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Critique de MarcelineBodier


J'ai 48 ans. J'ai rencontré mes copines de trente ans en 1987, dansé les yeux fermés sur Bowie, essayé de me convaincre que le plastique, c'était fantastique et le caoutchouc, super doux, regardé Dirty dancing en boucle et tout oublié en écoutant Lou Reed : comme les héroïnes de Hurler sans bruit ! Depuis lors, à nous toutes, mes copines de trente ans et moi, il nous est arrivé tous les bonheurs et les drames qui peuvent jalonner une vie : comme aux héroïnes de Hurler sans bruit ! Alors en lisant le livre de Valérie van Oost, j'ai parfois été prise de vertige : est-ce que l'auteure me connaît, pour parler si bien de ma vie ? Non, bien sûr. Mais vous aurez compris que ce livre est un roman générationnel, et même, celui d'une génération de femmes, nées au tournant des années 1970 et qui, comme moi, pourront s'y reconnaître.

Trois héroïnes, des personnages périphériques importants, et à eux tous, tous les heurs et malheurs possibles... il fallait donc s'y attendre : tous sont un peu stéréotypés. Il y a la bourgeoise coincée, la baroudeuse, la sensuelle, la jeune fille étouffée. Des hommes, aussi : le mari que la vie a éloigné, le premier amoureux qui resurgit avec tout son charme, cheveux blancs, kilos et rides en plus, le rocker avec qui tout n'est que plaisir et légèreté... Et puis les situations, que je me garderai bien de spoiler.

Mais à quoi est-ce que cet usage des stéréotypes correspond ? On pourrait se demander s'il s'agit d'un travers inévitable de la part d'une auteure qui vient du journalisme, qui fait d'ailleurs quelques clins d'oeil à son univers d'origine en décrivant à plusieurs reprises la manière dont ses héroïnes se parent et se maquillent. Pourtant, je pense qu'il y a bien autre chose. Je prends les paris : l'auteure s'est inspirée de sa propre vie et de celle de personnes qu'elle connaît, mais sans raconter ni sa vie ni la leur. Impossible – et sans intérêt – de deviner la part de l'autobiographie dans ce roman : Valérie van Oost a sans doute rebattu les cartes et tout redistribué sur des personnages fictifs et plus typés que la réalité. Elle en a ainsi fait des vecteurs d'expression d'émotions fortes, déchirantes, vécues, auxquelles nous pouvons totalement nous identifier.

Inutile d'ajouter alors que les frontières entre les stéréotypes se dissolvent progressivement, et que le livre est avant tout fait de drames et de résilience : en réunissant tous les personnages et en nous laissant aller à projeter nos propres émotions sur eux, nous obtenons un très bel effet de miroir grossissant tendu par l'auteure.

J'ajouterai deux mentions spéciales : tout d'abord, plus qu'à une juxtaposition de deux générations différentes, on a l'impression d'une rencontre intime entre l'âge adulte et la propre vingtaine de l'auteure, ce qui donne une grande profondeur aux scènes où elles sont ensemble. Ensuite, mention spéciale aux scènes de sexe... certes, elles ne sont en rien le sujet principal du livre. Mais elles sont là et j'ai aimé la légèreté des mots, les allusions aux sensations plus qu'aux gestes, l'attention attirée sur le désir avant le plaisir. Et si c'est cet argument qui vous décide à lire Hurler sans bruit, alors j'aurai eu raison d'ajouter ce clin d'oeil à la fin de ma chronique !
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