Il y a dans l'écriture de Christos Tsiolkas, quelque chose de terriblement passionné, violent et douloureux assez fascinant, même lorsque c'est insoutenable.
Dans ce recueil de nouvelles, il s'engage totalement dans l'expression de la difficulté de vivre, de l'absence d'innocence et dans la dénonciation des discriminations générées par le modèle multiculturel australien. C'est dur râpeux, physique et absolument désespéré .
Vivre, selon lui, ce serait presque uniquement une question biologique faite d'odeurs et de fluides corporels. Rares sont les auteurs qui s'emparent d'évocations triviales récurrentes et obsédantes, comme la sueur, l'urine ou le sperme, pour décrire des relations chancelantes, la déchéance de la maladie, la violence du viol, les malentendus ordinaires du quotidien.
La première nouvelle nous emmène en terrain connu, presque celui de « la gifle », une soirée entre amis qui à la faveur d'un jeu cruel dérape en un règlement de compte impitoyable, signant la fin de l'hypocrisie sociale savamment mise en scène. Elle donne le ton du recueil. On sait qu'on part explorer les bas fonds de l'âme humaine en bonne compagnie.
Et puis, il y a cette sorte de « balade des pendus » épouvantable d'horreur qui décrit tel un texte de rap, une prose anaphorique, l'univers sordide et barbare de la prison. Je me suis interrogée sur cette forme d'esthétisation de la violence, de l'humiliation, son sens, son message …il ne laisse pas indifférent.
En tout, 15 nouvelles, 15 univers différents, certains plus sombres que les autres, des humains toujours coincés dans des situations sans issues. De temps en temps une petite lueur fugace, un geste, un soupçon d'humour décalé. Il est bien planqué l'optimisme.
Ce n'est pas une lecture reposante, l'auteur nous bouscule, nous révolte, nous interpelle. C'est tout simplement de l'acide sulfurique sur les plaies de notre monde, l'apocalypse de l'humanité, un appel désespéré .
Christos Tsiolkas, un auteur dérangeant, essentiel dans la littérature contemporaine.
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Qu'elles se déroulent en Australie ou à l'étranger, ces nouvelles mettent toujours en scène des Australiens, jeunes ou moins jeunes, sans illusions. Peut être parce qu'ils ont intégré ce que se demande avec violence un personnage: "Pourquoi les gens nous déçoivent-ils toujours un jour ou l'autre ? "
Racisme, homosexualité, violence sont au programme de ces textes passant au crible la société australienne. Dès la première nouvelle, le ton est donné: sortez de votre zone de confort, accueillez à bras ouverts (ou non) le malaise distillé plus ou moins sourdement par ces textes.
J'avouerai que j'ai nettement préféré les textes où Christos Tsolkias, avec une grande économie de moyens, aborde des thèmes intimistes mais forts, en particulier les deux nouvelles mettant en scène des rapports mère fils, à ceux plus frontaux où la violence se donne libre cours. "Pornographie 2" est ainsi à la limite du supportable, tout comme le récit enchâssé dans le premier texte d'ailleurs.
Des textes comme des alcools forts, dont il m'a fallu espacer un peu la lecture.
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Des nouvelles crues enveloppées de tendresse de l’écrivain australien d’origine grecque.
Lire la critique sur le site : Liberation
Tout l'art de Christos Tsiolkas réside dans cet arc tendu entre rage et tendresse, qui décoche sans crier gare ses flèches de pure émotion.
Lire la critique sur le site : LesEchos
Tous les matins quand il se lève, c'est le même refrain :
« Pourquoi ne suis-je pas mort, cette nuit ? Qui voudrait de ce corps inerte ? On vit trop vieux. »
Adriana, sa femme, lui répond en criant : « Alors va chercher ton fusil et fais-toi sauter la cervelle ! »
La fille était orthodoxe. Je suis allé à l'enterrement avec Kayla. Une drôle d'église, pleine d'odeurs, mais géniale. L'encens, l'or, les couleurs, les icônes, ça m'a défoncé.
Comment expliquer ces choses à une jeune femme qui atteignait l'âge adulte à l'aube de la révolution numérique ? Comment justifier devant elle le comportement d'hommes et de femmes à la fin d'un millénaire d'archaïsmes ?
Je sais que ça fait mélo, mais c'est comme ça, les enfants sont cruels. Je vous livre mon expérience pour briser ce mensonge dangereux et stupide qui fait de l'enfance le temps de l'innocence.
Le sable est une des armes dont se sert la nature pour combattre l’arrogance du béton.
Interview par Olivia Phelip en partenariat avec www.viabooks.fr
Christos Tsiolkas revient en cette rentrée littéraire avec "Barracuda" : un roman coup-de-poing sur le dépassement de soi, le sacrifice, l'échec et la reconstruction, avec en toile de fond toutes les contradictions d'une nation bâtie sur le racisme et la violence.
En savoir plus sur "Barracuda" : http://bit.ly/1MslTkk
Lire un extrait : http://bit.ly/1KTrX6g