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EAN : 9782373850888
232 pages
Les éditions du Sonneur (25/10/2018)
3.73/5   11 notes
Résumé :
Premier écrivain à donner une voix aux immigrés irlandais dans l’Amérique du début du XXe siècle, loin des stéréotypes et des caricatures, Jim Tully dresse dans Les Assoiffés le portrait plein d’humour et de poésie des membres de sa famille aux personnalités remarquables et aux destins mouvementés : son grand-père, inénarrable conteur de bistrot ; son père terrassier, taillé comme un gorille et lecteur avide malgré sa myopie ; sa mère au grand cœur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La tradition migratoire irlandaise aux Etats-Unis précède la Grande Famine mais c'est bien cet épisode qui sera le grand accélérateur de l'exode irlandais. En l'espace de sept années plus d'1,5 millions d'Irlandais quittèrent leur terre natale. La famille de Jim Tully fut de ceux-là.

« Les assoiffés » est un roman autobiographique. L'auteur nous offre les portraits mémorables des Tully et des Lawler, la famille de sa mère. Nous sommes dans l'Ohio - fin 19ème et début 20ème – tous vont prendre vie sous les yeux du lecteur. On découvre des hommes durs et sentimentaux, à la faconde intarissable. On les imagine avec des mains énormes, des épaules massives, taillés dans le granit, nés pour le dur labeur et la bagarre. Ils font partie de cette diaspora Irlandaise, celle qui a creusé des fossés, des canaux, construit les chemins de fers dans l'arrière-pays.
La sagesse de ces hommes est bien cachée sous les hectolitres de whisky et de bière qu'ils ingurgitent ; car tenir l'alcool est une qualité essentielle pour être respecté.

Au centre de ce récit il y a le grand-père paternel, buveur invétéré, hâbleur. le récit d'un concours de boisson au coin d'un bar avec un unijambiste mythomane est un des morceaux de bravoure de ce livre !
Chaque membre de la famille va ainsi être croqué, donnant lieu à des portraits courts et colorés, mis en valeur par le sens du détail concret et du mot juste de Jim Tully.

Quelques mots sur l'auteur :
Jim Tully était romancier, nouvelliste et journaliste. Populaire dans les années vingt et trente, il est finalement tombé un peu dans l'obscurité. Pourtant il est considéré comme l'un des précurseurs du hard-boiled, style qui influencera toute la littérature américaine. Son oeuvre est aujourd'hui éditée en France par les Editions du Sonneur.
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« Les assoiffés » de 1928 est le cinquième livre de Jim TULLY (1886-1947) ainsi que le troisième du Cycle des bas-fonds (après « Vagabonds d'une vie » en 1924 et « Circus parade » en 1927, avant « Ombres d'hommes » en 1930 et « du sang sur la lune », ultime tome du cycle en 1931). L'auteur dénote dans le monde littéraire : pauvre, miséreux, ancien vagabond, il ne s'encombre pas d'un esthétisme stylistique, mais raconte la vraie vie avec les vrais mots de la rue, des errants. Et du style, croyez-moi, malgré lui il en a !

Dans ce tome il fait la part belle à sa famille, tout particulièrement à la figure de son grand-père adoré, Hughie, immigré irlandais arrivé dans l'Ohio au milieu du XIXe siècle et sorte de prince de la cuite et du bas peuple. Aidé par les souvenirs de sa soeur aînée Virginia, TULLY dépeint le parcours de la famille en Irlande puis une fois installée aux Etats-Unis.

Après une expérience de vie traumatisante avec la grande famine irlandaise des années 1840/1850, Hughie émigre de l'autre côté de l'Atlantique et n'est pas le seul, nombreux sont les irlandais qui cherchent une terre d'accueil pour fuir la misère. Rappel sans fioritures de quelques images de l'Irlande d'alors : « Dans le temps, en Irlande, on t'emmenait à la potence dans une charrue où t'étais assis sur ton cercueil ». Portraits de paysans plus vrais que nature, rugueux au coeur d'or ou escrocs, sur fond de catholicisme profondément ancré. Il ne fait pas bon de douter de l'existence de Dieu, il ne fait pas bon d'être Jim TULLY.

Les scènes se succèdent à un rythme endiablé, TULLY est un immense conteur et ne laisse pas de répit à son lectorat. Il a finement observé son monde et sait le retranscrire sans toutefois le diluer, le proposant en version brut de décoffrage. Mais même pour lui-même, l'évocation des enchaînements de ces vies misérables semble le faire tituber, aussi il sort soudainement de son chapeau une séquence émotionnelle emplie de tendresse, qu'il sait là aussi raconter avec un talent fou, sans artifices.

L'univers de TULLY, bien que truffé de figures branlantes, usées, déguenillées, n'est pas figé. Surgissent des sortes de lutins (que font-ils là ???) dans un intermède arrivant comme un cheveu sur la soupe. Retour à la famille, au quotidien fait de picole, de drames, de putes et de disputes, de faits divers. Comme cet oncle incarcéré pour vol de chevaux, sans oublier la mort de la mère, peu après celle de ses propres parents, dans une tragédie familiale, que pourtant TULLY égaie à grands coups de phrases vertes, lancées près d'un comptoir, ou encore par des séquences hilarantes, même en terrain hostile. Je pense ici à un enterrement durant lequel s'invitent des pleureuses, la scène est magistrale et jubilatoire. Jubilatoire comme ce bouquin-là, mi-roman mi-récit de vie, aussi tendre que réaliste et brutal.

Très tôt, le jeune Jim part à l'orphelinat, il y restera six ans. Il parle ici de « détention », ce passage dans sa vie l'a beaucoup affecté, tout comme le décès du bien-aimé grand-père Hughie, ivrogne au grand coeur, personnage explosif autant que sensible. Sans oublier la figure du père terrassier et grand lecteur, qui permet au tout jeune Jim de rencontrer ses premiers émois littéraires, alors que sa soeur Virginia s'implique dans l'aide aux nécessiteux.

Les portraits des membres de la famille de Jim TULLY sont pleins de verve et de tendresse, de puissance dans la démesure, comme ceux des paumés qu'il croise sur son chemin et qu'il nomme les « Naufragés de la vie ». Certains périssent, d'autres survivent, mais aucun n'est là pour faire de la figuration.

Jim TULLY est considéré comme l'un des pionniers du hard-boiled (bien que ceci serait à mon goût à débattre…). Comparé à GORKI, il narre la vie des nécessiteux, de ceux qui bossent pour nourrir une famille à la dérive, qui se saoulent sans vergogne, ces immigrés mal acceptés dans le pays hôte. Aussi leur vie est faite de nombreux périples et difficultés que TULLY s'amuse à convoquer dans ce style cru et humoristique. Les éditions du Sonneur se sont engagées dans la réédition française de toute l'oeuvre de Jim TULLY. le Cycle des bas-fonds est aujourd'hui sorti dans son intégralité (« Ombres d'hommes » est toutefois paru chez Lux), restent les romans épars dont je ne manquerai pas de vous parler, TULLY étant une énorme révélation. « Les assoiffés » fut publié en 2018, traduit aux petits oignons et préfacé par Thierry BEAUCHAMP, il est à découvrir.

« La faim et la misère étaient plus faciles à endurer que ma solitude de garçon avançant à tâtons dans la vie. Sans jamais plus d'un dollar à dépenser par mois, j'errais la nuit, d'un bar à l'autre, récitant des vers de mirliton, racontant des histoires ou échangeant ce que je pouvais pour un verre. J'adoptai ainsi une habitude qui ne m'a jamais quitté : j'appris à déchiffrer les visages en les regardant dans le reflet du miroir derrière le bar. J'évitais ainsi de fixer les gens dans les yeux. Cela m'a beaucoup servi. On se révèle toujours quand on ne se sent pas observé. Tout ce que je sais de la nature humaine, je l'ai découvert dans les saloons avant mes vingt ans ».

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Eh minou tu sais c'est quoi toi un Shanty Irish ? Bah moi je savais pas du tout alors que tu vois j'me vante à qui veut écouter ou même pas m'écouter combien j'adooooooore la littérature américaine et je savais même pas ce que ça voulait dire. En fait ça désigne les irlandais qui vivaient dans des cabanes à la fin du 19e et début XXe et qui étaient super super pauvres.

Bah de cette population y'a Jim Tully qu'est né. Et après il est devenu un des pionniers du hard-boiled et tout (c'est à dire l'ancêtre du roman noir un peu), en gros le gars niveau socio il s'y connaît mieux qu'un théoricien parce qu'il a vécu tout ça.

Bah Les assoiffés, c'est ça. C'est pas une fiction ni rien, Jim Tully il fait la Comédie Humaine de sa famille, qui étaient des gars qu'ont débarqués aux États-Unis après une famine dévastatrice en Irlande, un truc à propos de pommes de terre si j'ai bien compris.

Et tu sais l'idée reçue qu'on a des irlandais à cause de films ou de chansons où dans les livres les personnages sont super durs, super pieux, super cyniques et super alcooliques ? Bah Les assoiffées ça forge encore plus cette image d'épinal (oui je sais c'est quoi une image d'épinal c'est dingue hein ouais ?).

Du coup t'apprends qui était son grand père, sa mère, ses oncles maternels, sa soeur et toutes les aventures qu'ils ont vévu avec tout le côté dramatique et tragique que se prenne sur la gueule les irlandais à chaque fois qu'il se passe un truc dans la vie.

Tu sais un truc du genre "on lui offrit 200 dollars pour qu'il change de vie, il rencontra une femme splendide de qui il était fou amoureux mais ne vint jamais au mariage car on découvrit son cadavre raide mort d'un coma étylique la veille".

Voilà. Alors tu rigoles pas mal tu te dis que putain ces irlandais ont le don de raconter des trucs comme les conteurs du moyen-âge ils devaient faire, ils ont un sens du théâtre absolument génial et quand ils ont décidé que t'étais pas leur copain ça sert à rien de leur faire changer d'avis. Sauf si tu leur payes un coup, ils seront tes copains que le temps de boire un coup. Après tu peux crever.

C'est la découverte du mois, genre tu lis ça par curiosité et t'es satisfait quoi. C'est pas le grand roman américain plein de réussite et d'ambition c'est juste des légendes sous des photos que y'a pas avec des anecdotes de famille. Mais t'en sors tout joyeux avec des larmes qui piquent les yeux et qui sentent le whisky tourbé.

À la bonne votre et tout Les Éditions du Sonneur et merci d'avoir publié ça c'était une super chouette idée !

Sioux
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Les Irlandais ont lâché leur damnée patrie comme si c’était un chien galeux et pas le plus beau pays d’la Terre. Des milliers et des milliers, peut-être un million, ont mis les voiles en un an. Et Dieu merci, j’en faisais partie.
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Dans sa jeunesse, l’Angleterre ne permettait pas aux Irlandais catholiques d’aller à l’école. Il vécut et mourut dans une ignorance abyssale. Il mesurait un mètre cinquante-deux de haut et presque la moitié de large. Son cou était une masse de muscles. « Des vrais filins d’acier, bon Dieu ! » disait mon grand-père. Élevé dans une cabane au milieu d’une tourbière drainée par la pluie, il maudissait l’Angleterre et Cromwell, et soulevait des poids lourds pour se faire payer des coups à boire. Il approchait des cent ans quand il fut frappé par la foudre.
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Beaucoup d’écrivains ont dit des Irlandais qu’ils sont loquaces quand ils sont en guerre ou en colère. On ne peut pas se tromper davantage. Ces douze-là, blessés dans leur orgueil, restèrent silencieux, le regard fixé sur la neige.
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Les Irlandais sont pleins d’amour pour leurs frères, comme tous les gens qui croient les mensonges. Mais au fond d’leurs cœurs, c’est des traîtres les uns envers les autres. Ils vendraient l’âme de Charlie Parnell7 en personne – et c’est bien ce qu’ils ont fait – pour une pomme de terre nouvelle ! Çui qui parle d’amour fraternel est un idiot. Il connaît pas les Irlandais.
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Dans son enfance, en Irlande, les incendies criminels, les trahisons et les morts violentes étaient aussi répandus que les commérages sur le roi d’Angleterre.
Il ne respectait rien chez les hommes. Il pouvait transformer une veillée mortuaire en noce irlandaise et verser de l’alcool dans la gorge d’un macchabée.
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