AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782864324409
121 pages
Verdier (10/03/2005)
3.91/5   16 notes
Résumé :

Notre rapport à la médecine dépasse la réalité car cette science nous semble détenir une part de notre destin. De ce diagnostic découle l'évidence d'une " médecine imaginaire ". Si la pratique de cet art, la maladie et ses thérapeutiques cristallisent l'imaginaire de chacun, ces images sont étonnamment hétérogènes : la connaissance s'y mêle avec l'obscur, la raison à la folie.... >Voir plus
Que lire après Précis de médecine imaginaireVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Auteur découvert à partir d'une recherche comportant le mot "précis". Je tentais de trouver un "Précis de littérature roumaine", et voilà qu'accidentellement je me retrouve dans le cabinet du docteur Venet. le hasard fait résolument bien les choses. Qui aurait pu l'imaginer ?Je me suis régalée avec ces brèves : santé ! Quatre parties : « Vademecum de sémiologie médicale », « Premières esquisses d'un traité des ondes », « Névroses pianistiques (Quelques précisions) », « Imprécis de thérapeutique », pour un maître-mot : jubilation. Allez, sans « mépris », un dixit pour la fin : « Les drames se nouent si vite quand on baisse la garde, les coeurs s'arrêtent si facilement. » (p. 104)
Commenter  J’apprécie          301
Dans ce récit de 2005, sous forme de lexique et de fragments qui semblent paver le chemin pour un projet littéraire beaucoup plus vaste, Emmanuel Venet, psychiatre lyonnais féru de musique et de littérature, montre avec poésie et humour, comment sa carrière de psychiatre trouve ses racines dans ses souvenirs d'enfance, son désir de dominer le piano – ce qu'il appelle sa névrose pianistique.

En quatre parties – Vadémécum de sémiologie médicale, Premières esquisses d'un traité des ondes, Névrose pianistique, quelques précisions, et enfin Imprécis de thérapeutique – ce livre forme un miroir poétique des fantasmes, des conversations entendues et des croyances d'enfants sur le corps et la maladie. L'auteur évoque ses après-midis d'enfance quand, cloué par une angine sous sa couverture, il échappait à l'école pour plonger dans les livres, des dimanches bien réglés et marqués par l'ennui dans les jardins familiaux, l'évocation d'un monde sur le point de disparaître, au tournant des années 1970.

Ce Précis de médecine imaginaire est aussi celui de l'apprentissage de l'humilité du psychiatre face à la maladie, qui reconnaît la lucidité du malade en dépression, un refuge contre la réalité impensable du monde, et comprend le paranoïaque, dont la maladie plonge « ses racines dans une monstrueuse soif de justice, de pureté et de victoire, ce fonds commun de l'enfance que déçoit, défaite après défaite, la vie. » Emmanuel Venet, avec modestie et humour, partage l'évolution de sa propre névrose pianistique, quand adulte il accepte enfin l'imperfection, la possibilité d'une erreur ou même d'une défaite dans une interprétation, longtemps perçue comme une lutte avec l'instrument, une tauromachie.

[Myopie] «J'apprécie d'être myope. Au moins, quand on me bassine trop, j'enlève mes lunettes, et renvoie les gêneurs aux brumes préhistoriques d'avant mes six ans. Qu'on ne s'y trompe pas, il s'agit d'un petit meurtre, ni plus ni moins.»

[Saturnisme] « Sous ce nom splendide se cache une maladie médiocre, l'intoxication au plomb. La Faculté essayait de nous y intéresser en nous parlant de van Gogh et des pinceaux maculés tenus entre les dents, des ciels hurlants et de l'oreille offerte à une putain, sans oublier les derniers plombs tirés dans les blés d'Auvers. Elle nous signalait aussi les vieux marchands de journaux du temps de la linotypie qui, matin après matin, se léchaient un doigt, victimes finalement de la toxicité des habitudes. »
Commenter  J’apprécie          70
Brefs récits d'une poignée de maladies que vous avez toujours rêvé de contracter et de quelques autres qui au décours d'une fièvre atypique vous ont été révélées. Tel pourrait être le sous-titre de ce Précis de médecine imaginaire qu'Emmanuel Venet, se propose de conter. Que reste-t-il de nos maladies d'enfance ? Quelles extravagances, quelles résistances, quelles transgressions mettions-nous alors à l'oeuvre pour traverser les épreuves de la vie ou pour simplement rester à la maison quand le monde du dehors ne raisonnait pas à notre goût ? de quelles meurtrissures passées tirons-nous aujourd'hui profit pour s'arranger de nos nouvelles indispositions ? L'auteur, devenu médecin psychiatre, égrène avec tendresse et bienveillance, délectation et ironie, ces obscures affections qui de temps à autre nous habitent et qui à l'occasion orientent notre destin.
Il y est bien sûr question des petits arrangements avec le symptôme quand le mal fait irruption du côté d'un manque à être, quand l'émoi vient dire ce qu'il en est du moi, quand la douleur impose silence et obscurité, quand les doux leurres s'effondrent, quand un mot reste en travers de la gorge, quand les nerfs se mettent en pelote et fleurissent sur la peau, quand sifflent les oreilles et que la langue fourche, quand l'oeil se met à tourner ou que le sang se fait encre, quand enfin la pesanteur fantasmatique des maux devient un véritable casse-tête.
Ce précis n'est pas un livre chevillé au savoir médical, il explore savamment les effets d'une médecine qui échappe à la raison et qui, au delà de la simple clinique, nous transporte au seuil de l'inconscient.
De quoi en être tout retourné !
Commenter  J’apprécie          10
Ce sont de courts textes à dégus­ter pour se guérir de la moro­sité. J'avais d'bord mis 4 coquilla­ges, car certains textes (surtout la partie sur les ondes) me plai­saient moins que d'autres. Mais j'ai suivi le conseil de Keisha : relire ces petits textes au hasard et non pas à la suite. Tous sont alors de petits bijoux . elle en a reco­pié sur son blog qui m'a pous­sée à ache­ter ce livre , à mon tour je vous en offre un et si je réus­sis à vous séduire tout le livre d'Emmanuel venet se retrou­vera sur nos blogs !
Lien : http://luocine.fr/?p=7259
Commenter  J’apprécie          50
Un recueil .. de maladies .. imaginaires ou oubliées.
Precis de Sémiologie ironique
Courts textes à dégus­ter légers
Pour y revenir
pour conter des pathologies souvent grave
Derision
Derisoire.
De l'humour
De la culture
Mais un espace tellement médical
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Chez Mademoiselle Rivière, il y avait une antichambre Louis XVI aux fauteuils recouverts d’un plastique transparent ; un salon de musique où trônait un crapaud Pleyel particulièrement venimeux ; et la mère de Mademoiselle Rivière dont on entrevoyait parfois la silhouette dans les fonds de l’appartement : une ogresse barbue se dandinant entre deux cannes, beaucoup plus inquiétante que la fille d’en bas. J’ai appris plus tard que les dames Rivière encaissaient les loyers de l’hôtel Mon Répit, malgré des scrupules moraux que je devine intenses. Pour l’heure, on s’absorbait dans des dictées musicales riches en quintes diminuées et des gammes aux armures hérissées de dièses. J’imagine aujourd’hui qu’il y avait sous nos pieds une chambre avec un miroir au plafond où des mélomanes perfectionnaient l’art de la bourrée, mais je n’en percevais alors qu’un subtil parfum d’extravagance et de transgression.
Au fil des mois, quand j’entrais dans la sombre vallée de la rue du Garet, un dilemme me déchirait : j’espérais voir la fille, tellement belle, élégante et gentille avec moi ; et à la fois je redoutais qu’elle m’entraîne au restaurant sans que je sache lui résister. J’étais triste lorsqu’elle désertait son poste, effrayé lorsqu’elle me saluait d’un mot trop affectueux. En toile de fond, les Arabesques de Debussy et les Inventions de Bach : je pressentais que ces affaires-là marchent ensemble mais sans comprendre encore comment.
Un jour d’automne 1970, l’événement que je redoutais le plus se produisit : tandis que j’attendais l’heure de mon supplice sur un fauteuil recouvert de plastique, l’ogresse encadra sa lourde silhouette dans une porte du salon. Sans un mot, l’air hagard et le visage ruisselant de larmes, elle me fit signe de la suivre. Soudain, la gamme de mi bémol mineur me semblait une partie de plaisir à côté de ce qui m’attendait. Terrifié, je la suivis le nom d’un corridor au bout duquel s’ouvrait un autre salon. Là, un téléviseur sur pied faisait face un canapé où je dus m’asseoir à côté de la vieille. La télévision retransmettait les funérailles du Général De Gaulle, avec qui la sorcière avait dû vivre une passion inoubliable pour pleurer comme elle pleurait : hoquets, sanglots, reniflements, spasmes, elle allait à coup sûr mourir de chagrin sous mes yeux. Pétrifié et mutique, je feignais un intérêt exclusif pour l’écran.
Commenter  J’apprécie          40
Un matin de mi-juillet 1976, Gérard G. réformé des chemins de fer et législateur à temps plein, eut subitement l’idée d’une loi réprimant les abus de langage. Au prix d’un immense effort intellectuel, il réussit à la concevoir intégralement dans la journée, et s’accorda au crépuscule une promenade en ville. Curieusement, une foule assez dense se dirigeait vers le centre-ville, désireuse sans doute de manifester son adhésion au réformisme radical. Tout en se laissant porter par le flot bon peuple, Gérard G. se répétait, pour le plaisir, l’article premier de son texte : « Tout abus de langage sera sanctionné, au minimum, par la claque. »
Suivaient des subtilités juridiques étourdissantes.
À la nuit tombée, la municipalité lui fit la surprise d’un feu d’artifice et tout s’éclaira. Gérard G. salua à sa valeur l’initiative et, bien que peu en fonds, s’octroya un bock dans un bar à Populaces. Il percevait clairement la gêne de la clientèle : un couple d’ivrognes se livraient à des tendresses factices, une tablée d’étudiants chahutait sans entrain, et les éternels piliers de bistrot lui jetaient des regards torves. De toute évidence, chacun surveillait son langage. Il jugea utile de délivrer à la cantonade une opinion très positive sur le feu d’artifice, à quoi seule la patronne répondit en grognant : « oui, avec nos sous ! ». Tout le monde semblait avoir compris que Gérard G. appartenait aux Élites, ce qui est bien entendu le rendait infréquentable aux Populaces, mais il y trouvait matière à se rengorger.
Peu avant minuit, comme il est rentrait chez lui à pied, il croisa deux péronnelles qui parlaient fort en pouffant. Lorsqu’il arriva à leur hauteur, il entendit très distinctement la voix de l’une d’elles dire à son adresse « Testicule », alors que les donzelles faisaient toujours mine de jacasser entre elles.
L’abus de langage était flagrant, avec la circonstance aggravante qu’il était commis avec dissimulation par les Populaces à l’encontre d’une Élite. Magnanime, Gérard G. appliqua la peine minimale prévue par la loi, à savoir la double claque. Les condamnées jouèrent d’abord les interloquées, puis se mirent à insulter avec véhémence. Récidive légale qui leur valut la quadruple claque à laquelle elles tentèrent de se soustraire en hurlant. Délit de fuite, on s’acheminait vers un verdict terrible quand deux quidams s’interposèrent. Des teigneux. Il y eu échauffourée, mais par chance quatre Divinités arrivèrent prestement en voiture à gyrophare à la rescousse du législateur, et les autres protagonistes se dispersèrent. Tuméfié, saignant du nez, Gérard G. fut enchanté de pouvoir expliquer son cas au poste où sa qualité d’Elite fut aussitôt reconnue. Bien que récente, sa loi semblait déjà très appréciée, et il fut traité selon son rang. Hélas, suite à une erreur de procédure, on l’orienta vers un établissement psychiatrique peu adapté à son cas. Il n’eut aucune peine à s’en évader le surlendemain.
Commenter  J’apprécie          10
nul doute que la bêtise peut prospérer chez certains psychiatres
jusqu'à les rendre sourds. que certaines relations
thérapeuthiques peuvent tourner à l'assassinat de l'âme.
Et que les hurlements de détresse d'une femme désespérée
pêuvent être traités par le bâillon.
Quand au contexte de famine hospitalière, personne ne songe
aujourd'hui à en contester la réalité.
Parmi les logiques dont la Mère de Charles Juliet et 50.000 autres hospi
talisés ont été victimes, il faut compter : l'impéritie administrative,
l'incompétence médicale et la loi du plus fort dans les cuisines ....
Attentivement lettres d'ami(es) Charles Juliet la cause des causeuses
Commenter  J’apprécie          70
Notre époque a oublié cet ABERRANT SACRIFICE de
générations d'élèves doués et désireux d'aller au lycée
mais barrés à douze ans par leur extraction modeste.
votre mère, Charles Juliet, en a fait les frais.
lettres d'ami(e)s à Charles Juliet, attentivement.
(MERCI Monsieur Emmanuel Venet d'avoir mis au jour
cette abomination que vous nommez, avec justesse,
SACRIFICE : combien en furent victimes !! dixit charlottelit).
Commenter  J’apprécie          80
Malai­ses

Une fois à la retraite, mon grand père Joseph a fait trois chutes. Il avait l’habitude quand le temps le permet­tait, de péré­gri­ner des jour­nées entiè­res pour faire des cour­ses ou pour surveiller, en compa­gnie d’autres badauds, la bonne marche des chan­tiers des envi­rons ; Trois fois, donc ;, il rentra les genoux couron­nés, boitillant, endo­lori mais anor­ma­le­ment soucieux. L’affaire se soldait par du mercu­ro­chrome et des banda­ges, mais on la prenait telle­ment au sérieux qu’un des enjeux, à coup sûr, m’échappait. Rétros­pec­ti­ve­ment, j’ai compris que Joseph avait peur qu’on parle de malaise, et que ce soit fini de la vie paisi­ble.

Le malaise, concept central de toute expé­rience exis­ten­tielle, est affreu­se­ment mal traité par la méde­cine savante, qui le consi­dère au mieux comme une approxi­ma­tion à décons­truire. Il n’existe même pas, dans la litté­ra­ture spécia­li­sée, d’ouvrage consa­cré à ce sujet inépui­sa­ble. Osons le dire tout net, il manque à notre science un bon et solide« Traité du malaise », avec étymo­lo­gie, histo­ri­que, étude clini­que et tout le bata­clan. Moyen­nant quoi le patri­cien conscien­cieux parve­nant mal à distin­guer entre effet de langage et ennui de santé, craint systé­ma­ti­que­ment de passer à côté d’une mala­die grave et épuise son malade en examens inuti­les qui, bien souvent débou­chent sur un diag­nos­tic. De sorte que le patient pour­suit sa vie beau­coup moins serei­ne­ment que s’il n’avait pas consulté.
Joseph, lucide sur le risque, s’en remet­tait donc aux anti­sep­ti­ques et aux banda­ges. Vu qu’il tenait debout et gardait la vigueur de s’opposer à toute consul­ta­tion intem­pes­tive, on n’a jamais bien su les circons­tan­ces de ses chutes.
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Emmanuel Venet (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Emmanuel Venet
Payot - Marque Page - Emmanuel Venet - Virgile s'en fout
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (48) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

amoureux
positiviste
philosophique

20 questions
846 lecteurs ont répondu
Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..