Le cheval attelé de nouveau à la voiture, ils prirent tous le chemin du retour. A un tournant de la route, une automobile arrivant à toute vitesse frôla presque la voiture et fit faire un brusque écart à Frimaire.
< < Va donc, écraseur ! > > cria Lili furieuse au chauffeur qui était déjà loin.
En arrivant à Mirevent, -c'était le nom de la propriété- l'oncle Arsène déclara à la tante Nathalie qui le questionnait du regard :
< < Tout a bien marché... Lili a été charmante et certainement, quand elle voudra que je l'emmène, une autre fois, faire une promenade en voiture, ce sera toujours avec le plus grand plaisir > >
Le soir au dîner, l'oncle conta la bravoure de sa nièce, et tante Nathalie dit :
< < Pour la peine, elle aura au dessert un petit verre de sirop de framboise dont je la sais particulièrement friande. Qu'elle continue à nous donner de la satisfaction et elle n'aura pas lieu de le regretter... D'ailleurs, nous ne demandons qu'à la gâter, elle le sait bien ! > >
Lili était au comble du bonheur. Après avoir dégusté son sirop de framboise avec des mines de petite chatte, elle embrassa en leur souhaitant le bonsoir, son oncle et sa tante, puis accompagnée par miss Betsy, elle monta se coucher. Après une journée si bien remplie, elle ne demandait pas mieux que de retrouver son petit lit blanc pour s'y reposer. La gouvernante ayant allumé la veilleuse, lui donna un baiser sur le front et la quitta en lui disant :
< < Bonne nuit > >
Énervée par le grand air, par sa dispute avec les deux gamins, elle rêvait tout éveillée à de furieux combats dont elle sortait naturellement victorieuse.
La fatigue avait clos enfin ses paupières lorsque, dans le milieu de la nuit, le vent qui faisait rage la réveilla en sursaut. Dressée sur son séant, elle regarda par la fenêtre la campagne que baignait de clarté la pleine lune, et soudain elle sentit un frisson de terreur lui courir le long du dos. Joignant les mains elle s'écria :
< < Oh ! mon Dieu ! c'est surement un brigand qui vient pour assassiner mon oncle et ma tante ! > >