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EAN : 9782845780903
41 pages
Manucius (01/10/2008)
3.95/5   10 notes
Résumé :
Si par livres vous entendez parler de nos innombrables cahiers de papier imprimé, ployé, cousu, broché sous une couverture annonçant le titre de l'ouvrage, je vous avouerai franchement que je ne crois point, que l'invention de Gutenberg puisse ne pas tomber plus ou moins prochainement en désuétude. Je crois que si les livres ont leur destinée, cette destinée, plus que jamais, est à la veille de s'accomplir, le livre imprimé va disparaître. Ne sentez-vous pas que déj... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Les lecteurs qui connaissent l'existence d'Octave Uzanne se compte sans doute sur les doigts de la main d'un manchot et pour autant, il n'est pas à négliger. Ecrivain, éditeur et journaliste très actif, il se fit surtout une réputation de brillant bibliophile, ce qui ne sera pas pour vous déplaire.

Dans cette veine, il a écrit la présente nouvelle dont le titre interpelle autant qu'il intrigue : "La fin des livres". A l'heure où le monde de l'édition est, dit-on, en souffrance - alors qu'on n'aura sans doute jamais autant écrit avec plus ou moins de talent et de bonheur - cette nouvelle est un véritable récit "à la Jules Verne", oui, de la science-fiction, mes amis. C'est-à-dire qu'Octave Uzanne expose sa théorie à ses confrères : le livre papier va bientôt disparaître !

Nous sommes en 1894 et déjà, il y a un petit quelque chose de "1984" dans l'anticipation qui annonce cartes sur table l'arrivée du walkman, puis du lecteur numérique et d'internet, enfin le triomphe du livre audio sur tout autre support car "je crois au succès de tout ce qui flattera et entretiendra la paresse et l'égoïsme de l'homme ; l'ascenseur a tué les ascensions dans les maisons ; le phonographe détruira probablement l'imprimerie."

Avec une minutie logistique impressionnante, l'auteur expose comment, techniquement, romans, essais et même la presse, bref comme l'écrit va redevenir oral. Derrière les lignes se dessine également un pamphlet dénonçant le trop grand nombre de publications au détriment de la qualité, je m'abstiendrai de tout autre commentaire.

Étonnant texte plein de verve et d'imagination et qui fascine le lecteur d'aujourd'hui, celui-là même qui a trouvé naturel il y a trente ans de se promener avec, sur les oreilles, un casque à coussinets oranges relié à un baladeur de poche aussi encombrant qu'une brique de lait, celui-là même qu'on voit aujourd'hui dans le métro avec un casque d'opérateur du son sur la tête ou des substituts de coton-tiges lui sortant des oreilles, celui-là même qui, peut-être, écoute avec plaisir un livre audio.

En tout cas, avis à tous les lecteurs, et particulièrement à ceux qui cherchent désespérément à compléter la lettre U de leur challenge ABC, cette nouvelle d'Octave Uzanne est disponible gratuitement sur wikisource.org, et en version audio sur litteratureaudio.com.


Challenge XIXème siècle 2020
Challenge ABC 2019 - 2020
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La fin des livres est une nouvelle d'anticipation tirée du recueil ‘Contes pour les bibliophiles' d'Octave Uzanne et Albert Robida (1895). Pour info, celui-ci peut être lu en ligne sur Gallica.

Dans ce texte, les protagonistes discutent des destinées futures de l'humanité dans divers domaines comme la prédominance des continents, le remplacement de la nourriture par des pilules, le retour à l'âge d'or et aux moeurs primitives, ...

Le bibliophile est ensuite interpellé. Selon lui le livre imprimé tombera en désuétude et sera remplacé par des livres audio (phonographes) et les bibliothèques deviendront des phonographothèques (mieux vaut évoluer que disparaître).

Heureusement nous n'en sommes pas arrivés là. le livre papier est à mon avis plus menacé par la pénurie que par le désintéressement des lecteurs. de nos jours, la lecture se décline en plusieurs formats (papier, électronique, audio) et c'est très bien.

Voici un texte qui ouvre des pistes de réflexion intéressantes.






Challenge ABC 2021/2022
Challenge XIXe siècle 2022
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« La fin des livres » est une nouvelle d'une trentaine de pages, publiée en un seul volume chez Manucius qui n'a pas voulu faire plutôt paraître le recueil dont elle est extraite (Contes pour les bibliophiles), et vendu cinq euros, récit d'une discussion de plaisance entre intellectuels distingués, portant sur l'avenir de la société et des arts, et débouchant sur ce questionnement adressé au narrateur qui tâchera d'y répondre : « Ne nous direz-vous pas ce qu'il adviendra des lettres, des littérateurs et des livres d'ici quelque cent ans ? » (page 20)
En substance, voici ce qu'imagine le narrateur à ce terme : la disparition du livre papier, remplacé par des enregistrements sonores joliment lus, voire par des images, pour le plaisir de tous, car « Je me base sur cette constatation indéniable que l'homme de loisir repousse chaque jour davantage la fatigue et qu'il recherche avidement ce qu'il appelle le confortable, c'est-à-dire toutes les occasions de ménager autant que possible la dépense et le jeu de ses organes. Vous admettez bien avec moi que la lecture, telle que nous la pratiquons aujourd'hui, amène vivement une grande lassitude. […] Je crois donc au succès de tout ce qui flattera et entretiendra la paresse et l'égoïsme de l'homme. » (pages 23-25) Cet axiome est tout à fait juste, c'est ce qui fait songer le narrateur à des moyens de lecture simplifiée ; et cependant, son corollaire est faux comme l'histoire l'a montré, et je prétends non pas qu'il est blâmable de s'être trompé, car le risque même de la prédiction donne toujours une grandeur scientifique à celui qui s'y livre avec mémoire et conséquence, mais qu'on pouvait déjà en augurer l'erreur en 1894 grâce à la considération méticuleuse de l'axiome même : c'est que le suprême délassement de l'homme n'est pas tant de lire avec commodité que d'altérer le livre même par l'orientation d'une certaine demande commerciale au point que, conservant son sentiment d'intelligence, il peut se croire lire encore, et en toute simplicité, en toute « accessibilité », sans avoir jamais touché à de la littérature.
Ce que figure Uzanne – « Les auditeurs ne regretteront plus le temps où on les nommait lecteurs ; leur vue reposée, leur visage rafraîchi, leur nonchalance heureuse indiqueront tous les bienfaits d'une vie contemplative » (page 31) –, correspond au développement, mais parallèle au livre, d'une manifestation culturelle inférieure : la musique populaire. Avoir partout sur soi de quoi s'étourdir plutôt que s'élever, se complaire à des entêtements qui évitent de penser au lieu de concentrer ses forces mentales vers des objectifs élevés, en un mot entendre sans jamais utiliser son entendement, et par ce moyen se sentir absolument correspondant et conforme c'est-à-dire au coeur même de son époque et des modes, voilà l'abêtissement le plus paradoxalement valorisant que puisse vivre le Contemporain pour l'estime-de-soi. Ainsi la musique populaire a-t-elle largement concurrencé le livre en lui fournissant à la fois un prétexte d'esprit, la sacro-sainte Culture, ainsi qu'une occasion de divertissement, mais elle ne l'a pas supplanté ; elle a investi sa part de marché, mais le livre en tant qu'objet-papier demeure. Il n'y avait certes nulle raison de songer à faire écouter des choses aussi difficiles que des livres : c'est que le plus grand effort du livre ne se situe pas dans la technique de la lecture silencieuse (ni les yeux ni la nuque n'en souffrent beaucoup), mais bien dans la compréhension du texte ; or, pour cela, il est un peu plus pratique de s'arrêter à volonté et de reprendre parfois un peu en arrière, et la page est ainsi encore un peu plus avantageuse que l'enregistrement audio. Non, le prétexte ultime à lever du livre la difficulté foncière, c'est d'être parvenu à faire admettre comme authentique le livre qui ne relève pas du livre, c'est d'avoir tant insensiblement abaissé les exigences d'un livre que le Contemporain puisse dire en toute bonne foi : « Je suis lecteur » sans avoir la moindre idée de ce qu'était un livre selon les critères d'autrefois.
Cela, Uzanne n'a pas eu la lucidité de le prévoir. Il n'a pas mené une désespérance assez systématique de l'être moderne pour l'envisager, et il s'est probablement dit, à un certain stade de ses extrapolations : « Une telle dégradation n'est quand même pas possible ; je puis imaginer que l'homme change son mode de lecture, mais enfin il y aura toujours de quoi lire, ceci doit rester mon présupposé ! » Pour autant, malgré cette obstination qui lui fit manquer la vérité, il reste à la lisière de certains soupçons exacts mais qu'il n'ose prolonger ou approfondir, comme la télévision : « Les scènes des ouvrages fictifs et des romans d'aventure seront mimées par des figurants bien costumés et aussitôt reproduites ; nous aurons encore comme complément au journal phonographique, les illustrations de chaque jour, des Tranches de vie active, comme nous disons aujourd'hui, fraîchement découpées dans l'actualité. On verra les pièces nouvelles, le théâtre et les acteurs aussi facilement qu'on les entend déjà chez soi ; on aura le portrait et, mieux encore, la physionomie mouvante des hommes célèbres, des criminels, des jolies femmes ; ce ne sera pas de l'art, il est vrai. » (pages 38-39). Il prévoit aussi l'abaissement du niveau intellectuel des oeuvres et des lecteurs (juste une phrase là-dessus) : « le mandarinisme littéraire disparaîtra, les lettres n'occuperont plus qu'un petit nombre infime d'auditeurs. » (page 36) : cela était juste – mais ce n'est pas pour l'essentiel la solution qu'à retenue Uzanne, parce que parallèlement à l'envie de facilité chez le Contemporain, il n'a pas considéré l'envie de dignité apparente qui compte pour beaucoup dans la satisfaction qu'il éprouve à s'adonner à l'oisiveté sans culpabilité : il a donc l'envie et presque le besoin, sans lire un livre, de savoir quand même qu'il lit un livre. Il y a au moins pour moitié dans le plaisir qu'il prend au moindre-faire, la valeur qu'il accorde à ce farniente.
Mais peu importe que Uzanne n'ait pas eu ce génie (même s'il m'eût été plus estimable et plus maître alors) : il emploie un style net, fin et précis, une expression sans ostentation, ce qui requiert souvent plus de recherche qu'un style « recherché » ; j'aurais intérêt, je pense, à le lire de nouveau dans des oeuvres plus vastes, et le conserve sur mes « fiches ».
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1894. Mettant en scène un jeu de spéculations entre intellectuels, Uzanne, en une quarantaine de pages, prédit longtemps avant les liseuses la fin du livre papier. Il anticipe ainsi, parfois avec une étonnante justesse, ses remplaçants : le livre audio, la radio et le cinéma. L'exercice pourrait être plus creusé, plus développé, il n'en reste pas moins une très agréable lecture. La plume est vivante, fine et précise, et cette vision fantasmée du futur, bien que technologiquement très approximative, n'est pas si éloignée de notre réalité et de son agaçante logique du moindre effort.
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A Londres, aux vendredis scientifiques d'une institution royale, des messieurs de qualités sont surpris d'apprendre que le Soleil - donc la planète - n'en a guère que pour une vingtaine de millions d'années. Sortis et dans l'ambiance détendue de leur Club, ils vont, chacun selon ses idées et ses compétences, avancer leurs pronostics sur l'avenir de la culture, de l'art, de la littérature et, pour finir, des livres.

Comme j'ignorais le nom de l'auteur, je me suis imaginé avoir affaire à un pastiche de Jules Verne, à du steampunk, mais un coup d'oeil à la quatrième de couverture m'apprit que la nouvelle reliée que j'avais en main était une réédition contemporaine. Ce n'est pas déplaisant à lire, il est piquant de voir combien de conjectures étaient exactes, la plupart s'appuyant sur des observations tout à fait exactes... mais pas tout à fait sur les livres ! En réalité, Octave Uzanne est prophète mais très indirectement... C'est tout l'intérêt de ce texte court.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Julius Pollok, un doux végétarien et savant natura­liste, se plut à imaginer ce qu’il adviendrait des mœurs humaines, quand, grâce à la chimie et à la réalisation des recherches actuelles, l’état de notre vie sociale sera trans­formé et que notre nourriture, dosée sous forme de poudres, de sirops, d’opiats, de biscuits, tiendra en un pe­tit volume. Alors plus de boulangers, de bouchers, de marchands de vin, plus de restaurants, plus d’épiciers, quelques droguistes, et chacun libre, heureux, susceptible de subvenir à ses besoins pour quelques sous ; la faim biffée du registre de nos misères, la nature rendue à elle-même, toute la surface de notre planète verdoyante ainsi qu’un immense jardin rempli d’ombrages, de fleurs et de gazons, au milieu duquel les océans seront comparables à de vastes pièces d’eau d’agrément que d’énormes stea­mers hérissés de roues et d’hélices parcourront à des vitesses de cinquante et soixante nœuds, sans crainte de tangage ou de roulis.

Le cher rêveur, poète en sa manière, nous annonçait ce retour à l’âge d’or et aux mœurs primitives, cette uni­verselle résurrection de l’antique vallée de Tempé pour la fin du XXe siècle ou le début du XXIe. Selon lui, les idées chères à lady Tennyson triompheraient à brève échéance, le monde cesserait d’être un immonde abattoir de bêtes paisibles, un affreux charnier dressé pour notre gloutonnerie et deviendrait un jardin délicieux consacré à l’hygiène et aux plaisirs des yeux. La vie serait respectée dans les êtres et dans les plantes, et dans ce nouveau paradis retrouvé ainsi qu’en un Musée des Créations de Dieu, on pourrait inscrire partout cet avis au promeneur : Prière de ne pas toucher.
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Ce que nous appelons l’Art moderne est-il vraiment un art, et le nombre d’artistes sans vocation qui l’exercent médiocrement avec apparence de talent ne dé­montre-t-il pas suffisamment qu’il est plutôt un métier où l’âme créatrice fait défaut ainsi que la vision ? — Peut-on donner le nom d’œuvres d’art aux cinq-sixièmes des ta­bleaux et statues qui encombrent nos salons annuels, et compte-t-on vraiment beaucoup de peintres ou de statuaires qui soient des créateurs originaux ?
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Je crois donc au succès de tout ce qui flattera et entretiendra la paresse et l’égoïsme de l’homme; l’ascenseur a tué les ascensions dans les maisons; le phonographe détruira probablement l’imprimerie.
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Je me base sur cette constatation indéniable que l'homme de loisir repousse chaque jour davantage la fatigue et qu'il recherche avidement ce qu'il appelle le confortable, c'est-à-dire toutes les occasion de ménager autant que possible la dépense et le jeu de ses organes.
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Puisque nous réformons ce soir à notre guise la société future, apportant chacun un rayon lumineux dans la sombre nuit des siècles à venir, éclairez-vous de votre propre phare tournant, projetez votre lueur à l’horizon.
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