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Critique de ElizaLectures


Le roman s'ouvre sur trois lettres cajoleuses écrites par Lady Carbury aux rédacteurs en chef des journaux les plus en vue de Londres pour demander un bon accueil à son roman, implorant l'indulgence de l'un, flirtant avec l'autre…. Dès le départ, Trollope place ainsi cette grande saga victorienne sous le signe des tromperies et des manipulations. Si Lady Carbury en est réduite à écrire des romans et à convoiter avidement une carrière de femme de lettres, c'est qu'elle est ruinée par la conduite insouciante de son fils, Sir Felix. Ce dernier passe ses journées à s'endetter aux cartes dans un club londonien sans prestige avec quelques autres jeunes hommes. Pour lui, seul un mariage avec une héritière pourra lui assurer le train de vie dont il a besoin pour subsister. Cette héritière pourrait bien être Miss Marie Melmotte, la fille du grand financier Augustus Melmotte, nouveau génie de la City. Melmotte n'a ni titre ni distinction, mais assez d'argent pour s'acheter des duchesses à ses bals et faire des scandales aux secrétaires d'Etat. Grâce à sa fortune, toutes les portes lui sont ouvertes… Sur cette intrigue principale se greffent d'autres couples, Hetta Carbury déchirée entre son cousin plus âgé, Roger Carbury, et Paul Montague, jeune homme à l'allure bien plus engageante, mais lui-même pris aux griffes d'une “tigresse” américaine venue exiger de lui le respect d'une ancienne promesse de mariage. On trouvera aussi Lord Grendall et son fils, devenus laquais de Melmotte pour grappiller quelques sous de sa fortune, le jeune Dolly Longestaffe, que la seule pensée d'écrire une lettre fatigue et sa soeur, qui se débat pour obtenir une certaine indépendance, ou encore la jeune Ruby Rugles, petite paysanne qui se pâme devant son amoureux londonien au détriment de l'honnête fermier qu'elle doit épouser. Une galerie de personnages haute en couleurs que l'auteur entrecroise avec une maîtrise et une facilité déconcertante, ajoutant à tout cela la “grande affaire” de Melmotte, la Société de Chemin de Fer du Pacifique Centre et Sud et du Mexique, dont on ne voit durant tout le roman pas le premier mètre de rails.

Dans ce tumulte, certains personnages révèlent avec surprise un caractère plus ferme que ce qu'on croyait quand d'autres ne se relèvent jamais alors qu'on l'espérait toujours. le titre original du roman “The Way We Live Now” montre bien le parti pris de Trollope qui sous-tend tout le roman : “cette” époque a perverti la bonne vieille Angleterre. L'argent achète tout, les bonnes manières n'y sont plus respectées et la noblesse n'a plus le panache de l'ancienne époque. Si Trollope ne peut empêcher le monde d'avancer et les idées d'évoluer, il ne se retient pas de donner son avis à travers deux personnages : Roger Carbury, effaré devant la conduite de Sir Felix et Mrs Pumpkin, la tante de Ruby.

Ce livre pourrait s'intituler Grandeur et décadence d'Augustus Melmotte, tant il m'a fait penser à Balzac dans la description des affaires financières, des combines politiques, de ces caractères si forts (la mère se sacrifiant pour son fils, le journaliste jouant avec son pouvoir, l'héritier désargenté, la fille rebelle, etc.) et cette opposition permanente entre la campagne et la Ville… La différence réside cependant dans l'analyse psychologique beaucoup plus fine, parfois un peu longue, que fait Trollope des ressorts des actions de ses personnages.
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