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Critique de mh17


La biographie de Troyat (1984) est celle d'un écrivain qui raconte bien les histoires. Elle est de facture classique, chronologique, fluide, agréable à lire et bien documentée. Les références savantes, en particulier la correspondance, s'intègrent parfaitement dans la narration sans heurt et sans ostentation. Troyat est un écrivain pudique . Il ne nous dit pas ce que l'on doit penser, il suggère les contradictions de l'homme et nous laisse méditer tranquillement, comme Tchekhov le fait lui-même dans ses nombreuses nouvelles ( plus de 250) et ses pièces de théâtre. Tchekhov est un homme paradoxal. Il est à la fois plein de générosité envers les autres mais il aime prendre ses distances, se retirer quand il se sent étouffer. Il est très attaché à sa famille, à son clan dont il est devenu le chef très jeune. Pourtant, il aurait pu en vouloir à ce père violent, bête et bigot qui a conduit la famille à la misère. A ses deux frères aînés brillants qui ont préféré prendre le large et laissé mère et petits frères et soeur à leur triste sort. Tchekhov est lucide et cruel dans certaines de ses lettres mais il se reprend aussitôt. Faire la morale à des alcooliques ne sert à rien. Montrer qu'on est là est plus utile. Il déteste se plaindre et se réfugie dans l'étude puis dans un travail acharné. Tchekhov vit jusqu'à sa mort entouré de toute sa famille exubérante, de cousins éloignés, d'artistes de passage et de pique-assiettes. On mange bien, on boit bien , on raconte des histoires. Et puis Anton étouffe, cherche à s'isoler, voyage, mais, aussitôt arrivé à destination, sa famille lui manque et il ne pense qu'à rentrer. Avec les femmes c'est pareil, il prend la tangente dès qu il est question de s'engager. Quand il se marie enfin à Olga l'actrice, il sait qu'ils ne vivront pas souvent ensemble : elle joue à Moscou, il est contraint de vivre à Yalta à cause de la tuberculose. Il ne prend pas de position politique dans cette période troublée. Il ne veut rien démontrer mais il agit au mieux qu'il peut. Il soigne les petites gens gratuitement, construit des écoles dès qu'il a de l'argent. Après la mort de son frère Nicolas, Il semble s'imposer le voyage à Sakaline où il va soigner les bagnards avant de témoigner sur leur triste sort, le plus froidement possible pour mieux marquer les esprits. Il semble vivre les honneurs et sa popularité comme un fardeau et ironise souvent sur la comédie moscovite ou pétersbourgeoise. Il préfère écrire jusqu'à l'extrême limite de ses forces en conservant jusqu'au bout auprès de son entourage son beau masque triste et souriant.
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