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Ivan Tourgueniev, Pères et Fils (1863)

Pères et Fils (en russe Отцы и дети, littéralement Pères et Enfants), une des oeuvres phares de Tourgueniev, a été traduit en français par l'auteur lui-même et par Louis Viardot. Ce roman social déclencha de vives polémiques car il décrit avec réalisme le conflit entre la vieille et la nouvelle génération aux idées opposées, c'est-à-dire entre les adversaires farouches des réformes, les réformistes partisans d'un libéralisme évolutif à l'anglaise, et Evgueni, un jeune radical pour lequel Tourgueniev crée le terme nihiliste parce qu'il refuse toute autorité, n'obéit qu'à sa propre loi et de manière destructrice, renie en bloc l'art, la famille, l'amour et la religion, mais il sera le premier à être détruit.

Le roman se passe à la campagne, en 1859, époque charnière de l'histoire de la Russie, deux ans à peine après l'abolition du servage par Alexandre II, le tsar qui a régné de 1855 à 1881, année où il a été assassiné par des révolutionnaires au moment où il se préparait à octroyer une constitution et à libéraliser davantage encore le régime. Cet attentat a provoqué un retour en arrière de son successeur, Alexandre III, et un virage particulièrement funeste pour le destin de la Russie et des Romanov. le personnage de Bazarov a inspiré Fiodor Dostoïevski dans son roman Les Démons pour la peinture de la jeunesse nihiliste, notamment à travers le personnage de Stavroguine. Ce roman est en partie autobiographique, puisque Tourgueniev a vécu toute son enfance à la campagne, où il a été choqué par la condition misérable des serfs qu'il voyait autour de lui.
Au début du roman, après trois ans d'absence, Evgueni (Eugène) Bazarov, futur médecin gagné au nihilisme durant son passage à l'université, regagne son village natal et la maison de ses parents, petits propriétaires, accompagné de son ami Arkadi Kirsanov, fils de propriétaires un peu plus aisés, et un moment son disciple admiratif. Evgueni, le personnage central du roman, prône un renversement politique avec un discours aussi radical sur le fond qu'arrogant et intolérant dans la forme («Je ne partage les idées de personne»), et c'est ce qui séduit d'abord Arkadi avant de le décevoir, car Evgueni parle et mais réalise rien. Il rejette tout ce qui permet le vivre-ensemble, en contraste avec les idées nuancées et constructives d'Arkadi qui finit par prendre ses distances, et avec celles des père et oncle de ce dernier, les frères Kirsanov.

Arkadi le convie un jour à un bal. Evgueni qui n'a que mépris pour l'amour et pour les femmes, tombe amoureux d'une jolie veuve fortunée, Anna Odintsova, qui l'invite dans sa propriété. Mais il n'éprouve pas de réelle affection, ce qui ne peut le mener qu'à l'échec, en même temps que cet évènement perturbe sa théorie qui rejette les sentiments. Il se plonge alors dans des recherches scientifiques au cours desquelles il se blesse. Il ne se soigne pas, la plaie s'infecte, et le typhus l'emportera. Confronté à la mort en disséquant un cadavre comme médecin, il réalise la vanité de son existence et s'écrie «Moi, utile à la Russie ? Non, mais un boucher, un cordonnier, un tailleur, oui». C'est encore le thème de l'homme de trop.

Le roman confronte pour le lecteur les idées sociales d'Evguéni, d'Arkadi et de leurs parents. le père du premier, Vassili Bazarov, propriétaire d'un petit domaine agricole, reste globalement fidèle aux idées traditionnelles, plus par habitude que par conviction, tandis que sa mère, la pieuse et réaliste Arina, est partagée entre l'amour de son fils et une inquiétude certaine devant ses discours destructeurs. C'est elle qui interpelle son mari en ces termes «Qu'y faire, Vassili ? Un fils est comme un morceau qui se détache… et nous deux sommes comme deux petits champignons dans le creux d'un arbre. Nous resterons là fixés pour toujours, l'un près de l'autre, moi sans changer pour toi, et toi sans changer non plus pour ta vieille femme».

Arkadi Kirsanov, l'ami d'Evgueni Bazarov, est d'abord perméable à ses idées, mais à l'issue d'une sorte de parcours initiatique, finit par rejeter son radicalisme, préférant l'acquis des réformes, mêmes lentes, au rêve incertain d'un futur violent. Tourgueniev décrit avec beaucoup de finesse l'amitié entre ces deux jeunes issus de milieux sociaux différents, et qui partagent le même idéal avant de voir leurs chemins diverger.

Le père d'Arkadi, Nicolaï Kirsanov, veuf timide a concrétisé ses convictions démocrates en offrant la liberté à ses serfs deux ans avant l'abolition du servage, mais n'a pas encore poussé le modernisme jusqu'à épouser sa maitresse, Fénetchka, une femme du peuple qui lui a donné un enfant. Ce sera pour la fin du roman, Tourgueniev abordant ici brièvement, comme dans d'autres oeuvres, le thème de l'amour entre personnes de classes sociales différentes.

Ce Nicolaï qui attend avec impatience le retour de son fils parti il y a trois ans, a un frère, Pavel (Paul), libéral opposé aux idées extrêmes du jeune Bazarov à qui il dame le pion plusieurs fois. C'est le plus proche des idées de Tourgueniev, adversaire de toute violence.

Contrairement à Evgueni, Arkadi trouvera le bonheur en épousant la soeur cadette d'Anna, la calme et douce Ekaterina (Katia). Les autres iront aussi vers leur destin. Pavel partira en voyage, Nicolaï épousera la mère de son enfant, et Anna se mariera à Moscou.

Roman à thèse en filigrane, Père et fils est davantage un roman de moeurs décrivant le pouls et le rythme lent de l'identité russe au 19ème siècle. Au-delà des conflits générationnels, Tourgueniev y brosse un tableau réaliste des mentalités et traditions des différentes classes sociales, des paysages de la ruralité de l'époque, de l'atmosphère des causeries qui animent les salons aristocratiques, et d'événement gais ou tragiques comme un bal, une conversation près d'une meule de foin voisine de la maison de Bazarov, ou un duel au pistolet entre Pavel et Evgueni. En cela, il est proche des autres grands auteurs russes de son temps, et notamment de Pouchkine, Tolstoï et Dostoïevski. Tous ses personnages sont décrits avec une grande pénétration psychologique, y compris Evgueni pris entre ses fanfaronnades et ses doutes, situation qu'on retrouve dans d'autres oeuvres du romancier, et qui ont fait parler d'hamletisme et de donquichotisme.

Tourgueniev cite plusieurs dictons qui reflètent l'esprit de cette époque, comme "Plus le maître est exigeant, plus il est aimé du paysan". Les contrastes sont permanents entre pères et fils, propriétaires et serviteurs, conservateurs et progressistes, slavophiles et occidentalistes, idéalistes et matérialistes,…

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Nous sommes en 1859, à la campagne, au lendemain de l'abolition (tardive) du servage. Bazarov, jeune médecin étudiant les sciences naturelles et prônant le nihilisme, rentre chez ses parents, de petits propriétaires. Il est accompagné d'Arcade qui lui est fils de propriétaires terriens plus aisés - sans pour autant être aristocrates. Arcade Nikolaïévitch est plus jeune que son maître à penser dont il cherche à conforter l'amitié mais un bref séjour chez son père et son oncle - qui, veufs, vivent ensemble au domaine familial - suffit à lui montrer le fossé qui sépare les thèses de son ami et les pensées traditionnelles de ses parents...

Avec "Pères et fils", Tourgéniev trouve prétexte à aborder des sujets de société sensibles tel que le conflit de générations à une période charnière de l'histoire politique et économique de la Russie, ou encore l'enracinement des idées nouvelles dans un terreau aussi archaïque que celui de la ruralité russe du XIXème siècle et, comme c'est généralement le cas avec la littérature classique russe, le lecteur ne s'immerge pas seulement dans une autre dimension temporelle mais aussi dans une autre dimension sociale et identitaire.

D'un point de vue psychologique, ce roman est remarquable. En peu de pages, l'auteur brosse une galerie très complète et diversifiée de personnages masculins et féminins forts, la plupart très fouillés. Quel régal de découvrir toujours plus avant la Russie dans les différentes classes sociales qui la composaient. Je ne manque jamais de m'attendrir sur les figures les plus chétives et les plus émotives comme les parents de Bazarov, totalement inénarrables et si criants de réalisme.

D'un point de vue intellectuel, ce roman est également très intéressant. Il apporte un éclairage supplémentaire sur la pensée russe, sur ses traditions, sa spiritualité, son folklore, sa politique et son peuple. Un peuple tout en contrastes qui, à l'heure de l'abolition du servage, se révèle encore par des dictons tels que "Et tant plus le maître est exigeant, tant plus il est aimé du paysan".

A travers le parcours initiatique d'Arcade, à travers les idées nouvelles de Bazarov, à travers l'amour plus d'une fois au rendez-vous, à travers les causeries de salon et les autres rencontres qu'il ménage, ce roman apporte sa touche à une meilleure compréhension de la complexe identité russe.

Un bon témoignage de la littérature romantique russe.
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Pères et fils est le roman phare de l'oeuvre de Tourguéniev, qui met en scène Bazarov, nihiliste auto-proclamé, et messager des tendances contestataires de la société russe de la deuxième moitié du 19e siècle.
Bazarov est accueilli dans la famille de son ami Arcade. C'est l'occasion pour lui de proclamer haut et fort ses convictions politiques et philosophiques : c'est en fait un matérialiste passionné de science et d'expérimentation, méprisant l'art et le romantisme qui ne sont que balivernes :

«Un honnête chimiste est vingt fois plus utile que n'importe quel poète »

De même pour l'amour et la dépendance qu'il implique, tout cela n'est pour lui qu'une affaire de physiologie (à une époque où les neuromédiateurs et circuits de la récompense n'étaient même pas pressentis )

Les discussions sont animées ( ce qui donne tout son sens au titre, à travers les divergences d'opinions intergénérationnelles) à un tel point que les deux jeunes gens s'éloignent de la ferme familiale. Les voyages forment la jeunesse et notre Bazarov voit ses principes fondre comme neige au soleil alors qu'il s'éprend de la belle veuve Anna Sergueievna. Et l'on peut constater à plusieurs reprises la fragilité des bases théoriques de sa ligne de conduite , avec un sommet lors de la provocation en duel par son l'oncle d'Arcade, puisque Bazarov explique que le duel lui semble un moyen idiot de résoudre les conflits tout en acceptant la confrontation armée.

Le roman commence avec lenteur, et il faut arriver au tiers du récit pour que l'action se mette en place. Voyages, rencontres, sont autant d'occasion d'exprimer des opinions sur la situation sociale en Russie et de mettre les personnages au pied du mur.

Tourguéniev n'a pas le lyrisme et la puissance d'écriture de Dostoïevski, et les personnages dans leur manque de consistance ne créent pas un point d'ancrage solide pour le lecteur. il n'en reste pas moins que, passées les premiers chapitres, on peut s'intéresser à la narration et surtout à la mine d'informations qu'elle nous livre : c'est une sorte de portrait instantané de la Russie rurale de la deuxième partie du 19è siècle, qui permet de ressentir les prémisses des bouleversements que l'on connaît..
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COUP DE COEUR

« Une demi-heure plus tard, Nicolas Pétrovitch descendit au jardin et se dirigea vers la tonnelle qu'il aimait tant. de tristes pensées l'assaillaient. C'était la première fois qu'il prenait clairement conscience de la distance qui le séparait de son fils ; il pressentait qu'avec le temps cette distance ne ferait qu'augmenter. »

Voilà un excellent roman du XIXème siècle : une histoire rondement menée, du rythme, des sentiments forts, des débats passionnés et une critique de la société russe féodale. On y aborde des thèmes universels, car derrière la question du conflit des générations se trame une multitude d'autres thèmes, l'amitié, la confrontation du romantisme et du matérialisme, le libre arbitre de l'homme peu instruit, la vanité de la vie humaine, ... Et aussi des paysages russes, des steppes et des prés fleuris où l'on herborise et en filigrane, une société russe - et occidentale globalement, Tourgueniev étant peut-être le plus occidental des Russes de son époque, ce qui probablement en facilite sa lecture – en pleine mutation.

Et aussi des personnages très attachants : Bazarov le nihiliste qui pense qu'un « honnête chimiste est vingt fois plus utile que n'importe quel poète. » et qui révèlera petit à petit toute sa fragilité, le jeune Arcade, en qui au final « il n'y a ni témérité ni colère, seulement l'audace de la jeunesse, la fougue de la jeunesse ; […]vous autres nobles, vous êtes incapables de dépasser le stade de la noble résignation ou de la noble indignation, or cela c'est du vent. » , son oncle dandy qui a « gardé une sveltesse juvénile et cet élan vers le haut, loin des choses terrestres, que l'on perd, en général, passé vingt ans ».

Et la sublime Madame Odintsov, belle et riche veuve qui s'ennuie dans son domaine, un ennui métaphysique qu'elle met à l'épreuve dans ses discussions avec Bazarov, « un homme avec lequel on a plaisir à parler … on croit marcher au bord d'un précipice. D'abord on a peur, et puis l'audace vous vient on ne sait d'où. ».

À noter aussi les apartés de l'auteur, tout à fait innovantes à l'époque, qui n'hésite pas à parler en son nom propre, à prendre un peu de recul avec le récit et les personnages. « le maitre soupira et s'assit sur un banc. Présentons-le au lecteur, tandis qu'il attend, là, les jambes repliées sous son siège, le regard vagabond et pensif ».

Bref un roman moderne et universel. A lire et probablement à relire à différents âges de la vie.
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L'heure du printemps a sonné. L'hiver n'est plus. Les bourgeons, gonflés d'impatience, sont devenus ces concentrés de jeunes feuilles qui ne demandent qu'une chose: que le soleil caresse leurs extrémités afin qu'elles puissent se déployer dans le vent d'avril. Au pied de l'arbre, les moineaux, eux, piétinent les derniers petits morceaux de glace qui parsèment une flaque d'eau. Nos amis à plumes reviendront, courant de l'après-midi, prendre un bain printanier qui deviendra vite une habitude quotidienne. Ils s'en iront, ensuite, sautiller de branche en branche à la recherche de l'endroit qui les exposera le plus à la chaleur du soleil. Une fois leur duveteux plumage séché ils plisseront les yeux, satisfaits que l'hiver soit maintenant derrière eux.

Chaque année, à pareille époque, je regarde ce saisissant spectacle de la nature reprendre pleinement ses droits. Elle nous survivra quoi qu'il arrive et c'est avec une joie sans cesse renouvelée que j'admire cette grandeur qui me remet à ma juste place dans le Cosmos: celle d'un grain de sable qui ne fait que passer.

Ivan Tourgueniev aussi ne fit que passer entre 1818 et 1883. Il laissa, pourtant, une empreinte durable dans la littérature classique russe. Ces romans et nouvelles ont traversé deux siècles pour arriver jusqu'à nous et la petite analyse que je vous propose aujourd'hui est celle d'un de ses romans clés: Pères et fils.

Il faut tout d'abord situer l'écriture de ce roman dans une Russie qui est en pleine abolition du servage. Avant 1861 et la date officielle de cette réforme, les paysans russes étaient sous le joug de propriétaires qui administraient de grands domaines. Ces serfs travaillaient autant à l'agriculture de ces mêmes domaines qu'aux tâches liées à l'intérieur des bâtiments de leur maîtres et la toile de fond que l'on peut voir dans Pères et fils est celle de cette Russie-là. C'est ainsi que nous retrouvons dès l'entame du roman, un des personnages dénommé Nicolas Petrovitch Kirsanov et qui possède plus de deux cents paysans dont certains sont des dvorovi, c'est à dire des serfs employés au service intérieur. Sans avoir l'air d'y toucher Tourgueniev nous emmène dans une vie où le servage est encore bien ancré mais où l'on s'aperçoit que les lignes commencent à bouger.

Ce roman est évidemment connu pour le personnage du jeune Bazarov qui vient bousculer les certitudes des générations qui le précèdent. Sans utiliser la langue de bois, il remet en cause les faits établis, tourne ses interlocuteurs en ridicule et déconstruit ce qu'il estime être de fausses vérités. En un mot, il représente la nouvelle génération qui veut faire place neuve à coup de nihilisme:

" — Je vous ai déjà dit, mon oncle, repris Arcade, que nous ne reconnaissons aucune autorité.

— Nous agissons en vue de ce que nous reconnaissons pour utile, ajouta Bazarov: aujourd'hui il nous paraît utile de nier, et nous nions.

— Tout?

— Absolument tout.

— Comment? non seulement l'art, la poésie, mais encore … j'hésite à le dire …

— Tout, répéta Bazarov, avec une inexprimable tranquillité. "

A certains égards, le nihilisme que Arcadie et Bazarov expriment dans plusieurs passages du roman font parfois, et bizarrement, écho à une certaine société actuelle. Celle qui non seulement ne vit que par la critique et le rabaissement de l'autre mais surtout celle qui met toute son énergie à déconstruire ce qui est en place afin de repartir sur des bases “saines” mais qui, dès le terrain déblayé, s'en va un peu plus loin déconstruire autre chose tout en laissant le précédent terrain exsangue. Telles ces méthodes managériales dites LEAN mal cadrées qui se cachent derrière le poncif d'amélioration continue afin de ne pas voir que l'organisation qu'elles ont réformée est désormais une coquille vide. A ce titre “Père et fils” peut questionner notre rapport au monde.

D'ailleurs, comme l'explique le titre du roman, l'histoire est celui du face-à-face de deux générations. La plus jeune essayant de pousser l'ancienne vers la porte de sortie. Tandis que la plus ancienne table sur son expérience pour expliquer aux plus jeunes qu'ils ont encore tant à apprendre de la vie. Les deux générations se verront éclaboussées l'une par l'autre et au final personne ne sortira vainqueur de l'existence puisque c'est elle qui a toujours le dernier mot.

Enfin, il est a noté qu'une des scènes marquantes du livre est celle du duel entre Bazarov et le frère d'Arcadie. Cette épisode vient souligner avec force les différends qui séparaient ces deux générations et apporte un brin d'aventure à ce roman classique. Ce mécanisme du duel est d'ailleurs, à mon humble avis, une intelligente catharsis pour donner du relief au propos de Tourgueniev et qui n'est pas sans rappeler un autre classique de la littérature russe sorti tout droit du XIXème siècle: un héros de notre temps.
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Ce court roman de Tourgueniev nous émeut très vite, par son sujet: la filiation et l'amour filial. Deux amis: Arcade et Bazarov rendent visitent à leurs pères à la sortie de l'université. Dans un premier temps, ces fils sont attendus comme des rois, ils sont la chair de ceux qu'ils les ont fait naître. Les pères débordent d'affection et de tendresse pour leurs garçons même s'ils ont conscience d'être dépassés par des raisonnements ou de nouvelles idées qui se font jour à cette époque là comme le nihilisme.
Mais très vite, Tourgueniev nous fait percevoir comme ses fils qui auraient tendance à rejeter l'affection de leurs pères, voire les taxer de sentimentalisme ou de sensiblerie sont très attachés à ces mêmes pères.
Le roman monte en puissance dans la description et l'évocation des sentiments filiaux qui lient bel et bien ces hommes.
À cela s'ajoute, l'amour, l'amour pour les femmes. Et, c' est assez poignant de voir notre brave nihiliste: Bazarov rejeter l'amour au début comme une vulgaire tocade. Les femmes, pour lui, sont des distractions tout au plus.
Il lui faudra attendre son agonie pour avouer à une femme qui l'aimait, mais trop tard.
La complexité des liens amoureux, l'amour impossible, haineux, tendre est parfaitement maîtrisée dans l'écriture de Tourgueniev.
S'ajoute à cela, ces descriptions d'une nature grandiose, qui offre à chacun le meilleur, qui peut y rester insensible ?
Bref, un beau et bon roman que je vous recommande sans modération.
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Voici un livre plein à craquer de vie, à la fois comique et tragique. Au coeur de ce roman sur l'amour, la politique et la société, les croyances fortes et les désaccords passionnés, la maladie et la mort, se trouve le clivage générationnel entre les jeunes et les vieux. Lorsque le jeune diplômé universitaire Arkady et son mentor, le nihiliste Bazarov, quittent Saint-Pétersbourg pour rendre visite à leurs parents vieillissants en province, le conflit qui découle de la confrontation des visions du monde des générations - le radicalisme des jeunes et le libéralisme des parents – est à la fois représentatif de la Russie du XIXe siècle et incontestablement contemporain.
Bref, c'est un chef-d'oeuvre russe, écrit si joliment et avec une telle économie, qu'à la fin de sa lecture, on se sent un peu secoué et un peu remué.
Une vodka peut être de mise.
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« Pères et fils » est un roman d’une importance considérable pour la littérature russe. Il a été un énorme succès en son temps et il a donné suite à toute une série de polémiques, de répliques, et même à toute une littérature sur le sujet du nihilisme et du matérialisme, notamment les fameux « Possédés » de Dostoïevski ou « Que Faire ? » de Tchernychevski.
Entre maîtres et serviteurs, aristocrates et plébéiens, libéraux et nihilistes, conservateurs et progressistes, slavophiles et occidentalistes, jeunes et vieux, idéalistes et matérialistes, romantiques et réalistes, les relations et les idées des différents personnages, très caractérisés et pourtant complexes, évolutifs, sont suffisamment éloignées de nos clichés actuels pour que je me garde d’en faire des commentaires. Seulement, le personnage principal se nomme Bazarof, c’est un jeune médecin, très intelligent mais prétentieux, un matérialiste dont les idées s’opposent à celles de la génération précédente, libérale et idéaliste. Et le roman se déroule juste avant l’affranchissement des serfs en Russie. Mais ce sujet est peu évoqué, en tout cas pas directement.
Car davantage qu’un roman à thèse, « Père et fils » est un roman de mœurs. L’amour entre personnes de classes sociales différentes étant l’un des sujets sur lequel s’est appuyé Tourgueniev. Mais il n’est pas question que de cela, là encore les choses sont assez compliquées à résumer. Sans compter que tout s’entremêle et que Tourgueniev laisse le lecteur libre de son interprétation.
Un parfait exemple de roman russe du dix-neuvième siècle, avec des échantillons représentatifs de toute la société et de ses préoccupations : des paysans, des réformes agraires, des progressistes, des salons aristocratiques, des bals, des duels au pistolet. C’est comme un mélange de Pouchkine, de Tolstoï, de Dostoïevski. Donc, c’est excellent.
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Cette histoire m'a profondément ému, par la simplicité de son sujet et par la beauté de son style d'écriture.
Dès les premières lignes, l'auteur nous emmène dans cette magnifique campagne russe du XIXème siècle. Grâce à ces magnifiques descriptions, je me suis sentie vraiment là-bas : je déambulais dans le domaine familial des Kirsanof ; j'étais confortablement installée dans le salon de Mme Odinstof ou allongée dans la meule de foin près de la maison de Bazarof...
Le récit est simple, mais difficile à résumer si on ne souhaite pas dévoiler la fin. Beaucoup de thèmes sont évoqués dans ce récit avec une délicatesse et une subtilité que j'ai rarement vu :
- l'amitié, ce lien merveilleux qui rapproche deux jeunes hommes, issus de milieux sociaux différents, mais qui partagent les mêmes idéaux. Cette amitié connaît des moments de bonheur mais aussi des rivalités, et résiste parfois mal au temps et aux choix individuels.
- la jeunesse, cette époque de la vie où tout n'est qu'insouciance, nouvelles idées révolutionnaires et projets fantaisistes. J'ai aimé leur fraîcheur, leur naïveté et leur aplomb. Pourquoi ne pas aller séjourner chez une veuve qui a mauvaise réputation pendant plusieurs semaines ? Ou aller à un bal dans une lointaine commune ? Ou voler un baiser à une femme?
- l'amour inconditionnel des parents pour leurs enfants : c'est la partie qui m'a le plus ému. Je n'ai pas encore d'enfant mais l'auteur a su transcrire ce sentiment avec une vérité et une sensibilité exceptionnelle. Comment ne pas être touché par l'impatience de Nicolas Kirsanof qui attend son fils ? Ou la joie des parents de Bazarof qui le revoient au bout de trois ans ? Et leur déception lorsque leur fils les quitte pour on ne sait quel projet ? Voici un des passages les plus beaux du livre : « Qu'y faire, Vassili ! un fils est comme un lambeau qui se détache ; c'est un jeune faucon ; il lui plaît de venir et il arrive ; il lui plaît de repartir et il s'envole ; et nous deux, nous sommes toi et moi comme deux petits champignons dans le creux d'un arbre ; placés à côté l'un de l'autre, nous restons là pour toujours. Moi seule je ne changerai pas pour toi, comme toi tu ne changeras pas pour ta vieille femme ! »
- le sens de la vie: faut-il mener sa vie comme les générations passées l'ont toujours fait ou s'émanciper de leur schéma ? Qu'est-ce qui rend le plus heureux : est-ce l'amour ? la famille ? la fortune ? les idéaux ?
Le style d'écriture est MAGNIFIQUE, clair, limpide, doux. Les mots me manquent pour vous dire à quel point tout est beau. La fin est splendide, avec un jeu de parallèles saisissant entre la vie et la mort.
Conclusion : à lire de toute urgence !
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Voila un livre comme je les aime;avec une histoire familiale,des descriptions et des discussions inter-generationnelles;des echanges de points de vue,et se dire que tout cela passait pour la modernite du 19e siecle.
J'aime...L'evolution des idees et des moeurs ont beaucoup a nous apprendre;c'est toute une histoire;un autre point de vue et tres interessant a connaitre
Tres beau livre,plein de richesse familiale et philosophique du quotidien et de l'evolution des idees
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