Quand nous étions enfants, nous passions nos vacances chez ma grand-mère, qui possédait une immense propriété. Mais les jours de pluie... A l'avant de la maison, une pièce contenait l'unique bibliothèque, dont tous les occupants étaient reliés en bleu. Et un large fauteuil. Où je me blottissais pour lire. Tout ce que contenait ce modeste meuble, je l'ai dévoré. Voilà comment j'ai rencontré
Pierre Loti. «
Ramuntcho », «
Mon Frère Yves », « Pêcheurs d'Islande »... C'était loin, tout ça. Je les aurais sans doute oubliés, si, en parcourant la liste des ouvrages de non-fiction proposés par Masse critique, je n'avais repéré cette biographie rédigée par
Bruno Vercier. Elle a piqué ma curiosité. J'ai tenté ma chance. Je l'ai remportée.
Quel plaisir, avant même de l'ouvrir, de tenir ce bel objet : petit format, couverture en carton rigide, tranche noire, filets dorés, gravures anciennes qui évoquent les romans de
Jules Verne publiés par Hetzel. C'est déjà un régal pour les yeux.
J'ai pris mon temps pour le déguster. C'est vrai, la vie d'une personne existante, ça ne se lit pas comme un thriller. le papier crème est épais, la typographie élégante, l'iconographie très riche.
Je vais de surprise en surprise. Quel phénomène, ce
Pierre Loti ! Ou plutôt... Mais qui est-il, en fait ? On dirait que plusieurs hommes se partagent son enveloppe. Il y a
Julien Viaud, son nom de baptême, Harry Grant, qu'on nomme Loti, son double de papier, et enfin,
Pierre Loti, l'écrivain qu'on connaît.
J'apprends que, benjamin d'une famille où les aînés sont beaucoup plus âgés (sa soeur, Marie, a déjà dix-neuf ans à sa naissance, et Gustave, son frère, son modèle, en a douze), le petit Julien est de santé fragile. Ce qui ne l'empêchera pas de réaliser son rêve et d'entrer dans la marine pour bourlinguer aux quatre coins du monde, de vivre mille aventures, plus surprenantes les unes que les autres, d'être polygame, de s'engager en 14-18, malgré son âge avancé...
Je suis épatée de découvrir son talent pour le dessin, la photographie ensuite.
Je suis amusée de constater qu'il a un goût immodéré pour la mise en scène. Pas seulement au théâtre. Dans sa vie aussi. Il se déguise avec grand sérieux : on le voit poser en émir, en mandarin, en acrobate, quand ce n'est pas carrément en Louis XI ou Osiris. Il transforme sa maison en palais avec mosquée, salle Renaissance ou pagode.
Oui, vraiment, c'est un homme fascinant.
J'ai appris énormément de choses sur lui. J'ai très envie de visiter cette fameuse demeure à Rochefort et je vais lire son « Livre de la pitié et de la mort ».
La découverte de ce joli petit volume a donc été très agréable pour moi. Je ne regrette pas mon choix et remercie chaleureusement Babelio et l'Opération Masse critique, ainsi que les éditions La Geste.