Rien n'était pire que l'ignorance. Imaginer était pire que douter.
Peu importe mon nom ou l'endroit de ma naissance, et peu importe le lieu. Ce qui embellit une existence, ce n'est pas la géographie ou la langue qu'on parle mais les êtres qu'on croise.
Ce qui sculpte et nourrit notre parcours, ce qui le rend unique, ce sont les autres, ceux qui s'installent et qui disparaissent, ceux qu'on aime ou qu'on maudit. La famille, les amis, les ennemis, nos chiens, nos chats, tous ceux qui nous façonnent et nous forgent ou nous mutilent, ceux qui nous aiment et nous grandissent, qui nous méprisent, nous détruisent ou nous réparent.
L'amour et le bonheur savent se faire discrets. Au début, ils vous donnent le sentiment de voler, de côtoyer les sommets. Puis, au bout d'un certain temps, marcher sur l'arc-en-ciel devient presque banal, les sourires béats s'estompent, on se sent heureux, mais c'est normal, presque logique, une évidence. Le bonheur et l'amour savent se faire oublier. Si l'on n'y prête attention, ils se diluent et perdent de leurs couleurs, s'effacent.
Il faut parfois des années pour comprendre l'amour de ses parents.
Le malheur et la souffrance ne vous lâchent pas, ils se rappellent à vous sans cesse. Ils sont dans chaque mot, chaque parfum, chaque souvenir de la vie passée.
Les premiers émois rendent aveugles celles qui rêvent de belles histoires, ils leur dessinent des nuages de perles et leur inventent des arcs-en-ciel.
Ils étaient souvent comme ça les hommes, ils jouaient aux durs, mais dans les moments d'émotion, ils s'éclipsaient.
Le temps n'enrichit pas la vie, ou si peu. Il la vide et la dilapide, il la comptabilise en des milliards de futilités insignifiantes.
Il m'invita à le suivre jusque dans l'atelier, et bafouilla quelques mots de condoléances du bout des lèvres. Sa façon gauche et empruntée laissait transparaître un émoi non feint, c'est souvent dans les grandes carcasses qu'on trouve les cœurs les plus sensibles.