Citations sur L'Ange au regard vide (17)
Le commissaire se sentait un peu mieux. Il allait simplement se reposer. Essayer de faire baisser sa température. Le chasseur, Ignacio, lui avait prêté un livre d'un auteur de romans policiers mexicain. « No Happy Ending, de Paco Ignacio Taibo II. Un titre approprié, sergent. »
— Un Mexicain qui écrit en anglais ?
Le commissaire ramassa le livre de poche.
— Traduit. C'est bon. Le décor mexicain le rend encore plus intéressant. Bien écrit, aussi. Auriez-vous envie de le lire en espagnol ? Ignacio dit qu'il y a une librairie espagnol ici. Il devrait peut-être vous en acheter un exemplaire.
De Gier paraissait fatigué.
— Je ne lis pas de romans à énigmes.
— Snob. (Le commissaire dressa un index plein de blâme.) Vous loupez des exercices de moralité, la tension entre libido et surmoi, la recherches de valeurs essentielles, si tant est qu'elles existent, évidemment — comparaisons de la relativité, mœurs différentes et souvent incompatibles de groupes sociologiques distincts, intuitions empiriques, études animales et coutumes tribales, la notion de police vue comme une mafia en tenue, l'utilisation de la magie dans le crime...
— Taibo parle de tout ça ?
Le commissaire tapota le livre.
— En partie, sergent. En partie. En grande partie, en fait. Il y a là un certain lien avec notre affaire, je crois, mais je n'ai pas terminé le roman...
(page 150)
Pour ma part, je n'aime pas la police, évidemment, c'est un ramassis de fascistes, vous savez. Obéissent aux ordres, quels qu'ils soient. Comme pendant la guerre, quand mes parents ont été arrêtés. Par des flics hollandais, parce que les Allemands avaient dit de conduire tous les juifs à la gare. Si je n'avais pas été dehors en train de jouer, ils m'aurait flanqué moi aussi dans un wagon de marchandises. Pour me gazer à Treblinka.
— Oui reconnut Grijpstra.
— Ne le prenez pas mal, souligna Lakmaker. L'obéissance à l'autorité est le propre de l'homme. Nous aimons suivre des ordres. Ça nous fait lever le matin. Nous aimons aussi la violence. À présent, il y a des policiers juifs sur la rive ouest et dans la bande de Gaza. Qui font la même chose. Et puis la roue va tourner et on recommencera à nous tabasser.
(page 68)
Les méduses peuvent se multiplier à la manière des plantes si elles veulent. Les créatures poussent comme des fruits sur une structure ressemblant à un arbre, mais elles ont aussi des organes sexuels, qui peuvent s’unir pendant qu’elles nagent librement. Le futur, à l’instar du présent et du passé, sera excitant.
Les prophètes, par définition, passent leur temps et leur énergie à essayer de faire partager des idées singulières et bénéfiques. Il leur arrive d’user de méthodes étranges.
Nous vivons dans une certaine moralité, dans les principes de notre époque, et puis nous brisons ces principes, et par conséquent nous créons nos démons. Ils sont absolument irréels mais nous sentons que nous devons les apaiser quand même. Ou souffrir éternellement.
La gent insecte pourrait bien se débrouiller pendant quelque temps, jusqu’à ce que tout recommence : l’intelligence augmente, l’égotisme demeure, la science multiplie par deux la durée de vie si bien que la population explose, la race des insectes s’autodétruit, comme la race humaine avant elle.
Le singe courait de-ci de-là, en grimaçant et en baragouinant. Parfois des gens lui donnaient de l’argent et le petit animal faisait la révérence et partait à reculons. Pas d’argent pour le singe. Le chien aboyait virgules et points d’interrogation, un point-virgule ici et là.
Les joueurs étaient blessés, parfois tués. L’homme blanc avait changé les règles, rendu le jeu doux, limité le nombre des joueurs à douze par équipe, et institué des penaltys en cas de « brutalité inutile ». Ça n’en demeurait pas moins un sport à prendre des coups.
Moralement, bien entendu, nous pouvons avancer que maltraiter un mourant est un acte criminel, particulièrement quand cette activité implique de dépouiller cette personne, mais dans le cas qui nous occupe il est difficile d’en tirer une accusation de meurtre.
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