’accompagne, goule invisible et incompréhensible. Trelkovsky finit par s’identifier à elle tout en essayant de la combattre. Mais que peut-on contre son destin ?
Lui, le petit employé banal essayant de se fondre dans les murs de la ville ; l’étranger ne voulant pas se faire remarquer, soupçonneux et soupçonné, se retrouve embarqué dans une histoire délirante, cauchemardesque.
Il est ridicule Trelkovsky quand il tente de descendre ses poubelles sans faire de bruit, sans se faire remarquer mais il est aussi pathétique face à l’adversité. Justement qui sont ses adversaires ? Tout le monde, les cloisons, les bruits, les ombres, la vie en somme. Qui est Simone Choule ? Sa conscience ? Son aliénation ? Sa fuite ? Préoccupé par le regard des autres, préoccupé par sa sexualité, Trelkosky s’enferme au sens propre comme au sens figuré. Rien ne semble pouvoir le faire dévier de son abyssale plongée dans les ténèbres. Pauvre Trelkovsky ! On peut le trouver grotesque, même méchant. Il est un naufragé à qui n’est promise aucune terre d’accueil.
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Je ne sais par où commencer ?

Le début peut-être ?

Ou un poème ?

Après tout, c'est le mois (haussement d'épaules).


JE 2 BILLETS

« Ô Chrystèle
Aux doux billets
Ils pourraient se
briser
Comme le cristal
En tout cas, j'en ai parfois
l'effet
La sensation, adieu
les faits
Tel Trelkovsky et son
reflet
Dans les yeux de ses
voisins
Dans son regard dans
le miroir
Tout cela m'a donné l'envie
d'écrire
Dans le froid du matin
Dans la lumière du noir
Sur ce livre, ce personnage
et ses déboires
Je prends l'étrange et l'échange
à la place du rire »

Atreides


DANS LE RÉTROVISEUR/ Livre lu en Mai 2022


Il y a un truc avec ce bouquin, un sentiment particulier, un attachement assez unique et en même temps c'est le livre qui m'a propulsé, malgré moi, hors de la fenêtre de ma vie dans l'appartement Babelio.

Alors je n'irais certainement pas me comparer à Simone ou à Trelkovsky. Je ne suis d'ailleurs qu'un humble caméléon qui a reçu beaucoup de soutien de la part de ses voisins ici.
Et puis, ce qui est arrivé devait arriver hein !? La loi de Murphy comme on dit. J'ai compris bien des choses depuis. Ça a cheminé dans le jus de cervelle, dans la boîte crânienne, jusqu'à l'occiput. J'ai fait le point et j'en suis arrivé à cette conclusion indiscutable :

Je suis plus joli avec un frou-frou autour du cou.

Mais oui ! Mais oui ! Pourquoi tel attirail serait réservé aux femmes ? Pourquoi seulement Simone pourrait avoir de l'allure !? Je vous jure.
J'entends la voix de Liz chanter "Frou-frou dans les feux du milieu d'été" dans ma tête, ça me fait du bien.

C'est comme la dernière fois que je regardais la télévision. Je regardais une émission avec un chat et une autruche. Ça parlait de gluons, c'était plutôt intéressant. Ça me changeait de mon quotidien. Bref, j'étais en train de regarder cette émission quand une soudaine envie de me vider la vessie a frappé. J'ai couru jusqu'à la toilette et là qu'est-ce que je vois dans l'appartement en face !?

Moi !

Oui moi ! Vous vous rendez compte ?! Sauf que j'avais du fard à paupières, des talons hauts et un rouge à lèvres assez sexy. Et mon premier choc a vite laissé place à du désir. le désir de ressembler à ma vision.

Vous allez me dire que je suis encore fou, que je suis un grand timbré, qu'il me manque une case. Je suis et je reste chou. Je suis un caméléon sur l'épaule de Paul. Je reste sage pendant la classe de Bernard, même si parfois ils me regardent comme si j'étais un extraterrestre ou je ne sais quoi ! Je ne suis pas Simone Choule, ça c'est certain. Je ne suis même pas locataire ! Je suis proprio. Alors lâchez-moi.

J'entends souvent comme un bruit de fond le soir. J'ai l'impression que c'est la télé des voisins du dessous mais je n'en suis pas sûr. J'entends parfois crier et ça me réveille. J'ai comme l'impression de voir des silhouettes dans l'obscurité. Mais c'est avant que ma vue se réhabitue à la noirceur de la nuit qui flirte avec les meubles de ma chambre. Je suis tout nu comme un vers et je regarde l'heure, toujours un chiffre impair. J'ouvre la fenêtre et ça y est, ça caille enfin. le lendemain, le voisin du dessous vient frapper à ma porte pour me demander d'arrêter d'hurler la nuit.

Je ne suis pas Simone Choule. Cette phrase me hante, cette citation m'obsède. Je pense que le locataire est mon Paul en ski préféré. Je rêve d'être votre locataire dans vos nuits, dans vos têtes, dans vos rêves, et surtout dans vos rêves humides. Vous pensiez que j'allais dire "cauchemars" hein !? Mais comme tout bon voisin, je ne vous veux que du bien. Je veux que vous vous sentiez à l'aise dans vos billets, je veux que vous nous partagiez le meilleur de vous-mêmes, tout ce qui fait qu'on peut vous distinguer d'un autre, quoique... je est un autre.

Je suis

Simone.


Simone
Chouleeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee


DANS LE TRANSE-VRAI


Non ce n'est pas le doux travesti de Transylvania
Economie d'énergie de courant pour les Sylvania
Je n'ai plus d'amis ni de famille comme les Sylvanian
Dans le noir, seul, j'absorbe tout les maux comme Vania

Et je me choule, heu, je veux dire que je me saoule
Même la nuit circulant dans mon cauchemar et la foule
Je n'ose même plus écouter du jazz ou de la soul
De peur d'entendre les voisins à ma porte, qu'ils déboulent

En furie furieuse für mich et mes belles fourrures
Je ne suis pas Simone mais j'aime les belles parures
Ombre au fond du couloir que je vois scruter l'escalier

Tout cela à travers ma serrure et ma porte verrouillée
Peur du moment où ils viendront me jeter en pâture
Folle folie qui foule ma vie des fous je détruis et je suis
foutu

Atreides




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Contraint de partir de chez lui, Trelkovsky est bien content de retrouver un nouvel appartement. Certes, les commodités sont réduites au strict minimum, et il n'est pas encore tout à fait libre, puisque l'ancienne locataire, qui a tenté de se suicider en sautant de la fenêtre, est toujours en train d'agoniser, mais dans le besoin, on prend ce qui vient !

Dès la pendaison de crémaillère, ses relations avec ses voisins se compliquent. le bruit des discussions provoque la colère de tous les autres locataires, qui ne manquent pas de faire savoir leur mécontentement. Trelkovsky vit désormais dans la crainte de leur déplaire, persuadé que l'immeuble entier épie ses moindres faits et gestes pour le prendre en défaut. Sa paranoïa s'accentue au fil des mésaventures qu'il rencontre : cambriolage, disparitions mystérieuses d'objet, personnes inconnues qui rôdent dans les couloirs, ...

L'ambiance de ce roman devient vite oppressante : le lecteur oscille sans cesse entre l'impression que les voisins lui préparent en effet un sale coup, comme à tous les nouveaux arrivants, et de se retrouver face à un personnage en proie à des délires paranoïaques de plus en plus importants. Cette indécision ne sera tranchée qu'à la toute fin du roman, qui apporte son lot de surprise.

Si vous aimez les histoires kafkaïennes, dans lesquelles la réalité vous file quoi que vous fassiez entre les doigts, lancez-vous dans ce court roman, vous ne serez pas déçus du voyage !
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relecture du "locataire chimérique" de Topor, après l avoir découvert il y a une bonne quinzaine d'années. livre aimant, addictif, troublant. le talent de l auteur tient avant tout du fait que les locataires de l immeuble, quoique légèrement stricts et à cheval sur qq principes, n ont rien de particulièrement original ni monstrueux mais que notre locataire accumule les bévues tout en étant très intrigué sur le sort de l ex locataire, Simone Choule,qui s est jetée par la fenêtre et gît sur un lit d hôpital, momifiée. les faits et gestes comme les pensées de Kielovski se teintent rapidement (le livre est relativement court) de parano et de complot contre sa personne. vrai, faux...Le héros semble emporter par le climat étrange, jusqu à en devenir le jouet. Simone Choule, Kielovski va lui rendre visite, de plus en plus persuadé qu elle aussi a été victime des habitants de l immeuble. Une ambiance étrange s installe très vite, suspicion, traquenard, veut on aussi éliminer le nouveau locataire? Un texte hors norme,une fin glaciale. folie, réalité, Kielovski est devenu un personnage symbolique de la littérature absurde. Ce livre est un fil tendu entre cauchemars, horreur dans lequel le héros se perd, malgré ses raisonnements factuels, qui ne l empêcheront pas de sombrer dans cet enfer, réel ou non. un grand livre, sous ses airs de rien.
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critiques presse (2)
Lexpress
25 novembre 2011
Grinçant et grave, l'art de Topor est là, déjà, dans toute sa splendide noirceur
Lire la critique sur le site : Lexpress
Telerama
28 septembre 2011
Le Locataire chimérique dépeint un monde clos, paranoïaque, où le rire organique de Topor résonne à chaque page.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
La solitude lui apparut dans toute son horreur. Personne pour s’occuper de lui, pour le dorloter, pour lui passer une main fraîche sur le front afin d’évaluer sa fièvre. Il était seul, absolument seul, comme s’il était en train de mourir. Si cela se produisait, au bout de combien de jours découvrirait-on son cadavre ? Dans une semaine ? dans un mois ? Qui pénétrerait le premier dans le sépulcre ? Les voisins, sans doute, ou le propriétaire. On ne se souciait pas de lui mais il en allait autrement pour le loyer. Même mort, on ne lui permettrait pas de jouir gratuitement de ce logement qui ne lui appartenait pas. Il tenta de réagir.
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La jeune fille était vêtue d’un chandail vert qui faisait saillir les seins dont, à cause du soutien-gorge, ou de l’absence, on distinguait les pointes. La jupe bleu marine remontait bien au-dessus des genoux, par négligence non par calcul. Toujours est-il qu’une bonne partie de chair avant l’attache du bas était visible. Cette chair laiteuse de la cuisse, ombrée, mais d’une luminosité extraordinaire à côté des régions sombres du centre, hypnotisait Trelkovsky. Il eut du mal à s’en défaire pour remonter jusqu’au visage, qui était absolument banal. Des cheveux châtains, des yeux marron, une grande bouche badigeonnée de rouge à lèvres.
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- Ah ! monsieur, vous avez vu ! Elle a fait signer une pétition. Elle a réussi. Je vais être obligée de m'en aller. Quelle méchante femme ! Et ils ont tous signé ! Sauf vous monsieur. Je viens vous dire merci. Vous êtes bon. [...]
Elle se crispa tout d'un coup.
- Mais je me suis vengée ! La concierge aussi est une méchante femme, ce sera bien fait pour elle !
Elle regarda autour d'elle pour s'assurer que personne ne pouvait l'entendre, puis elle reprit en baissant la voix :
- Avec sa plainte et sa pétition elle m'a donné la colique. Alors vous savez ce que j'ai fait ?
La jeune infirme fixait intensément Trelkovsky. Il fit signe qu'il ne savait pas.
- J'ai fait dans l'escalier !
Elle s'esclaffa.
- Oui, j'ai fait caca tout le long de l'escalier.
Ses yeux étaient malicieux comme ceux d'une petite fille.
- À tous les étages, tout le long. C'est de leur faute, après tout, ils n'avaient pas à me donner la colique. Mais je n'ai pas fait devant chez vous, ajouta-t-elle, je ne veux pas vous causer d'ennuis.
Trelkovsky était horrifié. En un éclair, il se rendit compte que l'absence de souillure devant chez lui, loin de l'innocenter, ne ferait que le condamner plus sûrement.
D'une voix rauque, il s'enquit :
- Il... il y a longtemps ?
Elle gloussa.
- Maintenant. Juste à la minute. Quand ils le verront demain, ils vont en faire une tête ! Et la concierge qui sera obligée de tout nettoyer ! Bien fait pour eux, bien fait.
Elle battit des mains. Il l'entendit encore glousser pendant qu'elle descendait l'escalier avec précaution. Il se pencha par-dessus la rampe pour vérifier. Elle n'avait pas menti. Une traînée jaunâtre zigzaguait le long des marches.
Il porta la main à son front.
- Il vont sûrement dire que c'est moi ! Il faut que je trouve un moyen, il le faut.
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Trois jeunes gens tentaient d'accoster une femme devant lui. Elle jeta un mot bref et s'éloigna à grandes enjambées peu gracieuses. Il rirent très fort en s'envoyant de grandes claques dans le dos. La virilité aussi le dégoûtait. Il n'avait jamais apprécié cette façon de revendiquer son corps, son sexe et d'en être fier. Ils se vautraient comme des porcs dans leurs pantalons d'homme, mais ils restaient des porcs. Pourquoi se déguisaient-ils, quel besoin éprouvaient-ils de s'habiller puisque toutes leurs façons d'agir suaient le bas-ventre et les glandes qui y étaient accrochées ?
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Personne pour s’occuper de lui, pour le dorloter, pour lui passer une main fraîche sur le front afin d’évaluer sa fièvre. Il était seul, absolument seul, comme s’il était en train de mourir. Si cela se produisait, au bout de combien de jours découvrirait-on son cadavre ? Dans une semaine ? Dans un mois ? Qui pénétrerait le premier dans le sépulcre ?

Les voisins, sans doute, ou le propriétaire. On ne se souciait pas de lui mais il en allait autrement pour le loyer. Même mort, on ne lui permettrait pas de jouir gratuitement de ce logement qui ne lui appartenait pas.
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