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Critique de ElGatoMalo


En est-il de l'amour et de la pérennité du couple comme des sculptures de Patricio Lagos : vite enlacées un moment dans un creux du sable de la baie du mont St Michel, étreinte éphémère, effacées de la terre par la montée de la marée du temps qui passe à la vitesse d'un cheval au galop. Ce livre regroupe vingt textes dont le premier qui les introduit tous, Les Amants Taciturnes, propose cette image et finalement la perspective d'un dénouement plus heureux.

Les mousserons de la toussaint
Sur la mémoire, le temps qui passe, la nostalgie. Amis d'autrefois, deux personnages à l'opposé l'un de l'autre. le premier brûle l'instant présent en n'arrivant pas à trouver une véritable satisfaction dans ce qu'il vit au jour le jour. L'autre préserve un statu quo dans un présent qui s'éternise. Étrange alchimie de l'amitié qui permet de frapper à la porte de quelqu'un et le voir vous inviter à déjeuner comme si trente cinq années ne s'étaient jamais écoulées.

Théobald ou le crime parfait
Encore deux personnages, des doubles négatifs et positifs qui se font écho dans le temps sur le thème de l'amour et de la vengeance cette fois-ci. Quelques coups de griffe sur le corps enseignant et sur les élèves, moins incisifs mais plus justes. le portrait du couple principal semble être tiré d'un dessin de Dubout ou d'une illustration de couverture d'un San Antonio. Enchainements de faits et de circonstances bien peu probables cependant, quoique...

Pyrotechnie ou la commémoration
Un bel exemple de mise en abime car il s'agit là de l'histoire d'un romancier qui s'installe en province pour vivre sans le vouloir la trame du synopsis qu'il est venu développer dans cet endroit (pas si) paisible. Coïncidence ou hasard heureux, un mot que j'aime bien en ce moment : sérendipité. En fin de compte, situation extraordinaire digne d'un conte. Jeu de miroirs qui se reflètent l'un dans l'autre. Saluons l'élégance de Tournier qui, là où un autre aurait développé en 700 ou 800 pages d'insupportables stéréotypes, nous livre une nouvelle des plus savoureuses.

Blandine ou la visite du père
Cette fois dans le couple, c'est l'âge qui fait un très gros problème. Peut-être même à la limite de la légalité. Relation étrange dont personne ne se contenterait de dire qu'elle a lieu en tout bien tout honneur sauf l'auteur qui ne fait pas mine d'ignorer la difficulté de son sujet en faisant cependant référence à Lewis Carroll qui était photographe comme le protagoniste et adorait la compagnie des petites filles. le personnage central qui raconte l'anecdote semble lui aussi apprécier la compagnie des enfants et peut-être même la recherche-t-il puisqu'il s'est installé non loin d'une école. Une chute à laquelle on ne s'attend pourtant vraiment pas.

Aventures africaines
Le pendant du texte précédent, en symétrie, comme si l'hésitation à traiter de manière plus crue le sujet s'était transformée en désir de provocation. Donc : pédophilie et pédérastie non masquée.

Lucie ou la femme sans ombre 1/2
Un dérapage sur la connerie féminine dans la plus pure provocation machiste m^me si les propos sont mis dans la bouche d'une femme, suivie par quelques belles lignes sur la théorie de la couleur.

Lucie ou la femme sans ombre 2/2
Entre Les risques du métier, la clé sur la porte et Mourir d'aimer, il y avait encore une place pour un sujet comme un écho tout en douceur au livre de Thomas Tryon, le visage de l'autre.

Écrire debout
Quand ses auditeurs prennent le conférencier au pied de la lettre si on peut dire. A la lecture, je l'ai pris comme une conclusion de la série d'histoires sur des thèmes brûlants (les trois précédentes).

L'auto fantôme.
sur le thème du miroir quand il n'y a pas de limite à l'étourderie.

La pitié dangereuse
Encore sur le thème du miroir avec connotation médicale.

Le mendiant des étoiles
Des réflexions sur la mendicité et le relation pauvre/riche dans l'acte du don au travers de l'histoire de deux amis en voyage en Inde pendant la période de Noël.

Un bébé sur la paille
Quelques élucubrations pseudo médicales et totalement fantaisistes sur l'idée d'empreinte natale. On est à la limite du merveilleux scientifique. Un glissement un peu douteux de l'éthologie des oies sauvages vers le genre humain avec mise en scène d'un président de la république prénommé François. Introduit quelques contes sur les enfants et la progéniture.

Le roi mage Faust
Que vaut toute la connaissance du monde quand on perd son enfant ? Par extension, que vaut le savoir que l'on a pu accumuler quand on perd la seule personne à laquelle on tient vraiment ? Très intéressant quand à la discussion que l'on peut avoir sur la douleur qui nous fait perdre le jugement et nous précipite dans les bras de la religion.

Angus
Une histoire qui se déroule dans les hautes terres Écosse en plein moyen âge. On y trouve avec abondance crime d'une extrême violence, vengeance mijotée avec une patience infinie, jugement de dieu et coïncidence heureuse, adolescent inconscient, rite de passage et clin d'oeil à Victor Hugo]. Excellente.

Pierrot ou les secrets de la nuit
Sur le thème des couleurs, ce conte met en scène un Pierrot boulanger, une Colombine blanchisseuse, un Arlequin peintre en bâtiment. Tous ces personnages qui glandent d'habitude sur les dessins de carte postale, sont mis à l'ouvrage et triment comme des fous. La colombine finit par s'offrir quelques vacances avec un Arlequin de passage. Mais quand la bise vient gâcher la balade, elle rentre au village se mettre au chaud. Bon, on s'attendrait presque à la tirade de Raimu accueillant la Pomponette dans La Femme du Boulanger mais le Pierrot à le coeur tendre, moelleux et chaud comme une brioche du matin à peine sortie du four alors tout finit bien.

La légende de la musique et de la danse
La genèse revue et corrigée sous l'angle de la musique.

La légende des parfums
Exercice de style sur la précédente histoire en utilisant les parfums à la place de la musique.

La légende de la peinture.
Autour de l'idée de création et de communication, contenu et contenant (quelque part), un coup d'essai sur l'invention, la production et la reproduction de l'oeuvre. L'idée d'un codage universel qui traduirait n'importe quel texte signe une histoire qui précède de très loin l'avènement des traductions de Google dont on sait qu'elles font plus dans la fantaisie de l'absurde que la poésie. le collage de l'histoire des deux amis sur le mode contemporain avec l'histoire des deux peintres dans un cadre digne des mille et unes nuits fonctionne moyennement bien. La démarche conceptuelle qui conclue le concours entre les deux artistes me ferait plutôt penser à une pauvre fumisterie tout juste digne d'un coup de fatigue d'un étudiant en première année des beaux-arts.

Les deux banquets ou la commémoration
Comme un écho du précédent, encore un concours entre deux artistes ... ou deux artisans ? Puisque le thème se situe au niveau de l'art culinaire. Un art utile finalement. A quoi peut bien servir la peinture ? Si l'on songe à l'Arlequin des Secrets de la nuit ou encore au grec fumiste de la légende de la peinture qui ne se donne même pas la peine de toucher un pinceau, les peintres n'ont pas toujours un joli rôle dans les histoires de Tournier. Ceci mis à part, l'opposition entre invention et reproduction reste le thème principal mais ici elle est bien mieux développée. Il faut lire le conte pour tirer la substantifique moelle de ce jugement de Salomon auquel on ne peut que souscrire.

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