Un roman captivant, un peu déroutant dont l'action se déroule en huis clos dans les ruines du quartier du Chiado incendié. Dans ce décor apocalyptique quatre personnes se rencontrent. Il y a déjà,un vieux Lisboète du quartier qui ne veut pas abandonner son logis, il est suivi par un photographe qui souhaite réaliser un reportage, par un Français qui avait rendez-vous dans le Chiado avec un ancien fonctionnaire et par une femme étrange à la recherche de sa fille. Ils seront bientôt rejoints par un cinquième personnage assez énigmatique qui va les obliger à se confesser les uns après les autres. Leur errance dans le quartier dévasté durera pendant cinq jours... Un roman où l'étude psychologique est très présente, mais où le lecteur est aussi confronté à l'histoire du Portugal avec le déclin de son empire colonial, et aussi à la politique avec l'évocation de la dictature de Salazar puis de la république des oeillets.
Une belle écriture, un sujet intéressant, pas du tout ennuyeux même si l'action se passe dans un no man's land. Une très belle découverte. Presque un coup de coeur. Un roman que je recommande.
N'ai pas réussi à entrer vraiment dedans.
Lecture qui fut fastidieuse.
Ce n'est pas l'incendie de Lisbonne ni les protagonistes qui m'ont lassés,
Mais mon manque de concentration et du même coup,
Cette histoire n'a pas été assez percutante pour attirer suffisamment mon intérêt et mon attention dans les conditions bouleversées et particulières de ma vie actuelle.
Dommage .
Peut-être la relirais je à un autre moment plus propice.
Après avoir dégusté ‘Un dangereux plaisir', j'ai eu envie de lire autre chose du même auteur. Cet incendie m'a laissé un peu froide. 5 individus se réfugient dans un appartement sauvé des flammes. Ils vont peu à peu se dévoiler. J'ai trouvé une longueur à la mise en place, des ficelles trop grosses qui m'ont empêchées d'être vraiment dans l'histoire. J'ai malgré tout aimé le côté manipulation.
L'intrigue est un peu longue à démarrer. Ce n'est qu'à l'arrivée du 5ème comparse que le lecteur est entraîné dans le récit par l'envie d'en savoir plus.
Ce n'est pas le roman qui tient en éveil et que vous lisez en une nuit mais j'ai tout de même pris du plaisir à sa lecture.
J'ai hésité entre une notation de 2 ou 3 étoiles.
Lisbonne reste en fond du livre. La ville ne devient véritablement jamais un personnage à part entière. Néanmoins les protagonistes sont intéressants, bien campés. L'histoire se déroule. Dommage que le ressort de l'intrigue soit ce personnage omniscient, très ennuyeux et dont les motivations sont guère convaincantes. C'est le point noir. Sans ce Juvenal Ferreira, le livre auraient été pleinement convaincants, les autres personnages sont bien plus intéressants.
Ca va vite. Lisbonne brûle. Le Français suit la progression de l'incendie depuis ce matin. Il dormait dans sa pension, Rua do Ouro. Un ronflement dehors, il a tiré les rideaux. Il aurait dû faire jour, déjà, en plein été, pas ce brouillard gris, presque bleu, le 25 août 1988. A travers le gris bleuté, de l'autre côté de la rue, il a deviné du rouge, du jaune, l'arrière des grands magasins Grandella. Les couleurs grimpaient les étages, à toute allure, un vieux magasin, des boiseries, des réserves de tissu, de lingerie, ça va vite.
J'avais rendez-vous, jeudi matin, avec un homme de ton âge. Le consul de France m'a orienté sur lui, pour mon affaire. Il s'appelle Soares. Un moment, j'ai pensé que tu pouvais être le Soares que je cherchais, au moins celui que j'avais envie de trouver, plutôt insoumis... libre... Tu vois? C'est pour ça que je t'ai suivi dans le Chiado. Evidemment, ce n'était pas toi? Je sais bien, c'était idiot... Mais tout brûlait... Pas facile de réfléchir tranquillement...
Le vieux a du mal à ne pas rire. Lui, Soares? Non, il s'appelle Carneiro De Araujo, s'il veut son nom complet. Parce qu'au Portugal, ce n'est pas comme en France, on a plusieurs noms. Le nom complet de ton Soares?
Le Senhor Soares, dans les soixante-dix ans, lié aux Français, m'a dit le consul.
Alors, tu n'en as pas fini avec tous les Soares du Portugal. Un nom très porté... J'en connais plusieurs, l'annuaire en est rempli. Même le président de la République portugaise s'appelle Soares, Mario Soares, Lopes Soares... Tu avais rendez-vous avec le président de la République et tu ne le disais pas?
Non, pas ce Soares-là, un autre. Dommage que tu ne puisses pas m'aider. Le consul de France m'a indiqué que le Senhor Soares m'attendait le jeudi à dix heures au café A Brasileira. Un homme de grande expérience, selon lui, et connaissant tout le monde à Lisbonne depuis cinquante ans. J'espérais beaucoup de cette rencontre, et la catastrophe est arrivée : le feu a pris presque sous ma fenêtre, Rua do Ouro. Incompréhensible, non? Au moment où j'allais... peut-être... Enfin... Au moins obtenir d'autres noms, d'autres rendez-vous... Peut-être ma réponse... C'est bien compliqué... Je ne saurais pas dire tout ça en portugais.
C'est le moment de leur faire un aveu. Pourquoi un photographe reste-t-il au milieu d'un incendie? Le goût du spectaculaire? Sans doute. Mais avec un espoir, saisir, parmi les têtes qui passent devant son objectif, celle de l'incendiaire. Bien connu, ceux qui mettent le feu reviennent jouir du spectacle dont ils sont la cause. Cet incendie est volontaire, les autorités en étaient persuadées hier. Et moi, j'aurai peut-être fixé la tête du coupable sur ma pellicule.
Le gardien du cinéma se raidit : plutôt vexant, ce photographe, il laisse entendre que l'un d'entre-eux pourrait être un pyromane? Son immeuble est à moitié brûlé et il y aurait mis le feu lui-même? C'est mépriser la souffrance des hommes, blessant, vraiment blessant.
J'ai parcouru ces rues l'une après l'autre, Prata, Douradores, Fanqueiros, Madalena, et retour, Augusta, Sapateiros et Ouro. L'expression la plus banale des touristes et des officiels m'est venue à l'esprit : le coeur historique de la ville; ils se régalent, tous, de ces mots consacrés, la fierté de Lisbonne, son coeur historique, celui qu'aucune main n'a le droit de toucher, le coeur éternel de la capitale portugaise. Tous leurs clichés, eux aussi ils croient que leur ville est éternelle, alors qu'elle est périssable, comme l'empire colonial du Portugal, périssable comme l'équilibre du monde, la domination des forces occidentales, l'empire soviétique, les démocraties populaires, périssables, périssables, personne ne veut le savoir : le Portugal éternel et son coeur historique. Ils savent pourtant qu'il a été démoli une première fois, en 1755. Cela ne suffit pas, ils ne veulent pas voir le périssable.
Vous entendez?
Agustina passe son temps à les inquiéter : elle voit mieux, elle entend mieux que tout le monde. Toujours du bleu, par là... Et ce roulement de pierres lointain... Comment pouvez-vous ne pas l'entendre? Elle se tient aux fenêtres du bureau, impossible d'être en repos, depuis qu'ils se sont séparés du gardien. N'est-ce pas simplement cet imbécile qu'on entend taper au loin, à coups de marteau sur sa rampe? Il le fait exprès, l'inconscient, il veut nous faire ramasser, tous.
Non, on dirait plutôt un bruit de cloches un peu étouffé, l'Igreja dos Martires n'est pas si loin... A moins que ce ne soit l'electrico. Quelle ligne? Le 28? Il n'a sûrement pas été remis en route depuis hier. Ecoutez encore. Ce n'est pas le battement régulier d'une cloche ou d'un marteau.
Des cris d'assassiné alors?
Rien d'humain là-dedans, ne divaguons pas : une trompe de ferry. Les traversées du Tage continuent, le va-et-vient des bateaux entre les deux rives.
C'est impensable, non? Nous sommes-là, quelques-uns, et tous les autres s'embarquent, Praça do Comercio... leurs navigations de misère sur leurs bateaux orange.
Françoise Sagan : "Le miroir ***"