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EAN : 9782070361106
310 pages
Gallimard (31/05/1972)
3.89/5   80 notes
Résumé :
Quatrième de couverture :
— Couche-toi, dit-il.
Elle ne bougea pas, ne répondit pas. Elle fixait sur lui son regard dur. Aucune peur. Il aima cela.
Il fit encore deux pas et la gifla à toute volée. une fois sur chaque joue. C'est ainsi qu'il procède. On ne peut rien sur une vierge récalcitrante si d'abord on ne l'assomme pas. Elle ne bougea pas, sauf d'osciller sous chaque gifle, ne baissa pas les yeux. Il répéta :
— Couche-toi !
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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La loi est le premier livre de Roger Vailland que je lis, celui qui a eu le prix Goncourt en 1957, et mon verdict, c'est que cet auteur mériterait d'être plus connu. J'aime son écriture, sobre, sans fioritures, mais qui sait rendre compte de la complexité du réel, descendre « aux entrailles des choses ».

La loi est un jeu cruel: on joue au tarot pour savoir qui est le patron, qui a le droit d'humilier les autres. Et Roger Vailland nous sert une description assez terrible d'une partie, créant une atmosphère d'autant plus oppressante qu'elle pourrait bien être métaphorique d'une âpreté plus générale des rapports humains.
Que ce soit par la position sociale ou le désir que l'on fait naître chez l'autre, les rapports de domination ont en effet une grande place dans les relations des personnages du roman, qui sont décrites avec force et acuité.
Ça se passe dans une région pauvre du sud de l'Italie, et cette pauvreté exacerbe le côté rude et rêche, avec en toile de fond, tout autour de la Grand place, les «désoccupés», les sans-travail, qui attendent qu'un métayer ou un régisseur aient besoin de quelqu'un pour une bricole. Dans ce monde, si l'on en croit Matteo Brigante:
«Chacun attend quelqu'un et fait attendre quelqu'un d'autre. Seul Dieu n'attend personne et seul l'ouvrier agricole n'a personne à faire attendre. Ainsi se définirent pour lui deux absolus aux deux extrémités de la hiérarchie (bien qu'il n'employât pas ces mots) : Dieu et l'ouvrier agricole. L'état d'ouvrier agricole constitua ainsi pour ce fils d'ouvrier agricole le mal-être absolu. »
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La loi est le thème de ce livre récompensé par le prix Goncourt 1957, mais quelle loi ?
Car il en existe plusieurs à Manacore, petit port des Pouilles en Italie du sud, dans les années 50.
La loi ancestrale que fait régner les riches propriétaires terriens sur les notables, eux même supérieurs sur le peuple.
La loi des hommes sur les femmes, où l'on se vante de violer les jeunes filles vierges.
La loi des convenances et des usages sur la liberté et la modernité des régions du nord.
Mais surtout La Loi, jeu se pratiquant dans les tavernes où les perdants se voient humilier, injurier, calomnier sans pouvoir répondre aux attaques.
En lisant ce livre, c'est toute une région, une atmosphère, une époque passée qui viennent à nous. Moeurs révolues mais si bien décrites par l'auteur, personnages vils, passionnés, roublards, méchants, pas de place pour l'innocence et la candeur, seuls les plus malins sauront tirer leur épingle du jeu.
L'action se déroule en l'espace de quelques jours, un peu plus que le temps qu'il m'aura fallu pour dévorer ce roman.
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"C'est moi qui fait la loi, ici" est une expression que j'ai souvent entendue dans ma jeunesse mais qui me semble aujourd'hui moins usitée, preuve, peut-être, que la démocratie a progressé (bien que d'aucuns prétendent le contraire). Dans les années 1950, dans le Sud de l'Italie, au Nord des Pouilles plus exactement, l'expression "faire la loi" pouvait s'appliquer aussi bien à une famille, un village, une région qu'à un individu : quelqu'un pouvait faire la loi à un autre, un homme à un autre autre homme, ou à toute une maisonnée, mais aussi, plus rarement, une femme à un homme. Et pour que cette "loi" s'applique dans toute sa rigueur il fallait que cela soit public, que des faits attestent publiquement que telle "loi" avait cours. Ce mode de fonctionnement était si prégnant que les adultes (mâles uniquement, cette fois) en avaient fait un jeu de bistrot, où celui qui faisait la Loi prenait un malin plaisir à humilier publiquement son esclave.

Ce roman (prix Goncourt 1957) décrit la vie d'une petite cité balnéaire de cette région, en s'attachant à quelques personnages représentatifs : le grand propriétaire terrien et ses trois filles, un juge, un commissaire, un ancien militaire reconverti en mafioso, le chef d'une bande de voyous, et quelques autres. Roger Vaillant qui semble parfaitement connaître les moeurs de ce milieu, nous concocte une histoire somme toute assez banale mais dont tout l'intérêt est de disséquer les comportements de ces personnages et de révéler les "lois" sans pitié qui régissent tout ce petit monde. On est quelque part entre Georges Simenon et Alberto Moravia. Un très bon roman réaliste, sociologique, non dépourvu de poésie et de finesse psychologique. Et qui ne nous fait pas regretter cette vie d'autrefois...
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Les livres de Vailland ont certainement vieilli (je pense notamment à 325 000 francs, qui est bien daté). "La Loi", curieusement, tient plutôt le coup, me semble-t-il. le minois de la Lollobrigida, en arrière plan, et l'atmosphère du sud de l'Italie, y ont peut-être contribué, je ne suis pas forcément objectif !
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Chaque année, des cénacles d'auteurs se réunissent, chacun pour primer un livre. Les éditeurs semblent se répartir savamment ces prix. le prix Goncourt 1957 fut attribué à... l'éditeur Gallimard, avec 'La Loi' de Roger Vailland (1907-1965).
La Loi est un jeu imaginé par l'auteur, auquel participent des hommes de classes sociales diverses d'une petite ville côtière des Pouilles, au sud de l'Italie. Ce jeu réjouit les vainqueurs et les spectateurs mais est cruel pour les perdants… Vous l'avez compris : La Loi, ce n'est pas le jeu de l'Oie ! D'ailleurs certaines femmes sont considérées comme des dindes (seulement bonnes à farcir).
Ce roman restitue très bien l'ambiance en Italie après la seconde guerre mondiale, avec ses coutumes et hiérarchies sociales. Comportements mafieux, corruption, machisme, et bassesses humaines sont omniprésents, soulignés par le déroulement même du jeu qui s'en alimente. La religion catholique s'inscrit en toile de fond idéale d'une soi-disant bonne moralité qui s'accommode parfaitement de ce cadre. Les caractères et schémas de pensée des personnages principaux sont habilement disséqués, d'un ton neutre et sans lourdeur. Cette neutralité recèle une critique sévère de cette société. Je n'ai pas été surpris de découvrir que Roger Vailland a adhéré au Parti Communiste Français (de 1952 à 1956, année de la répression de l'insurrection de Budapest).

En 1959, « La Loi » fut adapté au cinéma par Jules Dassin (1911-2008), avec Gina Lollobrigida (dans le rôle de Marietta), Yves Montand (Brigante), Pierre Brasseur (Don Cesare), Marcello Mastroianni, et une courte apparition du fiston Joseph ("désoccupé") avant qu'il ne devienne un célèbre chanteur.

Je recommande vivement la lecture de ce roman, plus profond et plus intéressant que « 325 000 Francs » que Vailland écrivit quelques années plus tard. Roger Vailland est un auteur qui mérite d'être (re)découvert.
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
L'agronome a une voiture. Bon. Sur les routes du Sud, il lui est sans doute maintes fois arrivé d'être obligé de freiner à bloc, pour éviter un cycliste qui tourne brusquement sur sa gauche. Oui. Comment fait le cycliste ? Il tend le bras et tourne aussitôt à gauche, même si au même instant une voiture arrive à cent à l'heure derrière lui. Pourquoi ? Parce que c'est son droit. Il a tendu le bras, comme l'exige la loi; donc il a le droit de tourner. Il ne se demande pas si le chauffeur de la voiture qui arrive derrière lui aura la possibilité de freiner à temps. Cela regarde le chauffeur. Lui, puisqu'il a le droit de tourner, son honneur l'oblige a tourner, même s'il doit y perdre la vie. S'il cédait au chauffeur, alors que la loi lui donne priorité sur le chauffeur, alors qu'il a droit sur le chauffeur, il perdrait son honneur auquel il tient plus qu'à la vie.
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Les arbres finissent par mourir quand ils ont poussé toutes leurs branches, même les oliviers qui vivent plus longtemps que tous les autres ; quatre hommes réunis n’encerclaient pas de leurs bras le tronc de certains oliviers de ses olivaies et leurs nœuds perpétuaient le souvenir des tempêtes qui les avaient tordus, aux derniers siècles de l’Empire romain ; mais il arrivait qu’il en mourût un ; les feuilles se flétrissaient soudain, sans raison apparente ; quand on sciait le tronc, on ne trouvait jusqu’au cœur que du bois mort.
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Se servir du vent pour aller contre le vent ne définit pas seulement la navigation à voile mais aussi ce pouvoir que l’intelligence donne à l’homme de plier à son service les lois naturelles et sociales, la mesure de sa liberté. Bien qu’il soit souvent aussi pauvre que l’ouvrier agricole, le pêcheur n’est pas comme lui dans un état de mal-être absolu. Le pêcheur vend son poisson, qu’on lui achète ; dès qu’il y a commerce la servitude n’est plus absolue. La relative liberté du patron pêcheur se reflète sur le matelot et même sur le mousse, prix de leur complicité dans la lutte contre la nature et les hommes.
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Le monde est fait à l’image de la flotte royale, du temps que Matteo Brigante y était quartier-maître. Les matelots : le peuple. Les sous-officiers : lui, les hommes d’affaires de Foggia. Les officiers subalternes : les notables de Porto Manacore ou de Foggia, les hommes d’affaires quand ils sont inscrits au barreau. Les officiers supérieurs : don Cesare, don Ruggero. L’état-major suprême : la Montecatini, la société de bauxite. Et au-dessus le roi dont on ne sait plus le nom depuis qu’on est en République, la Société anonyme du pouvoir d’État. Tout en haut : Dieu.
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Il y a des humains qui en possèdent d’autres ; les possédants deviennent à leur tour possédés ; les possessions l’une l’autre s’enchaînent ; on n’y échappe pas. Il a possédé beaucoup de femmes, des femmes mariées surtout ; son métier lui offre des facilités que d’autres n’ont pas ; il prenait toujours l’initiative de la rupture, mais le plus souvent la femme restait possédée de lui ; elle quémandait une dernière aventure ; c’était perpétuellement la dernière entrevue ; il en tirait quelque gloire.
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