AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de PetiteBalabolka


Un titre comme un ancrage. C'est sur ces terres de l'Ouest, associées aux guerres civiles de la Révolution que va se dérouler, se figer même, l'ensemble du roman. Sans que l'on sache précisément où dans cet Ouest, plus historique que géographique, l'histoire, tel un huis-clos ne sortira pas (ou seulement par propos rapportés) du domaine des Perrières, propriété de la famille de l'Aubépine. Monsieur de l'Aubépine est un maître que l'on peut qualifier de traditionnel. Royaliste, "tueur de Chouans", il a été de toutes les guerres de l'Ouest. Apprécié de ses gens qui l'estiment sévère mais juste, le vieux noble déconcerte cependant par le traitement particulièrement méprisant qu'il inflige à son fils unique. Pas étonnant donc que celui-ci choisisse l'autre camp, celui des Républicains et qu'une fois devenu maître du château, il s'intéresse de près à son garde-chasse, Lambert dont le père a été un soldat de la Révolution, un "bleu". Sauf que Lambert ne revendique pas spécialement cet héritage et de ce malentendu initial va naître une tension de plus en plus forte que François Vallejo a su parfaitement rendre sur le plan narratif.

Ce n'est pas qu'il refuse d'avoir un maître républicain, Lambert mais les idées nouvelles du baron, personne ne les comprend et puis comment se débarrasser de ses habitudes serviles comme l'y encourage le maître quand on peut être chassé du domaine du jour au lendemain avec femme et enfants ? Chaque jour, il lui faut supporter les nouvelles lubies du baron, s'adapter à son humeur changeante, protéger son épouse Eugénie qui sert au château et surtout Magdeleine, sa fille aux traits délicats. Heureusement, Lambert respire un peu lorsqu'il part chasser avec sa meute, des bêtes puissantes et dociles qui font sa fierté et notamment le Rajah, un molosse, mélange de force et de douceur et dont l'auteur a su faire un véritable personnage.

Et ce siècle qui est tout aussi changeant que la personnalité de Monsieur de l'Aubépine. Avec les événements de 1848, il frétille et le voilà à Paris, prêt à jouer un rôle dans cette nouvelle République. On ne lui donne pas mais c'est égal, il est d'humeur joyeuse et ramène toutes sortes de "créatures" au château. Quand la trahison de "l'usurpateur" intervient en 1852, il n'a de cesse d'entrer en contact avec son principal adversaire, le grand écrivain exilé à Guernesey. Une lubie de trop pour Lambert...

Ouest est un roman troublant. Je n'ai pas été gênée, pour ma part, par le choix qu'a fait l'auteur pour introduire ses dialogues, cette sorte de position intermédiaire entre la narration et les échanges verbaux. Au contraire, j'ai trouvé cela habile. Tout comme j'ai trouvé intéressant d'évoquer les bouleversements politiques du XIXème siècle et notamment des événements plutôt parisiens depuis un ancrage provincial, un peu comme l'écume lointaine d'un tumulte. Car le vrai trouble n'est pas là, il est dans la tension entre le maître et son garde-chasse, un domestique, au sens étymologique du terme, celui qui est attaché à la domus, la maison parce qu'il y vit, y a sa famille, ses repères et y exerce son savoir-faire, en maître avec ses chiens, parcourant "ses" bois. Lambert n'est pas servile par faiblesse mais par force en quelque sorte. Monsieur de l'Aubépine, quant à lui, n'est pas forcement républicain par conviction mais peut-être par dépit. Décidément, rien n'est lisse, ni évident sur ces terres de l'Ouest.
Lien : http://leschroniquesdepetite..
Commenter  J’apprécie          203



Ont apprécié cette critique (15)voir plus




{* *}