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Critique de VincentGloeckler


De « La salle de bain » à ce nouveau livre à paraître début septembre, « la clé USB », l'oeuvre de Jean-Philippe Toussaint pourrait bien être le meilleur témoignage de ce que l'envahissement du monde par les technologies numériques a fait à l'humanité et à sa littérature, si l'on ne retrouvait pas finalement et avec bonheur la sensibilité si particulière de l'auteur… On éprouve d'abord un peu de réticence à ouvrir ce dernier roman, se demandant ce qu'un tel titre annonce sous la plume du magicien Toussaint, ce que cette foutue « clé », trivial véhicule de nos archives courantes, vient faire sur la prestigieuse couverture des Éditions de Minuit… et puis (quand on vous parle de magicien !), on se laisse embarquer dans une enquête aux allures de thriller, oscillant entre le documentaire sur les malversations au royaume des technologies financières et le roman d'espionnage, on s'y laisse prendre, gagné soi-même par l'angoisse grandissante du personnage, contaminé par sa terreur quand il voit, par exemple, une main s'avancer sous la paroi des toilettes pour s'emparer de son ordinateur, qu'il a négligemment posé sur le sol, pour se laisser mener… bien ailleurs que là où l'on pensait ! le récit s'ouvre sur un « blanc », une parenthèse temporelle que le roman va s'évertuer à remplir, mais il s'achève sur un autre « blanc », un effacement infiniment plus important. Entre temps, rien que des petits faits vrais, la réalité d'une Commission européenne, pour laquelle travaille notre protagoniste, confrontée aux manoeuvres, parfois frauduleuses des lobbyistes, et des allusions au cours contemporain du monde, en particulier le pouvoir économique grandissant de la Chine et les attentats djihadistes, mais aussi un peu de fantastique, à commencer par le nom des « méchants », évoquant des intrigues de Fu-Man-Chu, et le véritable plaisir que semble prendre Jean-Philippe Toussaint à saturer sa prose de termes issus du jargon numérique ou de l'univers du virtuel. Et un clin d'oeil, avec une « salle de bain » comme l'un des décors provisoires de la vie de notre narrateur. Et puis au terme de différents rebondissements, une intrigue qui débouche sur… rien, ou plutôt sur l'essentiel, un retour à l'os, et un personnage qui découvre un peu de sa vérité. du grand art, quand des mille feux de l'artifice surgit la nudité du vrai… On n'en attendait pas moins du grand Toussaint !
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