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EAN : 9782742728923
1171 pages
Actes Sud (31/08/2000)
4.45/5   81 notes
Résumé :
La Grosse Femme, Thérèse, Pierrette, Edouard, Albertine, Marcel ... Ce volume est l'occasion de retrouver, dans un Montréal plus vivant que jamais, les personnages hauts en couleur du grand cycle romanesque de Michel Tremblay.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ce gros volume est en réalité composé de 6 romans composés par Michel Tremblay entre 1978 et 1997.
On y suit les péripéties d'une famille francophone de Montréal entre 1942 et 1962, à travers quelques péripéties de personnages emblématiques.
Le principal personnage de l'ensemble est peut-être bien la ville de Montréal. Une ville triste, engluée dans les principes et les convenances, les regards des voisins, l'emprise d'un catholicisme mécanique et sans mysticisme, paralysée par ses complexes. Autant le dire tout de suite, le décor posée par Michel Tremblay n'est pas franchement joyeux. Les personnages, assez pathétiques, tentent chacun d'échapper à la pesanteur de leur destin, mais leur tentatives d'en sortir sont marquées les unes après les autres par l'échec.
Des thèmes récurrents apparaissent au travers des 6 oeuvres : la douleur d'être soi, la différence et l'homosexualité, la fausse innocence de l'enfance, l'anticléricalisme, le besoin d'évasion, la folie, l'omniprésence du joual (dialecte populaire québécois)… Il me semble que si les quatre premiers volumes (La grosse femme d'à côté est enceinte, Thérèse et Pierrette à l'école des Saints-Anges, La Duchesse et le Roturier, Des nouvelles d'Édouard) peuvent se lire indépendamment, les deux derniers (Le Premier Quartier de la lune, Un objet de beauté) seront assez hermétiques à ceux qui n'auront pas lu les précédents. Il est sans doute préférable de lire l'ensemble qui forme un tout cohérent.
Personnellement, je n'ai pas beaucoup adhéré à la noirceur du regard de l'auteur. Son style est d'ailleurs en harmonie avec le message : peu d'air, en particulier dans les trois premiers titres. Pour un français, la lecture du joual demande une certaine accoutumance.
En revanche, ayant beaucoup voyagé à Montréal, j'ai pu replonger dans cette atmosphère si particulière que j'apprécie tant. Et la lecture de Tremblay, qui nous parle d'hier, m'aide à mieux comprendre le Québec d'aujourd'hui.
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Cette anthologie de six romans, dans cette nouvelle édition revue et corrigée, nous offre une plongée prenante dans un univers marqué par le fléau de la pauvreté. Tremblay a consacré un travail minutieux pour donner vie à ces familles entrelacées, et le résultat est assez remarquable. J'ai grandi avec ses romans, ce qui dénature un peu mon objectivité : l'adhésion avec son univers m'est quasi immédiate, et je comprends qu'il n'en soit pas de même pour tous. Pour ma part, je me sens aisément transportée dans le quartier populaire et ouvrier de l'est de Montréal, comme si j'observais ces vies se dérouler devant mes yeux.

Cette édition révisée apporte une touche de réalisme supplémentaire à l'ensemble. Les ajustements subtils opérés par Tremblay permettent de renforcer la cohérence et l'authenticité des personnages, tous cassés par la vie, baroques et attachants. J'apprécie la justesse avec laquelle ils sont décrits, les détails qui les rendent si palpables, jusque dans leurs pires travers (ne vous attendez pas à une galerie foncièrement sympathique !) Certes avec le temps je vois mieux les ficelles de Tremblay, la répétition de certains motifs, les rouages à l'oeuvre lors de ses descriptions, mais quelle oeuvre passée au crible ne laisse pas entrevoir ses coutures ?

Au-delà de l'immersion dans le quotidien de ces personnages, les "Chroniques du Plateau-Mont-Royal" offrent également une fenêtre sur l'histoire du Québec, sur les événements qui ont marqué le pays et la communauté du Plateau-Mont-Royal. A cet égard, l'oeuvre trouve de façon habile et assez intéressante l'équillibre entre fiction et réalité. J'imagine que tout lecteur trop éloigné de l'histoire locale se sentira peut-être un peu étouffé pour le poids documentaire, mais s'il surmonte cet obstacle, je pense qu'il n'oubliera pas de sitôt sa visite au coeur de cette belle fresque humaine.
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Un livre génial, l'auteur met en scène des personnages d'origine modeste à Montréal. Émotions, humours le lecteur rencontre des personnalités qui ne pourra pas oublier. le joual utilisé par l'auteur renforce la proximité avec le lecteur. J'ai eu du mal à quitter ce livre tant je me suis attachée aux personnages.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
« Duplessis ! Duplessis ! » Déjà pomponnée comme pour sortir malgré l'heure matinale, Marie-Sylvia se tenait sur la première des trois marches de ciment qui menaient à son restaurant. « Duplessis ! » Été comme hiver, aussi bien à la Saint-Jean-Baptiste qu'aux Rois et même le Vendredi saint, Marie-Sylvia, dès sept heures du matin, portait pierres du Rhin aux oreilles et perles de verroterie au cou. Son rouge à lèvres qui tachait ses dents et lui donnait une haleine sucrée était célèbre dans toute la rue. Les enfants disaient que Marie-Sylvia sentait le bonbon. Les femmes disaient que Marie-Sylvia sentait. « Duplessis ! » Elle portait sa robe du samedi. Oui, elle possédait une robe pour chaque jour de la semaine. Une seule. Elle ne variait jamais. On pouvait baser son calendrier sur les robes de Marie-Sylvia. Et certains le faisaient. Si Marie-Sylvia s'était acheté une robe neuve, non seulement toute la rue aurait-elle été au courant, mais quelques-uns de ses habitants n'auraient plus su quel jour on était. Exaspérée, Marie-Sylvia rentra dans son restaurant, traînant ses savates à moitié défoncées sur le plancher de bois franc. Car Marie-Sylvia n'était coquette que jusqu'aux genoux. Elle n'avait jamais pu endurer de souliers qu'elle appelait d'ailleurs « des tuepieds». « Des suyers?
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Mercedes avait rencontré Béatrice dans le tramway 52 qui partait du petit terminus au coin de Mont-Royal et Fullum pour descendre jusqu'à Atwater et SainteCatherine, en passant par la rue Saint-Laurent. C'était la plus longue ride en ville et les ménagères du Plateau Mont-Royal en profitaient largement. Elles partaient en groupe, le vendredi ou le samedi, bruyantes, rieuses, défonçant des sacs de bonbons à une cenne ou mâchant d'énormes chiques de gomme rose. Tant que le tramway longeait la rue Mont-Royal, elles étaient chez elles, elles faisaient tous les temps, se donnant parfois des claques dans le dos quand elles s'étouffaient, interpellaient d'autres femmes qu'elles connaissaient, elles allaient même parfois jusqu'à demander au conducteur comment il se faisait qu'il n'était pas encore parti pour la guerre. Mais quand le tramway tournait dans la rue Saint-Laurent vers le sud, elles se calmaient d'un coup et se renfonçaient dans leurs bancs de paille tressée toutes, sans exception, elles devaient de l'argent aux Juifs de la rue Saint-Laurent, surtout aux marchands de meubles et de vêtements, et le long chemin qui séparait la rue Mont-Royal de la rue Sainte-Catherine était pour elles très délicat à parcourir.
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C’était une chandelle usée qui vacille, une horloge démontée qui hoquette, un moteur au bout de son rouleau, un chien trop vieux, une servante qui a fini de servir et qui se meurt d’ennui, une vieillarde inutile, un être humain battu, sa grand-mère. (La grosse femme d’à côté est enceinte, p. 25)
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Richard avait souvent vu sa grand-mère pleurer de rage, appuyée contre la vitre de la fenêtre de sa chambre qui donnait sur l'escalier extérieur. Il l'avait même entendue maudire les deux femmes, leur jeter des sorts impuissants, il l'avait vue leur tirer la langue et faire semblant de leur donner des coups de pied. Elle errait du matin au soir de sa chambre à la salle à manger et de la salle à manger à sa chambre, superfétatoire objet d'attention dans cette maison où tout et tous avaient des tâches assignées ou du moins une utilité quelconque, excepté elle. Elle aurait voulu descendre les vidanges, faire le souper, laver la grosse femme, faire tremper tous les rideaux de la maison dans la baignoire, rosser Philippe ou Thérèse, ou Richard, ou Marcel, mais rosser quelqu'un; au lieu de quoi elle aboutissait infailliblement devant l'appareil de radio, l'oreille collée sur les confidences de Donalda ou les sautes d'humeur de la grosse Georgianna. Au beau milieu d'un ronflement Victoire ouvrit des yeux vitreux et sa main remonta une mèche blanche qui lui barrait le front. Aussitôt, Richard détourna la tête.
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Édouard et Thérèse s'étaient levés en même temps. Leurs chambres se faisaient face, aussi étaient-ils tombés nez à nez en ouvrant leur porte. « Vous vous levez ben de bonne heure, à matin, mon oncle Édouard? C'est pourtant samedi! » « Les envies de pipi ont pas de jours, ma p'tite fille! » Ils avaient tous deux couru jusqu'à la salle de bains qui se trouvait tout à fait à l'arrière de la maison, après la salle à manger et la cuisine. Thérèse était arrivée la première mais elle avait cédé la place au frère de sa mère. Marcel, le frère de Thérèse, tellement petit pour ses quatre ans qu'on lui en donnait à peine deux et demi ou trois, avait entendu la course et lorsque Thérèse et Édouard étaient passés près de lui il avait zézayé un timide bonjour mais les deux courseurs ne l'avaient pas entendu.
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Vidéo de Michel Tremblay
Le Salon dans tes oreilles - S1E41 - Confidences d'écrivain: Michel Tremblay
Confidences avec Michel Tremblay, figure emblématique et incontournable de la littérature québécoise, mais aussi du Salon du livre de Montréal.
Présenté par
SALON DU LIVRE DE MONTRÉAL Et LEMÉAC ÉDITEUR
Avec Michel Tremblay, Auteurrice Danielle Laurin, Animateurrice
Livre(s) Victoire !
Le Salon dans tes oreilles est un balado issu des entrevues, tables rondes, et cabarets enregistrés dans le cadre du Salon du livre de Montréal 2020. Écoutez des auteurs, autrices et personnalités parler de livre, de lecture et d'écriture et échanger autour des cinq thématiques suivantes: le Féminisme, la Pluralité des voix, 2020, et après?, Récit et inspiration et Famille et enfance. Bonne écoute!
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