Univers corrompu, flicaille faisandée, ça suinte la crasse et la haine, mais que c'est bon !
Totalement convaincu par "
L'hypnotiseur" de
Juan Saenz Valiente (en association avec
Pablo de Santis au scénario), je souhaitais me vautrer à nouveau dans ses traits imparfaits, ses microcosmes bancals, ses ambiances fortes. Rien à voir ici, cependant, avec l'autre galaxie citée. "
L'hypnotiseur" était très sombre et pastel, ici, couleurs et contrastes sont au rendez-vous. le dessinateur n'en rajoute pas dans le glauque peinturluré, et il fait bien, vu la teneur du monde décrit. Débauchés et ripoux se répondent, tous pervers, tous dépravés, tous corruptibles. le graphisme est gouleyant, généreux et dégouline en tout sens. La faune est grassouille, pauvrette, les horizons désenchantés. J'adore. Son usage des scènes d'arrière-plan est jubilatoire, j'aime les dessinateurs qui fourmillent d'idées, nous éclaboussent de détails et chroniquent le monde contemporain de la sorte.
Côté scénario,
Carlos Trillo y va franco ! le ton est léger, vif, distrayant, malgré le noir des situations. C'est brut de décoffrage, sans censure, ne sombrant jamais dans le vulgaire, tout en restant qualitatif et animé d'un esprit de sociologue. La misère n'est pas gratuite ici, elle dénonce, porte ses combats, décortique nos civilisations en déclin. C'est brillant, pathologique, drôle et couillu. Complètement pourri, mais jouissif. Une réussite peu commune, incorrecte et limite !